Bisphosphonates et ostéonécrose Bisphosphonates and osteonecrosis - JPIO n° 03 du 01/08/2007
 

Journal de Parodontologie & d'Implantologie Orale n° 03 du 01/08/2007

 

ÉDITORIAL

Paul Mattout  

Rédacteur en chef

Le thème de ce numéro spécial du JPIO est la plaque dentaire ou le biofilm dentaire avec comme « Guest Editor » Michel Brecx. Mais, j'ai choisi d'aborder dans mon éditorial le problème des ostéonécroses décrites chez les patients soumis à des bisphosphonates.

Sans nul doute, le thème de ce numéro du JPIO est totalement étranger aux bisphosphonates, mais ce sujet est si préoccupant que je me devais d'attirer votre attention sur les risques que l'on découvre aujourd'hui...


Le thème de ce numéro spécial du JPIO est la plaque dentaire ou le biofilm dentaire avec comme « Guest Editor » Michel Brecx. Mais, j'ai choisi d'aborder dans mon éditorial le problème des ostéonécroses décrites chez les patients soumis à des bisphosphonates.

Sans nul doute, le thème de ce numéro du JPIO est totalement étranger aux bisphosphonates, mais ce sujet est si préoccupant que je me devais d'attirer votre attention sur les risques que l'on découvre aujourd'hui : l'ostéonécrose des maxillaires.

Les bisphosphonates sont des inhibiteurs de la résorption osseuse. Ils sont très fréquemment prescrits par voie intraveineuse ou par voie orale. Par voie intraveineuse chez les patients atteints de tumeurs associés à des pertes osseuses ; par voie orale, chez les patients atteints d'ostéoporose.

Des publications récentes font état de lésions nécrotiques de l'os maxillaire ou (moins souvent) mandibulaire chez les patients sous médication bisphosphonate intraveineuse ou intra-orale à long terme.

Très récemment, quelques travaux publiés en 2006 relatent des cas d'ostéonécroses des mâchoires attribuées à la prise de bisphosphonates, sans que le mécanisme en cause ne soit bien compris.

Citons 3 publications qui montrent l'ampleur de notre méconnaissance sur le sujet ou tout au moins sur l'imprévisibilité des résultats :

•  Jeffcoat (JOMI, 2006), en rapportant 2 études cliniques, n'établit pas d'incidence d'ostéonécrose. Les patients sous alendronate et atteint de parodontite ont eu un taux plus faible d'infection et de perte dentaire.

•  Ruggier et al. (J Oncol Pract, 2006) recommandent la plus grande prudence. En effet, même en cas d'arrêt de la prise de bisphosphonates par le patient, les effets demeurent et le taux d'ostéonécrose persiste.

•  Brown (Parodont Dent Rest, 2006) confirme que les bisphosphonates sont captés par l'os et ont un effet prolongé même après l'arrêt du traitement. Cet auteur recommande la plus grande prudence, car même un traitement parodontal non chirurgical chez un patient ayant été sous bisphosphonates risque d'aboutir à une ostéonécrose.

Quelles recommandations préconiser aujourd'hui ?

-  chez les patients nécessitant un traitement aux bisphosphonates, réaliser tous les soins en bouche avant le début du traitement ;

-  n'intervenir qu'en cas d'absolues nécessités ;

-  opter pour des traitements chirurgicaux conservateurs ;

-  dans tous les cas, éviter d'exposer l'os ;

-  désinfecter le site opéré consciencieusement ;

-  pratiquer une asepsie rigoureuse ;

-  utiliser systématiquement des antibiotiques et des antiseptiques ;

-  créer un abord chirurgical le moins large possible.

Je ne terminerai pas cet éditorial sans remercier très sincèrement Michel Brecx d'avoir dirigé, avec le professionnalisme et l'expertise que nous lui connaissons, ce numéro spécial sur la plaque dentaire. Il a su réunir les meilleurs auteurs pour nous faire connaître ce biofilm que nous côtoyons, tous, chaque jour et qui est encore plus complexe que nous l'imaginions.

Merci à tous les auteurs qui ont permis de réaliser un ouvrage qui fera date pour le JPIO.

The theme of this special issue of JPIO is dental plaque or dental biofilm, with Michel Brecx as our Guest Editor. However, in this editorial, I have decided to focus on the problem of osteonecrosis observed in patients taking bisphosphonates.

Without doubt, the theme of this issue of JPIO is completely unconnected from bisphosphonates. However, this topic is so alarming that I must inform you of the risks that are currently being discovered: osteonecrosis of the maxilla and mandible.

Bisphosphonates are inhibitors of bone resorption. They are very frequently prescribed either intravenously or orally: intravenously for patients affected by tumours associated with bone loss, and orally for patients with osteoporosis.

Recent literature reports necrotizing lesions of maxillary or (less often) mandibular bone in patients undergoing long term intravenous or oral treatment with bisphosphonates.

Very recently, a few papers published in 2006 have reported cases of osteonecrosis of the maxilla and mandible as a result of taking bisphosphonates. However, the mechanism of action is not well understood.

Let us quote three articles which show the extent of our ignorance on the subject or at least on the unpredictability of results:

•  Jeffcoat (JOMI, 2006), while reporting two clinical studies, has not established the incidence of induced osteonecrosis. Patients under alendronate and affected with periodontitis have shown a lower rate of infection and tooth loss.

•  Rugier et al. (J Oncol Pract, 2006) recommend the greatest caution. Indeed, even when the bisphosphonate treatment is stopped, the effects remain and osteonecrosis rates persist.

•  Brown (PDR, 2006) confirms that bisphosphonates are retained by bone and have a long-lasting effect even after the treatment has ceased. This author recommends the greatest caution, since even non-surgical periodontal treatment in a patient who has been treated with bisphosphonates can trigger osteonecrosis.

What recommendations should now be considered?

-  patients who need a bisphosphonate treatment must receive all necessary oral treatments before their therapy starts;

-  one must intervene only in case of absolute need;

-  one must opt for conservative surgical treatments;

-  in any case, bone exposure must be avoided;

-  the site to be operated on must be carefully disinfected;

-  an aseptic technique must be rigorously applied;

-  antibiotics and antiseptics must be systematically used ;

-  surgical access must be as minimal as possible.

I would like to conclude this editorial by thanking Michel Brecx most sincerely for directing this special issue on dental plaque with the professionalism and expertise for which he is well known. He has brought together the best authors who are in a position to introduce us to the biofilm that we all encounter in our every-day practice and which is even more complex than we thought.

Very many thanks to all those authors who have contributed to this outstanding issue.