Technique d'empreinte mixte plâtre-élastomère utilisant un tube porte-empreinte - Implant n° 2 du 01/05/2006
 

Implant n° 2 du 01/05/2006

 

Dossier technique

Jean-François Barret*   Philippe Barthèlemy**  


*Prothésiste
6, rue Campo-Formio
75013 Paris
**Ex-assistant à la faculté de Paris V
DU de prothèse imlanto-portée de Paris V
82, bd Haussmann
75008 Paris

Cet article décrit une technique d'empreinte mixte plâtre-élastomère utilisable pour les édentements complets ou partiels. Son utilisation est très simple et donne des résultats précis et constants.

À la différence de la prothèse dento-portée, la prothèse implanto-portée ne peut compter sur l'élasticité desmodontale pour parfaire son adaptation. Bien que certains auteurs aient montré qu'une inadaptation prothétique modérée ne compromettait pas l'ostéointégration[1], il semble logique de vouloir éliminer les contraintes passives générées par la mise en place d'une prothèse mal adaptée. Ces contraintes s'ajoutant aux forces occlusales peuvent être à l'origine de complications mécaniques ou biologiques[2- 4].

La chaîne prothétique débute par la prise d'empreinte au cabinet dentaire ; cette étape doit fournir au laboratoire de prothèse un modèle de travail précis qui va servir de référence tout au long de cette chaîne prothétique. Les techniques récentes de réalisation d'armature en titane par usinage n'autorisent pas le recours à la soudure pour éliminer une inadaptation et imposent une technique d'empreinte fiable et précise.

De nombreuses études ont été réalisées sur les matériaux et les techniques d'empreinte en implantologie. Au travers de ces études, il apparaît que la technique dite directe ou pick-up est préférable à la technique indirecte[5- 7], en raison de l'imprécision que génère le repositionnement des transferts dans l'empreinte[8].

La solidarisation des transferts par un matériau rigide est bénéfique[9- 13], même si elle ne semble pas nécessaire à certains auteurs lorsque les implants sont parallèles ou très peu divergents[14- 16].

Le matériau classiquement utilisé pour solidariser les transferts est la résine autopolymérisante dont la stabilité dimensionnelle est médiocre.

Le plâtre à empreinte a été utilisé par certains auteurs comme matériau de solidarisation des transferts[17- 20]. Toutefois, sa manipulation délicate et ses faibles qualités mécaniques compliquent son utilisation.

Cet article décrit une technique d'empreinte originale mixte plâtre-élastomère, autorisant les empreintes pour édentement partiel ou complet.

Matériel (FIG.1)

• un kit fourni par le laboratoire de prothèse comportant :

- la dose de plâtre prédosée adaptée au cas clinique : plâtre de classe IV à prise rapide (Pico-Stone speed) ;

- une seringue graduée avec repère de la quantité d'eau nécessaire ;

- une cupule de malaxage à usage unique ;

- une seringue à usage unique pour injecter le plâtre ;

- un tube plastique perforé adapté au cas clinique ;

• un porte-empreinte ajouré permettant le dévissage des vis des transferts d'empreinte ;

• un matériau élastomère de préférence monophase ;

• des transferts d'empreinte pour technique directe ou, plus pratiques, des cylindres provisoires en titane munis de vis longues pour transfert d'empreinte.

Méthode

Au laboratoire de prothèse

Le praticien fournit au laboratoire de prothèse une empreinte en alginate réalisée avec les transferts coniques pour empreinte indirecte. Un modèle en plâtre est tiré de cette empreinte.

Sur les répliques d'implants, des tubes provisoires en titane qui serviront de transfert d'empreinte sont vissés. Ils présentent une section cylindrique plus faible, ce qui autorise un passage plus facile du tube plastique porte-empreinte (FIG. 2A et B).

Les tolérances d'usinage de ces tubes étant identiques à celles des transferts d'empreinte, l'empreinte sera aussi précise (FIG.3). Le tube plastique perforé est réalisé (FIG.4). Si besoin, un porte-empreinte individuel ajouré est fabriqué.

Le kit est confectionné et envoyé au praticien.

Au cabinet dentaire

Le praticien visse les tubes en titane sur les implants. Il effectue ensuite une radiographie pour vérifier leur mise en place. Le tube plastique est placé sur les transferts.

L'eau prélevée et dosée à l'aide de la seringue graduée est versée sur le plâtre préalablement déposé dans la cupule de mélange. Le malaxage à l'aide d'une spatule à ciment dure environ 30 secondes au bout desquelles le plâtre prend une consistance crémeuse. Il est alors très facilement chargé dans la seringue à empreinte, puis injecté dans le tube plastique par les trous pratiqués sur les faces vestibulaire et linguale (FIG.5).

La transparence du tube permet le contrôle visuel de la bonne injection du plâtre. Le temps de prise suffisamment long du plâtre (10 min) permet de retirer facilement tous les excès (FIG.6).

Une fois le plâtre pris, les transferts peuvent être dévissés pour vérifier la qualité de la clef de positionnement réalisée (FIG.7). La surempreinte peut alors être effectuée à l'aide du porte-empreinte individuel et d'un matériau élastomère (FIG.8 et 9).

À partir de cette empreinte, le laboratoire de prothèse réalise un maître-modèle avec une fausse gencive amovible.

Présentation de cas cliniques (FIG.10 à 23)

Le premier cas clinique est l'illustration clinique du modèle de démonstration précédent (FIG.10 à 15).

Les deux suivants concernent des édentements de grande portée qui ont été traités par des bridges à armature Procera® titane transvissée (FIG.16)à 23).

Résultats

Depuis la mise au point et l'application de cette technique par Jean-François Barret en septembre 2002, sur 126 prothèses réalisées dans son laboratoire à partir de ce procédé d'empreinte, seuls 3 problèmes sont apparus, nécessitant la réfection de l'armature prothétique. Ces 3 échecs proviennent d'erreur de manipulation lors de l'empreinte : le premier est dû à un mauvais positionnement des transferts sans contrôle radiographique, les deux autres à un mauvais dosage du plâtre et de l'eau (TABLEAU I).

Discussion

L'exigence de précision des empreintes en prothèse implanto-portée plurale a toujours été très forte. Les nouvelles techniques de réalisation d'armature en titane usiné, qui n'autorisent pas le recours à la section et la soudure de l'armature pour rectifier une inadaptation, augmentent encore cette exigence.

Des différentes études sur les techniques et matériaux d'empreinte, il apparaît que les empreintes les plus précises sont celles réalisées en technique directe avec solidarisation des transferts par un matériau rigide.

Le plâtre à empreinte (Snow White) a été décrit comme matériau de solidarisation par certains auteurs, mais son utilisation reste délicate, en particulier pour les édentements partiels dans lesquels il est difficile d'empêcher la propagation du plâtre dans les espaces interdentaires. En outre, il possède des qualités mécaniques médiocres (faible résistance) et physiques moyennes (expansion inférieure à 0,12 %).

La technique décrite dans cette étude fait appel à un plâtre de type IV dont les qualités mécaniques sont élevées (résistance à la compression : 60 MPa) et dont l'expansion de prise est meilleure (inférieure à 0,1 %).

Elle utilise un tube plastique transparent permettant :

- de contrôler le remplissage du tube pendant l'injection ;

- de contenir le plâtre et d'éviter qu'il ne fuse dans les espaces interdentaires et les contre-dépouilles ;

- d'éviter la contamination du plâtre par la salive durant sa prise.

Conclusion

Cet article décrit une technique d'empreinte mixte plâtre type IV-élastomère dans laquelle un tube plastique est utilisé pour contenir le plâtre. Cette technique simple à mettre en oeuvre en clinique donne des résultats fiables et précis comme en témoigne son très faible taux d'échecs. Elle raccourcit le traitement prothétique, car l'empreinte ainsi réalisée ne doit pas être contrôlée par une clef en plâtre lors d'une séance ultérieure.

ADRESSE DES DISTRIBUTEURS

PICO-STONE SPEED - PICODENT - DENSCHEIDER STRAßE 24 - D-51688 WIPPERF - RTH - ALLEMAGNE - IMPREGUM® - 3M ESPE - BOULEVARD DE L'OISE - 95029 CERGY-PONTOISE CEDEX - TÉL. : 01 30 31 82 27 - FAX : 01 30 31 82 62 - E-MAIL : 3MESPEfr@mmm.com - PROCERA® - NOBEL BIOCARE - 80, AVENUE DES TERROIRS-DE-FRANCE - 75007 PARIS CEDEX 12 - TÉL. : 01 53 33 89 10 - FAX : 01 53 33 89 33 -

BIBLIOGRAPHIE

  • 1. Jemt T, Book K.Prosthesis misfit and marginal bone loss in edentulous implant patients. Int J Oral Maxillofac Implants 1996;11(5):620-625.
  • 2. Adell R, Lekholm U, Rockler B, Brånemark PI.A 15-year study of osseointegrated implants in the treatment of the edentulous jaw. Int J Oral Surg 1981;10(6):387-416.
  • 3. Jemt T.Failures and complications in 391 consecutively-inserted fixed prosthèses supported by Brånemark implants in edentulous jaws: a study of treatment from the time of prosthesis placement to the first annual checkup. Int J Oral Maxillofac Implants 1991;6(3):270-276.
  • 4. Kallus T, Bessing C.Loose gold screws frequently occur in full-arch fixed prostheses supported by osseointegrated implants after 5 years. Int J Oral Maxillofac Implants 1994;9(2):169-178.
  • 5. Barrett MG, de Rijk WG, Burgess JO.The accuracy of six impression techniques for osseointegrated implants. J Prosthodont 1993;2(2):75-82.
  • 6. Carr AB.Comparison of impression techniques for a five-implant mandibular model. Int J Oral Maxillofac Implants 1991;6(4):448-455.
  • 7. Carr AB.Comparison of impression techniques for a two-implant 15-degree divergent model. Int J Oral Maxillofac Implants 1992;7(4):468-475.
  • 8. Liou AD, Nicholls JI, Yuodelis RA, Brudvik JS.Accuracy of replacing three tapered transfer impression copings in two elastomeric impression materials. Int J Prosthodont 1993;6(4):377-383.
  • 9. Assif D, Fenton A, Zarb G, Schmitt A.Comparative accuracy of implant impression procedures. Int J Periodont Rest Dent 1992;12(2):112-121.
  • 10. Assif D, Marshak B, Schmidt A.Accuracy of implant impression techniques. Int J Oral Maxillofac Implants 1996;11(2):216-222.
  • 11. Assif D, Nissan J, Varsano I, Singer A.Accuracy of implant impression splinted techniques: effect of splénétique material. Int J Oral Maxillofac Implants 1999;14(6):885-888.
  • 12. Naconecy MM, Teixeira ER, Shinkai RS, Frasca LC, Cervieri A.Evaluation of the accuracy of 3 transfer techniques for implant-supported prostheses with multiple abutments. J Oral Maxillofac Implants 2004;19(2)192-198
  • 13. Vigolo P, Majzoub Z, Cordioli G.Evaluation of the accuracy of three techniques used for multiple implant abutment impressions. J Prosthet Dent 2003;89(2):186-192.
  • 14. Herbst D, Nel JC, Driessen CH, Becker PJ.Evaluation of impression accuracy for osseointegrated implant-supported superstructures. J Prosthet Dent 2000;83(5):555-561.
  • 15. Hsu CC, Millstein PL, Stein RS.A comparative analysis of the accuracy of implant transfer techniques. J Prosthet Dent 1993;69(6):588-593.
  • 16. Humphries RM, Yaman P, Bloem TJ.The accuracy of implant master casts constructed from transfer impressions. Int J Oral Maxillofac Implants 1990;5(4):331-336.
  • 17. Eid N.An implant impression technique using a plaster splinting index combined with a silicone impression. J Prosthet Dent 2004;92(6):575-577.
  • 18. Mariani P.Prothèses totales à complément de rétention implantaire : l'empreinte dissociée. Synergie Prothet 2001;3:3. abutments. Int J Oral Maxillofac Implants 200;19(2):192-198.
  • 19. Nissan J, Barnea E, Krauze E, Assif D.Impression technique for partially-edentulous patients. J Prosthet Dent 2002 Jul;88(1):103-104.
  • 20. Zouras CS, Winkler S, Thaler JJ 2nd.Dual-tray impression technique for implant-retained overdentures. Implant Dent 1995;4(1):57-60.