Recherche clinique - JPIO n° 4 du 01/11/2018
 

Journal de Parodontologie & d'Implantologie Orale n° 4 du 01/11/2018

 

Revue Scientifique Internationale

Responsable : Yves REINGEWIRTZ

Recherche clinique

Parodontologie clinique

G.A. KOSTAKIS, Q. LIAN, A.L. IOANNOU, B.S. MICHALOWICZ, M.T. JOHN, H. CHU

Journal of Periodontology 2018;89:558-570.

Méta-analyse en réseau des moyens de contrôle de plaque inter-proximaux destinés à la réduction des indices cliniques de l'inflammation

But de l'étude

Il existe un choix important de moyens de contrôle de la plaque interdentaire (Interdental oral...


Recherche clinique

Parodontologie clinique

G.A. KOSTAKIS, Q. LIAN, A.L. IOANNOU, B.S. MICHALOWICZ, M.T. JOHN, H. CHU

Journal of Periodontology 2018;89:558-570.

Méta-analyse en réseau des moyens de contrôle de plaque inter-proximaux destinés à la réduction des indices cliniques de l'inflammation

But de l'étude

Il existe un choix important de moyens de contrôle de la plaque interdentaire (Interdental oral hygiene aids, IOH). Toutefois, leur recommandation est limitée par le manque d'études comparatives. Le but de cette étude est de comparer leur efficacité en utilisant la méta-analyse bayésienne en réseau. La méta-analyse consiste à apparier des études dont l'objet (la brosse à dents, par exemple) et le critère d'évaluation (l'indice de plaque, par exemple) sont identiques. La méta-analyse en réseau consiste à apparier des études dont les objets sont différents (fil dentaire, brossettes, etc.) en gardant un critère d'évaluation identique afin de les comparer.

Matériel et méthode

Deux personnes indépendantes ont réalisé une revue de littérature systématique des essais cliniques randomisés évaluant les IOH. Les résultats ont estimé l'inflammation gingivale (Gingival index, GI), le saignement au sondage (Bleeding-On-Probing, BOP) puis la plaque dentaire et la profondeur de poche. Les tests statistiques sur les effets aléatoires ont été réalisés pour chaque critère d'évaluation mesuré : un test sur les postérieures médianes et un autre sur l'intervalle de crédibilité à 95 % des distributions marginales (CI).

Résultats

Un processus de sélection en deux étapes des articles a identifié 22 essais évaluant 10 IOH utilisés comme compléments au brossage. Les brossettes interdentaires ont atteint la meilleure réduction de GI (0,23), suivies par les hydropulseurs (0,19) au test CI. Au test des postérieures médianes, les brossettes et les hydropulseurs ont montré les mêmes résultats pour le GI, alors que la probabilité que le fil dentaire ou les bâtonnets interdentaires aient le meilleur IOH était proche de zéro. Il est notable de constater qu'exceptés les bâtonnets, tous les IOH ont permis de réduire le GI par rapport au contrôle.

Conclusion

L'étude statistique au moyen de méta-analyse bayésienne en réseau permet d'évaluer les IOH et de les classer en fonction de leur efficacité. Les brossettes interdentaires et les hydropulseurs ont montré le meilleur résultat pour réduire le saignement gingival, alors que les bâtonnets et le fil ont été classés comme derniers.

Commentaires

Grâce au moyen d'analyse statistique plus récent qu'est la méta-analyse en réseau, cette étude nous permet d'aborder de manière plus scientifique notre approche des moyens d'hygiène interdentaire prescrits à nos patients. Néanmoins, l'hétérogénéité des tests utilisés restreint la qualité des conclusions établies : par exemple le fil dentaire, qui est très souvent une méthode préventive, ne peut être vraiment comparé qu'aux brossettes d'une extrême finesse. Il ne peut être opposé aux bâtonnets destinés à des espaces particulièrement larges lorsqu'une parodontite est déjà évoluée. Enfin, la grande majorité des études réalisées dans ce domaine (table 2), sont subordonnées aux fabricants de ces produits, et l'importance du marché des hydropulseurs reste certainement très différente de celui des bâtonnets.

Jean-Nicolas Hasson (Mulhouse)

Ortho-Paro

C.V. CARVALHO, L. SARAIVA, F. PAIM F. BAUER, R.Y. KIMURA, M.L. SILVEIRA SOUTO, C.C. BERNARDO, C. MENDES PANNUTI, G.A. ROMITO, F.E. PUSTIGLIONIA

American Journal of Orthodontics and Dentofacial Orthopedics 2018;153:550-557.

Traitement orthodontique en présence d'une parodontite agressive

But de l'étude

Les auteurs vont évaluer les effets d'un traitement orthodontique sur le parodonte, en présence d'une parodontite agressive stabilisée.

Matériel et méthode

Les auteurs ont sélectionné 10 patients (âge 25,0 +/– 5,22 ans) ayant bénéficié d'un traitement orthodontique dans un contexte de parondontite agressive traitée. Les patients ont été vus tous les mois, avec un contrôle régulier du biofilm, et comparés avec une cohorte de 10 patients sains (âge 22,9 +/– 5,23 ans) ayant bénéficié d'un traitement orthodontique. Les auteurs ont mesuré la profondeur des poches au sondage, le niveau d'attache, le saignement au sondage ainsi que l'indice de plaque au début, en cours et 4 mois après la fin de traitement.

Résultats

Les analyses statistiques mettent en avant une amélioration de l'ensemble des paramètres évalués :

– profondeur de poches : réduction de 0,29 mm

– niveau d'attache clinique : gain de 0,38 mm

– saignement au sondage : réduction de 4 %

– indice de plaque dentaire : réduction de 11 %

Conclusion

Les patients ayant une parodontite agressive stabilisée peuvent entreprendre un traitement orthodontique sous couvert d'un contrôle strict de leur biofilm.

Commentaires

Cette étude corrobore une fois de plus l'intérêt d'une prise en charge ortho-parodontale chez les patients ayant constaté des migrations secondaires ou présentant déjà des encombrements dentaires initiaux. On constate, dans cette étude, que l'ensemble des indices mesurés s'est amélioré entre le début et la fin du traitement et ceci probablement pour plusieurs raisons :

– la prise de conscience raisonnée de la problématique, associée à une motivation accrue chez ces patients qui aspirent à une santé dentaire retrouvée et à un sourire harmonieux. Les saignements associés au déplacement des dents alertent les patients de la maladie parodontale et signent aussi le ressenti d'un début prématuré de la sénescence du corps. On ne veut pas donner les signaux de cette vieillesse, ce qui permet aux personnes concernées d'accepter encore mieux cette prise en charge contraignante ;

– le patient est au centre de cette équipe pluridisciplinaire, il se sent épaulé et, lorsqu'il est mis en confiance, ne veut surtout pas décevoir et respecte à la lettre le contrat dicté par les praticiens. La maintenance parodontale à domicile, l'assiduité aux rendez-vous et le respect de l'appareil orthodontique contribuent grandement à la réussite du traitement. Au fil du temps, le sourire s'améliore et les patients apprennent à aimer leurs dents et se les réapproprient ;

– sur le plan biomécanique et sur celui de l'hygiène, l'alignement des dents va progressivement rendre l'accès au nettoyage de plus en plus facile, les séances de brossage deviennent de plus en plus simples. En outre, les thérapeutiques orthodontiques utilisent actuellement des fils dont les forces sont de plus en plus douces et continues, propriétés indispensables aux déplacements dentaires atraumatiques.

La conclusion reste cependant à moduler car seuls les patients motivés et pouvant débourser une somme d'argent importante, qui bien souvent n'est pas prise en charge par la sécurité sociale et les mutuelles, verront cette amélioration se produire. Notre rôle consiste également à dire non aux patients insuffisamment motivés car le risque d'aggravation parodontale devient alors de plus en plus important.

Renaud Rinkenbach (Strasbourg)

Implantologie clinique

F. YOUNES, J. COSYN, T. DE BRUYCKERE, R. CLEYMAET, E. BOUCKAERT, A. EGHBALI

Journal of Clinical Periodontology 2018;45:721-732.

Étude contrôlée randomisée sur la précision de la chirurgie implantaire entièrement guidée chez des patients partiellement édentés

But de l'étude

Cette étude clinique s'attache à comparer la précision de trois types de chirurgies implantaires sur des patients présentant un édentement partiel postérieur au maxillaire : à main levée (FH), guidée pour le forêt pilote (PG), et totalement guidée avec un guide à appui dentaire (FG).

Méthode

Trente-deux patients (11 hommes et 21 femmes), présentant un édentement partiel au niveau des maxillaires postérieurs nécessitant au moins 2 implants, sont recrutés dans cette étude clinique contrôlée randomisée. Ils sont tous en bonne santé, ont un indice de plaque inférieur à 25 % et il leur manque au moins 2 dents adjacentes en distal des canines. Tous les soins nécessaires sont réalisés avant les chirurgies implantaires. Le calcul de la taille de l'échantillon indique un minimum de 16 implants par groupe. Les patients sont randomisés dans l'un des trois groupes : FH, PG, FG. La position idéale des implants est déterminée par le même opérateur grâce à un logiciel de planification implantaire permettant de fusionner les données concernant l'os au format DICOM aux données concernant le wax-up prothétique (empreinte optique au format STL). Toutes les chirurgies sont réalisées par le même opérateur expérimenté et avec le même type d'implants. La position finale de chaque implant est comparée à sa position idéale telle que planifiée par ordinateur par un opérateur à l'aveugle. La variable principale de cette étude est la déviation apicale globale (AGD). Les variables secondaires sont l'angle de déviation (AD), la déviation globale coronaire (CGD), la déviation latérale coronaire (CLD), la déviation verticale coronaire (CVD), la déviation apicale latérale (ALD) et la déviation apicale verticale (AVD).

Résultats

Les implants sont posés sans guide (FH) chez 11 patients (26 implants), avec un guide pour le forêt pilote (PG) chez 11 patients (24 implants), et en chirurgie guidée intégrale (FG) chez 10 patients (21 implants). La chirurgie entièrement guidée (FG) est la plus précise de façon statistiquement significative (AGD moyenne : 0,97 mm, maximale : 1,98 mm), suivie par la chirurgie avec un guide pour le forêt pilote (AGD moyenne : 1,43 mm, maximale : 2,72 mm). La déviation apicale globale la plus importante est obtenue avec la chirurgie implantaire sans guide (FH) (AGD moyenne : 2,11 mm, maximale : 4,84 mm). Les résultats obtenus sur la majorité des variables secondaires suivent le même ordre. Bien que des prothèses vissées aient été planifiées pour tous les implants, 5 des 26 couronnes dans le groupe sans guide et 1 des 24 couronnes dans le groupe PG ont finalement dû être scellées en raison de problèmes d'axes.

Conclusion

Dans cette étude, la chirurgie intégralement guidée permet d'obtenir un positionnement des implants plus proche de celui idéalement planifié, ce qui permet notamment de mettre en place une prothèse transvissée.

Commentaires

La chirurgie guidée permet d'améliorer le positionnement de l'implant, qui est un facteur critique non seulement pour l'esthétique mais aussi pour sa survie. Toutefois, quand les guides (2 sur 10 dans l'étude) ont besoin d'être ajustés pour être insérés, la précision diminue en même temps que la stabilité du guide. Par la suite, il serait intéressant d'étudier le rapport coût/bénéfice, en tenant compte de l'esthétique et de l'absence de complications biologiques.

Céline Gatti (Paris)

Implantologie clinique

P.S. KUMAR, S.M. DABDOUB, R. HEGDE, N. RANGANATHAN, A. MARIOTTI

Journal of Clinical Periodontology 2018;45:597-604.

Facteurs de risques prédictifs des péri-implantites liés au site : une analyse rétrospective

But de l'étude

Plusieurs facteurs de risque de péri-implantites ont été identifiés de longue date, des facteurs locaux biomécaniques, immuno-inflammatoires et microbiens. Et si les facteurs liés au patient sont connus, tels le diabète ou le tabac, ces derniers sont insuffisants pour prédire l'évolution des implants et des tissus péri-implantaires. L'objet de cette étude est d'identifier les facteurs de risques liés au site qui augmentent les risques de péri-implantites.

Matériel et méthode

L'étude analyse les caractéristiques cliniques et radiographiques de 222 implants unitaires en fonction depuis au moins 5 ans chez 86 sujets présentant une péri-implantite. Elle met en évidence les facteurs contribuant aux plus grandes variabilités et identifie les facteurs de risque prédictifs par une analyse linéaire discriminante et une analyse logistique multinomiale.

Résultats

Une augmentation significative de risque de péri-implantite est associée à la présence d'une maladie parodontale au niveau d'une des dents adjacentes au moment de la restauration (odds ratio (OR) : 8,0) ; au placement de l'implant à une profondeur de 6 mm et plus en relation avec la limite émail/cément d'une dent adjacente (OR : 8,5) ; à une prothèse asymétrique (OR : 4,3) ; à un antécédent de perte dentaire en rapport avec une parodontite (OR : 2,4) ; à un indice de plaque de départ de 1,6 ou plus (OR : 7,9) ; et à une largeur insuffisante de muqueuse kératinisée (OR : 2,8).

Conclusion

Le pronostic d'un succès implantaire doit prendre en compte, outre les facteurs liés au patient, les facteurs liés au site d'implantation.

Discussion

Ces résultats sont susceptibles d'expliquer certaines situations d'échecs implantaires, classiquement admises en présence de sujets présentant, ou ayant présenté, un passé de parodontite, et notamment en présence d'un enfouissement de la plateforme prothétique supérieur à 5 mm. Est-ce qu'il ne faut pas en effet considérer un grand nombre des restaurations esthétiques antérieures aux limites profondément sous-gingivales comme autant de sources de complications potentielles ? En pareilles conditions, limiter les autres facteurs de risques, parodontites ou facteurs liés au patient, devient impératif.

Yves Reingewirtz (Strasbourg)