L'évolution de la démographie professionnelle : opportunité ou désastre annoncé ? - Clinic n° 08 du 01/09/2009
 

Clinic n° 08 du 01/09/2009

 

DE BOUCHE À OREILLE

Frédéric Bessef  

f.besse@hotmail.fr

nLe nombre des praticiens diminue. Dans une région rurale comme le Périgord, la situation fluctue de tendue à dramatique selon les secteurs. L'avenir est pire : dans les 5 ans, 40 % des praticiens vont prendre leur retraite, créant des tensions importantes jusque dans la préfecture. Et la situation est identique dans la majorité des départements ruraux. Seules les villes universitaires, la Côte d'Azur et la Côte basque échappent encore à ces perspectives.

Pour tous ceux...


nLe nombre des praticiens diminue. Dans une région rurale comme le Périgord, la situation fluctue de tendue à dramatique selon les secteurs. L'avenir est pire : dans les 5 ans, 40 % des praticiens vont prendre leur retraite, créant des tensions importantes jusque dans la préfecture. Et la situation est identique dans la majorité des départements ruraux. Seules les villes universitaires, la Côte d'Azur et la Côte basque échappent encore à ces perspectives.

Pour tous ceux qui se sont installés dans les années 1980, cela ressemble à une revanche sur le destin et ces années de surpopulation dentaire. Depuis, la couverture sociale de nos patients a diminué, rendant impossible la survie d'un cabinet qui se limiterait à des soins conventionnés. Dans le même temps, notre spécialité a fait des progrès extraordinaires. Nos résultats auraient paru inimaginables aux praticiens des années 1970. Cela s'accompagne d'une évolution concomitante des données avérées de la science selon lesquelles nous devons soigner nos patients. Le résultat est inévitable et le télescopage proche : une pléthore de patients mal assurés et un faible nombre de praticiens tenus de les soigner au mieux vont faire que nos cabinets vont être envahis de patients qui n'auront tout simplement pas les moyens de se faire soigner.

Le dilemme sera alors le suivant : ou bien soigner en faisant un effort énorme sur ses honoraires et en réduisant ses exigences techniques pour souscrire à son obligation déontologique de soigner ceux qui doivent l'être - et ce sera alors un désastre pour sa capacité d'investissement - ou sélectionner sa patientèle de manière à ne prodiguer que des soins conformes aux données acquises de la science. Dans les deux cas, le praticien se retrouvera en porte-à-faux avec le Code de déontologie et la logique de son existence et de sa place dans la société. La deuxième solution étant de loin la plus rentable, elle sera choisie par le plus grand nombre. L'image de notre profession, déjà douteuse, deviendra désastreuse : celle d'une corporation n'acceptant de soigner que ceux qui en ont les moyens. Et en termes de santé publique, les nombreux laissés-pour-compte du système seront alors contraints de recourir aux services de charlatans, sauf à s'automutiler.

Le problème étant à la fois technique et financier, sa solution participera des deux. Il est donc urgent de définir des normes de travail, non pas idéales et conformes, etc., mais simplement acceptables. Mais aussi de créer des mesures vraiment incitatives à l'installation de praticiens, par exemple l'exonération des charges sociales, une diminution de l'impôt sur le revenu, des locaux et du personnel fournis par les régions ou les départements. Et enfin de recentrer les remboursements de la Sécu vers un panier de soins.

Vu de Paris, le problème peut sembler théorique et abstrait. Vu depuis beaucoup de régions, il est concret et il fait mal ! n