Traitement unitaire post-traumatique de la perte d'une incisive centrale supérieure chez l'adolescent - Implant n° 1 du 01/03/2000
 

Implant n° 1 du 01/03/2000

 

Dossier clinique

Christian Chavrier *   Christophe Médard **  


*DSO, DEO, MCU-PH
Chef de l'Unité fonctionnelle d'implantologie
Responsable du Diplôme universitaire de chirurgie et prothèse implantaire
**Docteur en chirurgie dentaire
Assistant des universités
Université Claude-Bernard (Lyon 1)
rue Guillaume-Paradin
69372 Lyon Cedex 08

La perte traumatique d'une dent du secteur antérieur chez l'enfant est fréquente et associée à une perte osseuse importante. L'utilisation de greffe osseuse d'apposition d'origine mentonnière permet non seulement de récupérer un volume osseux satisfaisant, mais aussi de positionner l'implant dans le couloir prothétique. La gestion des tissus mous se fait grâce à la dent provisoire. L'utilisation d'un noyau dur en céramique pour la réalisation de la prothèse d'usage offre un rendu esthétique très satisfaisant.

Chez l'enfant, la perte d'une incisive du secteur antéro-supérieur consécutivement à un traumatisme est relativement fréquente. Le praticien est souvent démuni face à un tel incident. En effet, la croissance osseuse n'étant pas terminée, il est impossible de poser un implant. Les réhabilitations prothétiques provisoires mobiles constituent dès lors la seule alternative envisageable. Ces prothèses n'enrayeront pas la résorption osseuse qui, à l'âge adulte, peut atteindre de telles proportions qu'elle empêchera toute solution implantaire. Les progrès des techniques chirurgicales et des composants prothétiques ont permis de traiter intégralement ces patients avec des résultats esthétiques et fonctionnels de qualité.

Présentation du cas

Il s'agit d'un jeune patient de 19 ans. A l'âge de 11 ans, à la suite d'un accident de cheval, il a perdu son incisive supérieure droite [11]. D'après les photographies antérieures à l'accident et l'étude clinique, le patient présentait un diastème interincisif interdisant tout type de traitement par prothèse fixe, à l'exception d'une prothèse implanto-portée (Fig.1). Par contre, l'examen tomodensitométrique montre une crête excessivement mince, contre-indiquant la pose d'un implant (Fig.2). Après discussion avec le patient, le plan de traitement suivant lui est proposé :

- augmentation du volume de la crête osseuse à l'aide d'une greffe d'os autogène d'origine mentonnière ;

- au bout de quatre mois, mise en place d'un implant endo-osseux à insertion verticale type Frialit®-2 vissé ;

- après une période d'ostéointégration de six mois ; mise en place d'une vis de cicatrisation et mise en condition des tissus mous péri-implantaires à l'aide d'une réhabilitation prothétique provisoire;

- après huit semaines, lorsque les tissus mous sont conditionnés, la réhabilitation prothétique définitive est réalisée.

Etapes thérapeutiques

Augmentation du volume de la crête osseuse

Une greffe osseuse d'os cortico-spongieux est prélevée dans la symphyse mentonnière, du côté droit (Fig. 3) et transfixée en épaisseur au niveau de la table osseuse externe de l'os alvéolaire en lieu et place de la 11 (Fig.4)) [1, 2]. Le greffon est laissé seulement quatre mois pour éviter tout risque de résorption antéro-postérieure. Un scanner de contrôle montre le gain osseux obtenu (Fig.5) à l'issue de cette période.

Mise en place de l'implant

Un implant vissé de type Frialit®-2 de 13 mm de longueur et de 3,8 mm de diamètre est mis en place et laissé en nourrice six mois. La mise en fonction est alors réalisée (Fig. 6).

Mise en condition des tissus mous péri-implantaires

Le pilier de cicatrisation est enlevé (Fig. 7). Une empreinte est prise (Fig. 8) afin de réaliser au laboratoire une dent provisoire sur une préforme de type Protect® (Fig. 9). Lors de la pose, le surplus gingival est éliminé de manière à l'adapter au contour cervical idéal de la dent provisoire (Fig.10). Cette dernière sera laissée en place huit semaines afin de mettre en condition le tissu gingival péri-implantaire (Fig. 11 et 12).

Réhabilitation prothétique d'usage

Une empreinte du site implantaire et des tissus mous est réalisée à l'aide d'un polyéther. Une céramique, directement cuite sur un moignon dur de type Cerabase® (Fig. 13), est confectionnée, puis collée au laboratoire sur son support titane avec du Super Bond® (Fig. 14 et 15) et vissée en bouche (Fig. 16 et 17).

Discussion

Une restauration par traitement implantaire, notamment du secteur antérieur, ne sera réussie que si elle apporte satisfaction tant sur le plan fonctionnel qu'esthétique. Le résultat dépendra de quatre facteurs :

- la chirurgie d'augmentation préimplantaire ;

- le positionnement idéal de l'implant ;

- l'aménagement des tissus péri-implantaires ;

- la qualité de la restauration prothétique.

Chirurgie d'augmentation préimplantaire et positionnement idéal de l'implant

Ce cas clinique, rencontré fréquemment chez les adolescents, démontre à l'évidence l'intérêt des greffes autogènes mentonnières dans le traitement des crêtes minces. Celles-ci donnent des résultats fiables et rapides qui assureront la pérennité de l'ostéointégration. D'autre part, sur le plan volumétrique, elles présentent par rapport aux techniques de régénération osseuse guidée l'avantage d'obtenir un gain osseux important et stable dans un temps court [3, 4]. Ce nouveau volume disponible permet de placer l'implant dans une position idéale et ainsi de réaliser une prothèse unitaire vissée dans l'implant. L'expérience a montré que, chez l'adolescent, la période de prise de la greffe ne doit pas dépasser quatre mois pour éviter tout risque de résorption du greffon. Par contre, à un âge avancé, le greffon est laissé plus longtemps (4-6 mois).

Aménagement des tissus péri-implantaires

Il contribue considérablement à l'esthétique finale. Cet aménagement tissulaire peut se faire de différentes manières, mais la plus courante reste la prothèse provisoire grâce à laquelle une gencive péri-implantaire identique à la gencive péri-dentaire de la dent adjacente peut être obtenue [5-7]. L'utilisation de préformes adaptées permet de réaliser au laboratoire la dent provisoire au contour cervical idéal. Le praticien adaptera la gencive à la dent provisoire lors de la pose pour obtenir un résultat satisfaisant. Cette adaptation s'effectuera soit au bistouri soit à l'aide d'une fraise rotative diamantée. Un temps de cicatrisation de huit semaines est nécessaire pour atteindre un résultat stable et réaliser la restauration prothétique dans le respect de l'environnement tissulaire.

Qualité de la restauration prothétique

L'apparition sur le marché de noyaux durs en céramique alumineuse rend possible les restaurations tout en céramique avec tous les avantages que cela comporte : parfaite biocompatibilité, translucidité idéale de la restauration, particulièrement au niveau cervical, aspect naturel de la prothèse d'usage. Dans le cas présent, le positionnement idéal de l'implant grâce à la greffe osseuse a permis de monter directement la céramique sur le noyau du Cerabase® et de réaliser une prothèse vissée. Lorsque le positionnement de l'implant est moins bon, le noyau dur est utilisé comme inlay-core et une couronne en céramique est scellée dessus.

ADRESSE DES DISTRIBUTEURS

FRIALIT-2® - CERABASE® - PROTECT® - FRIADENT FRANCE - Route de Montereau, BP 106, Darvault, 77793 Nemours Cedex. Tél. : 01 60 55 55 45. Fax : 01 60 55 55 49

SUPER BOND® - GÉNÉRIQUE INTERNATIONAL - 15, avenue Joyeuse, 94340 Joinville le Pont. Tél. : 01 49 76 09 77. Fax : 01 49 76 09 78

BIBLIOGRAPHIE

  • 1. Misch CM, Misch CE, Resnik RR, Ismail YH. Reconstruction of maxillary alveolar defects with mandibular symphysis grafts for dental implants: a preliminary procedural report. Int J Oral Maxillofac Implants 1992;7:360-366.
  • 2. Chavrier C. Autogenous mandibular chin grafts in the treatment of thin alveolar ridges. Implant Dentistry 1995;4(2):118 (abst).
  • 3. Chavrier C. Les greffes osseuses d'origine mentonnière dans le traitement des crêtes minces. Rev Stomatol Chir Maxillofac 1997;98(suppl. 1):8-9.
  • 4. Buser D, Brägger U, Lang NP, Nyman S. Regeneration and enlargement of jaw bone using guided tissue regeneration. Clin Oral Implant Res 1990;1:22-32.
  • 5. Touati B. Improving aesthetics of implant-supported restorations. The Implant Report 1995;7(9):81-93.
  • 6. Gamber D, Salama M. The aesthetic smile diagnosis and treatment. Periodontology 2000 1996;11:98-128.
  • 7. Chavrier C. Greffe conjonctive enfouie et implantologie : présentation d'un cas clinique. J Parodontol 1992;11(3):313-318.