Apport des techniques autogènes de régénération osseuse et muqueuse dans le cas d'une réhabilitation implantaire - Implant n° 4 du 01/11/2020
 

Implant n° 4 du 01/11/2020

 

Chirurgie pré-implantaire

P.O. SAGE  

Les techniques de régénération osseuse sont diverses et très documentées. Compte tenu de sa capacité de cicatrisation et de sa prédictibilité, l'os autogène reste le gold standard pour la reconstruction de grands défauts alvéolaires, surtout pour les greffes osseuses verticales [,]. Cependant, les techniques d'apposition simple d'un os très cortical montrent des...


Résumé

Résumé

La survie de nos greffes osseuses est fonction de la technique utilisée, de la gestion des tissus mous environnants ainsi que des facteurs généraux (hygiène du patient, tabac, état de santé général, etc.). Les techniques autogènes de régénération osseuse et muqueuse restent à ce jour les plus documentées et les plus reproductibles, et ce même dans des conditions défavorables (tissus cicatriciels, hygiène perfectible, etc.).

Nous rapportons le cas d'une patiente née en juillet 1987, ayant subi un trauma à l'âge de 16 ans entraînant une perte de 11, 21, 31 et 41. Des implants ont été posés lorsque la patiente a terminé sa croissance (19 ans) associés à une greffe osseuse en apposition en région 31-41. Suite à la perte précoce des implants 31 et 41, la patiente est restée avec une prothèse amovible. Sept années plus tard, la patiente est adressée pour une réhabilitation implantaire de la même région. Une prise en charge globale de ce secteur est nécessaire : greffe épithélio-conjonctive pour améliorer le contexte gingival ; greffe osseuse autogène avec prélèvement rétro-molaire ; pose d'un implant en région 31 ou 41 avec greffe de conjonctif tubérositaire ; aménagement gingival ; réalisation des dents.

Le volume et la qualité du tissu gingival péri-implantaire sont indissociables de la réussite de ce type de traitement. Une gencive kératinisée/fixe et de bonne qualité est nécessaire autour des implants. En 2018, Thomas conclut, dans une méta-analyse portant sur les effets des procédures d'augmentation des tissus mous sur la survie de l'os péri-implantaire, que les augmentations des tissus mous favorisent une meilleure santé implantaire. Il ajoute que l'augmentation de gencive kératinisée par greffe autogène permet une meilleure préservation de l'os marginal des implants. Il décrit également que le gain d'épaisseur de gencive fixe à l'aide de greffon autogène apporte une meilleure stabilité de l'os marginal péri-implantaire.

La gestion du volume osseux est, elle aussi, primordiale pour le taux de survie implantaire. Les techniques d'augmentation osseuse sont nombreuses mais les résultats ne sont pas toujours ceux attendus. Ceci est d'autant plus le cas pour les greffes permettant de reconstruire un volume osseux vertical. La reproductibilité de ces greffes a été décrite par Khoury dans une étude clinique décrivant les résultats de 132 patients traités par une reconstruction en 3D entre les années 1995 et 2000. À l'aide de cette technique, la moyenne du gain osseux vertical obtenue est de 7,2 mm.

Le prélèvement osseux autogène rétro-molaire et le prélèvement autogène de tissus mous (conjonctif à la tubérosité ou épithélio-conjonctif au palais) permettent d'obtenir des résultats stables. La greffe osseuse autogène apporte d'excellents résultats lorsqu'elle est réalisée selon le concept de Khoury. Ces techniques présentent néanmoins l'inconvénient de créer un second site opératoire pour les patients. Cependant, l'absence de douleur et la reproductibilité des résultats nous encouragent à utiliser les techniques autogènes sur des défauts importants.

Les techniques de régénération osseuse sont diverses et très documentées. Compte tenu de sa capacité de cicatrisation et de sa prédictibilité, l'os autogène reste le gold standard pour la reconstruction de grands défauts alvéolaires, surtout pour les greffes osseuses verticales [,]. Cependant, les techniques d'apposition simple d'un os très cortical montrent des résultats parfois décevants. La technique décrite par Khoury sous forme de reconstruction en 3D avec des blocs osseux et de l'os particulaire [] est l'une des plus reproductible.

La survie de nos greffes osseuses est fonction de la technique utilisée, de la gestion des tissus mous environnants ainsi que des facteurs généraux (hygiène du patient, tabac, état de santé général, etc.)

Cependant suite à un échec de greffe osseuse, les tissus mous sont souvent fibreux car cicatriciels. La gestion d'un échec doit donc être globale : re-motivation du patient, gestion des tissus mous avant la greffe osseuse, gestion du tissu osseux, gestion des tissus mous péri-implantaires, conception de la couronne définitive.

Cas clinique

Une patiente née le 17 juillet 1987 se présente suite à un trauma et la perte de ses incisives centrales maxillaires et mandibulaires en 2003 (11-21 ainsi que 31-41). La première option thérapeutique choisie est un bridge collé maxillaire et mandibulaire chez son dentiste (praticien no 1), en raison de son âge contre-indiquant la pose d'implants (16 ans). Suite à plusieurs épisodes de perte du bridge, la patiente consulte à nouveau chez son dentiste pour avis implantaire en 2005.

La patiente est non fumeuse et ne souffre d'aucune allergie ou intolérance médicamenteuse, elle est en bonne santé générale. La solution implantaire est choisie par la patiente et son praticien. Le volume osseux maxillaire est satisfaisant pour une implantation mais une greffe osseuse est nécessaire à la mandibule au préalable.

La patiente est adressée à Paris (praticien no 2) pour une prise en charge en vue d'une reconstruction osseuse. Il décide, en accord avec la patiente, de faire une greffe osseuse autogène avec prélèvement pariétal pour reconstruire le défaut osseux vertical mandibulaire. Le bloc osseux est placé en apposition. Une cicatrisation osseuse de 6 mois est préconisée par le praticien no 2 avant la mise en place des implants par le praticien no 1.

Le 8 décembre 2006, les implants sont posés en région 11, 21, 31 et 41. Après quelques mois, un début de perte osseuse à la mandibule est observé par le praticien no 1.

La perte osseuse observée continue jusqu'à la perte des implants 31 et 41 le 4 septembre 2010, suivie par la mise en place d'une prothèse transitoire. Les implants 11 et 21 ne présentent aucun signe de mucosite ou péri-implantite.

La patiente est restée avec une prothèse transitoire amovible depuis cette date.

Elle est adressée chez nous le 20 novembre 2017 pour avis implantaire et greffe osseuse. La situation clinique et radiographique n'est pas favorable pour la pose de deux implants [fig. 1 et 2] :

• pas de gencive kératinisée (ou fixe) ;

• gencive fine ;

• perte osseuse cranio-apicale et vestibulo-linguale ;

• diminution de l'espace coronaire mésio-vestibulaire entre 32 et 42.

Nous proposons ce plan de traitement à la patiente.

1. Greffe épithélio-conjonctive pour améliorer le contexte gingival.

2. Greffe osseuse autogène avec prélèvement rétro-molaire.

3. Pose d'un implant en région 31 ou 41 avec greffe de conjonctif tubérositaire.

4. Aménagement gingival.

5. Réalisation des dents.

Toutes ces interventions sont réalisées sous anesthésie locale au cabinet dentaire.

Greffe épithélio-conjonctive pour améliorer le contexte gingival

La première étape a pour but de recréer une gencive kératinisée, fixe et épaisse en regard de la future greffe et du futur implant. Ceci permettra de diminuer le risque d'exposition de la greffe osseuse et de favoriser un bon taux de succès implantaire.

L'anesthésie locale est infiltrée en vestibulaire et lingual en région 31-41 ainsi qu'au palais en région 24-26 (Alphacaïne® SP, Dentsply Sirona).

Le site receveur en région 31-41 est préparé avant le prélèvement du greffon épithélio-conjonctif. Un patron de la forme du défaut est réalisé à l'aide du paquet de la suture stérile.

Le greffon est prélevé au palais à l'aide d'une lame 15 en épaisseur partielle dans la région de 24 à 26. Il fait environ 1,5 mm d'épaisseur [fig. 3].

Un tissage est réalisé avec un fil résorbable 4/0 dans la plaie palatine, permettant de stabiliser un Coe pack pour éviter les douleurs du site de prélèvement. L'alternative aurait été une plaque palatine.

Une suture 6/0 résorbable est utilisée sur le site receveur [fig. 4]. Après 1 mois de cicatrisation, les tissus mous sont stables [fig. 5].

Greffe osseuse autogène avec prélèvement rétro-molaire

Cette étape est réalisée 1 mois et demi après l'étape précédente.

La patiente est pré-médiquée avec de l'amoxicilline (2 × 1 g par jour pendant 8 jours), de la prednisolone (1 mg/kg par jour pendant 3 jours), du paracétamol (1 g, 30 min avant l'intervention puis en cas de douleurs).

Un greffon osseux rétro-molaire est prélevé avec la Micro-Saw (Dentsply Sirona) selon la technique décrite par Khoury en région 38.

Le greffon est prélevé sous irrigation continue avec une solution saline stérile. Les ostéotomies verticales sont réalisées dans le volume de la ligne oblique externe. L'ostéotomie horizontale rejoint les deux ostéotomies verticales en apical. Des perforations corticales occluso-crestales d'environ 2-3 mm de profondeur sont réalisées entre les deux ostéotomies verticales. Ces perforations sont reliées à l'aide du ciseau à os afin de créer une tension permettant de luxer le bloc.

Une incision crestale est réalisée pour accéder au défaut osseux, associée à une incision sulculaire au niveau de 43-42-32-33 et à une incision de décharge verticale en regard de la 33. Le lambeau est levé de pleine épaisseur [fig. 6 et 7] et un nettoyage des fibres périostée résiduelles est fait à l'aide d'une fraise boule diamantée et d'une rugine.

Le concept biologique de greffe est appliqué en dédoublant le bloc cortical rétro-molaire avec la MicroSaw® (Dentsply Sirona) [] [fig. 8]. Chaque bloc est encore affiné avec une râpe à os (Safescraper®, Meta) pour obtenir des particules d'os riches en ostéoblastes et ostéocytes de qualité []. Les blocs d'os corticaux obtenus sont utilisés pour donner la forme à la greffe et les petites particules osseuses forment le corps de la greffe. Les blocs corticaux affinés jouent alors le rôle d'une membrane biologique.

Un bloc osseux vestibulaire est fixé par 2 vis d'ostéosynthèse de 1 mm de diamètre (Stoma). Un bloc osseux lingual est trans-vissé par une vis d'ostéosynthèse traversant le bloc osseux vestibulaire ainsi que l'os résiduel du site receveur [fig. 9 et 10]. Il n'y a aucune mobilité des blocs osseux en place. Les blocs osseux donnent la forme de la nouvelle crête osseuse et sont placés dans le contour osseux. Les particules osseuses sont foulées entre les lamelles osseuses [fig. 11].

Une incision périostée est réalisée sur toute la longueur du lambeau vestibulaire. Elle permet de diminuer la tension de la suture. Les sites receveur et donneur sont suturés avec un fil 5/0 mono-filament résorbable (Monofast (PGCL) 5/0, Neohm).

Suivi post-opératoire

Immédiatement après la chirurgie, la patiente applique une poche de glace sur la zone traitée (15 min par heure toutes les heures les deux premiers jours). Il est recommandé à la patiente de commencer le bain de bouche à la chlorhexidine 0,12 % 48 heures après l'intervention. La patiente a été suivie en contrôle à 2, 3, 8 et 12 semaines après l'intervention afin de vérifier la cicatrisation. La prothèse amovible transitoire est complètement évidée en vestibulaire et lingual pendant le temps de la cicatrisation osseuse. Une précaution particulière est demandée en raison de la fragilité de la prothèse ainsi évidée. Il est également demandé à la patiente de porter le moins possible la prothèse pendant la phase de cicatrisation (4 mois).

Au contrôle à 2 semaines, la patiente décrit une absence de douleur les 10 premiers jours post-opératoires, puis une rixe avec une personne alcoolisée qui l'a agressée avec un coup au visage. Depuis cette altercation elle présente des douleurs au niveau du site de prélèvement en région 38. Un CBCT est fait afin de vérifier l'absence de fracture du site de prélèvement. Rien n'est visible radiologiquement. Il est conseillé à la patiente de reprendre du paracétamol et un contrôle est reprogrammé une semaine plus tard. À ce moment-là, plus aucune douleur n'est décrite [fig. 12].

Ce CBCT permet de mettre en évidence la distance entre le nerf alvéolaire inférieur et la zone de prélèvement. En effet, si les règles de prélèvement sont respectées, à savoir l'utilisation de la Micro-Saw (Dentply Sirona), la réalisation de perforations occlusales, la luxation du bloc par tension à l'aide du ciseau à os et un prélèvement au sein de la ligne oblique externe, le nerf est bien à distance des traits d'incision.

Pose d'un implant en région 31 ou 41 avec greffe de conjonctif tubérositaire

La mise en place de l'implant est possible 4 mois après la cicatrisation osseuse [fig. 13].

La patiente est pré-médiquée avec de l'amoxicilline (2 × 1 g par jour pendant 8  jours), de la prednisolone (1 mg/kg par jour pendant 3 jours), du paracétamol (1 g, 30 min avant l'intervention puis en cas de douleurs).

L'accès au site se fait par une incision crestale et un lambeau de pleine épaisseur en région 31-41 [fig. 14]. Les 3 vis d'ostéosynthèse sont déposées. Une carotte osseuse est prélevée pour observer la qualité de la cicatrisation [fig. 15].

Un implant Zimmer TSVM (Zimmer Biomet), 3,7 mm de diamètre, 11,5 mm de longueur est positionné en région 31 [fig. 16].

Une greffe de conjonctif enfoui prélevée à la tubérosité est placée dans la région 31-41. Celle-ci a un rôle esthétique pour augmenter le volume des tissus mous et protéger la greffe osseuse sur le long terme [fig. 17].

La suture est faite avec un fil 6/0 monofilament résorbable (Monofast (PGCL) 6/0, NEOHM).

Une cicatrisation de 3 mois est respectée avant l'aménagement gingival.

Aménagement gingival

L'aménagement gingival consiste en une dés-épithélialisation de la gencive supra-implantaire. Le conjonctif supra-implantaire est poussé en position 41. Une vis de cicatrisation du commerce est utilisée chez cette patiente [fig. 18 et 19]. Un temps de cicatrisation de 2 semaines est nécessaire avant la prise d'empreinte [fig. 20].

Réalisation des dents

Une empreinte est réalisée à l'Impregum (empreinte polyéther) à la mandibule avec une technique d'empreinte ouverte. Une empreinte de l'antagoniste est réalisée à l'alginate. Le laboratoire (Laboratoire Lebrun, Biesheim) a réalisé une dent sur l'implant en région 31 avec une extension en 41 [fig. 21]. La prothèse supra-implantaire est réalisée sur un pilier zircone avec embase titane. La gencive est légèrement ischémique au moment de la pose de la prothèse en raison de l'absence d'utilisation d'une dent provisoire [fig. 22 et 23]. La patiente est revue en contrôle à 2 semaines puis tous les 6 mois [fig. 24 et 25].

Discussion

Gestion des tissus mous

Une gencive kératinisée/fixe et de bonne qualité est nécessaire autour des implants afin d'améliorer le taux de succès implantaire. En 2018, Thomas[] conclut, dans une méta-analyse portant sur les effets des procédures d'augmentation des tissus mous sur la survie de l'os péri-implantaire, que les augmentations des tissus mous favorisent une meilleure santé implantaire. Il ajoute que l'augmentation de gencive kératinisée par greffe autogène apporte un meilleur indice de saignement et une meilleure préservation de l'os marginal des implants. Il décrit également que le gain d'épaisseur de gencive fixe à l'aide de greffon autogène apporte une meilleure stabilité de l'os marginal péri-implantaire.

La question se pose alors de savoir à quel moment du plan de traitement faire ces greffes de tissus mous. Kadkhodazadeh[] s'est posé la question en 2017. Il en ressort que la largeur et l'épaisseur de tissu kératinisé, la nécessité d'aménagement osseux ainsi que les facteurs de risques locaux déterminent la date la plus appropriée pour la greffe des tissus mous. Dans le cas de cette patiente, l'absence complète de gencive kératinisée rendait la procédure d'augmentation osseuse inenvisageable sans une greffe épithélio-conjonctive au préalable. La greffe de conjonctif enfoui était nécessaire afin d'améliorer le résultat esthétique final pour augmenter le volume des tissus péri-implantaires. Elle était également utile pour améliorer le taux de succès implantaire.

Dans une revue systématique réalisée par Esposito[], il est décrit que la greffe de tissus mous autogènes au niveau des sites d'implantation est efficace pour augmenter l'épaisseur gingivale et, de ce fait, le taux de succès implantaire. Les techniques de reconstruction de la muqueuse kératinisée à l'aide d'autogreffe ou d'une matrice collagénique d'origine animale permettent d'améliorer le taux de succès implantaire en augmentant la qualité de la gencive kératinisée/fixe, mais le résultat esthétique n'est pas optimal. Il faut donc à la fois de la gencive kératinisée/fixe et un volume de tissu conjonctif suffisant pour obtenir un résultat esthétique et stable dans le temps.

L'alternative à la greffe épithélio-conjonctive est la matrice collagénique. D'après McGuire[], cette solution semble être un bon substitut à la greffe gingivale libre. Cependant, le recul clinique et bibliographique reste faible.

Gestion du tissu osseux

La greffe osseuse d'apposition d'un os cortical telle que la décrit Cordaro[] présente un taux de résorption variant de 23,5 à 42 %. Ceci est la conséquence de la technique utilisée, de la même manière que pour la patiente décrite ci-dessus. L'apposition d'un bloc osseux très cortical comme le ramus ou un greffon pariétal va difficilement être revascularisé. Ce manque de revascularisation entraîne inévitablement la résorption à moyen puis à long terme du greffon et donc la perte des implants qui sont associés.

Le concept biologique de greffe osseuse décrit par Khoury[] est fondé sur la création d'un coffrage par les blocs osseux pour y placer de l'os particulaire. Ce concept permet une meilleure régénération comparée à l'utilisation de blocs corticaux en onlay. Une étude clinique décrivant les résultats de 132 patients traités par une reconstruction en 3D entre les années 1995 et 2000 a montré un taux de complications réduit[]. Au total, deux complications ont été observées : une exposition de la greffe et une régénération incomplète avec migration de tissu conjonctif dans la zone greffée. Une bonne cicatrisation de la plaie muqueuse et osseuse a pu être observée chez tous les autres patients et a permis d'insérer 237 implants. À l'aide de cette technique, la moyenne du gain osseux vertical obtenue est de 7,2 mm. Ce faible taux de complications est en partie lié à une bonne gestion des tissus mous.

D'autres techniques sont décrites dans la littérature pour les greffes verticales mandibulaires :

• l'os allogénique en bloc[] ;

• les membranes e-PTFE[] ;

• les Ti-Mesh[,] ;

• la distraction ostéogénique[].

L'utilisation de bloc d'os allogénique (Allogenic Bone Block - ABB) pourrait être une alternative à l'os autogène. Cependant, l'étude de Draenert démontre que l'os allogénique en bloc est déconseillé pour les greffes osseuses verticales[]. En effet, il décrit une perte osseuse verticale moyenne supérieure à 30 % de la longueur des implants. Cette étude a été interrompue après seulement 6 cas en raison du nombre important d'échecs (5 sur 6, 83 %). Trois types de résultats non satisfaisants sont observés. Type 1 : perte précoce complète de l'os greffé après 3 à 8 semaines (n = 2). Type 2 : diminution précoce de la gencive attachée, sans exposition de la greffe, avec perte osseuse ou péri-implantite après la mise en charge prothétique (6 à 8 mois après la greffe ; n = 2). Type 3 : pas de complications pendant la cicatrisation osseuse mais péri-implantite après la mise en charge prothétique (après 6 mois ; n = 1). Un taux de complication élevé est décrit dans différentes études avec des blocs d'os allogénique[,,].

Les auteurs s'accordent à dire que les greffes verticales de plus de 4 mm doivent être constituées d'au moins 50 % d'os autogène particulaire[,]. Les techniques de stabilisation diffèrent selon les auteurs. Urban décrit une technique pour les greffes osseuses verticales avec des membranes e-PTFE[]. L'os autogène est prélevé à la mandibule, broyé dans un moulin à os et appliqué sur le défaut. La greffe est alors immobilisée et recouverte avec une membrane e-PTFE, stabilisée avec des pins en titane. Urban décrit dans cette étude un taux de complication de 2,78 %. Il est significativement moins important que celui décrit par d'autres auteurs[-]. Ces études rapportent un taux d'expositions des membranes ou d'infections allant de 12,5 à 18,4 %.

L'association d'os autogène avec une Titanium Mesh pour les greffes verticales d'au moins 4 mm a été décrite[,]. Les Ti-Mesh sont utilisées pour stabiliser et protéger la greffe. Roccuzo compare un groupe test avec une Ti-Mesh à un groupe contrôle avec uniquement de l'os autogène en bloc. Sur les sites tests, une exposition de la Ti-Mesh est décrite chez 4 patients sur 12. Dans un de ces 4 cas, une fermeture spontanée a eu lieu. Dans les autres, la déhiscence des tissus mous a augmenté et la Ti-Mesh a dû être retirée prématurément. À la réouverture, la greffe était bien incorporée à l'os natif dans les 12 cas. Dans le groupe contrôle, une résorption importante est observée (> 50 %) dans 2 cas. Au niveau des sites test (Ti-Mesh), une résorption moyenne de 13,5 % de la greffe est observée contre 34,5 % au niveau des sites contrôles. Dans cette étude, les blocs osseux ne sont pas affinés et sont directement fixés en onlay sur le site receveur. La nature extrêmement corticale des blocs osseux explique cette résorption. De plus, l'utilisation d'une Ti-Mesh dans un espace étroit tel qu'il est chez notre patiente reste techniquement compliquée. Le risque d'exposition contre indique l'utilisation de cette technique.

La distraction ostéogénique (DO) est une autre méthode utilisée pour corriger les défauts osseux verticaux. Elle a été décrite par différents auteurs tels que Block, Chin, Jensen ou Esposito[-]. La DO est difficile à mettre en œuvre pour des petits défauts en raison du faible espace disponible et de l'encombrement du distracteur. De plus, un contrôle très strict doit être fait avec le patient pour éviter une inclinaison du fragment distracté.

Dans une revue systématique, Esposito tente de trouver quelle technique est la plus reproductible dans les cas de greffes verticales. Il conclut que différentes procédures permettent l'augmentation osseuse verticale mais qu'aucune n'est plus efficace que l'autre. La technique doit surtout être maîtrisée par le praticien pour assurer un bon résultat[].

Simion a réalisé une étude sur l'évaluation à long terme des implants dentaires mis en place lors de la greffe osseuse verticale, dans laquelle il a séparé les patients en 3 groupes[]. Dans le groupe A (6 patients), il a utilisé une membrane e-PTFE seule pour protéger le caillot sanguin ; dans le groupe B (11 patients), une membrane e-PTFE associée avec une allogreffe ; dans le groupe C (32 patients), une membrane e-PTFE associée avec de l'os autogène. Le suivi varie de 18 à 69 mois. D'après Simion, la comparaison des trois techniques est impossible en raison du faible nombre de patients dans les groupes A et B. Cependant, dans les groupes A et B, un gain vertical de 4 mm n'a jamais été observé alors que, dans le groupe C (avec os autogène), il a été possible de recréer une hauteur de plus de 8 mm. Dans cette étude, une seule perte d'implant a été observée lors du second temps chirurgical et seulement deux implants ont perdu 3,5 mm d'os crestal à 1 an (groupe B). Ils concluent, en accord avec ces données, que les résultats sont similaires à ceux des implants placés dans une greffe osseuse latérale ou dans de l'os natif[-].

Un ou deux implants ?

Avec les implants étroits mis à notre disposition sur le marché, la question de poser 1 ou 2 implants dans des espaces réduits existe. L'espace inter-implantaire et celui entre une dent et un implant doivent rester la clé du positionnement tridimensionnel de l'implant. En cas de remplacement implantaire de 2 incisives mandibulaires ou de 2 incisives centrale et latérale maxillaires contiguës, il peut être intéressant de poser un seul implant et de réaliser une supra-structure avec extension cantilever. L'implant doit alors être placé dans la position d'une des deux dents à remplacer et non en position centrale pour faciliter l'hygiène et éviter l'effet « palmier ». Ceci a été prouvé avec un excellent taux de survie des implants supportant un cantilever dans cette situation par He[].

Conclusion 

Le prélèvement osseux autogène rétro-molaire et le prélèvement autogène de tissus mous (conjonctif à la tubérosité ou épithélio-conjonctif au palais) permettent d'obtenir des résultats stables et reproductibles. La greffe osseuse autogène apporte d'excellents résultats lorsqu'elle est réalisée selon le concept de Khoury. Ces techniques présentent néanmoins l'inconvénient de créer un second site opératoire pour les patients. Cependant, l'absence de douleur et la reproductibilité des résultats nous encouragent à utiliser les techniques autogènes sur des défauts importants.

Auteur

P.O. SAGE

Diplômé de la faculté de Strasbourg

Ancien collaborateur du Dr Pierre Keller (Strasbourg – Kehl)

D.U. d'implantologie université de Strasbourg

C.E.S. de prothèse fixée université de Nancy

D.U. de chirurgie pré- et péri-implantaire Université de Paris

Attaché au service de chirurgie dentaire de la Faculté de Strasbourg

Exercice limité en chirurgie et implantologie à Colmar

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