L’occlusion en prothèse amovible partielle
 

Les cahiers de prothèse n° 152 du 01/12/2010

 

Prothèse amovible partielle

Estelle Schittly  

DCD, MCU-PH
Service d’odontologie
UFR d’odontologie
Université Reims-Champagne-Ardenne
2, rue du Général-Kœnig
51100 Reims

Résumé

L’enregistrement du rapport mandibulo-maxillaire est une démarche qui doit mobiliser une quantité de questions bien en amont de la réalisation du projet prothétique. L’analyse du cas avant enregistrement du RMM doit prendre en compte le devenir de la DVO du patient au terme de la restauration, le décalage entre ORC et OIM, la position à enregistrer, la technique et le type de dispositif à employer… Tous ces paramètres sont autant de critères à prendre en compte simultanément en suivant un protocole de réflexion reproductible et hiérarchisé qui est loin d’être simple de prime abord. Cet article tente d’éclaircir la démarche clinique à appliquer pour guider le questionnement du praticien lors du transfert du moulage mandibulaire sur articulateur.

Summary

Occlusion in removable partial denture : mounting mandibular cast on the articulator

Recording the mandible-maxilla relation (MMR) is an approach that implies a number of questions well ahead of the prosthetic project. The analysis of the case before recording MMR must take into account the future of the vertical dimension of occlusion (VDO) of the patient after the restoration, the gap between centric occlusion and maximum intercuspation, the recording position, the technique and the type of device to use… All these parameters are all criteria to be considered simultaneously for a well-thought reproducible and hierarchized protocol which is at first far from simple. This article attempts to clarify the clinical approach to be applied to guide the practitioner in the questioning for mounting mandibular cast on the articulator.

Key words

mounting mandibular cast, occlusal registration, removable partial denture

L’enregistrement du rapport mandibulo-maxillaire (RMM) est une étape clé de l’exercice prothétique. Elle intervient à deux stades du traitement : lors de l’étude des moulages sur articulateur et lors du transfert des informations cliniques au laboratoire de prothèse.

Sa maîtrise passe par la connaissance des différents types de dispositifs d’enregistrement, leur mode d’utilisation et leurs indications [1].

Les exigences d’efficacité et de gain de temps conduisent de plus en plus à rechercher une réduction du nombre de séances consacrées à la réalisation d’une prothèse, au détriment le plus souvent de la précision. Or, c’est lors de l’étape de la pose de la prothèse que l’accumulation des erreurs et des compromis sanctionne sévèrement le praticien. L’origine des problèmes rencontrés au fauteuil provient le plus souvent de l’évanescence, ou de l’insuffisance des informations transmises entre le cabinet et le laboratoire de prothèse [2, 3].

L’édentation sectorielle non compensée, ou le port prolongé de prothèses amovibles instables aboutissent à des perturbations esthétiques et fonctionnelles. Dans le cadre d’un traitement où l’indication de prothèse amovible partielle (PAP) ou composite est privilégiée, le nombre et la situation des secteurs édentés compliquent le transfert des moulages sur articulateur. Une démarche rationnelle s’impose au stade de l’établissement du projet prothétique comme à celui des séquences de réalisation pour choisir les moyens les plus simples et les plus précis.

Le but d’un enregistrement fiable du RMM est de pouvoir concevoir un projet prothétique à partir d’une simulation rigoureuse de la situation clinique et de majorer ensuite la précision des étapes de réalisation prothétique au laboratoire [4, 5].

Cet article n’aborde pas le montage du moulage maxillaire qui est implicitement considéré muni d’une double base et transféré à l’aide d’un arc facial sur l’articulateur [6].

Il a pour objectif de :

– de définir les critères de choix de la position de référence mandibulaire à transférer ;

– de décrire les différents types de support d’enregistrement du RMM et leur mode d’utilisation ;

– de définir leurs indications en fonction du type d’édentement au maxillaire et à la mandibule.

Les données du problème

Pour solidariser le moulage mandibulaire à la branche inférieure de l’articulateur, différentes exigences incontournables doivent être prises en compte :

1. pouvoir maintenir de façon stable et précise le moulage mandibulaire sur le support d’enregistrement jusqu’à la fin de la prise du plâtre d’apport ;

2. retrouver sur l’articulateur la dimension verticale correspondant à celle du projet prothétique ou de l’élaboration des différents composants au laboratoire ;

3. choisir la position de référence mandibulaire conduisant à la simulation clinique la mieux adaptée aux objectifs fonctionnels.

Maintien du moulage sur le support d’enregistrement

A priori, il faut toujours privilégier un enregistrement sur des supports dentaires plutôt que muqueux ou dento-muqueux. Ainsi, le premier critère décisionnel à analyser concerne la possibilité d’utiliser une plaque de cire aménagée, support d’enregistrement conventionnel du RMM pour des arcades indemnes avec des dents non mobiles.

Dans le cas contraire, le recours à 1, voire 2 maquettes d’occlusion qui exploitent un appui muqueux plus ou moins étendu est indispensable.

Quels critères doivent être pris en compte pour déterminer le choix d’un support en cire ou de maquettes d’occlusion ?

• Le nombre et la répartition des dents sur l’arcade maxillaire permettent une stabilité suffisante de la plaque de cire d’enregistrement.

• Les impacts des cuspides antagonistes sur le support d’enregistrement forment un polygone de sustentation assurant la stabilité du moulage dans les indentations enregistrées.

Pour faciliter la compréhension, on peut donner la définition d’un polygone occlusal de sustentation (POS) formé par des contacts occlusaux les plus éloignés possibles dans le plan horizontal, de part et d’autre de l’axe médian, pour conférer au moulage mandibulaire une stabilité optimale sur le support d’enregistrement (fig. 1).

Ainsi, pour choisir une plaque de cire aménagée, ces deux critères sont indissociables et interdépendants.

À l’opposé, en l’absence de l’une de ces 2 conditions, le recours à une, voire deux maquettes d’occlusion est incontournable [7].

Quels critères permettent de déterminer le choix d’une ou deux maquettes d’occlusion ?

Pour prendre la décision, il faut suivre la même démarche que précédemment :

1. le POS le plus étendu est formé grâce aux indentations sur une maquette maxillaire (fig. 2) ;

2. le POS le plus étendu est formé grâce aux indentations sur une maquette mandibulaire (fig. 3).

Le choix s’impose de façon évidente pour l’une ou l’autre de ces deux situations.

3. le POS formé par l’une ou l’autre maquette est de surface insuffisante : ce problème ne peut être résolu que par la mise en œuvre de 2 maquettes d’occlusion (fig. 4).

Dans le cas d’édentement unilatéral de grande étendue, le POS sur le bourrelet de la maquette est de surface trop réduite. Pour équilibrer le nombre d’indentations des 2 côtés de l’arcade, une solution consiste à associer un support de cire à la maquette d’occlusion [8] (fig. 5, 6 et 7).

Quelles techniques permettent de fixer le moulage sur articulateur avec le plus faible risque d’erreur ?

Si l’on prend pour exemple la manipulation de l’articulateur Quick (Fag), l’un des plus utilisés en pratique courante, deux techniques peuvent être décrites.

• Articulateur retourné sur la branche supérieure

C’est la méthode conventionnelle qui consiste à retourner l’articulateur, placer le moulage dans les indentations du support d’enregistrement (fig. 8), contrôler sa stabilité avec les 4 doigts de la main droite (fig. 9) et maintenir la position à l’aide du pouce et de l’index gauches, placés de part et d’autre de la tige incisive (fig. 10). La branche inférieure est ensuite rabattue sur le plâtre déposé sur la base du moulage.

• Articulateur posé à l’endroit sur le plan de travail

C’est la méthode préconisée par A. Lauritzen dans les années 70 [9] avec l’articulateur Dentatus, transposable à de nombreux autres articulateurs : le moulage mandibulaire est placé dans les indentations, branche supérieure ouverte. Les index et majeurs des deux mains sont placés sur la base en regard des indentations les plus extrêmes sur le POS, les 2 pouces placés en opposition permettent d’exercer une pression qui plaque de façon équilibrée le moulage mandibulaire sur l’enregistrement (fig. 11). Un premier mouvement de rotation est exercé jusqu’au contact du pointeau incisif pour évaluer la quantité de plâtre nécessaire (fig. 12). Cette manipulation est renouvelée après apport de plâtre à prise rapide (Snow White®, Kerr) sur la plaque de montage (fig. 13).

Pour ces 2 séquences, l’aide d’une assistante est appréciable pour gagner en temps et en précision.

C’est la technique n° 2 que nous pratiquons le plus souvent en raison du parfait contrôle de la stabilité du moulage durant toute la manipulation.

La prise en compte de la dimension verticale

L’évaluation de la dimension verticale d’occlusion doit faire partie des premières investigations lors de l’examen clinique de l’occlusion.

Pour un patient partiellement édenté, différentes situations sont possibles.

• Il n’existe aucun contact occlusal pour définir la DVO

Pour l’utilisation de l’articulateur, celle-ci devra donc faire l’objet d’une recherche clinique mettant en œuvre les techniques classiquement décrites en prothèse complète : déglutition, phonétique, mesure de l’étage inférieur de la face au repos, etc. [10-15] (fig. 14).

• La DVO est définie par au moins un contact occlusal

Elle doit être appréciée en occlusion d’intercuspidie maximale (OIM), puis en occlusion de relation centrée (ORC).

D’emblée, si une importante prématurité est détectée, créée par exemple par une molaire maxillaire égressée, cette dernière doit être éliminée avant la prise d’empreinte pour moulages d’étude. En effet, dans cette situation, tout enregistrement de la relation centrée s’effectuerait avec un support d’enregistrement trop épais avec les conséquences que cela entraînerait sur la précision.

Lorsqu’il existe une différence importante de DVO entre l’OIM et l’ORC, le transfert du moulage maxillaire avec un arc facial présente un intérêt appréciable, car cela autorise des modifications de la dimension verticale de l’articulateur sans risque d’erreur importante (pour établir un projet prothétique par exemple) (fig. 15 et 16).

La détermination d’une DVO répondant aux critères esthétiques et fonctionnels est une séquence importante exigeant de la part du praticien beaucoup d’attention et de sens clinique, car de sa précision dépendent toutes les étapes de concrétisation du projet prothétique.

Application clinique

Pour le transfert du moulage mandibulaire, les différentes situations cliniques évoquées ci-dessus doivent être analysées pour influencer les protocoles d’enregistrement et de manipulation de l’articulateur [16].

• La DVO n’est pas définie ; aucune dent des 2 arcades n’est en occlusion

C’est en général une maquette d’occlusion qui est utilisée. Au stade de l’étude, elle est réglée progressivement jusqu’à l’obtention d’une DV répondant aux critères fonctionnels et esthétiques (fig. 17, 18 et 19). Très fréquemment, la présence de dents égressées dépassant des courbes fonctionnelles conduit à une réduction très importante de la hauteur des bourrelets.

Au stade de la construction prothétique, le respect de la DVO déterminée à l’issue de l’étude est largement favorisé par un, voire deux montages directeurs sur cire qui accompagnent les travaux entre clinique et laboratoire (fig. 20).

• La DVO est définie, mais de façon erronée (dents abrasées, versées, prothèses fixées défaillantes… par exemple)

La solution la plus intéressante consiste à enregistrer le RMM en utilisant le support d’enregistrement comme référence verticale (fig. 21).

• La DVO est correcte, parfaitement définie

Si un support de cire est utilisé, prenant appui sur les dents restantes, l’évaluation de l’augmentation de la DV par les matériaux d’enregistrement conduit à régler en conséquence la tige incisive à + 2, 3, 4…, avant de fixer le moulage mandibulaire sur l’articulateur.

L’utilisation d’une maquette d’occlusion sans interposition occlusale autorise un enregistrement de la DV correcte, à transposer sur l’articulateur, pointeau à 0 [1-6] (fig. 22).

C’est également le cas lorsque l’enregistrement des indentations s’effectue sur ou en regard de dents préparées (fig. 23 et 24).

Le choix de la position de référence pour enregistrer le RMM

Très en amont de la décision thérapeutique, la position d’enregistrement doit être déterminée rapidement [17]. De cette dernière découlera le mode de transfert du moulage mandibulaire sur l’articulateur.

Quelle position mandibulaire enregistrer ?

Il existe une infinité de positions mandibulaires par rapport au maxillaire. Il faut en choisir une qui soit fiable et reproductible et qui ne soit pas affectée par les différents actes cliniques ou de laboratoire. Seules deux situations permettent de répondre à ces exigences :

– une position donnée par les dents : l’occlusion d’intercuspidie maximale (OIM) ;

– une position donnée par les ATM : la relation centrée (RC) [18].

L’occlusion d’intercuspidie maximale

L’OIM est une relation dentaire. Son enregistrement est réalisé bouche fermée. Elle offre le maximum de contacts simultanés entre les arcades maxillaire et mandibulaire, sans interférence, donc sans interposition de matériau d’enregistrement. Si l’indication de cette position est bien posée et que le nombre de dents antagonistes est suffisant, l’OIM est retrouvée par simple affrontement des moulages [19].

Dans le cas contraire, une maquette d’occlusion est utilisée. Les bourrelets sont réglés jusqu’à l’obtention simultanée des contacts dentaires en OIM et des indentations dans les bourrelets (fig. 22).

À quel stade de la prise en charge thérapeutique enregistrer en OIM ?

• Au stade diagnostique

Excepté pour le faible pourcentage de patients dont l’ORC et l’OIM sont confondues, l’OIM ne doit pas être utilisée lors du transfert des moulages d’étude sur articulateur. Le simple affrontement des moulages peut dissimuler la présence de prématurités en ORC, ce qui peut avoir des conséquences pathologiques à l’issue de la restauration prothétique (fig. 25 et 26).

• Au stade de la réalisation prothétique

L’indication de l’OIM comme position de référence de reconstruction repose sur 4 principes de base.

L’OIM est choisie lorsque :

– la DVO du patient est correcte ;

– les contacts dentaires permettent le centrage-calage de la mandibule ;

– le guidage antérieur est efficace ;

– il n’y a pas de décalage de plus de quelques dixièmes de millimètres entre ORC et OIM.

La relation centrée

La RC est une relation articulaire. Elle est définie ainsi : une situation condylienne de référence correspondant à une coaptation condylo-disco-temporale haute, simultanée, obtenue par contrôle non forcé, réitérative dans un temps donné et pour une posture corporelle donnée et enregistrable à partir d’un mouvement de rotation mandibulaire. (CNO 2001). C’est sa reproductibilité qui fait tout l’intérêt de cette position [17-19].

Son enregistrement est classiquement réalisé grâce à l’interposition d’un matériau entre les arcades. Les dents ne sont plus en contact. (La perforation du matériau d’enregistrement signifierait un contact dentaire, et donc la manifestation potentielle d’un engramme qui fausserait l’enregistrement de référence articulaire.)

Avec l’interposition du matériau d’enregistrement entre les arcades, la DVO est augmentée. À l’issue de l’enregistrement, il est nécessaire de tenir compte de l’épaisseur du matériau support des indentations en augmentant l’ouverture des branches de l’articulateur avant transfert du moulage mandibulaire : pointeau à + 1, +… ou + 5. Plus cette épaisseur est importante, plus le risque d’erreur est grand lors de la fermeture de l’articulateur, en raison de la différence entre la situation de l’axe bi-condylien de rotation mandibulaire du patient et l’axe charnière du simulateur d’occlusion [1] (fig. 22).

L’utilisation d’une butée antérieure (Jig) doit être prise en compte dans les mêmes conditions. M. Le Gall évoque une technique de déprogrammation et de décontraction musculaire avec la technique du Jig associée à une position volontaire de la langue au palais en déglutition [20].

Quand enregistrer en RC ?

• Au stade de l’étude

Comme indiqué précédemment, la relation centrée est la seule référence à utiliser pour établir un diagnostic occlusal précis à partir du montage des moulages d’étude (fig. 27 et 28).

• Au stade de la réalisation prothétique

La RC est choisie lorsque :

– la DVO du patient n’est pas définie ou est erronée ;

– les contacts dentaires ne permettent pas le centrage-calage de la mandibule ;

– le guidage antérieur doit être restauré ;

– il y a un décalage latéral visible entre ORC et OIM (tabl. I).

Techniques d’enregistrement du rapport mandibulo-maxillaire

Pour optimiser la fiabilité des enregistrements [1, 3, 6], il est nécessaire de respecter certains principes simples. Ces principes sont valables quel que soit le support d’enregistrement.

Au stade de l’élaboration prothétique, un contrôle de la précision est conseillé en effectuant plusieurs enregistrements successifs et en les validant à l’aide de la double base maxillaire [1] (fig. 29 et 30).

Techniques

Comme décrit plus haut, les enregistrements doivent avoir une épaisseur minimale pour rester dans la zone de rotation pure de l’articulation.

Les indentations doivent être nettes et peu profondes et ne concerner que les pointes cuspidiennes pour obtenir des contacts précis entre moulages et matériaux d’enregistrement.

Les indentations doivent être nombreuses et constituer un POS le plus étendu possible pour assurer une stabilité des moulages lors du transfert sur articulateur.

Supports d’enregistrement

Les supports d’enregistrement doivent répondre à des exigences de conception assurant résistance mécanique, rigidité et stabilité sur leurs surfaces d’appui [21]. Ils doivent avoir un encombrement minimal. En effet, leur contact avec la langue ou l’intérieur des joues du patient peut perturber sa proprioception et l’inciter à positionner sa mandibule en un geste d’évitement.

Dans le cadre des édentements sectoriels, deux types de supports sont couramment utilisés : la plaque de cire dure aménagée et la maquette d’occlusion.

D’autres techniques et matériaux d’enregistrement de la relation mandibulo-maxillaire ont été décrits : silicones polyvinyl-siloxanes associés à une butée antérieure en résine [22].

Support de cire dure aménagé

Ce type de support répond idéalement aux critères énoncés précédemment : enregistrement de la RC avec une très faible ouverture buccale du patient, rigidité du matériau, appui sur les surfaces dentaires.

Sa conception est simple [1, 17, 19]. Une plaque de cire Moyco X Hard® (Moyco) est légèrement ramollie sous l’eau chaude. Les cuspides du moulage maxillaire sont imprimées à sa surface (fig. 31). Les indentations obtenues assurent la stabilité de la cire en bouche (c’est également l’occasion de valider la cohérence entre le moulage et la situation intrabuccale, ainsi que la stabilisation de la plaque de cire sur l’arcade). La plaque est ensuite découpée suivant la forme d’un trapèze, dont la limite des bords est à l’aplomb des faces vestibulaires des dents (fig. 32). Une plaque de cire Moyco, découpée en forme de U, pliée en deux, sert de renfort et vient rigidifier l’ensemble dans sa partie médiane (fig. 33). La partie antérieure est découpée pour n’obtenir des indentations qu’au niveau des dents cuspidées.

L’enregistrement proprement dit a lieu sur une fine couche d’Aluwax® (Dental Products Co), réchauffée (fig. 34 et 35) et déposée côté arcade mandibulaire. (Le Temp Bond® ou la Bite registration paste® de Kerr ajoutés secondairement, en petite quantité dans les indentations, augmentent la précision et la stabilité du moulage mandibulaire).

Maquette d’occlusion

Ce support d’enregistrement prend appui sur les surfaces ostéo-muqueuses et sur les faces palatines ou linguales des dents. Elle est soumise aux lois de la dualité tissulaire et doit par conséquent répondre à un ensemble de critères de qualité au moment de sa conception, lui conférant rigidité, résistance mécanique et précision d’enregistrement.

Il faut noter que seul un moulage issu d’une empreinte anatomo-fontionnelle peut conférer à la maquette un comportement optimal tenant compte de la visco-élasticité des tissus d’appui.

La base de la maquette d’occlusion doit être rigide et indéformable. Elle est réalisée en résine ou en plaque base (True base), munie d’un fil de renfort.

Le support d’enregistrement des indentations, constitué par les bourrelets, est en matériau dur, thermoplastique : en stents ou en cire dure. Leur forme reproduit celle du rempart alvéolo-dentaire à restaurer (fig. 36 et 37).

Pour être stable, la maquette d’occlusion doit impérativement être élaborée sur le moulage utilisé pour la mise en articulateur. Cette stabilité peut être optimisée par un rebasage sur le moulage isolé, à l’aide d’une couche de pâte en oxyde de zinc-eugénol (Impression Past®, SSWhite) [1-7] (fig. 38).

Pour l’enregistrement, les bourrelets sont ramollis à la flamme douce et placés rapidement en situation en prenant appui sur la base. Les indentations sont ensuite éliminées et les bourrelets remis en forme (fig. 39). La même manipulation s’effectue sur de l’Aluwax® collée sur les bourrelets, puis les excès sont éliminés (fig. 40). Des contrôles successifs en relation centrée permettent de valider la précision de l’enregistrement avant d’affronter les moulages pour le transfert sur articulateur (fig. 41).

• Les sources d’échecs

Lors des séquences d’enregistrement, l’une des principales sources d’erreur provient d’un déplacement de la maquette sous l’effet des contraintes antagonistes. Le praticien doit impérativement bloquer la maquette sur ses appuis par un contrôle bidigital pour lui permettre de percevoir le moindre mouvement lors de la montée de la mandibule et réchauffer les bourrelets en conséquence ou supprimer des interférences (fig. 42).

En effet, les interférences sont une cause d’échecs à surveiller. Elles sont localisées sur la base, notamment au niveau des tubérosités et du trigone ou entre dents et base. Les rétentions pour maintenir les bourrelets peuvent être également des obstacles à la fiabilité de l’enregistrement (fig. 43). Le sommet de ces rétentions doit être impérativement en dessous du plan d’occlusion. L’attention doit donc être portée sur ces éléments dès la conception des supports d’enregistrement. À ce sujet, le dialogue praticien/prothésiste revêt une importance particulière [2] (fig. 44).

NB : Pour les deux supports d’enregistrement décrits ci-dessus, aucun matériau plastique à température ambiante ne peut être envisagé. L’utilisation de la cire rose à modeler, par exemple, est à proscrire. Son manque d’inertie et son potentiel de déformation la réservent strictement aux bases de montage des dents prothétiques.

Armature métallique comme support d’enregistrement

Au stade plus avancé de l’élaboration prothétique, un des meilleurs supports d’enregistrement est constitué par l’armature du châssis. Lorsque l’intégration de l’armature est validée au niveau occlusal (suppression des éventuelles surocclusions avec les taquets, les épaules de crochets ou les connexions de crochets cavaliers), les grilles du châssis sont stabilisées en regard de l’intrados sur le moulage terminal par de la cire rose. Des bourrelets en cire Moyco ou en Stents sont élaborés et exploités selon les mêmes critères que ceux utilisés pour une maquette d’occlusion conventionnelle [23] (fig. 45).

Le transfert du moulage mandibulaire réalisé à partir de cet enregistrement permet d’accéder à la fiabilité du montage sur l’armature des dents sur cire. Celui-ci peut être à nouveau contrôlé avant polymérisation par un nouvel enregistrement (fig. 46). L’équilibration de la prothèse terminée fait appel à un remontage sur articulateur selon les mêmes modalités.

Conclusion

La réussite de la conception prothétique dépend en grande partie de la pertinence du choix de la position du RMM à enregistrer et de la technique d’enregistrement. La systématisation de réflexes simples et de protocoles bien établis permet d’instaurer une routine de fiabilité que nous recherchons tous. Une démarche rationnelle, l’établissement et l’application d’un arbre décisionnel pour l’enregistrement du rapport mandibulo-maxillaire permettent d’augmenter la fiabilité des restaurations prothétiques et au final, un gain de temps non négligeable au fauteuil.

Pour le praticien, cela se traduit par une diminution de stress considérable. C’est également la confiance et la sérénité pour le patient qui évite les séances de retouches fastidieuses pour intégrer la prothèse.

Bibliographie

  • 1 Schittly J, Schittly E. Prothèse amovible partielle. Clinique et laboratoire. Collection JPIO. Rueil-Malmaison : Éditions CdP, 2006.
  • 2 Fouilloux I, Hurtabo S, Begin M. Prothèse composite : la communication clinicien-prothésiste. Stratégie Proth 2002;2(1):15-27.
  • 3 Derrien G, Jardel V. Prothèse amovible partielle et rétablissement de la fonction occlusale. Cah Prothèse 2002;120:81-90.
  • 4 Margerit J, Joullié K, Nublat C, Vieville F. Le montage directeur : matérialisation des différents paramètres occlusaux en PAP. Stratégie Proth 2002;2(1):41-51.
  • 5 Schittly E. Le montage directeur : une réalisation incontournable en prothèse composite. Clinic – Cahier 1 2009;30(3):145-152.
  • 6 Schittly J. Pratique de l’articulateur en prothèse amovible partielle. In : Orthlieb JD, Brocard D, Schittly J, Manière-Ezvan A, eds. Occlusodontie pratique. Rueil-Malmaison : Éditions CdP, 2006.
  • 7 Schittly E, Cariou F. Édentements sectoriels : Enregistrement des rapports maxillo-mandibulaires. Cah Prothèse 2000;112:25-36.
  • 8 Schittly E, Feys G. Classe II de Kennedy de grande étendue. Technique originale d’enregistrement de la relation centrée. Cah Prothèse 2001;114:45-50.
  • 9 Lauritzen A. Mechanics of occlusion. J Maxillofac Orthop 1969;2(2):31-32.
  • 10 Postaire M. Contrôle ou détermination de la dimension verticale d’occlusion par une technique phonétique. Clinic 1992;6:425-429.
  • 11 Begin M, Rohr M. La dimension verticale et l’espace libre d’inocclusion : un moyen simple de détermination. Act Odonto Stomatol 1992;177:105-112.
  • 12 Millet C, Schoendorff R. Dimensions verticales en prothèse complète. Paris : Elsevier. Encycl Med Chir Stomatologie-Odontologie 1996;II:23-325-E-10.
  • 13 Pouysségur V, Serre D, Exbrayat J. Test phonétique et dimension verticale : le logatome. Cah Prothèse 1997;97:53-55.
  • 14 Makzoumé J. La dimension verticale en prothèse totale : rapport critique. Cah Prothèse 2000;109:15-23.
  • 15 Berteretche MV, Hüe O. Les dimensions verticales. In : Orthlieb JD, Brocard D, Schittly J, Manière-Ezvan A, eds. Occlusodontie pratique. Paris : Éditions CdP, 2001:31-40.
  • 16 Schittly J, Borel JC, Exbrayat J. L’occlusion en prothèse partielle amovible. Réal Clin 1995;6:447-465.
  • 17 Laurent M, Laborde G, Orthlieb JD. Choix et enregistrement de la position de référence. In : Orthlieb JD, Brocard D, Schittly J, Manière-Ezvan A, eds. Occlusodontie pratique. Rueil-Malmaison : Éditions CdP, 2006.
  • 18 Orthlieb JD, Ré JP, Perez C, Darmouni L, Mantout B, Gossin G, Giraudeau A. La relation centrée myostabilisée : un concept simple, physiologique et consensuel. Cah Prothèse 2008;141:13-21.
  • 19 Orthlieb JD. Gnathologie fonctionnelle. Volume 1 : occlusion et restauration prothétique. Collection « Mémento ». Rueil-Malmaison : Éditions CdP, 2010.
  • 20 Le Gall MG, Joerger R, Bonnet B. Où et comment situer l’occlusion ? Relation centrée ou position de déglutition guidée par la langue ? Cah Prothèse 2010;150:33-46.
  • 21 Borel JC, Schittly J, Exbrayat J. Manuel de prothèse partielle amovible. 2e édition. Paris : Masson, 1994.
  • 22 Derrien G, Jardel V. Silicones polyvinylsiloxanes et enregistrement des rapports mandibulo-maxillaires. Partie 2 : aspects cliniques. Cah Prothèse 2009;148:55-61.
  • 23 Santoni P. Maîtriser la prothèse partielle amovible. Préface P. Mariani. Rueil-Malmaison : Éditions CdP, 2004.