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DSO
Professeur associé
Département de parodontologie
UFR de stomatologie et de chirurgie maxillo-faciale Paris VI
La greffe intrasinusienne par abord latéral (technique de Caldwell-Luc) a été décrite par Boyne et James en 1980 [1]. Depuis, cette technique a été largement utilisée pour la réhabilitation du secteur maxillaire postérieur présentant une hauteur osseuse insuffisante associée à une pneumatisation du sinus. L'abord du sinus par voie crestale a été décrit par Tatum dans les années 1970, mais n'a jamais été véritablement exploité...
La greffe intrasinusienne par abord latéral (technique de Caldwell-Luc) a été décrite par Boyne et James en 1980 [1]. Depuis, cette technique a été largement utilisée pour la réhabilitation du secteur maxillaire postérieur présentant une hauteur osseuse insuffisante associée à une pneumatisation du sinus. L'abord du sinus par voie crestale a été décrit par Tatum dans les années 1970, mais n'a jamais été véritablement exploité [2]. Ce n'est qu'en 1994 que Summers a repris et simplifié cette technique. Deux variantes ont été proposées en fonction de la hauteur résiduelle de la crête osseuse [3, 4].
Elle consiste à soulever le plancher sinusien, greffer l'espace ainsi créé et poser l'implant simultanément. Dans ce cas, l'os résiduel doit être supérieur ou égal à 5 mm pour assurer la stabilité primaire de l'implant. Le site du futur implant, à condition qu'il soit de type 3 ou 4, est préparé à l'aide d'une série d'instruments appelés ostéotomes. Ils permettent de préserver l'os résiduel en le condensant latéralement et en en refoulant une partie vers le plancher sinusien. La préparation du site implantaire s'arrêtera à 1 mm du plancher sinusien. C'est alors que la première dose du greffon sous forme de particules est introduite dans le site. Le dernier ostéotome utilisé est remis en place et on appliquera de légers coups de maillet afin de fracturer le plancher sinusien. La membrane sinusienne se décolle du plancher sous l'effet de la pression exercée par le greffon. Au fur et à mesure que l'espace ainsi créé se remplit, la membrane continue à se décoller. Selon Summers, aucun instrument ne doit franchir le plancher afin d'éviter le contact avec la muqueuse, ce qui pourrait occasionner sa déchirure. Les études se rapportant à cette technique montrent des taux d'ostéointégration des implants de l'ordre de 94 à 97 % comparables à ceux relevés au niveau d'un os non greffé [5-9].
Elle consiste à greffer le sinus par voie crestale et à poser les implants d'une manière différée. Dans ce cas, la hauteur osseuse résiduelle est en deçà des 5 mm requis pour assurer la stabilité primaire de l'implant. En fonction de l'étendue de l'augmentation intrasinusienne projetée et du nombre d'implants prévus, une ou plusieurs tranchées circulaires sont réalisées à l'aide d'un trépan de 5 ou 6 mm de diamètre interne (Fig. 1). La profondeur de la tranchée doit impérativement s'arrêter à au moins 1 mm de la corticale du plancher. Pour cela, une étude tomodensitométrique (scanner), accompagnée d'un guide radiologique muni de repères radio-opaques semble indispensable pour créer la tranchée à un endroit précis dont on aura mesuré préalablement la hauteur. Il arrive souvent que la préparation du disque osseux par le trépan ne soit pas uniforme en profondeur sur l'ensemble de son périmètre en raison de variations topographiques de la crête et du plancher du sinus. La mobilisation du disque peut alors s'avérer fastidieuse avec un risque de perforation de la muqueuse. Dans ce cas, l'utilisation d'un ostéotome, spécialement mis au point par Toffler [10], est fortement recommandée (Fig. 2). Il permet de compléter ponctuellement la désinsertion du disque osseux au niveau de la tranchée. Une fois refoulé, le disque doit rester attaché à la membrane sinusienne. Avant l'introduction de la première dose du greffon, l'intégrité de la membrane sinusienne est vérifiée en ayant recours, de préférence, à des binoculaires avec un éclairage par lumière à fibres optiques. Accessoirement, et dans le doute, on peut recourir à la manœuvre de Valsalva. Les 2 ou 3 premières doses du greffon doivent être introduites, très délicatement, dans le sens vertical pour permettre un premier décollement de la membrane. Par la suite, on alternera entre l'insertion latérale et verticale pour éviter une pression continue sur un seul point et permettre le décollement de part et d'autre de la membrane. Quelques doses sont à nouveau incorporées, et un cliché rétro-alvéolaire est pris en cours d'intervention. L'aspect régulier (souvent en dôme) qu'affiche le greffon sur le cliché au niveau de sa partie apicale est une preuve supplémentaire de l'intégrité de la membrane sinusienne. La procédure peut alors se poursuivre. Le niveau d'augmentation dépend du volume du greffon. Selon Uchida et al., pour obtenir un gain de 5 mm de hauteur intrasinusienne, il faudrait remplir un volume de 1,17 cc en moyenne [11]. À titre d'exemple, un flacon de Bio-Oss de 2 g occupe un volume de 4 cc.
Les avantages que cette technique offre sont de 4 ordres.
La hauteur osseuse obtenue est suffisante pour placer des implants d'au moins 10 mm de longueur (longueur minimale recommandée au niveau du maxillaire postérieur) et ce, quelle que soit la hauteur de la crête résiduelle. Le gain est de l'ordre de 9 à 11,5 mm en moyenne selon les auteurs [4, 10, 12-14] (Fig. 3 et 4).
En évitant d'aborder le sinus par la technique de la fenêtre latérale, la vascularisation de la cavité sinusienne - et, par conséquent, celle du greffon - est en grande partie préservée. Selon Solar et al. [15], celle-ci se réalise par le biais de :
- l'anastomose vasculaire intra-osseuse (AI);
- l'anastomose extra-osseuse (AE) ;
- les vaisseaux de la membrane sinusienne provenant surtout de l'artère alvéolaire postéro-supérieure (AAPS), l'artère infra-orbitaire (AIO) et l'AI (Fig. 5).
Dans la technique d'abord crestal du sinus, l'AE est préservée, car l'incision et le décollement du lambeau sont très limités. Cette branche est responsable de la vascularisation mucopériostée dans la zone osseuse prémolaire-molaire [15]. Elle est la seule source d'irrigation du tissu osseux au niveau des crêtes fortement résorbées. Il est donc recommandé, au niveau des crêtes fortement atrophiées, de ménager le périoste et de le décoller le moins possible (Fig. 1).
De même, l'AI passant au sein de la paroi latérale du sinus est laissée intacte contrairement à l'abord latéral (Fig. 6). Afin de limiter le préjudice porté à cette source d'irrigation importante du sinus, Solar et al. [15] ainsi que Watzek et al. [16] préconisent de limiter au maximum l'étendue du volet latéral [15, 16]. Cette disposition, à notre sens, aurait pour conséquence de rendre plus aléatoire le décollement de la membrane sinusienne. Les facteurs de succès d'une greffe sinusienne tels qu'ils ont été définis par Watzek et al. [16] sont :
- la capacité proliférative du site hôte ;
- l'index de l'activité métabolique ;
- le volume et la taille du défaut à traiter ;
- la vitalité du site hôte et sa capacité à revasculariser le greffon ;
- la stabilité du greffon au niveau du site hôte ;
- la concentration de protéines morphogéniques osseuses au niveau de la surface osseuse de l'hôte.
Les 3 derniers facteurs semblent plus favorables avec la technique crestale, car :
- la vascularisation et, par conséquent, la vitalité du site sont mieux respectées. Le greffon devrait être mieux vascularisé (et donc sa maturité accélérée), particulièrement en son centre qui reçoit l'apport sanguin des branches collatérales de l'AI et du périoste des tissus mous [15] ;
- la stabilité du greffon est mieux assurée du fait de la conservation de la paroi latérale ;
- l'apport de protéines morphogéniques devrait être plus favorable du fait de la conservation de la paroi latérale richement vascularisée contrairement à la crête dont la vascularisation est quasiment inexistante au niveau des crêtes fortement résorbées [16].
Les suites postopératoires sont minimes avec la technique crestale, car elle est peu invasive. Dans une étude sur 63 greffes intrasinusiennes, Wiltfang et al. ont mis en évidence des conséquences mineures (hématome, gonflement) dans 40 des 45 cas opérés selon la technique latérale. Deux d'entre elles ont développé une sinusite. En revanche, aucune conséquence n'a été décelée sur les 18 cas opérés par la technique crestale [17].
Le pourcentage de perforation de la membrane sinusienne avec la technique crestale est de l'ordre de 5,5 % [10]. Cependant, le nombre d'études sur cette technique est encore très limité et ce résultat ne doit pas être généralisé. Néanmoins, il reste bien en deçà des chiffres constatés avec la technique de l'abord latéral (17 à 35 %) [18-20].
• La présence de septa intrasinusiens peut être une contre-indication si l'on envisage de greffer l'ensemble de la cavité sinusienne. Dans des cas d'augmentation ponctuelle (et c'est là encore un des avantages de cette technique), ces septa peuvent être évités.
• Le contrôle de l'intégrité de la membrane est impossible à vérifier de visu dans la première variante de la technique (mais pas dans la seconde) à cause de l'épaisseur de la crête (4 mm et plus) et de l'étroitesse de l'ouverture crestale. En revanche, le recours à la radiographie peropératoire afin de vérifier l'aspect en dôme qu'affiche souvent le greffon reste d'une grande aide.
En théorie, la technique de l'abord crestal semble, dans la plupart de ses aspects, plus avantageuse pour le patient. Des études comparatives et contrôlées traitant de l'aspect clinique, radiologique et histomorphométrique sont toutefois nécessaires pour obtenir des éléments de réponse concrets.
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