Six propositions pour un « nouvel avenir » - Clinic n° 4 du 01/04/1999
 

Clinic n° 4 du 01/04/1999

 

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A la fin du mois de mars, parallèlement à la CNAMTS exposant son « plan stratégique d'action », le Syndicat national des chirurgiens-dentistes des centres de santé (SNDCDCS) a donc présenté comme prévu, à la presse et aux organismes professionnels, sa « plate-forme pour une politique de santé bucco-dentaire en France ». Nous vous en avions quelque peu dévoilé les grandes lignes dans notre précédente édition. L'objectif appuyé du syndicat est de « permettre à...


A la fin du mois de mars, parallèlement à la CNAMTS exposant son « plan stratégique d'action », le Syndicat national des chirurgiens-dentistes des centres de santé (SNDCDCS) a donc présenté comme prévu, à la presse et aux organismes professionnels, sa « plate-forme pour une politique de santé bucco-dentaire en France ». Nous vous en avions quelque peu dévoilé les grandes lignes dans notre précédente édition. L'objectif appuyé du syndicat est de « permettre à tous l'accès aux soins, garantir la qualité des soins et développer la prévention ». La démonstration s'articule autour d'un constat et de 6 propositions visant à « dessiner un nouvel avenir à la santé bucco-dentaire de la population de notre pays ».

Le constat ne peut surprendre. Un passage de la plate-forme le résume assez bien : « Cette situation [avec un Etat particulièrement absent depuis des décennies] nous permet de nous éloigner considérablement du débat en cours sur la maîtrise des dépenses de santé, puisque dans le secteur bucco-dentaire, la part de l'assurance maladie est largement minoritaire devant celle des ménages et celle des assurances complémentaires. En vérité, la maîtrise comptable est aujourd'hui faite en dentaire par les ménages, inscrivant notre profession dans une logique de marché et non dans une démarche de santé. Il nous faut impérativement sortir de cette logique infernale et de son extrême complexité ».

Dans ce contexte, la prévention est encore du domaine de « l'expérimental, de l'exceptionnel, du bricolage », dans la mesure où les actions, toutes « pilotes » et diverses, ne s'inscrivent jamais dans la durée et n'ont jamais fait l'objet de la moindre étude scientifique « indépendante et conforme à ce qui est mené dans les autres secteurs médicaux ». Enfin, en matière d'exclusion, il y a encore beaucoup à faire pour éviter une « dentisterie à deux vitesses, basée sur une inégalité sociale » et pour « adapter aux exigences de notre temps une nomenclature qui ne fait que favoriser un tel système ».

Non à une privatisation rampante

Dès lors, la première proposition concerne la prévention pour laquelle le SNDCDCS préconise la « mise en place par le gouvernement d'un programme national, avec des personnels qualifiés dans toutes les structures d'accueil des 0 à 18 ans », dont l'étude et le suivi seront assurés par « une structure de concertation régionale en lien avec les DRASS et les ORS ». Il faut, en outre, « se donner les moyens d'une évaluation et d'une recherche permanente permettant de fixer des objectifs de santé publique qui feraient l'objet d'un contrat avec les syndicats dentaires ». Grâce à une nouvelle nomenclature d'actes, les praticiens s'impliquant dans ce programme « pourraient vivre de leurs seuls soins ». Tout cela suppose néanmoins un engagement fort de l'Etat, de l'assurance maladie, des assurances complémentaires et une participation des collectivités territoriales.

Idem pour la lutte contre l'exclusion, plus particulièrement des 18-26 ans et des plus démunis : il s'agit de réglementer dans des honoraires de références l'accessibilité de ces populations à travers un conventionnement spécifique par département, avec le soutien de la région, qui permette à tout praticien impliqué dans un tel dispositif social de vivre correctement.

Parallèlement, on doit entièrement « repenser la nomenclature » et « dissocier les modalités d'élaboration de la valeur des actes des modalités de leur prise en charge ». Sachant que « travailler à ce dispositif, c'est aussi mettre un frein à tous les projets de filière qui accentuent la disparité ».

« Non à toute privatisation rampante du système de santé bucco-dentaire au profit des banques et des assurances. La santé dentaire des Français n'est pas à vendre et la prévention n'est pas un cadeau Bonux », conclut la plate-forme en abordant les domaines de la « nécessaire indépendance des praticiens » [à travers une obligation de formation continue mais sans recertification] et « des conditions d'exercice convenable » à travers une rémunération « opposable » permettant de faire face aux nouvelles charges que connaît le cabinet.

Une telle politique, qui vise à « faire remonter au plus près des 100 % la prise en charge actuellement aux environs de 30 % », peut être évaluée à 10 milliards, dont 5,5 milliards pour revaloriser les soins conservateurs (chiffre identique à celui de la CNAMTS dans son plan stratégique !).

Reste pour le SNCDCS à savoir faire entendre ce véritable credo.

En route vers le privé

Lors de la présentation de la plate-forme du SNCDCS à la presse, Fabien Cohen, Secrétaire général du syndicat, a abordé plusieurs problèmes d'actualité à travers quelques phrases bien senties :

« Le vent de découragement qui envahit les chirurgiens-dentistes vient de ce qu'on les maintient dans un monde médical au rabais. […] On attend maintenant un signal fort des pouvoirs publics vers une profession marginalisée pendant trop longtemps dont on s'est servi et dont on continue à se servir pour livrer aux complémentaires privées une partie des responsabilités de la Sécurité sociale. […] On peut même dire que la maîtrise comptable est appliquée au dentaire depuis une trentaine d'années puisque si la prise en charge actuelle de 30 % était appliquée à l'ensemble de la santé, la Sécurité sociale deviendrait une véritable banque. […] Nous ne pouvons pas continuer à rester des marginaux à la fois dans le domaine de la santé et dans le domaine de la protection sociale. Il faut réintégrer le secteur dentaire dans le champ de la protection sociale, à moins qu'on veuille le privatiser. Mais qu'on le dise clairement. En tout état de cause, nous refusons la dichotomie actuelle que cette situation entraîne entre les syndicats professionnels « pro-conventionnels », qui demandent des aménagements du système, et « ultra-libéraux », qui préconisent la suppression de la Sécurité sociale. […] Avec le Plan stratégique de la CNAM, on semble programmer la mort de la Sécurité sociale en créant des filières de type HMO états-uniennes. Dans les centres de santé de caisses qu'on a créés en nombre, ces derniers temps, le souci est plus financier que social. Les chirurgiens-dentistes y sont soumis à des pressions de rentabilisation. […] On parle de médecin référent, on ne parle pas encore de chirurgien-dentiste référent, mais, au bout du compte, on nous amène vers quelque chose de plus grave ».