Traitement des édentements complets mandibulaires par la technique du Brånemark Novum® - Implant n° 1 du 01/02/2004
 

Implant n° 1 du 01/02/2004

 

Chirurgie-Prothèse

Pierre Michelon  

Docteur en chirurgie dentaire
Docteur en sciences odontologiques
27, place Albert-1er
83000 Toulon

Résumé

Cet article décrit les différentes étapes, chirurgicales et prothétiques, du traitement d'un édentement complet mandibulaire en un seul jour par la méthode dite du Brånemark Novum® Same Day Teeth. Le succès de cette technique dépend essentiellement de la prise en compte des impératifs prothétiques qui régissent la position et l'orientation des implants. Seule une approche pas à pas réfléchie permet d'éviter les erreurs et d'aboutir à une réhabilitation donnant satisfaction.

Summary

This article describes the various surgical and prosthetic stages of the treatment in just one day of a total loss of the mandibular teeth by the method known as Brånemark Novum® Same Day Teeth. The success of this technique depends primarily on taking into account the prosthetic requirements which gorvern the position and the orientation of the implants. Only a well-thought step-by-step approach makes it possible to avoid the errors and lead to a satisfactory rehabilitation.

Key words

immediate loading, full mandibular edentulism, Brånemark Novum®

Le système Brånemark [1, 2] a été décrit à l'origine comme étant une technique en deux temps selon laquelle l'implant est laissé en position sous-périostée durant une période de cicatrisation osseuse initiale de 4 mois, garantissant une liaison os/implant suffisamment solide avant la mise en charge fonctionnelle. Cette technique en deux temps est toujours d'actualité, son recul et sa fiabilité sont inégalés.

Cependant, la longueur du traitement et les contraintes inhérentes ont initié des développements tendant vers une simplification du protocole et un raccourcissement des délais de cicatrisation. Une des premières approches est celle d'Ericsson et al [3]. : les piliers transgingivaux sont connectés aux fixtures durant le premier temps chirurgical ; les résultats obtenus ne montrent pas de différence statistique avec la technique classique.

Ces résultats sont confirmés par une étude multi-centrique de Becker et al. [4] qui porte sur 135 fixtures de Brånemark ainsi que par les travaux de Collaert et De Bruyn [5].

Il est nécessaire de contrôler l'absence totale d'interférences entre les piliers transgingivaux et l'intrados de la prothèse amovible provisoire, celles-ci pouvant être à l'origine de la mobilisation et donc de la perte d'implants [6].

Parallèlement à cette technique de mise en charge rapide, des travaux tendant vers une mise en charge immédiate ont été entrepris. Le premier rapport est celui de Schnitman et al. [7] : 5 ou 6 fixtures placées classiquement entre les trous mentonniers sont associées à 2 implants posés en position disto-linguale par rapport aux émergences des nerfs dentaires. La prothèse amovible est transformée, au moment de la pose, en prothèse fixe prenant appui sur les 2 implants distaux et l'implant médian ; les autres implants restent enfouis et servent de test. Au bout de 10 ans, 4 des 28 implants mis en charge immédiatement ont été perdus chez 4 patients ; aucun échec n'est constaté dans le groupe témoin [8].

En 1994, Henry et Rosenberg [9] publient une étude sur 5 patients : chacun reçoit 6 fixtures de Brånemark dont 4 sont mises en fonction immédiatement. Après une mise en charge progressive d'un an, aucune perte n'est à signaler.

D'autres études dont celle de Balshi et Wolfinger [10] en 1997 et celle de Randow et al. [11] en février 1999 corroborent la possibilité d'une mise en charge immédiate dans le cas des édentements mandibulaires.

Friberg et al. [6], puis Sennerby et al. [12], utilisant l'analyse de la fréquence de résonance, ont clairement mis en évidence l'évolution de la mobilité des implants dans le temps : à la mandibule, il n'existe aucune variation significative entre le moment de la pose, à 4 mois et après 1 an de mise en fonction ; en revanche, au maxillaire, la « solidité » d'un implant est significativement plus importante après une phase de cicatrisation sous-périostée de 6 mois, puis elle évolue peu.

En accord avec Brunski [13, 14], il semble que, contrairement à ce que l'on a cru pendant de nombreuses années, la condition de succès d'un implant n'est pas la prévention de l'invagination épithéliale, mais la non-mobilisation de celui-ci.

À partir de l'hypothèse suivant laquelle il est possible d'éliminer les contraintes incontrôlées, sources d'échecs, s'exerçant sur les composants transmuqueux en fixant une construction rigide sur les implants tout de suite après leur insertion chirurgicale, Brånemark et al. [15] ont développé une nouvelle approche pour la mise en charge immédiate dans le cas des édentements complets mandibulaires. Il est ainsi possible de traiter ces édentements dans la journée par prothèse fixe ostéo-ancrée ; le matériel nécessaire à sa mise en œuvre est produit et commercialisé sous le nom de Brånemark Novum® Same Day Teeth.

Cet article décrit, étape par étape, cette technique éprouvée et les différentes phases chirurgicales et prothétiques qui réduisent les risques d'erreurs et d'échecs.

Description du système

Il est essentiel de connaître parfaitement les différents composants du Brånemark Novum®. Ce afin d'éviter toute erreur tant dans la pose des indications qu'au cours des phases chirurgicales et prothétiques.

Il existe 3 éléments principaux usinés en titane (Fig. 1) :

- les fixtures ;

- une armature de solidarisation ou armature inférieure ;

- une armature prothétique ou armature supérieure.

Fixtures (Fig. 2)

Elles présentent 2 parties : un filetage non autotaraudant, destiné à être placé en position endo-osseuse, et un col lisse faisant office de pilier transgingival. La partie émergeante de l'os, quelle que soit la longueur de l'implant, est constante et égale à 4 mm.

À leur sommet, un hexagone externe sert à leur blocage en rotation au moment de leur insertion. Elles présentent un filetage interne, destiné à la vis de maintien de l'armature inférieure.

L'épaulement supérieur périphérique est déformable : il va s'écraser au moment de la mise en place de l'armature inférieure afin de compenser les éventuelles erreurs de positionnement des implants ; ceci permet une adaptation passive.

Elles sont disponibles en plusieurs longueurs et diamètres (Tableau I).

Armature inférieure (Fig. 3 et Tableau II)

Elle sert de barre de solidarisation entre les implants et de support à l'armature supérieure. Elle est arciforme et présente une section rectangulaire aux bords inférieurs arrondis.

Elle comporte, pour le passage des vis en titane prenant appui dans les fixtures, 3 trous s'ouvrant sur des logettes de centrage et 4 filetages borgnes destinés aux vis de maintien de l'armature supérieure.

Armature supérieure (Fig. 4 et Tableau II)

Elle sert de support aux dents prothétiques. Elle est posée sur l'armature inférieure à laquelle elle est fixée par 4 vis en titane. Elle a une section en T inversé d'où une grande rigidité.

Sa hauteur diminue aux 2 extrémités où elle présente un bord inférieur arrondi pour ne pas interférer avec la muqueuse gingivale dans la zone molaire.

Elle présente dans sa partie inférieure 3 logettes permettant de la centrer et de ne pas interférer avec les têtes des vis de maintien de l'armature inférieure.

Étude préopératoire

Les systèmes implantaires sont généralement conçus pour permettre un rattrapage des axes et pallier des différences de parallélisme ou d'enfoncement. Ce n'est pas le cas pour le Brånemark Novum® où les implants doivent être placés à quelques centièmes de millimètres près, en fonction d'armatures préusinées, aussi bien horizontalement que verticalement.

L'expérience montre que pratiquement tous les édentements complets mandibulaires, hormis les cas où il existe une solution de continuité osseuse d'origine traumatique ou chirurgicale, sont traitables par pose de 4 à 6 fixtures soutenant un bridge ostéo-ancré et ce, quel que soit le niveau de résorption osseuse. Les indications d'un traitement par Brånemark Novum® sont beaucoup plus restrictives et l'étude préopératoire doit être rigoureuse. Elle est conduite en 3 étapes.

Bilan prothétique initial

Une seule forme d'armature est disponible. Il faut donc s'assurer dans un premier temps qu'elle va être utilisable. Pour cela, il suffit de superposer une armature ou, plus simplement, le dessin sur un transparent de sa projection (Fig. 5) à l'arcade dentaire du patient. Cela peut être une empreinte avant extraction, la prothèse adjointe si elle donne satisfaction ou le montage de dents sur cire, validé en bouche. L'armature doit s'inscrire en avant dans la courbure incisivo-canine et arriver, en arrière, au niveau de la face distale de la première molaire. Elle ne doit pas dépasser, dans le sens vestibulo-lingual, des surfaces occlusales molaires (Fig. 6).

Bilan radiographique

Si l'armature semble convenir, on peut poursuivre l'étude préopératoire par un bilan radiographique, comprenant une radiographie panoramique, une téléradiographie de profil et une vue occlusale.

La radiographie panoramique renseigne sur l'espace osseux disponible entre les 2 trous mentonniers dans les sens vertical et horizontal.

La téléradiographie de profil donne avec une grande précision la hauteur, l'épaisseur et la forme osseuse au niveau de la symphyse dans le plan sagittal.

L'incidence occlusale montre la courbure mandibulaire.

À l'aide d'un transparent sur lequel sont dessinées, avec plusieurs degrés d'agrandissement, les silhouettes des fixtures (Fig. 5), on peut, par superposition, sur la radiographie panoramique et la vue de profil constater si le volume osseux est suffisant en tenant compte de la zone d'écrêtage nécessaire à l'enfouissement total de la partie filetée des implants. On détermine ainsi la longueur des fixtures à utiliser.

Avec un dessin sur transparent de l'armature inférieure, on vérifie sur la vue occlusale que la courbure mandibulaire est compatible et la distance entre les trous mentonniers suffisante (Fig. 7).

Bilan implanto-prothétique

Si le volume osseux utilisable est suffisant, on peut passer à la troisième partie du bilan pré-opératoire qui permettra de faire coïncider le projet prothétique avec les possibilités implantaires. Un montage sur articulateur du modèle maxillaire et du projet prothétique mandibulaire est alors nécessaire. Cela pour déterminer les paramètres suivants.

Classe d'Angle

L'armature prothétique ne pouvant être décalée par rapport aux implants, les classes II marquées constituent une contre-indication. Classiquement, seules les classes I et III peuvent être traitées par la technique du Brånemark Novum® .

Dimension verticale d'occlusion (DVO)

La hauteur cumulée de l'armature supérieure, de l'armature inférieure et de la partie supra-osseuse des fixtures étant de 14,5 mm, une dimension verticale trop basse ne permet pas de réaliser une prothèse dans de bonnes conditions.

Deux options sont possibles dans ce cas : soit augmenter la DVO et s'assurer qu'elle est acceptable par le patient, soit prévoir de diminuer chirurgicalement la crête osseuse au moment de la pose des implants si le volume osseux le permet.

Plan d'occlusion

Il dicte l'orientation des implants puisque l'armature doit lui être parallèle. Il faut s'assurer de son horizontalité dans les différents plans.

Courbe de Spee

Dans le cas d'une courbe de Spee inversée, suite à des égressions par exemple, il y aura risque d'interférences, dans les secteurs postérieurs, entre les dents maxillaires et l'armature prothétique. Il est certes possible de la meuler, mais cela l'affaiblit et la raccourcit. Il peut même s'avérer que la prothèse ne soit pas réalisable.

Avant de poser les implants, il est donc crucial d'effectuer les corrections nécessaires soit par coronoplastie, soit prothétiquement et de s'assurer qu'elles sont suffisantes et acceptées par le patient.

Contre-indications

Contre-indications d'ordre général

Ce sont les mêmes que pour une pose d'implants classique. Il convient cependant de s'assurer que le patient est à même de supporter une intervention relativement longue sans avoir recours à une anesthésie générale. Il est en effet nécessaire de le placer en relation centrée et de lui demander de fermer la bouche en cours d'intervention afin d'utiliser des repères maxillaires pour le positionnement des fixtures.

Contre-indications d'ordre local

Elles sont mises en évidence durant l'examen pré-opératoire.

En cas de dents résiduelles présentant des lésions apicales, il est nécessaire d'attendre au moins 2 mois après extraction et curetage avant la pose des implants.

À la condition d'une préparation gingivale 3 semaines au préalable et d'une sérieuse motivation, il est possible, dans le cas de dents à faible soutien osseux, de réaliser les extractions et la pose des implants dans le même temps.

Matériel nécessaire

L'accastillage spécifique au Brånemark Novum® (réf. 27236) est essentiellement constitué de gabarits et de guides qui permettent de placer les implants les uns par rapport aux autres pour les faire coïncider avec l'armature inférieure (Fig. 8). Il faut rajouter au matériel fourni des indicateurs de direction classiques 2/3 (réf. DIA 312-0), une pièce à main et une fraise à os de fort diamètre en tungstène.

La préparation osseuse est réalisée avec des forets à irrigation externe à usage unique et de diamètre croissant. Le système d'irrigation ne doit pas être solidaire de la tête du contre-angle afin de pouvoir diriger le liquide de refroidissement, du sérum physiologique réfrigéré, directement sur le foret, sans interférences avec les gabarits.

Les forets sont disponibles en 2 longueurs. Les plus longs présentent une graduation qui permet de contrôler l'enfoncement en fonction de l'implant utilisé. Ils sont donc polyvalents.

Prémédication

Un traitement antibiotique de spiramycine (1 500 000 UI 3 fois par jour) pendant 8 jours débutée 2 jours avant l'intervention, associée à un traitement analgésique postopératoire sont prescrites.

Phases cliniques

Enregistrement de la dimension verticale d'occlusion

Des repères muqueux au niveau de l'aile du nez et de la partie inférieure du menton sont tracés avec un feutre indélébile. La DVO déterminée durant l'examen préopératoire est soigneusement mesurée et notée (Fig. 9).

Anesthésie

Une anesthésie locorégionale bilatérale au niveau de l'épine de Spix, complétée par des rappels vestibulaires et linguaux, assure un silence opératoire correct. Dans le cas de patients particulièrement inquiets, on peut prescrire des anxiolytiques ou avoir recours à l'administration de neuroleptiques par voie intraveineuse, administrés par un médecin anesthésiste en milieu hospitalier.

L'anesthésique utilisé est de l'articaïne hydrochloride à 4 % adrénalinée.

Détermination des points d'émergence osseux et de l'axe des implants

C'est là l'étape la plus importante, car d'elle va dépendre le succès de l'intervention et de la réalisation prothétique.

Classiquement, l'axe des implants doit passer par le point de trépanation endodontique des dents à remplacer. Cela garantit une orientation satisfaisante par rapport aux contraintes occlusales et un espacement correspondant au diamètre des dents, gages d'une prothèse facile à réaliser, fonctionnelle et esthétique.

Dans le cas du Brånemark Novum®, cette règle est difficile à respecter de par le strict parallélisme des implants et leur espacement prédéfini. Il faut cependant s'en inspirer pour la mise en place de l'implant médian qui est la clef de voûte de toute l'intervention. Une fois cet implant installé, les différents gabarits et guides déterminent la position des 2 autres.

La possibilité de référence par rapport aux dents supérieures est impérative durant toute l'intervention. Aussi, dans le cas d'un édentement supérieur total ou partiel, la prothèse amovible est préalablement stérilisée à froid pour pouvoir être mise en bouche et manipulée.

Détermination du point de symétrie mandibulaire

Il est malaisé de visualiser parfaitement le milieu de la mandibule une fois un lambeau récliné. Le point de symétrie doit être marqué, dès le début de l'intervention, à la fraise boule dans l'os, au travers de la gencive, en s'aidant des freins de la langue et de la lèvre, de la papille rétro-incisive et du point interincisif supérieur (Fig. 10 et 11).

Incision, exposition du site implantaire

Une incision crestale s'étendant jusqu'au niveau des faces postérieures des premières molaires, associée à des décharges distales vestibulaires permet de récliner un lambeau de pleine épaisseur (Fig. 12). Il doit autoriser une parfaite visibilité de l'ensemble de la mandibule, particulièrement du côté lingual pour en visualiser la concavité.

Les émergences des nerfs dentaires sont largement mises à jour et un petit dissecteur inséré vers l'avant dans les trous mentonniers permet de vérifier qu'il n'y a pas de crosse nerveuse.

Les éventuelles extractions peropératoires sont alors réalisées (Fig. 13).

Détermination de la position de l'implant médian

Pour cela, on se sert d'un indicateur de direction système BrånemarkTM 2/3. La partie destinée à vérifier la profondeur du forage à 3 mm de diamètre et l'évasement cortical mesure 13 mm, soit à peu près la même hauteur que l'ensemble partie supra-osseuse de la fixture, armature inférieure et armature supérieure.

Avec le foret de 2 mm de diamètre, on effectue un forage sur environ 10 mm de profondeur, dans le même plan sagittal que le point de symétrie, suivant un axe passant par la papille rétro-incisive et un point vestibulaire par rapport au sommet de la crête osseuse pour éviter la concavité linguale de la mandibule (Fig. 14). L'indicateur de direction permet de vérifier l'orientation correcte par rapport aux dents supérieures en demandant au patient de fermer la bouche à la DVO prédéfinie (Fig. 15).

L'orientation en bas et en dehors de l'axe de l'implant médian entraîne une bascule de la partie postérieure de l'armature, d'où un espace prothétique plus important qui facilite le montage des molaires. Le premier gabarit ou gabarit guide, maintenu en son milieu par un indicateur de direction, permet de visualiser l'emplacement des 2 implants distaux et d'évaluer les rapports qui existent avec les trous mentonniers (Fig. 16). S'il existe un risque de lésion des nerfs dentaires, il suffit de déplacer vestibulairement le point de trépanation osseux antérieur.

Le foret de 2 mm est ensuite utilisé sur toute la hauteur osseuse disponible suivant l'axe passant par la papille rétro-incisive. La position de l'implant médian est alors fixée.

Régularisation osseuse

Avant la mise en place des implants, un plateau osseux crestal horizontal, de 6 mm de large au minimum, parallèle à l'armature inférieure et donc au plan d'occlusion, est réalisé en vue de l'enfouissement total de la partie filetée des fixtures.

Au lieu de meuler d'emblée la crête osseuse de façon empirique, il est préférable de déterminer dans un premier temps l'enfoncement de l'implant médian.

Avec une fraise à os montée sur une pièce à main et sous irrigation importante, un plateau horizontal de 2 cm de long est réalisé dans la région antérieure pour qu'apparaisse, autour du point de trépanation de l'implant médian, une zone plane de 6 mm de large au minimum et pour que l'indicateur de direction classique, remis en place, n'interfère pas avec les dents supérieures à la DVO prédéfinie.

Le second gabarit ou gabarit d'évaluation est alors utilisé. Sa largeur est de 6 mm, d'où son emploi comme guide de réduction osseuse. Il est maintenu en place par un indicateur de direction (réf. 27249) passant par le forage médian, face la plus large vers le bas (Fig. 17). Il suffit alors de diminuer, progressivement, par meulage, la crête mandibulaire jusqu'à ce que le gabarit, maintenu parallèlement au plan frontal, appuie uniformément de toute sa longueur et sa largeur sur le plateau osseux. La réduction osseuse est ainsi optimisée et correspond exactement aux besoins dans les sens verticaux et horizontaux (Fig. 18).

Mise en place de l'implant médian

Le foret de 2 mm de diamètre est utilisé, au travers du gabarit d'évaluation fermement maintenu, pour marquer l'emplacement et l'axe des 2 implants distaux. Un forage sur une dizaine de millimètres est effectué et les indicateurs de direction 2/3 sont mis en place au travers du gabarit d'évaluation. Après avoir demandé au patient de fermer la bouche, on vérifie à nouveau que l'armature est correctement centrée par rapport aux dents supérieures et que l'espace prothétique est suffisant.

Les forages à 2 mm de diamètre sont ensuite achevés sur toute la hauteur osseuse disponible. La graduation du foret permet de vérifier la longueur des implants à utiliser et ainsi de confirmer l'examen radiographique.

Le gabarit n° 3 ou gabarit de positionnement, équipé du guide de forage de 2 mm de diamètre, est mis en place et positionné grâce aux 3 indicateurs de direction Brånemark Novum®.

La séquence de forage (2 - 3 - 3,5 - 3,8 - 4 - 4,2 - 4, 4 mm) est alors exécutée sur toute la longueur de l'implant au travers des gabarits de forage du diamètre correspondant, les graduations servant de guide d'enfoncement (Fig. 19).

Il est impératif de maintenir fermement les gabarits de forage en place, le gabarit de positionnement bien au contact de l'os et de forer de façon alternative, tout en s'assurant que le liquide de refroidissement soit bien dirigé au contact du foret, sous le gabarit.

Le taraudage est fait avec un couple maximal et à vitesse lente au travers du guide de 5 mm de diamètre jusqu'à la profondeur choisie.

La fixture, parfaitement positionnée et maintenue dans le porte-fixture, est mise en place au travers du guide de 5 mm de diamètre, puis vissée à vitesse lente sous fort refroidissement jusqu'à ce que le porte-fixture arrive au contact ferme du guide. Le vissage est ensuite contrôlé à l'aide de la clef manuelle.

Le porte-fixture ainsi que les gabarits et les indicateurs de direction sont retirés (Fig. 20).

Mise en place des implants distaux

Le gabarit n° 4 ou gabarit en V, muni du guide de forage de 2 mm, est posé sur la fixture antérieure maintenue par une vis de fixture temporaire. Il est ensuite orienté par des indicateurs de direction enfoncés dans les forages distaux. La vis temporaire est alors serrée à 10 Ncm. Il est immobilisé, au travers de filetages, par 2 vis à os de stabilisation dont l'avant-trou est creusé avec un foret de 2 mm (Fig. 21).

L'alésage des 2 puits implantaires distaux est obtenu en utilisant toute la série de forets en association avec les guides correspondants, en évitant tout échauffement.

Après taraudage, les implants distaux, parfaitement positionnés dans les porte-fixtures, sont insérés et vissés en butée (Fig. 22). Tout le matériel de positionnement est retiré (Fig. 23).

Vérifications avant suture

L'armature inférieure est mise en place provisoirement, maintenue par les 3 vis adéquates serrées faiblement. La réplique de l'armature supérieure est présentée pour vérifier l'existence d'un espace de 3 mm au minimum entre les extensions distales et la crête osseuse (Fig. 24). Dans le cas contraire, il est nécessaire de diminuer la hauteur osseuse par meulage (Fig. 25).

Suture du lambeau

Le lambeau est remis en place et l'incision refermée par une suture discontinue en commençant par les incisions de décharge. Le point utilisé entre les implants est un matelassier horizontal en X permettant une bonne coaptation sans risque de déchirement.

Mise en place de la barre inférieure de solidarisation

Une feuille de silicone percée de 3 trous en regard des implants est placée sur la gencive pour éviter une hyperplasie cicatricielle.

L'armature inférieure est mise en place et maintenue par les 3 vis provisoires pour fixture, munies d'une rondelle de compression en téflon (Fig. 26). Le positionnement correct de l'armature, sans interposition de la feuille de silicone ou de la gencive, est vérifié, puis les vis sont serrées à la clef manuelle progressivement et alternativement, en commençant par le milieu. Le serrage doit aboutir à un écrasement uniforme des rondelles de téflon (Fig. 27).

L'épaulement supérieur des fixtures s'écrase alors légèrement, garantissant ainsi une adaptation passive de l'armature sur les 3 piliers implantaires.

Les vis provisoires sont remplacées par les vis définitives, serrées à 45 Ncm (Fig. 28).

Une protection en silicone est mise en place sur l'armature (Fig. 29). La phase chirurgicale terminée, l'utilisation de poches de glace permet de réduire l'hématome postopératoire.

Phases prothétiques

Enregistrement de l'occlusion

La protection de l'armature inférieure est retirée, puis l'armature supérieure est mise en place, maintenue par 2 vis de prothèse (Fig. 30). L'enregistrement de l'occlusion est réalisé à la DVO relevée avant intervention à l'aide d'un mordu en silicone lourd (Lab-Putty Hard) (Fig. 31).

Il peut être utile d'employer une butée antérieure constituée de plusieurs feuilles d'étain, récupérées dans les radiographies rétroalvéolaires, ou d'une cale en résine.

Essayage des dents prothétiques

Le laboratoire doit avoir à sa disposition le modèle supérieur monté sur articulateur, un jeu de dents prothétiques en composite (Vivadent PE Orthosit) et un modèle mandibulaire constitué d'une réplique de l'armature inférieure sur laquelle sont fixées 3 répliques de fixtures, le tout enchâssé dans un socle en plâtre. L'armature supérieure est fixée par 2 vis prothétiques sur le modèle inférieur, le tout est positionné sur l'articulateur grâce au mordu en silicone (Fig. 32). Les vis prothétiques sont remplacées par des vis guides sur implant (réf. 29095), éventuellement raccourcies pour ne pas interférer avec la DVO. Les dents prothétiques sont montées sur l'armature inférieure à la cire (Fig. 33 et 34).

Dans le cas d'un édentement complet maxillaire traité par prothèse amovible, les dents sont montées de façon à obtenir une occlusion balancée. Si les canines supérieures sont fixes, c'est un montage en protection canine qui est préconisé.

Ce montage est essayé en bouche. L'occlusion, la DVO, l'esthétique et la phonétique sont vérifiées (Fig. 35).

Finition au laboratoire

La position des dents et le contour vestibulaire validés en bouche sont enregistrés par une clef vestibulaire en silicone lourd (Lab-Putty Hard) (Fig. 36). L'armature supérieure reçoit un traitement de surface préservant sa partie inférieure (sablage avec de l'alumine 100 µ sous 2,5 bars), puis un traitement de liaison silanique pour le métal/céramique/résine à raison de 5 secondes par cm2 (Silano Pen) (Fig. 37).

Un opaque de couleur rose (Opaquer OVS 2) est appliqué (Fig. 38).

Elle est alors remise en place sur le modèle inférieur, maintenu par les vis guides. La clef en silicone contenant les dents prothétiques est repositionnée (Fig. 39 et 40) et de la résine (Résine rose Pro Base Cold) est coulée, puis polymérisée à 55° C pendant 10 min sous une pression de 6 bars (Ivomat). Cette technique diminue les risques de déformation de l'armature par rapport à une mise en moufle. La résine est ensuite ébarbée, finie, puis polie.

Après un remontage sur articulateur, l'occlusion est contrôlée et les meulages d'ajustage éventuels sont effectués (Fig. 41 et 42).

Finition en bouche

La protection en silicone retirée, la prothèse est mise en place. Elle est maintenue sur la barre inférieure par les 4 vis de prothèse en titane serrées progressivement, en quinconce, jusqu'à un couple de 45 Ncm (Fig. 43).

L'occlusion est contrôlée et, si besoin, ajustée. Les têtes des vis sont protégées par une boulette de coton et leur puits d'accès obturé par un ciment provisoire.

Conseils postopératoires

Le patient est informé du risque d'apparition d'un hématome postopératoire, se résorbant généralement en moins d'une semaine. Il lui est demandé de faire des bains de bouche avec du sérum physiologique après chaque repas.

Pendant la première semaine, une alimentation de faible consistance est conseillée.

Une maintenance avec une brosse postchirurgicale est préconisée dès le troisième jour.

Un analgésique est prescrit pendant quelques jours si nécessaire.

Contrôles postopératoires et suivi clinique

À 10 jours, la feuille de silicone et les points sont retirés. Des conseils de brossage et de maintenance sont donnés. Le serrage des vis de l'armature inférieure est vérifié et parfait après dépose de la seule armature supérieure.

À 3 mois, les armatures sont déposées, les implants testés et les tissus mous examinés. Les vis de maintien des armatures inférieures et supérieures sont bloquées à 45 Ncm.

À 6 mois, le serrage des vis est contrôlé sans déposer l'armature inférieure et les puits d'accès des vis sont obturés avec un composite, les têtes de vis étant protégée par un peu de gutta percha.

Complications possibles

Fracture de la mandibule

C'est le risque principal. Il peut survenir dans le cas de mandibules fortement résorbées du fait du large diamètre des implants utilisés. À la moindre suspicion en cours d'intervention, le protocole du Novum® doit être abandonné au profit de l'utilisation d'implants classiques.

Perforation et saignement

Une perforation de la corticale linguale au niveau des implants distaux peut survenir et entraîner un saignement. Cela peut être évité en réclinant correctement le périoste avant les phases de forage.

L'exposition linguale de spires est généralement sans importance. Elle doit toutefois être limitée en raison des risques d'irritations muqueuses post-opératoires.

Échauffement de l'os

C'est le facteur principal d'échec. Une forte irrigation avec du sérum physiologique réfrigéré et un forage séquentiel sont impératifs.

Lésion du nerf dentaire

Avant de forer au niveau des implants distaux, il convient de repérer les trous mentonniers et de s'assurer qu'il n'existe pas de crosse antérieure. Si le volume osseux disponible est insuffisant, le protocole du Novum® doit être abandonné au profit de l'utilisation d'implants classiques.

Desserrage des vis

Il peut être évité en contrôlant le serrage à 45 Ncm plusieurs fois au cours des premiers mois. Le desserrage des vis de l'armature inférieure peut entraîner la perte d'un ou plusieurs implants. Le protocole de maintenance décrit semble éviter cette complication.

Compression gingivale sous les extensions

Si la réduction osseuse sous les extensions distales des armatures est insuffisante, une compression douloureuse de la muqueuse peut apparaître assez rapidement. Une retouche de l'armature permet généralement de résoudre ce problème. Il est parfois nécessaire de rectifier le niveau osseux.

Rétention alimentaire sous la prothèse

Un jour trop important sous l'armature inférieure ou sous les extensions distales de l'armature supérieure peut être gênant. Un rajout de résine permet de résoudre ce problème une fois le contour gingival stabilisé.

Conclusion

Le traitement des édentements complets par la technique du Brånemark Novum® Same Day Teeth présente de nombreux avantages dont la rapidité et un prix de revient réduit. Cependant, les indications doivent être posées de façon stricte et le protocole opératoire pas à pas doit être parfaitement respecté.

Seule une parfaite connaissance de la technique et des impératifs prothétiques permet de mener à bien ce type d'intervention où les solutions de rattrapage sont limitées malgré la disponibilité de composants permettant de gérer les complications.

ADRESSE DES DISTRIBUTEURS

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