Préserver et reconstruire l'os alvéolaire2e partie - Implant n° 2 du 01/05/2003
 

Implant n° 2 du 01/05/2003

 

XXIXe CONGRÈS DE L'ASSOCIATION FRANÇAISE DES CHIRURGIENS MAXILLO-FACIAUX JUMELÉE À LA SOCIÉTÉ PARISIENNE DE PARODONTOLOGIE

Implant a suivi

Gérard Aouate  

Docteur en chirurgie dentaire
DSO
DU de parodontie
DU d'expertises

Pour le XXIXe édition de son congrès, l'Association française des chirurgiens maxillo-faciaux (AFCMF) s'est associée à la Société parisienne de parodontologie pour échanger leurs connaissances et compétences respectives sur le thème « L'os alvéolaire, préserver et reconstruire ». Dans une première partie (Implant 2002;8(4):267-275), Gérard Aouate a rappelé l'intérêt thérapeutique qui peut résulter d'une collaboration entre les deux disciplines. Cette deuxième partie présente les trois dernières séances.

4e séance : communications libres, présidée par J.-C. Bertrand, C. Cantaloube

Bases anatomiques du prélèvement iliaque postérieur en chirurgie préimplantaire (C. Vacher, H. Ganem, A. Daffise, T. Loncle, J.-P. Lézy, Clichy, Paris, France)

Cette communication met en évidence les exigences et les aléas d'un tel geste pour une technique qui est cependant encore couramment pratiquée. Christian Vacher et ses collaborateurs entreprennent, sur dix sujets frais, 20 prélèvements iliaques postérieurs. L'incision choisie est horizontale au sommet postérieur de la crête iliaque, latéralement par rapport à l'épine iliaque postéro-supérieure. Le greffon est bicortical et s'accompagne d'une récolte d'os spongieux dans une zone richement pourvue. Puis, une laparotomie antérieure, suivie d'un décollement colopariétal droit et gauche et une dissection de la loge rétropéritonéale permettant de mettre en évidence les éléments sujets à des lésions lors de cette dissection. Les premiers résultats montrent qu'ils n'ont pu retrouver les rameaux dorsaux des nerfs lombaux qui sont exposés dans ce type de prélèvement. Ces rameaux participent à l'innervation sensitive de la fesse et l'atteinte à l'intégrité de ces fibres nerveuses provoque des hypoesthésies de la fesse. De même, jamais ils n'ont constaté de risque de lésion de l'artère fessière supérieure. Des atteintes de l'articulation sacroiliaque ont été notées, mais peuvent, selon les conférenciers, être évitées si le prélèvement se fait au sommet.

La douleur qui est couramment rapportée dans la littérature, dans le cas des prélèvements antérieurs, semble minorée dans leur technique.

Le nerf fémoro-cutané est décrit comme fréquemment atteint dans ces prélèvements postérieurs.

Ce travail conduit aux recommandations suivantes :

- il faut inciser sous la crête iliaque pour éliminer les risques d'atteinte des nerfs ilio-hypogastriques ;

- il faut avoir un décollement antérieur prudent dans la zone de la graisse pararénale.

Malgré ses avantages, qui sont la quantité d'os prélévé surtout spongieux et l'absence de modification du contour cutané, cette technique devrait tomber en désuétude.

Lors de la discussion, des précisons sont demandées sur les éventuels avantages d'un prélèvement iliaque postérieur par rapport à un prélèvement iliaque antérieur.

C. Vacher et ses collaborateurs expliquent qu'initialement, ils ne faisaient que des prélèvements antérieurs. L'un d'entre eux, le chirurgien orthopédiste, pratiquait le prélèvement postérieur et avait remarqué qu'il n'occasionnait aucune douleur postopératoire. Cela permettait de réduire la durée du séjour du malade en la ramenant parfois à sa plus simple expression (hôpital de jour).

Greffe osseuse autogène pour remodelage alvéolaire - une technique en un temps - un site (G. Süle, Liège, Belgique)

Gérard Süle se retrouve à nouveau au pupitre pour nous proposer sa technique. La résorption osseuse postextractionnelle laisse souvent persister un lit osseux implantaire inadéquat, surtout dans le cadre du principe devenu intangible que « la prothèse guide l'acte chirugical implantaire ».

Afin de supprimer un site donneur éloigné, G. Süle conjugue apport osseux local et barrière de régénération. L'os est prélevé dans le sens horizontal alors que l'implant est positionné dans un sens vertical (Fig. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7 et 8).

Reconstruction alvéolaire maxillo-mandibulaire par greffons crâniens bicorticaux (à propos d'une série de 70 patients) (J.-L. Béziat, N. Abou Chebel, H. Geha, Lyon, France)

La technique de Jean-Luc Béziat et de ses collaborateurs de l'hôpital de la Croix-Rousse à Lyon est la suivante.

Les prélèvements sont réalisés dans la région pariétale au-dessus de la crête temporale supérieure (Fig. 9 et 10). Rapidement, il s'est avéré justifié de reconstruire les sites de prélèvement pour éviter une dépression anatomique plus inquiétante que gênante pour les patients. Une cranioplastie par greffon unicortical latéralisé par rapport au greffon bicortical ; ce greffon est translaté pour recouvrir le site carencé (Fig. 11 et 12).

Au niveau maxillaire, deux techniques ont fait l'objet d'applications.

La première a consisté à placer les greffons verticalement dans un souci de respect de l'anatomie en plaçant la table externe en dedans, la table interne en dedans et le spongieux verticalement (Fig. 13, 14 et 15). L'inconvénient de cette technique est que le greffon n'est pas très bien adapté à la courbure osseuse maxillaire. En outre, l'implant est situé dans le diploë.

La deuxième technique, qui a été retenue, consiste à découper les greffons de façon arciforme, puis à les superposer en en mettant deux, si nécessaire. De cette manière, l'implant va successivement traverser la corticale, le dipoë, deux fois la corticale, puis à nouveau le diploë (Fig. 16, 17 et 18).

Le même souci les a guidés à la mandibule. L'étude de l'application de ces protocoles porte sur 66 patients et 112 reconstructions. Les complications au niveau du crâne concernent deux blessures durales simples et une complication générale se rapportant à un accident vasculaire cérébral controlatéral résolutif sans séquelles.

Les résultats montrent 4 échecs partiels (exposition, fracture de greffon) et 2 échecs totaux (désunion muqueuse, infection, etc.).

En conclusion, les avantages et le bien-fondé des greffons crâniens bicorticaux sont récapitulés ainsi :

- même site opératoire ;

- suites indolores ;

- absence de séquelles ;

- os membraneux doué d'une meilleure intégration.

Chirurgie préprothétique du maxillaire : étude rétrospective de 120 cas traités par greffe en onlay ou Lefort 1 avec greffe osseuse en sandwich (J. Ferri et G. Raoult, Lille, France)

Joël Ferri et Gwenaël Raoult proposent une étude comparative des avantages et des inconvénients des techniques de greffes par rapport aux techniques d'ostéotomies.

Après avoir rappelé les principes se rapportant aux deux techniques, ils énoncent les avantages de l'ostéotomie de Lefort 1 qui permet de corriger le décalage en un seul temps des bases osseuses, d'apporter des quantités d'os importantes et, dans le même temps, de positionner les implants. Les rapports des bases osseuses étant rendus favorables, la structure prothétique qui en résultera sera plus cohérente. Au niveau facial, le patient retire de cette technique un rajeunissement physique.

Les inconvénients de cette ostéotomie restent la lourdeur de la technique en comparaison de la greffe et une densité osseuse plus faible que les greffes d'origine crânienne.

Les avantages de la greffe sont la simplicité et des suites opératoires faciles. Ses inconvénients sont : impossibilité de modifier significativement les rapports maxillo-faciaux, les résorptions qui, dans certains sites, sont importantes et, dans les atrophies maxillaires, des modifications très restreintes sur le plan de l'esthétique faciale.

Si cet os est indiscutablement celui qui se résorbe le moins, donnant ainsi un atout majeur à la technique, cela ne suffit pas à soustraire à l'ostéotomie de Lefort 1 ses attributs qui restent pleinement valides [1-3] (Fig. 19, 20 et 21 ).

Reconstruction alvéolaire par greffe osseuse (J.-F. Tulasne, Paris, France)

« La reconstruction alvéolaire est pour nous une des difficultés majeures de la chirurgie implantaire » est, en introduction, l'expression primordiale de la pensée de Jean-François Tulasne. C'est la raison pour laquelle il apparaît prudent de construire initialement, de réévaluer ensuite pour une implantation ultérieure plutôt que de greffer et implanter conjointement.

La première notion à prendre en compte est que le pronostic est radicalement différent selon que la résorption alvéolaire est de type horizontal ou de type vertical. Un exemple, la crête en « lame de couteau » permet d'envisager une issue favorable qui s'oppose radicalement à nos attentes concernant les crêtes plates. La deuxième notion concerne l'origine osseuse et, chaque fois, il faut privilégier l'os cortical. Aussi, appuie J.-F. Tulasne, les résultats générés par l'emploi de l'os iliaque sont souvent imprévisibles, sans mentionner sa faible densité (ancrage pauvre pour l'implant), sa résorption importante et les suites opératoires douloureuses.

Si le ramus doit être considéré comme zone donneuse non négligeable sur le plan de la reconstruction chirurgicale, bien que faible pourvoyeur, c'est à l'os crânien que le conférencier dévoue sa pratique presque exclusivement comme lieu anatomique d'apport. Cet os est dense et sans séquelles esthétiques ni douloureuse.

Chez les sujets avec une calvitie, il n'y a pas de contre-indication formelle, compte tenu d'un risque de dépression postopératoire du cuir chevelu. Dans ce cas, il lui arrive de prendre de l'os iliaque, mais jamais plus pour reconstituer de l'os alvéolaire.

Le Dr Tulasne cite Paul Tessier comme le chirurgien à l'origine de la propagation de cette technique opératoire.

Dans la zone du sourire, qui représente les cas les plus difficiles, l'important est d'apprécier justement la situation de l'os alvéolaire sur les dents adjacentes (Fig. 22, 23a, 23b et 24).

Contrairement aux idées reçues, l'os cortical se résorbe ou plutôt se remodèle, précise le conférencier. Dans ces cas où les répercussions de ces manifestations ont une incidence sur l'esthétique, une solution est apportée par le biais de greffe de gencive, ce qui permet de parer à l'inadéquation de certains résultats.

Les confrères parodontistes ont su transmettre aux chirurgiens maxillo-faciaux leurs convictions de l'utilisation des membranes dans les thérapeutiques de régénération. Mais ces derniers avaient des réticences, liées à l'inhérence même de ces barrières, à savoir le risque d'infection. Faut-il soumettre un sinus greffé à un risque de complication infectieuse ?

Suite à un certain nombre de succès et dans certains cas, ils ont systématisé l'emploi de ces barrières.

En presque deux années, avec 45 membranes posées, 4 infections ont été relevées sans explication claire. C'est pour cette raison que l'emploi de membranes dans les sinus greffés est évité.

5e séance : communications libres, présidée par J.-M. Péron et J. Mercier

Les greffes osseuses autogènes en chirurgie préimplantaire (R. Zerbib, Paris, France)

Robert Zerbib utilise, à partir d'octobre 1988, de l'os iliaque comme matériau donneur, mais il l'abandonne rapidement pour le remplacer par de l'os crânien. Son sujet traite principalement des apports osseux dans les comblements de sinus dont il reconnaît qu'ils représentent l'essentiel de sa pratique.

Dans la grande majorité des cas, la hauteur d'os sous-sinusien est inférieure à 5 mm. Dans cette situation, on réalise une greffe osseuse et, au bout de 6 mois, on pose des implants de manière conventionnelle. La technique consiste à délimiter, après avoir réalisé une incision sur la ligne faîtière, un volet osseux qui ne sera pas conservé, par opposition au protocole antérieur. Puis, la muqueuse est prudemment décollée. Un toit d'os cortical, fixé au fil d'acier ou encastré, est créé dans cette cavité qui est ensuite comblée. L'avantage du toit est de colmater une éventuelle brèche muqueuse importante et rend le remplissage aisé et sûr. Si l'espace interarcades est augmenté, R. Zerbib effectue une greffe en onlay sur la crête. Les greffons d'apposition sont alors d'origine pariétale.

Si la hauteur résiduelle est supérieure à 5 mm, on pratique dans le même temps opératoire: premièrement, le comblement ; deuxièmement, la mise en place des implants et non l'inverse pour des raisons de gestion de l'apport tissulaire.

Depuis octobre 1988, plus de 950 patients ont bénéficié de cet éventail d'interventions. L'os iliaque a été complètement abandonné au profit de l'os pariétal. Les prélèvements du greffon en vue d'histologie montrent d'après les éléments cellulaires rencontrés que l'on est dans une physiologie tissulaire normale.

L'os autogène est utilisé de façon exclusive.

Utilisation du plasma enrichi en plaquettes dans les greffes du sinus maxillaire (P. Valentini, Paris, France)

Pascal Valentini propose une approche de l'interrelation des facteurs de croissance sur des substituts osseux tels qu'une xénogreffe osseuse d'origine bovine. Il précise que la régénération osseuse guidée nécessite la réunion de trois facteurs : des cellules, un support et surtout des molécules signaux. Dans ces dernières, on retrouve les Bone Morphogenetic Protein (BMP). Les facteurs de croissance vont agir sur un certain nombre de cellules cibles dont les préostéoblastes et les ostéoblastes. Parmi les modes d'interaction, le mode paracrine où une cellule va produire des facteurs de croissance qui vont stimuler une autre cellule. (Un exemple de fonctionnement paracrine est illustré par les plaquettes sanguines.)

Les facteurs de croissance ont un rôle mitogène (provoquant la multiplication des cellules cibles) et de stimulation de l'angiogenèse.

La question est de savoir comment se procurer, à moindre coût, ces facteurs de croissance. Ceux disponibles, les protéines recombinantes, sont onéreux. Le PRP (plasma enrichi en plaquettes) est la réponse et cette technique a déjà fait ses preuves depuis longtemps en chirurgie digestive comme en chirurgie hépatique. En chirurgie maxillo-faciale, deux études [4, 5] montrent que grâce au PRP, il est possible d'augmenter et la qualité et la quantité osseuses et ce, en un temps réduit, ce qui va dans le sens de la diminution des temps de traitement.

Utilisant personnellement le Bio-Oss® depuis 10 ans, le Dr Valentini a voulu le tester en association avec du PRP. L'os autogène s'est alors révélé nécessaire, car les facteurs de croissance sont efficaces sur le tissu osseux lui-même, mais pas sur les substituts osseux qui sont dénués de cellules vivantes. Une étude a été menée sur 2 groupes de 3 patients non fumeurs en vue d'observer les délais de cicatrisation des greffes osseuses de sinus associant du Bio-Oss®, de l'os autogène et du PRP préparé de deux façons différentes.

Au final, il semble possible d'accélérer la cicatrisation des xénogreffes avec du PRP, mais avec des résultats inconstants, qui dépendent de la technique d'enrichissement, mais aussi de la technique d'activation du plasma : avec ou sans thrombine. Ces techniques sont cependant très réglementées dans leur emploi en France. Pour plus d'informations sur les aspects médico-légaux, les décrets peuvent être consultés sur le site:

Dans le cadre de la discussion, l'une des questions posées est : « Dans l'ultracentrifugat que vous obtenez, vous utilisez la partie intermédiaire qui est le PRP, la partie supérieure correspond donc au plasma pauvre en plaquettes (PPP) ; avez-vous l'expérience de cette partie supérieure en tant que membrane en la modelant comme telle entre deux compresses ? »

Dr Valentini : Absolument, les premiers travaux le concernant montrent que ce PPP pourrait activer de manière très significative la cicatrisation des tissus mous.

La régénération osseuse guidée (M. Simion, Milan, Italie)

Situer Massimo Simion revient à citer un parcours exemplaire. Après sa spécialité de prothèse fixée en 1982, il est nommé professeur à l'Université de Milan en 1987 et prend le siège de la présidence de l'EAO (European Academy of Osseointegration) en 2001. Chef du département de parodontologie, il a conservé une activité privée, vouée à la parodontologie et à l'implantologie. Ses publications, internationales pour la plupart, sont toutes d'un intérêt majeur.

Sa démonstration est celle de la clinique étayée par les résultats fondés sur la preuve scientifique. Le succès prévisible à long terme d'implants endo-osseux exige une quantité osseuse mesurable, évaluée à 7 mm en hauteur et à 4 mm en largeur de crête. Cependant, il a été constaté que cette disponibilité tissulaire présentait des carences qui menaçaient non seulement l'aspect fonctionnel des implants, mais également l'aspect esthétique.

Il n'est donc pas étonnant que les secteurs antérieurs relèvent de manière aiguë de certains déterminants anatomiques : la qualité tissulaire, la quantité de muqueuse kératinisée et, tout naturellement, la largeur et la hauteur osseuse. À cet égard, si nous disposons de réponses en ce qui concerne le traitement esthétique de la prothèse sur un implant unitaire, nous nous trouvons démunis d'assurance et acceptons des compromis dès lors qu'il s'agit de restaurations plurales. Autre considération : la perte des papilles gingivales des dents adjacentes est concomitante de la perte d'attache sur ces dents et la régénération des papilles doit être considérée comme quelque chose de redoutable. Donc, si tous ces éléments sont présents en quantité et en qualité, nous ne serons pas dans l'épreuve. Inversement, si ces composants anatomiques présentent un décalage, nous entrons alors dans la gestion des problèmes. Son protocole ne se met pas en marche au temps t = 0, car souvent les tissus mous nécessitent un délai afin de parvenir à maturation et ce délai est estimé à deux mois à la fin desquels la maturation et la cicatrisation des composants parodontaux sont achevées. L'augmentation tissulaire débute, suivie à 6 mois de la mise en place des implants qui est une nouvelle occasion de gestion des tissus mous au moment du second temps opératoire ou du premier temps opératoire lorsque le choix chirurgical est du un temps opératoire.

Le protocole proposé est répétitif sur le plan de la méthode. Une membrane est fixée du côté palatin à l'aide de vis en titane, puis de l'os autogène est interposé sous la barrière, lequel est souvent prélevé dans la zone rétromolaire mandibulaire, puis réduit en copeaux à l'aide d'un moulin (Quétin, Hu-Friedy). La membrane doit être bien arrimée en s'aidant de micro-vis, sans tension ni contact avec les dents. Ce faisant, nous pouvons nous attendre à un gain osseux maximal, là où une résorption variant de 20 à 30 % serait observée en l'absence de membrane.

L'état osseux conditionne l'état gingival. La formation de papilles gingivales reste une entreprise, une épreuve lorsqu'elle s'applique à la zone correspondant à deux implants adjacents. Dans ce domaine de la dentisterie implantaire, s'il est permis de penser que le protocole infaillible n'existe pas, retenons que 3 mm de support osseux sont indispensables donnant ainsi la mesure de la plus grande proximité entre deux implants.

Alors que le praticien implantaire dispose de la greffe de conjonctif enfoui pour gérer les cas esthétiques, le praticien prothésiste compose, lui, avec le profil d'émergence prothétique pour modeler les contours gingivaux et créer une harmonie.

M. Simion ne peut mieux définir sa pensée qu'avec la démonstration où un implant est à nu de manière périphérique et sur une hauteur de 7,5 mm, en parfaite position prothétique, le col aligné aux collets voisins. La perforation de la corticale osseuse, le choix d'une membrane, renforcée en titane (Gore-Tex du modèle TR9W, par exemple) qui va dicter la morphologie future de la crête néoformée et la fermeture soignée sans tension des lambeaux sont les commandements du succès [6]. Les expositions membranaires ? Elles sont aujourd'hui quasiment réduites à zéro selon le Dr Simion qui fait référence à une autre étude [7]. Cela n'évite cependant pas les risques d'infection dont le taux de survenue selon son expérience est de 5 %. Son étude porte sur 123 implants répartis en trois groupes et suivis pendant des périodes de 1 à 5 ans : sous la membrane non résorbable, un premier groupe avec le caillot sanguin seul, un deuxième groupe avec une allogreffe et un troisième avec de l'os autogène. À la dépose des membranes, une perte osseuse est observée et mesurée et, par ordre croissant d'intérêt, sont trouvés les allogreffes, l'os autogène, puis le caillot sanguin. Le conférencier conclut alors que la régénération osseuse guidée verticale confère au nouvel os les mêmes caractéristiques que l'os natif. Le Dr Simion donne son avis sur la technique de séparation osseuse qu'il considère comme n'ayant pas vraiment fait l'objet d'études histomorphométriques, mais seulement de cas cliniques publiés. Cette technique peut être retenue afin d'accroître l'os verticalement et non pas dans les trois dimensions. Ses applications concernent la déficience osseuse supérieure à 3 mm.

6e séance : communications libres, présidée par P.-L. Tessier et J. Levignac

Chirurgie orthognathique assistée par ordinateur (COAO) (C. Marecaux, M. Chabanas, Y. Payant, F. Boutault, Grenoble, Toulouse, France)

La chirurgie orthognathique assistée par ordinateur (COAO) s'est développée à la fin des années 80 selon deux principaux axes : d'une part, celui de la simulation avec des équipes américaines qui ont su définir de manière rationnelle les principes de cette chirurgie; d'autre part, celui du développement des techniques de navigation intra-opératoires, dont la neurochirurgie a bénéficié en premier, puis que d'autres spécialités dont la chirurgie maxillo-faciale ont peu à peu intégré. Le traitement de l'image est déjà couramment utilisé, mais la technique de navigation des systèmes de guidage avec des logiciels spécifiques est encore incomplète dans ses applications pratiques. Deux problèmes principaux restent à résoudre en COAO : l'un, l'absence de céphalométrie tridimensionnelle pour le planning en trois dimensions, et l'autre, la création d'un modèle de tissus mous pour l'intégration de la composante esthétique de cette chirurgie. L'équipe du Dr Marecaux s'attache à développer ce modèle par des outils destinés au planning et à la simulation chirurgicale.

Concernant la céphalométrie tridimensionnelle, le modèle le plus intéressant est le travail de Jacques Treil qui comprend l'analyse dentaire et l'analyse maxillo-faciale. D'un point de vue biomécanique, le modèle le plus pertinent afin de rendre compte des caractéristiques biomécaniques d'un milieu continu comme celui des tissus mous de la face repose sur la méthode des éléments finis. Ce modèle est suffisamment fin pour intégrer les muscles concourant à la mimique.

La COAO sera disponible dans un avenir proche, mais il reste cependant des développements à produire dont ceux indispensables à la mise au point de ses instruments.

Résultats à long terme après reconstruction alvéolaire (Long term results after alveolar reconstruction) (U. Joos, Münster, Allemagne)

Ulrich Joos, du département de chirurgie maxillo-faciale à Münster, présente une classification des défauts osseux permettant d'établir pour chaque classe une dimension de l'acte chirurgical.

De la classe 1 qui correspond à la perte des dents à la classe 4 où la perte osseuse est complexe, on a un alourdissement de la reconstruction.

De 1993 à 1997, son centre a traité 780 patients qui ont reçu au total 2 065 implants. Extraits de cet échantillon, 200 patients et leurs 574 implants ont été suivis pendant 5 ans une fois le traitement terminé. Pour certains, il s'agissait d'apports osseux mineurs ; d'autres avaient subi des chirurgies majeures. Seules 17 péri-implantites ont été relevées et 6 implants ont été perdus. Pour le Dr Joos, les chances de succès sont directement proportionnelles à la maîtrise par le clinicien de la technique de transplantation des tissus.

Le futur en chirurgie maxillo-faciale (The future of maxillofacial surgery) (S. A. Schendel, Stanford, États-Unis)

Stephen A. Schendel est chef du département de chirurgie plastique de l'Université de Stanford. Son parcours est original. Après un diplôme de l'école dentaire de l'Université du Minnesota en 1973, il achève en 1979 quatre années en tant que résident de chirurgie buccale et maxillo-faciale au Parkland Memorial Hospital de Dallas. Puis, sous la tutelle de Jean Delaire, il passe deux années à Nantes pour parfaire ses connaissances en orthopédie dento-faciale et en chirurgie. Interne à Baylor University (Dallas), il devient chirugien général, puis chirurgien plasticien avant de rejoindre, en 1987, Paul Tessier en tant qu'assitant. Il est à temps plein à Stanford depuis 1989.

Ses recherches en médecine ont essentiellement concerné des travaux engagés avec la NASA (National Aeronautics and Space Administration). Le futur est plein de promesses de ce que la profession seulement commence à appliquer. Son propos concerne la chirurgie maxillo-faciale assistée par ordinateur. L'imagerie d'aide au diagnostic, la planification chirurgicale et la simulation, les systèmes intra-opératoires, l'apprentissage et l'enseignement montrent l'ampleur des applications.

Trois techniques sont reconnues comme d'une grande contribution au diagnostic par l'imagerie : la tomodensitométrie (TDM), l'imagerie par résonance magnétique (IRM) et les ultrasons.

De nouveaux développements apparaissent tels que la segmentation automatique et la réunion de la TDM et de l'IRM.

Le cas d'un enfant souffrant d'une suture précoce crânienne est analysé à l'aide d'un logiciel développé dans son laboratoire (Fig. 25 à 26). En manipulant les données informatiques, S. A. Schendel et son équipe arrivent à supprimer le revêtement cutané et accéder ainsi aux structures crâniennes sous-jacentes. Ils peuvent également superposer les tissus mous au profil osseux et ce faisant, les rendre semi-transparents, ce qui permet d'évaluer les déformations osseuses. Plus extraordinaire encore est ce voyage virtuel, permis désormais, en intracrânien afin d'en examiner les sutures tout autant que les structures avoisinantes et revenir au point de départ.

Un cas de carcinome de l'orbite dont le traitement suppose des résections est montré. L'image tridimensionnelle permet de rendre transparents les tissus mous et grâce à l'informatique, une image en miroir peut être obtenue à partir du côté opposé, indiquant ainsi ce qu'il faut reconstruire. Puis, à partir de la hanche, une pièce osseuse est prélevée et modelée pour s'encastrer parfaitement dans la perte de substance.

Appliquée à l'organe dentaire, la TDM a permis d'établir l'anatomie dentaire de manière réaliste et ce, comme jamais auparavant ; rendre transparentes certaines structures et suivre l'anatomie canalaire autour de tous les axes tout en sectionnant virtuellement la dent à souhait.

Tout permet d'espérer aujourd'hui que l'imagerie et les techniques de simulation vont jouer un rôle croissant et ce, dans chacun des aspects de la chirurgie maxillo-faciale. Les progrès accomplis ces dernières années avalisent pleinement les efforts dans ce siècle naissant.

BIBLIOGRAPHIE

  • 1. Ferri J, Bado-Silveira F, Doual JM, Peuvrel G, Donazzan M. Orthognathic surgery of the atrophic upper jaw. A proposal for a single-stage treatment. LeFort I osteotomy with bone grafts and implants. Rev Stomatol Chir Maxillofac 1997;98(Suppl.1):69-74.
  • 2. Sailer HF. A new method of inserting endosseous implants in totally atrophic maxillae. J Craniomaxillofac Surg 1989;17(7):299-305.
  • 3. Cawood JI, Stoelinga PJ, Brouns JJ. Reconstruction of the severely-resorbed (Class VI) maxilla. A two-step procedure. Int J Oral Maxillofac Surg 1994;23(4):219-225.
  • 4. Marx RE et al. Platelet rich plasma: growth factor enhancement for bone grafts. Oral Surg Oral Med Oral Pathol Oral Radiol Endod 1998;85:638-646.
  • 5. Tayapongsak P, O'Brien DA, Monteiro CB, Arceo-Diaz LY. Autologous fibrin adhesive in mandibular reconstruction with particulate cancellous bone and marrow. J Oral Maxillofac Surg 1994;52(2):161-165;discussion 166.
  • 6. Simion M, Jovanovic SA, Trisi P, Scarano A, Piattelli A. Vertical ridge augmentation around dental implants using a membrane technique and autogenous bone or allografts in humans. Int J Periodont Rest Dent 1998;18(1):8-23.
  • 7. Simion M, Jovanovic SA, Trisi P, Scarano A, Piattelli A. Vertical ridge augmentation around dental implants using a membrane technique and autogenous bone or allografts in humans. Int J Periodont Rest Dent 1998;18(1):8-23.