8e congrès de l'European Association for Osseointegration - Implant n° 4 du 01/11/1999
 

Implant n° 4 du 01/11/1999

 

Implant a suivi

Xavier Assémat-Tessandier  

Rédacteur en chef

L'événement européen de l'implantologie s'est déroulé cette année à Copenhague avec une participation record de 800 congressistes. Cette 8e édition du congrès de l' European Association for Osseointegration avait pour thème les surfaces implantaires le premier jour et les implants pour la restauration des édentements unitaires le deuxième jour. Cette première partie résume les interventions de la première journée, la deuxième partie paraîtra dans le prochain numéro.

Première session : l'interface os/implant, présidée par T. Albrektsson (Suède) et D. Buser (Suisse)

Surfaces implantaires et facteurs de promotion osseuse utilisés en chirurgie orthopédique (S. Overgaard, Danemark)

Le succès des prothèses orthopédiques implantaires non scellées semble reposer sur la fixation précoce de l'implant dans l'os. Cette dernière est obtenue lors de la mise en place de l'implant par l'ajustage initial en pression, suivie par la croissance osseuse. La croissance osseuse autour d'un implant orthopédique dépend de plusieurs facteurs qui peuvent être classés en quatre groupes principaux :

- les facteurs liés à l'implant (aspects chimiques et topologiques de la surface implantaire, forme de l'implant, etc.) ;

- les conditions mécaniques (stabilité et conditions de charge) ;

- la cicatrisation de l'os et sa capacité de remodelage (quantité d'os, médicaments, dysfonction métabolique, etc.) ;

- les facteurs de stimulation osseuse (facteurs de croissance, matériau de greffe osseuse, revêtements d'hydoxyapatite, etc.).

En résumé, la surface de l'implant (poreuse contre sablée), les revêtements d'hydroxyapatite et la présence de micro-mouvements (150-500 µm) influencent significativement la croissance osseuse. Qui plus est, il est démontré que la fixation de l'implant orthopédique et la croissance osseuse sont influencées par les greffes osseuses alloplastiques et les substituts osseux, seuls ou combinés avec des facteurs de croissance osseuse (TGF-ß et BMP-7). De plus, la situation de contrôle est différente de la situation primaire en ce qui concerne la capacité de cicatrisation, à la fois avec et sans les facteurs de croissance.

Interactions entre la modification des surfaces implantaires en titane et les tissus (P. Thomsen, Suède)

Le but des études présentées est de déterminer les mécanismes d'interaction des surfaces implantaires sur les tissus de façon à optimiser les nouveaux matériaux implantaires pour une utilisation clinique. Leur approche consiste à utiliser in vitro et in vivo des implants présentant des propriétés de surface, caractéristiques et modifiées. Les études dans les tissus mous montrent que la modification chimique des surfaces entraîne une altération des réponses inflammatoires spécifiques autour des implants. Les études dans l'os indiquent que la présence d'une épaisseur d'oxyde accrue ou une augmentation de la rugosité sur une échelle submicrométrique sont des propriétés de surface intéressantes pour l'obtention d'une réponse osseuse rapide. En résumé, sans tenir compte des modifications de surface, un degré de contact élevé entre le titane et l'os mature a été observé dans les études expérimentales à long terme. Dans les travaux de recherche sur l'homme, le processus d'échec observé est plurifactoriel et n'est pas lié seulement aux propriétés de surface du matériau. Les études révèlent que les modifications des surfaces d'implants ont une influence majeure sur les réactions inflammatoires précoces alors que d'autres facteurs ont une influence majeure dans la cicatrisation des tissus et les réactions d'échecs.

La surface des implants influence-t-elle la différentiation et la prolifération cellulaire ? (J. E. Davies, Canada)

L'ostéogénèse de contact montre qu'in vitro, les cellules osseuses suivent l'orientation de la surface au contact de laquelle elles se trouvent. D'autre part, l'os est en remaniement constant sous l'action des ostéoclastes qui détruisent l'os et des ostéoblastes qui le remplacent. L'intégration des implants endo-osseux dépend de trois phénomènes distincts :

- l'ostéoconduction ;

- la formation osseuse ;

- le remodelage osseux.

L'ostéoconduction est représentée par la migration des cellules ostéogéniques. Ce phénomène se déroule différemment in vitro et in vivo : in vitro, les cellules sont déposées au contact de l'implant ; in vivo, les cellules doivent franchir le caillot sanguin, ce qui prend deux à trois jours. Les cellules migrent de façon imparfaite si la surface implantaire est lisse, car la fibrine du caillot n'est pas liée à la surface de l'implant et les cellules ne peuvent l'atteindre. Lorsque la surface est granuleuse, la fibrine est attachée à la surface de l'implant et les cellules osseuses migrent à son contact. La surface implantaire est donc importante pour la conduction osseuse, mais n'a pas d'effet sur la différentiation cellulaire. La différentiation cellulaire est un phénomène normal, dû à la spécialisation des cellules. Il est indépendant de l'état de surface de l'implant.

Est-ce que la modification chimique de la surface implantaire influence la réponse osseuse ? (J. E. Ellingsen, Norvège)

Parmi tous les matériaux qui ont été utilisés comme matériau implantaire, un petit nombre a montré une réponse favorable sur les tissus vivants. Ces matériaux ont généralement une surface dont l'activité chimique est proche de celle de l'apatite dans l'os. Ce groupe de matériaux comprend principalement des matériaux contenant du Ca-PO4, mais aussi certains matériaux formant une couche d'oxyde. Les matériaux contenant du Ca-PO4 présentent en général une faible résistance mécanique et ne sont pas utilisables pour réaliser des implants dentaires et sont, par conséquent, seulement employés comme revêtements sur d'autres matériaux supports. Les métaux, en particulier le titane, forment une couche d'oxyde de surface qui présente une similitude avec le comportement chimique de surface de l'hydroxyapatite. C'est probablement la raison du succès du titane comme matériau implantaire. La présence de dioxyde de titane donne au titane la capacité d'induire la précipitation de cristaux de phosphate de calcium à la surface de l'implant, ce qui ne peut se produire en l'absence d'oxyde. L'activité chimique de la surface du dioxyde de titane peut être modifiée et en fonction de la manipulation : il est possible non seulement de compromettre, mais également de favoriser la réponse de l'os. Le fluorure a une activité de promotion osseuse expérimentalement reconnue. Par l'incorporation d'ions fluorures dans la couche d'oxyde de titane, il a été possible d'augmenter de façon significative la rétention des implants, même en les comparant à des implants à surface rugueuse. Cette amélioration repose probablement sur une réaction chimique entre l'oxyde fluoré et l'os, et non sur une liaison mécanique.

Deuxième session : la rugosité de surface, présidée par D. van Steenberghe (Belgique) et P. Thomsen (Suède)

La surface idéale pour les implants oraux (T. Albrektsson, Suède)

De très nombreuses études expérimentales sur des surfaces implantaires, prétendument rugueuses, présentent des résultats difficilement contrôlables dans la mesure où la rugosité de surface n'est pas correctement décrite. Les mesures mécaniques prises par contact à l'aide de profilomètres ne sont pas adaptées à l'évaluation des implants présentant un filetage. Une autre erreur, fréquente dans l'évaluation de la rugosité de surface des implants, provient de l'interprétation des études animales : les résultats expérimentaux des travaux de Wennerberg (PhD thesis, Université de Göteborg, 1996) sur la meilleure réponse osseuse obtenue pour une rugosité de surface de Sa 1,5 µm, ont été immédiatement interprétés comme la preuve qu'une telle rugosité de surface pour des implants était la solution optimale en clinique. En réalité, il n'est pas évident qu'une réponse osseuse favorable chez l'animal dans une étude à court terme entraîne obligatoirement le succès clinique d'implants intra-oraux. On peut même soutenir qu'il en est tout autrement : les travaux d'Ivanoff (PhD thesis, Université de Göteborg, 1999), ayant montré que certains implants apportaient une réponse osseuse très favorable expérimentalement, ont paradoxalement présenté le plus mauvais comportement par rapport au groupe de contrôle dans les études cliniques. De plus, les implants présentant une rugosité de surface importante ont été associés avec une formation accrue de plaque. Or, la plaque microbienne a été reconnue « comme un facteur important pour l'initiation de l'inflammation péri-impantaire pouvant entraîner la destruction de l'os autour de l'implant » (Proceedings of the 1st European Workshop on Periodontology, Lang & Karring, Eds. Quintessence, 1994). Ainsi, il a été montré que 2,8 % des implants présentant une surface lisse (Sa 0,5 µm) présentent une péri-implantite, alors que 48,8 % des implants avec une surface rugueuse (Sa 2 µm) développent le phénomène (Esposito, Eur J Oral Science, 1998).

La rugosité de surface des implants influence-t-elle leur fixation ? (J. A. Jansen, Pays-Bas)

Les implants maxillaires présentent des taux de succès cliniques moins satisfaisants que les implants symphysaires mandibulaires. Un des éléments critiques qui influence la stabilité des implants sur le long terme est le matériau utilisé pour leur fabrication. Sous cet aspect, il est nécessaire de différencier les propriétés physico-chimiques et géométriques de la surface du matériau implantaire. De nombreuses études in vitro et in vivo ont déjà apporté la preuve que l'ancrage de l'implant dans l'os pouvait être amélioré par l'application d'un revêtement de phosphate de calcium ou par la création de micro-rugosités à la surface de l'implant. D'autre part, nous devons souligner que tous ces rapports favorables sur les effets bénéfiques de ces deux paramètres d'état de surface implantaire amènent à se poser un certain nombre de questions. Par exemple, très fréquemment, les propriétés chimiques et de rugosité des implants utilisés sont confondus dans la structure de l'étude. Il est par conséquent très difficile d'interpréter de façon aussi catégorique qu'on le souhaiterait le résultat final d'une étude.

La rugosité de surface des implants influence-t-elle la santé des tissus mous ? (M. Quirynen, Belgique)

La surcharge occlusale et la péri-implantite sont les deux causes principales d'échec des implants après une ostéointégration initiale. Pour la péri-implantite, la présence de germes pathogènes est une condition sine qua non. Des études sur la formation in vivo de la plaque ont clairement démontré la corrélation positive entre le taux de croissance et l'ensemble, entre la rugosité de surface et l'énergie libre de surface. L'impact de la rugosité de surface devient significatif au dessus d'un niveau de Ra de 0,2 µm. Ceci est particulièrement vrai pour la zone supragingivale et seulement à un moindre degré pour l'environnement subgingival pour lequel l'adhésion à la surface est seulement l'un des cinq facteurs de développement des bactéries. La surface de la plupart des systèmes implantaires présente une rugosité qui s'étend du rugueux au très rugueux pour la partie endo-osseuse et parfois rugueuse pour la partie transgingivale. De plus, la faible dureté de la plupart des matériaux utilisés fait que ceux-ci deviennent de plus en plus rugueux au cours du temps par le nettoyage mécanique et/ou professionnel ou par l'utilisation d'agents de prophylaxie acides. Cette augmentation de rugosité aboutit à la formation et à la maturation plus rapide de plaque et peut augmenter la fréquence de la péri-implantite. D'autre part, une surface complètement lisse (Ra en dessous de 0,2 µm) entraîne une migration apicale de l'attache muqueuse.

Outils diagnostiques et soins d'entretien autour des implants à surface rugueuse (N. P. Lang, Suisse)

Les surfaces dures, non érodables, y compris le titane, provoquent la formation d'un biofilm lorsqu'elles sont placés dans un système de fluides. Le dépôt d'une couche de protéine, suivi de la colonisation de cette pellicule par les bactéries se déroule selon le même schéma au niveau des implants oraux qu'au niveau des dents naturelles. La configuration de la surface des implants joue un rôle mineur dans l'augmentation du volume de la plaque. En réaction à la formation du biofilm, les tissus mous péri-implantaires développent une réponse caractérisée par les signes cliniques suivants : rougeurs, saignement au sondage et parfois, une hyperplasie. Histologiquement, un infiltrat inflammatoire se développe et s'étend apicalement à la muqueuse marginale. Très souvent, ces réactions physiologiques à l'accumulation de la plaque restent localisées, même lorsqu'une mucosite se développe. Cependant, la réponse de l'hôte peut atteindre l'os environnant l'implant, entraînant une péri-implantite. Cliniquement, ceci se caractérise par l'augmentation de la profondeur de sondage et la perte d'attache, accompagnée de la perte osseuse radiographique et des signes cliniques de l'inflammation. En fonction du diagnostic continu des tissus péri-implantaires selon des paramètres parodontaux, un programme de soins est proposé avec des dispositifs mécaniques, un contrôle antiseptique et antibiotique de l'infection péri-implantaire. A la suite de l'élimination réussie de l'infection, la perte de l'os péri-implantaire peut être palliée par des techniques de régénération tissulaire guidée.

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