Chirurgie
DDS, MDS, PhD
Clinique Brånemark, Service dentaire publique faculté d'Odontologie,
Université de Göteborg, Göteborg, Suède
Les résultats remarquables obtenus à court et long terme avec les implants en titane du système Brånemark ont fait l'objet de nombreuses publications. Au cours des années, ce système implantaire a été associé à une recherche continuelle et a connu un essor particulier avec l'introduction de nouveaux composants et de nouveaux concepts. Fondé sur l'expérience de son auteur, cet article décrit les diamètres du dernier foret actuellement recommandé et la durée de cicatrisation préconisée lorsque l'on utilise des implants vissés usinés de diamètres et de conFigurations variables dans des régions du maxillaire présentant des densités osseuses différentes. Les publications d'études expérimentales et cliniques ont montré que les implants placés dans un os de faible densité présentaient une stabilité et une histomorphométrie identiques à celles des implants placés dans un os plus dense, mais au bout d'une période de cicatrisation plus longue. De ce fait, en ce qui concerne la mise en place d'implants dans de l'os maxillaire peu dense, nous ferons valoir l'utilité d'une technique adaptée à la préparation du site implantaire afin d'obtenir la meilleure stabilité primaire possible et la nécessité d'un temps de cicatrisation plus long afin d'obtenir la meilleure stabilité secondaire possible. En ce qui concerne la mise en place d'implants dans de l'os mandibulaire dense, une approche différente est présentée. Dans ce cas, il y a suffisamment de données scientifiques pour étayer le concept de la mise en charge précoce ou immédiate.
The excellent short- and long-term treatment results of the Brånemark System™ titanium implants have been presented in numerous reports. Over the years this implant system has been associated with continuous research and development with the introduction of new components and concepts. Based on the experience of the author, the current article describes the recommended final twist drill diameters and duration of healing when using machined screw-shaped implants of various diameters and designs in jaw regions of different bone qualities. Laboratory and clinical reports have shown that implants in bone of poor texture exhibit similar histomorphometry and stability as those placed in bone of a more dense texture, but first after an extended healing. Thus, with regard to implant placement in soft bone of maxillae, the utility of an adapted bone site preparation technique to obtain the best primary implant stability possible, and extended healing periods to obtain the best secondary stability possible, are emphasized. With regard to implant placement in the dense bone of mandibles, a different approach is discussed. Here, sufficient scientific data support the concept of early or immediate loading.
Une série d'études multicentriques prospectives a permis de démontrer l'excellence et le pronostic à long terme du traitement implantaire selon Brånemark [1-5]. Bien que les résultats obtenus avec l'implant standard de 3,75 mm de diamètre [6, 7] soient prédominants dans la plupart des publications, des implants plus récents (c'est-à-dire les implants de 4 et 5 mm de diamètre, les implants autotaraudants Mk II et les implants WP) ont également été évalués [8-13]. Parallèlement à l'arrivée de nouvelles conFigurations, des modifications successives ont été apportées aux protocoles de traitement afin d'adapter la technique de préparation du site osseux aux caractéristiques de l'implant utilisé. Ainsi, différents diamètres de forets (Nobel Biocare), en rapport avec les différents diamètres implantaires, ont été recommandés avec pour objectif d'assurer à l'implant la meilleure stabilité primaire possible. En revanche, peu d'efforts ont été réalisés pour guider le clinicien lorsqu'il place des implants dans de l'os de faible densité, et la nécessité d'établir des protocoles plus adaptés est à l'ordre du jour
En plus des données obtenues à partir de radiographies préopératoires, 3 signes cliniques majeurs sont à prendre en compte pour évaluer l'instabilité d'un implant placé dans un os de faible densité lors de la pose de celui-ci [14] :
- en dépit d'un faible couple de vissage sélectionné (20 Ncm), l'os peut ne pas offrir une résistance suffisante pour engendrer un arrêt automatique du moteur lorsque l'implant a atteint sa position définitive. Un tel implant peut être conservé dans le site osseux, bien qu'un temps de cicatrisation allongé de 1 à 2 mois soit conseillé, c'est-à-dire 4 à 5 mois à la mandibule et 8 mois au maxillaire ;
- lors du serrage de la vis de couverture, la force exercée par le tournevis manuel peut s'avérer suffisante pour mobiliser également l'implant, indiquant ainsi la présence d'une mobilité en rotation. Un tel implant peut alors être conservé dans le site osseux, bien qu'un temps de cicatrisation allongé de 2 à 3 mois soit conseillé, c'est-à-dire 5 à 6 mois à la mandibule et 9 mois au maxillaire ;
- une fois l'implant inséré, il peut être mobilisé horizontalement ou verticalement, ce qui indique la présence d'une mobilité totale. Il doit alors être déposé et remplacé, de préférence, par un implant plus large. Après la dépose de l'implant, une autre solution peut être mise en œuvre : elle consiste à utiliser une pince gouge pour récupérer des copeaux d'os afin de les compacter le long des parois du site, permettant ainsi de réinsérer l'implant initialement utilisé et de rencontrer une plus grande résistance. Un tel implant peut alors être conservé dans le site osseux, bien qu'un temps de cicatrisation allongé de 3 à 4 mois soit conseillé, c'est-à-dire 6 mois à la mandibule et 10 mois au maxillaire.
De nombreuses données provenant d'études expérimentales et cliniques sont en faveur d'un temps de cicatrisation plus long lors de la mise en place d'implants dans un os de faible densité. Des études sur le lapin ont montré qu'avec le temps, on pouvait observer une augmentation des contacts os/métal et des valeurs supérieures de couple de dévissage [15, 16]. Dans leur étude, Johansson et Albrektsson [15] montrent que le contact os/implant augmente d'une valeur de quelques pourcent à 3 semaines pour atteindre 85 % à 1 an. Ils en concluent que le processus d'ostéointégration pourrait continuer durant au moins 1 an chez le lapin et qu'il faudrait prévoir une période plus longue chez l'homme compte tenu du remaniement osseux plus lent chez ce dernier. Il est également suggéré que la mise en place d'implants dans de l'os de volume et/ou de densité faible nécessite une période de cicatrisation allongée. Celà confirme les résultats présentés par Mori et al. [17], qui ont mis au point un modèle expérimental de lapin présentant des zones d'os de faible densité (de type ostéoporose) et qui ont évalué la quantité de contacts os/implant à 2, 4, 8 et 12 semaines après la pose d'implants. Ils obtiennent des résultats histomorphométriques comparables entre les implants témoins à 8 semaines et les implants placés dans de l'os peu dense à 12 semaines. En conséquence, ils proposent une période de cicatrisation plus longue pour les patients présentant un os du type rencontré chez les patients atteints d'ostéoporose. Comme cela a été signalé, le remaniement osseux est quelque peu différent chez l'homme, et 12 semaines pour l'os de lapin correspondent en fait à 8-10 mois pour l'os humain [18].
Des études cliniques montrent que les implants présentant une stabilité primaire différente du fait de leur mise en place dans de l'os de densité faible, moyenne ou forte ont des valeurs de stabilité secondaire identiques au bout de 1 an ou plus [19]. Ainsi, les implants placés dans de l'os de faible densité « rattrapent » au cours du temps ceux qui sont placés dans de l'os de densité moyenne ou forte. Lorsque l'on allonge les temps de cicatrisation, les données concernant la survie des implants sont excellentes tant pour la région postérieure du maxillaire que pour les patients atteints de formes graves d'ostéoporose générale et locale [20-22].
En dehors de l'allongement des temps de cicatrisation, il faut s'efforcer d'obtenir la meilleure stabilité primaire possible pour l'implant, ce qui est possible en utilisant une technique de préparation adaptée en fonction des différents diamètres implantaires [14]. Ainsi, lorsque l'on insère des implants de 4 et 5 mm de diamètre dans un os de faible densité, le foret de 3 mm de diamètre et la fraise conique à évasement courte sont les derniers forets à utiliser. La fraise conique à évasement permettra en conséquence un élargissement de l'entrée du site implantaire afin qu'il puisse accueillir l'implant de 5 mm. Dans un os dont la largeur vestibulo-palatine ou linguale est réduite, il est recommandé d'utiliser comme derniers forets les forets de 2,3 ou 2,85 mm de diamètre, puis d'insérer des implants de 3,3 ou 3,75 mm de diamètre.
L'os dense se trouve essentiellement au niveau de la mandibule et, en particulier, entre les 2 trous mentonniers. En ce qui concerne la technique « classique en 2 temps », des résultats couronnés de succès à long terme ont été présentés [23, 24]. Ils portent sur des implants de 3,75 mm de diamètre insérés à l'aide d'un taraud de même diamètre. Avec l'arrivée des implants autotaraudants placés dans de l'os de texture dense [9, 25], la technique du filetage avec un taraud a été supprimée et, à la place, il a été recommandé de finir la préparation avec le foret de 3,15 mm de diamètre. Lorsque l'on se trouve en présence de densités extrêmes telles qu'un os de marbre, il a été suggéré d'accroître l'élargissement du site osseux à l'aide du foret de 3,35 mm de diamètre ou du taraud de 3,75 mm de diamètre. Ainsi, pour de l'os d'une densité identique dans les mandibules atrophiées, c'est-à-dire de qualité 1/quantité E [26], des résultats encourageants à 5 et 10 ans ont été présentés au bout de 5 et de 10 ans [27]. La nécessité d'implants plus larges que ceux de 3,75 mm de diamètre n'est en principe pas bien maîtrisée dans ces situations osseuses.
Concernant le temps de cicatrisation pour les mandibules édentées, les 3 mois classiques ont été plus fréquemment remplacés par des techniques « en un seul temps » avec mise en charge précoce. Dans une série d'études expérimentales et cliniques, Ericsson et al. [28-30] ont montré d'excellents résultats jusqu'à 5 ans après l'insertion d'implants en un seul temps, tout comme avec des implants placés en un seul temps, puis connectés à des prothèses fixées après une période postopératoire de 20 jours. Les valeurs de stabilité primaire de l'implant dans de l'os mandibulaire dense, enregistrées à l'aide de mesures de fréquence de résonance, s'avèrent identiques à celles de stabilité secondaire mesurées après un temps de cicatrisation de 3 à 4 mois [31].
Par conséquent, un os de résistance suffisante procure aux implants une stabilité primaire qui, à son tour, peut leur permettre d'être mis en charge durant la phase postopératoire immédiate. Concernant la mise en charge immédiate, l'ultime objectif a été atteint par Brånemark et al. [32] qui ont publié le protocole du traitement en un jour (Brånemark Novum®) avec des restaurations fixées implanto-portées pour des mandibules totalement édentées. Cinquante patients porteurs de 150 implants ont été suivis de 6 mois à 3 ans sans aucune complication en matière de niveau osseux marginal et avec un taux de survie implantaire de 98 % après 2 ans. La partie postérieure de la mandibule présente différents types de qualité osseuse. Du fait de la présence du nerf dentaire inférieur, la stabilité de l'implant est obtenue essentiellement au niveau marginal de l'os compact et des corticales vestibulaires et/ou linguales. Chaque fois que le volume osseux autorise leur mise en place, les implants de grand diamètre peuvent être utilisés afin de profiter des corticales vestibulaires et/ou linguales. Dans de telles situations, le diamètre du dernier foret utilisé doit de préférence être de 3,85 à 4,3 mm, selon l'épaisseur des corticales. Cependant, lorsque l'on a la possibilité de placer 2 ou, mieux encore, 3 implants dans la partie postérieure de la mandibule, les implants standard (de 3,75 mm de diamètre) ont donné de bons résultats (taux de survie supérieur à 97 %) sur une période de 5 ans ou plus [33].
Les excellents résultats obtenus avec les conFigurations de l'implant standard, du Mk II et des implants de large diamètre ont généré une recherche continuelle et le développement du système Brånemark. Avec l'arrivée de l'implant universel Mk III et de l'implant pour os de faible densité Mk IV, avec le Stargrip™, une technique d'insertion plus simple a été mise au point. Elle permet de placer les implants avec un guide fixture à friction pour un meilleur accès dans toutes les situations et supprime l'utilisation du porte-fixture. Plusieurs études multicentriques prospectives en cours (Nobel Biocare AB), chargées jusqu'ici d'évaluer le comportement de ces implants, présentent des résultats encourgeants. Les Figures 1 et 2 illustrent les recommandations de l'auteur sur la façon d'utiliser les implants usinés Mk III et IV du système Brånemark en tenant compte de l'édentement total et partiel, de la qualité de l'os, des diamètres des derniers forets par rapport au diamètre des implants, et du choix du couple délivré par le moteur dans différentes régions de la mâchoire.
Il reste à démontrer cliniquement si les implants à surface rugueuse (TiUnite™) des conFigurations Mk III et IV produiront une intégration de haute qualité plus rapide qu'avec les implants usinés. Si tel est le cas, la durée du temps de cicatrisation pourra également être raccourcie pour l'os de faible densité. Il n'en reste pas moins que les surfaces rugueuses sont plus concernées par les péri-implantites [34-36] et des études de suivi doivent par conséquent être mises en place afin d'évaluer le comportement à long terme de ces implants.
BRÅNEMARK NOVUM® - MK II, MK III ETMK IV - STARGRIP™ - BRÅNEMARK SYSTEM™ - TIUNITE™ - NOBEL BIOCARE, 80, AVENUE DES TERROIRS-DE-FRANCE, 75007 PARIS CEDEX 12. TÉL. : 01 53 33 89 10 - FAX : 01 53 33 89 33.