Greffes d'apposition mandibulaires postérieures verticales par blocs osseux d'origine buccale - Implant n° 2 du 01/05/2003
 

Implant n° 2 du 01/05/2003

 

Chirurgie

Michel Brunel *   Christian Chavrier **  


*Docteur en chirurgie dentaire
Diplômé universitaire de chirurgie et prothèse implantaires
Attaché de l'unité fonctionnelle d'implantologie
Service d'odontologie de Lyon
17, avenue Félix-Faure
69007 Lyon
**Maître de conférences des universités
Praticien hospitalier
DCD, DSO, DEO
Responsable de l'unité fonctionnelle d'implantologie
Responsable du diplôme universitaire de chirurgie et prothèse implantaires
Université Lyon-1
96, rue Montgolfier
69007 Lyon

Résumé

Lorsque la zone mandibulaire postérieure présente un déficit osseux interdisant la pose d'implants, il est possible d'avoir recours à une augmentation du volume d'os disponible par apposition de blocs osseux prélevés dans la cavité buccale.

Le site du prélèvement, soit symphysaire soit ramique, sera choisi en fonction des examens préopératoires, notamment des radiographies panoramiques et des scanners. Notre choix devra tenir compte aussi des suites postopératoires que le prélèvement pourrait entraîner.

La chirurgie sera réalisée en un temps soit avec une voie d'abord permettant le prélèvement et la greffe quand le premier est ramique, soit avec deux voies d'abord, l'une mentonnière et l'autre ramique, en cas de prélèvement mentonnier. La voie d'abord au niveau du site d'apposition devra dans chaque cas être réalisée de telle manière qu'elle permette une excellente fermeture du site opéré.

Ce type d'intervention, réservé à des praticiens expérimentés, pratiqué sous anesthésie locale, peut être réalisé au cabinet dentaire dans une salle dédiée en respectant avec rigueur les règles d'asepsie d'usage.

Les greffes d'apposition mandibulaires postérieures permettent avec un minimum de risques et d'inconfort pour le patient de poser des implants dans les zones molaires inférieures présentant un déficit osseux modéré.

Summary

When the hind mandibular zone shows a bone defect forbidding the setting of implants, it is possible to resort to a bone enlargement available by affixing of bone blocks taken in the oral cavity.

The site of the extraction, either symphysary or ramic, will be chosen according to pre-operative tests, especially according to panoramic x-rays and scanners. Our choice will also have to take into account the post-operative effects that the extraction might provoke.

The surgery will be done either with one tract allowing the extraction and the graft when the first one is ramical, or with two tracts first, one mental and the other ramical, if there is a mental extraction. The tract, first on the level of the affixing, will have, in each case, to be realized in such a way as to allow a perfect closing of the site operated on.

This type of intervention which is reserved to experienced practitioners and which is practiced under local anaesthesia must be realized in a dental practice in a specific room dedicated to it and in a strict respect of the usual aseptic rules.

The hind mandibular affixing grafts allow to set implants, with a minimum of risks and unpleasantness for the patient, in inferior molar zones which present a reasonable bone defect.

Key words

Implant , hind mandibular teeth missing , affixing graft, mental extraction , retromolar extraction, bone enlargement

Pour pallier les édentations des zones terminales mandibulaires postérieures, deux solutions s'offrent à nous : soit la pose d'un appareil amovible, soit la pose d'implants. Cependant, dans de nombreux cas, nous sommes en présence d'un os mandibulaire atrophié n'autorisant pas la pose d'implants. La seule solution possible est alors l'appareil amovible. Actuellement, nos patients acceptent de moins en moins d'être condamnés à porter ce type de prothèse. Les greffes d'apposition mandibulaires postérieures verticales par apport osseux d'origine intrabuccale sont une solution de choix pour résoudre bon nombre de ces cas. À condition que les indications soient bien posées et que des principes rigoureux de chirurgie soient mis en œuvre, ces interventions sont relativement simples d'un point de vue technique, avec peu de risques et d'effets secondaires. De ce fait, elles permettent d'étendre considérablement les possibilités de restauration implantaire.

Problèmes et solutions relatifs à l'édentement postérieur mandibulaire

Étiologie des déficits osseux mandibulaires postérieurs

Différents facteurs sont généralement en cause :

- des extractions dentaires délabrantes ;

- une lyse osseuse d'origine parodontale ;

- le port d'un appareil dentaire pendant de nombreuses années.

Types de résorptions mandibulaires postérieures

On observera des résorptions qui seront soit verticales, soit transversales, soit mixtes et d'importance variable.

Indications des greffes osseuses d'apposition verticale

Dans les zones mandibulaires postérieures, certaines configurations osseuses peuvent contre-indiquer la pose d'implants [1] et, de ce fait, constituer une indication de greffe osseuse d'apposition. Il s'agit :

- du manque de hauteur osseuse disponible au-dessus du canal dentaire. Il est actuellement admis que les longueurs minimales des implants doivent être d'au moins 10 mm [2, 3] pour assurer la pérennité des traitements. Cela est particulièrement vrai dans les zones mandibulaires postérieures où les dents sont soumises à des forces importantes. De ce fait, étant donné qu'il faut laisser une distance de sécurité de 1,5 à 2 mm entre la base de l'implant et le canal dentaire, la hauteur osseuse disponible au-dessus de ce canal doit être au minimum égale à 11,5 ou 12 mm ;

- du rapport défavorable de la hauteur de la couronne clinique sur la hauteur de la racine clinique. Il doit être inférieur ou égal à 1 afin que le bras de levier exercé sur l'implant lors de la mastication ne soit pas trop important [4].

Contre-indications

Les contre-indications aux greffes osseuses d'apposition verticale sont d'ordre général (état de santé du patient incompatible avec l'intervention, absence de motivation ou de coopération), d'ordre psychologique et d'ordre local :

- mauvaise hygiène bucco-dentaire ;

- pathologies bucco-dentaires non soignées ;

- occlusion défavorable ;

- site receveur ayant besoin d'une quantité d'os que la mandibule ne peut fournir [5] ;

- limitation d'ouverture buccale telle qu'il n'est pas possible d'opérer ou de poser les implants par la suite.

Techniques de reconstruction alvéolaire

Il existe quatre grands types de techniques de reconstruction alvéolaire, les deux premiers étant toutefois plus adaptés au maxillaire qu'à la mandibule :

- la chirurgie distractive alvéolaire [6, 7] ;

- l'expansion osseuse, qui peut être obtenue en appliquant différentes techniques [8], soit avec des ostéotomes et un modelage de la crête osseuse (bone spreading), soit en sectionnant longitudinalement la crête osseuse puis en écartant les deux parties obtenues (bone splitting) afin de gagner, grâce à la cicatrisation, en largeur osseuse ;

- la régénération osseuse guidée, pour reconstruire de légers défauts localisés en utilisant des membranes et des particules d'os autogène, allogène ou encore des matériaux de comblement de synthèse [9, 10] ;

- les greffes osseuses autogènes, allogènes, avec de l'os en poudre ou bien des blocs osseux [11, 12].

Sites donneurs intrabuccaux

Zone rétromolaire

Selon Misch [1], les limites d'utilisation de la zone ramique sont dictées par l'accès clinique et la quantité d'os disponible. Le praticien sera en présence d'un os le plus souvent uniquement cortical, au maximum d'une épaisseur de 4 mm, d'une hauteur de 10 mm et d'une longueur de 35 mm.

Ces dimensions permettent de pallier des déficiences de 3 ou 4 dents au plus pour un manque de hauteur n'excédant pas 4 à 5 mm.

Menton

Le site symphysaire, très facile d'accès, fournit généralement un os cortico-spongieux de bonne qualité. Une fois le greffon prélevé, il est possible, dans le site de prélèvement, de récolter de l'os spongieux à l'aide de ciseaux à os pour combler les petits défauts sous et autour de la greffe [11-13].

Sur le plan quantitatif, il est possible d'obtenir des greffons jusqu'à 5 cm de longueur en deux morceaux de 5 à 6 mm d'épaisseur et de 12 à 15 mm de hauteur selon les sujets.

Matériel et méthode

Étude de faisabilité

Après l'examen clinique du patient, une radiographie panoramique est réalisée. Elle permet d'évaluer la hauteur osseuse résiduelle au-dessus du canal dentaire et, par conséquent, la hauteur d'os manquante ainsi que les hauteurs osseuses disponibles dans les zones de prélèvement mentonnier ou rétromolaire.

Des moulages des deux arcades sont également réalisés afin de procéder à l'étude préprothétique qui est indissociable de l'acte chirurgical. Cela permet d'apprécier la hauteur interarcade, l'occlusion statique et la position future des dents sur les implants. Un scanner mandibulaire est enfin effectué. Il va permettre de mesurer et de déterminer précisément, au niveau du site receveur, le type de greffe à exécuter - soit apposition verticale, soit apposition latérale, soit mixte - et l'importance de l'apport osseux nécessaire en épaisseur, en longueur et en largeur. C'est à ce moment-là que l'on peut déterminer la zone de prélèvement qui sera le mieux appropriée en mesurant, sur les sites donneurs possibles, la quantité d'os disponible.

Protocole chirurgical dans le cas d'un prélèvement mandibulaire rétromolaire

Nous allons étudier le cas d'une patiente âgée de 35 ans présentant un édentement unilatéral en arrière de 35 (Fig. 1 et 2).

Médication

Une anesthésie locale est réalisée avec du chlorhydrate d'articaïne et 1/100 000 d'adrénaline, à raison de 3 ou 4 capsules de 1,8 ml en infiltration locale sur le site donneur. Il ne faut pas pratiquer d'anesthésie locorégionale pour ce type d'intervention afin de garder la sensibilité du nerf dentaire. La patiente est prémédiquée avec 1 g d'amoxicilline per os 1 heure avant l'intervention et 50 mg d'hydroxyzine dichlorhydrate 30 minutes plus tard.

La couverture antibiotique est prolongée 1 semaine après l'intervention, associée à un bain de bouche à la chlorhexidine.

Après l'intervention, une injection intramusculaire d'une ampoule de 3 mg d'acétate de bêtaméthazone et de 3 mg de phosphate de bêtaméthazone est pratiquée, associée à la prise orale d'un antalgique de type paracétamol codéiné.

Incisions

Dans ce cas d'apposition osseuse mandibulaire postérieure, le site de prélèvement sera voisin du site donneur, si bien qu'en une seule intervention avec une seule voie d'abord, il sera possible d'exposer le site donneur en même temps que le site receveur. Deux techniques d'incision seront utilisées pour cette zone car il y a deux impératifs différents.

Une des conditions absolues de réussite d'une greffe est la bonne fermeture du site greffé. À cette fin, il n'y a pas d'incision crestale au niveau du site receveur mais une incision vestibulaire décalée dans la joue pour créer ainsi un lambeau pédiculé lingualement. L'incision remontera assez en arrière de la zone réceptrice de façon à réaliser un lambeau suffisamment grand pour obtenir par la suite une bonne fermeture en tenant compte de l'épaisseur osseuse ajoutée.

Ensuite est pratiquée une incision crestale d'avant en arrière pour découvrir le site receveur. La voie d'abord à ce niveau est assez semblable à celle utilisée pour l'extraction des dents de sagesse incluses avec, cependant, un dégagement un peu plus étendu en arrière qui va rejoindre la branche montante (Fig. 3).

Prélèvement

Une fois les deux sites contigus (receveur et donneur) découverts, on peut procéder au prélèvement du greffon.

Une ostéotomie est réalisée à l'aide de microdisques diamantés Microsaw de Frios de 8,5 mm de diamètre sous irrigation abondante. Ces disques sont protégés par un carter, ce qui permet d'approcher les tissus mous dans des zones difficiles sans risque de blessure. Ils sont montés sur les pièces à main pour les ostéotomies verticales et sur un contre-angle pour les ostéotomies horizontales.

Deux traits de section verticaux espacés de la longueur nécessaire sont réalisés en arrière de la zone réceptrice et en avant de la branche montante, puis les traits de section horizontaux rejoignant les traits verticaux sont exécutés. Ces traits de section vont ainsi délimiter un bloc osseux (Fig. 4). La profondeur de la pénétration des disques est vérifiée grâce au diamètre connu des disques qui est de 8,5 mm, soit une pénétration de coupe de 3,75 mm.

Le greffon osseux ainsi délimité est détaché à l'aide d'ostéotomes.

D'autres techniques à l'aide de fraises en tungstène ont été préconisées [1] ; nous préférons utiliser des microdisques qui nous semblent présenter plus de sécurité vis-à-vis des tissus mous grâce à leur carter de protection. Ils permettent en outre une économie osseuse par rapport aux fraises, moins de traumatisme et une coupe plus précise car le trait de section est très fin.

Le site de prélèvement n'est pas comblé.

Apposition du greffon

Le site receveur est perforé de microtrous réalisés grâce à une fraise Zekrya. Le bloc d'os cortico-spongieux prélevé est minutieusement ajusté au site receveur pour qu'il y ait le moins d'espace possible entre le greffon et la mandibule. Le greffon en place est fixé sur le site receveur à l'aide de deux vis en titane Tekka® de 12 mm de long et de 1,5 mm de diamètre (Fig. 5).

Une fois le greffon fixé, les angles vifs sont arrondis avec une fraise en tungstène afin d'éviter tout traumatisme de la muqueuse qui pourrait générer des perforations susceptibles d'entraîner la perte du greffon. À cette même fin et pour parfaire la greffe, les espaces et les irrégularités entre le site receveur et le greffon sont comblés par de la poudre d'os de banque TBF® mélangé au sang du patient (Fig. 6).

Fermeture du site

La fermeture du site se fera sur deux plans. En premier lieu, le plan profond périosté est suturé, avec du fil Éthicon® vicryl blanc 3/0 à résorption rapide, par des points séparés de façon à recouvrir le greffon le mieux possible avec le périoste. Dans un deuxième temps, le plan superficiel est suturé de manière identique, avec du fil Éthicon® vicryl blanc 3/0 et quelques points de fil vicryl violet 3/0, après repositionnement sans tension des lambeaux (Fig. 7). Les suites postopératoires sont minimes.

Pose des implants

Des implants Ciny Serf® de 3,5 mm de diamètre sur 10 mm de longueur seront posés 4 mois plus tard (Fig. 8 et 9 ) après contrôle scanner de la hauteur osseuse disponible (Fig. 10).

Protocole chirurgical dans le cas d'un prélèvement mentonnier

Voici le cas d'une patiente âgée de 60 ans présentant un édentement bilatéral mandibulaire.

Une radio panoramique est réalisée dans un premier temps pour évaluer la hauteur osseuse résiduelle (Fig. 11). Il y a un manque de hauteur en positions 36 et 37. Les coupes au scanner de cette zone nous montrent une hauteur osseuse disponible d'environ 5 mm au-dessus du canal dentaire (Fig. 12), ce qui est insuffisant pour poser des implants. Une greffe osseuse d'apposition verticale va donc être réalisée.

Le bloc osseux est pris au niveau du menton car il n'y a pas suffisamment de volume osseux disponible en rétromolaire dans ce cas.

Il n'y a pas de différence significative par rapport à l'exemple précédent en ce qui concerne les techniques de prélèvement et de greffe. En revanche, il y a deux sites d'intervention au lieu d'un seul : un de prélèvement mentonnier et un de greffe mandibulaire postérieure.

Le prélèvement mentonnier est réalisé dans un premier temps (Fig. 13, 14 et 15) après anesthésie locale du site. Le site de prélèvement est comblé par un bloc d'os de banque TBF® cortico-spongieux (Fig. 16). Après avoir refermé le site mentonnier (Fig. 17), l'intervention se porte sur le site d'apposition. Une deuxième anesthésie locale est réalisée dans la zone de 36 et 37. La voie d'abord au niveau de ce site sera la même que dans le cas précédent : réalisation d'un lambeau pédiculé lingual avec incision décalée jugale (mais sans prolonger l'incision crestale en arrière car, cette fois-ci, un abord postérieur pour le prélèvement est inutile) (Fig. 18).

Le greffon est fixé par 2 vis en titane Tekka® (Fig. 19). Les défauts, comme dans le cas précédent, sont comblés par de la poudre d'os TBF®. Le site est refermé par suture du plan profond périosté (Fig. 20) avec du fil Éthicon® vicryl blanc 3/0 puis du plan superficiel (Fig. 21) avec du fil Éthicon® vicryl violet 3/0.

La durée de l'intervention est un peu plus importante que pour l'opération précédente étant donné qu'il y a une intervention sur deux sites différents bien que proches.

Trois mois et demi plus tard, le nouveau niveau osseux est mesuré grâce à un nouvel examen scanner. Le gain de hauteur est de 5 mm à 6 mm (Fig. 22). Deux implants Brånemark de 3,75 × 11 mm sont mis en place 4 mois après la pose du greffon (Fig. 23 et 24).

Discussion

En cas de déficit osseux dans la zone mandibulaire postérieure, la pose d'implants est possible de plusieurs façons.

Le passage des implants à côté du canal dentaire est possible dans quelques rares cas, mais il ne faut pas faire courir de risques inconsidérés de paresthésie définitive aux patients. Nous pensons donc que c'est une solution qui est généralement à éviter. Le déroutement du nerf dentaire inférieur est une technique qui semble laisser inévitablement des séquelles sensitives ; elle nous semble donc à proscrire [14].

La pose d'un distracteur peut être une solution [15] car elle offre l'avantage de régénérer les tissus mous en même temps que les tissus durs, une greffe d'apposition pouvant être envisagée si nécessaire en complément dans un deuxième temps, surtout si le site de distraction est très richement vascularisé. Elle présente cependant certains inconvénients :

- la hauteur osseuse résiduelle doit être d'au moins 8 mm pour éviter les risques de fracture ;

- il existe une difficulté de mise en place en zone postérieure, les zones antérieures semblant plus propices du fait de l'encombrement de ce type d'appareillage ;

- le patient doit avoir une habileté suffisante pour tourner la vis d'activation du distracteur régulièrement ;

- en cas d'échec par nécrose du segment osseux distracté, le déficit osseux du patient est considérablement aggravé.

Les greffes d'apposition verticales permettent d'obtenir de bons résultats. Selon Chiche [16], sur 19 greffes mandibulaires postérieures par bloc osseux d'origine mentonnière, aucune exposition n'a été notée, les implants ont été posés 4 mois plus tard avec 96 % de taux de succès. Selon Sethi et Kaus [17], sur 60 patients ayant subi des greffes mandibulaires avec 118 implants posés, on note un taux de 98,3 % de succès. Enfin, selon Mannaï [18] et Bahat [19], avec des implants posés en même temps que la greffe, on note de 95 à 98 % de réussite.

Les risques d'échec sont essentiellement liés à une exposition du greffon entraînant sa perte. La gestion des tissus mous doit être rigoureuse, les lambeaux doivent être refermés sans aucune tension. En cas de perte du greffon, le site receveur retrouvera son état osseux initial après cicatrisation.

Les greffes d'apposition mandibulaires postérieures présentent de nombreux avantages :

- augmentation considérable des possibilités d'implantation dans des cas qui semblaient, récemment encore, ne relever que du port d'une prothèse amovible ;

- simplicité et rapidité de ce type d'opération qui se déroule dans une même zone qui est la cavité buccale ;

- technique chirurgicale peu mutilante et avec très peu de suites opératoires ;

- intervention sous anesthésie locale dans la salle de chirurgie du cabinet dentaire [16], sans nécessité d'anesthésie générale ni d'hospitalisation ;

- même origine embryologique du site donneur et du site receveur. Le greffon est un os cortical qui présente très peu de fonte osseuse, contrairement par exemple à un greffon iliaque qui, selon Philippe [20], présente une résorption estimée entre 30 et 60 %. Les prélèvements crâniens, en revanche, pourront procurer un os de très bonne qualité mais l'intervention sera médicalement et psychologiquement beaucoup plus délicate ;

- pose des implants assez rapide après l'apposition du greffon (4 mois) ;

- maintien de l'architecture osseuse et du caractère dense de la mandibule par les greffes d'apposition corticales.

Il existe aussi certaines limites et quelques inconvénients :

- la hauteur maximum que l'on peut gagner est de 5 à 6 mm, ce qui réduit les possibilités ;

- en cas de déficits postérieurs bilatéraux de grande étendue, les sites donneurs mandibulaires peuvent se révéler insuffisants ;

- la pratique liée à l'anesthésie locale oblige le praticien à travailler dans un laps de temps n'excédant pas 2 h 30 car, au-delà, l'anesthésie locale doit être renouvelée et l'intervention devient pénible pour le patient ;

- il faut aussi être très prudent lors de la pose des vis d'ostéosynthèse pour ne pas léser le nerf dentaire.

Quel site de prélèvement choisir ? Les prélèvements à partir de la symphyse sont d'accès aisé [16] et donnent un os cortico-spongieux abondant. La quantité d'os pouvant être fournie est supérieure à celle que l'on peut obtenir des zones rétromolaires [21] qui, elles-mêmes, ne sont pas toujours aptes à être des sites donneurs en fonction de la localisation du canal dentaire.

L'accès est beaucoup plus facile au menton que dans la zone ramique et cela peut être particulièrement important lors de la chirurgie en fonction des possibilités d'ouverture buccale du sujet ou bien de l'importance du volume de ses tissus mous.

Un facteur de choix déterminant est aussi celui des suites opératoires et des risques encourus : le risque potentiel de lésion du nerf dentaire est très important en cas de prélèvement ramique, notamment si la zone de prélèvement se superpose au passage du canal dentaire, c'est pourquoi il est indispensable de faire une étude radiologique préopératoire minutieuse. Cependant, une fois le prélèvement effectué, les suites opératoires sont tout à fait minimes, la zone prélevée n'a pas besoin d'être comblée du fait de l'anatomie des tissus mous environnants.

En cas de prélèvement mentonnier, les risques de lésion du nerf dentaire sont pratiquement nuls car, après avoir exposé les trous mentonniers, on peut pratiquer le prélèvement à distance. Il existe des risques de fracture du bord basilaire de la mandibule lors du maniement des ciseaux à os. En revanche, les suites opératoires, sans être trop importantes, sont plus désagréables généralement que lors des prélèvements ramiques : hématomes postopératoires fréquents, altération de la sensibilité des dents antérieures ou bien douleurs - ces signes régressant au bout de 6 mois -, nécrose pulpaire des incisives et des canines si le prélèvement a été réalisé trop haut, troubles de la sensibilité du menton. L'opération est aussi plus traumatisante et plus longue car elle touche nécessairement deux sites différents : celui du prélèvement d'une part et celui de la greffe d'autre part.

Le site de prélèvement doit pouvoir fournir la quantité et la qualité d'os nécessaire. Celui-ci sera déterminé par les examens préopératoires.

Il convient de toujours choisir la solution la moins traumatisante pour le patient : le prélèvement rétromolaire le sera chaque fois que cela sera possible et le site mentonnier ne le sera qu'en cas d'impossibilité au niveau ramique.

Conclusion

Les greffes osseuses autogènes font maintenant partie des données acquises de la science [18], elles ne doivent pas être considérées comme des interventions exceptionnelles mais comme des interventions accessibles à une équipe expérimentée. Les blocs osseux autogènes greffés dans les zones mandibulaires postérieures permettent la mise en place d'implants là où, pendant longtemps, il fallait avoir recours à des prothèses amovibles pour remplacer les dents manquantes.

La possibilité d'utiliser des sites de prélèvement intrabuccaux et de réaliser des interventions sous anesthésie locale permet de pratiquer, dans un cabinet dentaire équipé à cet effet, des opérations simples et peu traumatisantes.

Remerciements

aux Dr Pascal Paldino et Michel Perriat pour leur collaboration lors de la rédaction de cet article.

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