Mon cher confrère, est-ce que je peux… ? - Clinic n° 09 du 01/10/2013
 

Clinic n° 09 du 01/10/2013

 

C’est mon avis

Philippe LESCLOUS  

PU-PH chirurgie orale médecine orale
Faculté de chirurgie dentaire de Nantes philippe.lesclous@univ-nantes.fr

L’« imprimatur » donné par un collègue médecin, généraliste ou spécialiste, est encore (et toujours) bien ancré dans nos mœurs pour la prise en charge odontostomatologique de nombreux patients présentant divers troubles de santé. Et pourtant, est-ce réellement toujours bien pertinent ? Combien de fois un avis donné par un de ces confrères, souvent à notre demande, nous a-t-il paru difficilement compréhensible, voire contestable ? Le désir de sécurité (quelle...


L’« imprimatur » donné par un collègue médecin, généraliste ou spécialiste, est encore (et toujours) bien ancré dans nos mœurs pour la prise en charge odontostomatologique de nombreux patients présentant divers troubles de santé. Et pourtant, est-ce réellement toujours bien pertinent ? Combien de fois un avis donné par un de ces confrères, souvent à notre demande, nous a-t-il paru difficilement compréhensible, voire contestable ? Le désir de sécurité (quelle sécurité ?) nous empêche-t-il d’abord de réfléchir et de consulter les référentiels médicaux à notre disposition ? Ils sont légion aujourd’hui dans de nombreux domaines et ils sont aisément accessibles. Ils ont l’immense avantage d’être adaptés à notre pratique professionnelle et apportent quantité d’informations pratiques. Bien souvent, ces référentiels émettent des recommandations directement applicables dans notre exercice quotidien. D’ailleurs, en les consultant, le praticien odontologiste arrivera à une conclusion parfois très différente de celle apportée par un de ses collègues médecins consulté en première intention. Pourquoi ? Parce qu’il faut bien être conscient que la formation et les connaissances odontostomatologiques de nombre de ces collègues sont parcellaires. Combien d’entre eux connaissent les répercussions locorégionales ou générales d’une pathologie infectieuse dentaire ou parodontale ? Combien d’entre eux connaissent les répercussions buccales d’une pathologie générale ? Combien d’entre eux sont au courant des procédures à mettre en œuvre en cas de risque infectieux ou de risque hémorragique dans notre domaine ?

La formation, pierre d’angle de la meilleure réponse

Inutile de leur jeter la pierre. Savoir déterminer un risque infectieux ou un risque hémorragique et les conséquences que cela peut avoir sur le traitement à prodiguer dans notre domaine d’action devrait faire partie intégrante de notre compétence. D’ailleurs, il s’agit là d’une attente (légitime) de la communauté médicale. C’est en répondant le plus efficacement possible à cette attente que notre profession devrait évoluer vers une intégration et donc vers une plus grande reconnaissance du monde médical. Les enseignants hospitalo-universitaires des facultés d’odontologie en sont bien conscients et construisent aujourd’hui des programmes qui devraient permettre au futur chirurgien-dentiste « généraliste » de remplir au mieux ce rôle. Une certaine médicalisation de la formation initiale odontologique est en route. Mais cela suppose aussi une offre de formation continue à la hauteur pour tous les praticiens déjà installés depuis de nombreuses années. Des progrès considérables sont à réaliser dans ce domaine. Il suffit de lire les différents programmes de nos manifestations et congrès professionnels pour s’en convaincre.

Notre sort et celui de nos patients sont d’abord entre nos mains

Ces quelques lignes ne sont pas écrites pour masquer un quelconque complexe vis-à-vis de ces collègues médecins mais bien dans un état d’esprit le plus collaboratif possible. Car, bien sûr, il subsiste dans quelques situations des interrogations légitimes, reflets de l’état des connaissances et de la complexité humaine. Mais une telle démarche devrait permettre d’optimiser la communication médicale et aider à une prise de décision alors pluridisciplinaire la plus éclairée possible.

Ne nous trompons pas : c’est d’abord en montrant notre savoir-faire que nous serons les plus efficaces et reconnus par tous comme de véritables acteurs de santé. À nous de jouer !