Méthodologie pour le positionnement tridimensionnel d'un implant à visée esthétique. 1re partie : généralités - - Implant n° 2 du 01/05/2006
 

Implant n° 2 du 01/05/2006

 

Implant pas à pas

Résolution du cas

Jean-Pierre Brun*   Philippe Leclercq**  


*Expert près la cour d'appel de Grenoble
49, avenue Alsace-Lorraine
38000 Grenoble
**Expert près la cour d'appel de Paris
45, rue de Courcelles
75008 Paris

L'os réagit à toute sollicitation. En dessous de son seuil de réactivité, il va se résorber par hypofonction. Au-dessus, il le fera par hyperfonction. Dans cette enveloppe fonctionnelle, il va vivre dans son cycle de « résorption-activation » physiologique ou « turn-over »

Ceci traduit avec simplicité les lois de Julius Wolff[1].

Il faudra donc faire travailler l'os périphérique dans cette enveloppe de réactivité afin de résister favorablement aux forces de cisaillement.

La non-prise en compte des réactions tissulaires périphériques à long terme fait courir un risque majeur[2]. Leur stabilisation en conformité avec la recréation d'un espace biologique de bonne stabilité est essentielle[3].

Le placement de l'implant permettant de restaurer la dent dans le couloir prothétique est donc fondamental.

1 - Proposition d'une méthodologie(Fig. 1b, Fig. 1a, Fig. 1d, Fig. 1c)

Matériel chirurgical

Outre la trousse à dissection et la trousse implantaire, il inclut :

- un pied à coulisse chirurgical pour préciser les distances à respecter ;

- des guides chirurgicaux avec contrôle de l'enfoncement et visualisation du diamètre de l'implant par un plateau sur le guide.

Méthode

- une visualisation « d'anticipation » constante de la future couronne implanto-portée pendant la pose implantaire ;

- à cet égard, il est tenu pour acquis qu'un cratère osseux périphérique à la tête implantaire va s'établir en une année environ ; il est d'un diamètre et d'une profondeur moyens de 1,5 mm ;

- ceci amène au respect d'une « carte » de sécurité qui sera présente à l'esprit pendant la pose.

2 - Les 5 points clés(Fig. 2a, Fig. 2b, Fig. 2c)

1. Distance point de contact crête : 5 mm

C'est la règle de Tarnow[4, 5]

Il faut confirmer cliniquement la distance réalisable entre le futur point de contact prothétique et la crête osseuse péri-implantaire qui devra se situer autour de 5 mm, sous peine de ne pas permettre une recréation de papille interdentaire. Celle-ci est en effet limitée par l'absence de fibres péri-implantaires. La règle de Tarnow demeure aujourd'hui la seule règle cliniquement applicable avec une marge de sûreté élevée.

2. Distance bord à bord entre deux implants : 3 mm

Le cratère de 1,5 par 1,5 doit toujours être considéré au moment de la pose et « deviné par l'opérateur ».

À ce jour, quels que soient le type d'implant et la situation clinique, on doit le considérer comme inéluctable

3. Toile osseuse vestibulaire à partir de l'épaulement implantaire : 1,5 mm

L'adaptation physiologique à 1 an de la base osseuse sous charge est largement dépendante de ces volumes tissulaires.

4. Espace bord à bord entre un implant et une dent contigus : 2 mm

Cette distance sera réduite de par l'existence du ligament parodontal stabilisateur de la papille.

2 - Les 5 points clés (suite, Fig. 2d)

5. Enfoncement sous la ligne de jonction amélo-cémentaire : 1 mm

Si l'on trace une ligne reliant la ligne de jonction amélo-cémentaire des dents adjacentes au futur implant, l'émergence de la tête implantaire horizontalement à la JEC de la dent adjacente doit se situer à 1 mm apicalement à celle-ci, mais pas plus.

Ce concept du 5, 4, 3, 2, 1 permet un positionnement implantaire sécurisé pour l'avenir de la future dent.

3 - Les points particuliers(Fig. 3b, Fig. 3a)

1. Le temps de stabilisation des tissus mous

Il est fondamental et s'inscrit dans la demande actuelle de vouloir « gagner du temps ».

Il existe une perte de hauteur gingivale péri-implantaire d'une valeur moyenne de 1 mm dans cette période de stabilisation des tissus mous pour 80 % des cas analysés [7].

Gagner du temps passe par le respect des délais de la physiologie.

3 - Les points particuliers (suite, Fig. 3c, Fig. 3d, Fig. 3f, Fig. 3e, Fig. 3g)

2. Le biotype gingival et le support tissulaire

Même si le parodonte n'existe plus, la littérature utilise par extension la même terminologie autour d'un implant. De grandes précautions prothétiques et notamment un respect des émergences sans surcontour doivent être pris avec un biotype fin. Il convient de rappeler que les volumes osseux reconstruits se stabiliseront aux dimensions naturelles d'adaptation et ne demeureront pas aux dimensions apportées quel que soit le volume obtenu après greffe d'os. Il est donc inutile de reconstruire à l'excès un volume de tissu insuffisant. Un environnement de tissu conjonctif protecteur par apport de tissus mous est par ailleurs une sécurité physiologique de maintenance dans le temps de l'écrin gingival.

La restauration implantaire esthétique est difficile à traiter. Le processus de résorption fait suite immédiatement à l'avulsion de la dent et exerce une influence négative sur le contour des tissus mous et durs. Celle-ci est telle que, dans la très grande majorité des cas esthétiques, la perte osseuse doit être compensée par des apports tissulaires durs ou mous afin de pallier cette résorption imprévisible au sens quantitatif.

Cette compensation doit se faire dès l'avulsion avant le début du processus même de la résorption. Elle ne devrait pas excéder ce que la nature avait programmé et construit.

Le cheminement implantaire commence donc avec l'avulsion. Il implique une technique atraumatique et fine.

L'implant doit être posé en respect des tissus futurs supports de la couronne.

Le cheminement du succès ne se termine jamais, mais prend sa maturité après la réalisation prothétique qui sera garante du remaniement des tissus péri-implantaires.

Le respect strict du plan de traitement, des délais biologiques, la coordination des étapes sont les garants des succès immédiats et à long terme.

BIBLIOGRAPHIE

  • 1. Wolff J.Das Gesetz der Transformation der Knochen. Berlin : éd. A. Hirschwald, 1892.
  • 2. Cochran DL, Hermann JS, Schenk RK, Higginbottom FL, Buser D.Biologic width around titanium implants. A histometric analysis of the implanto-gingival junction around unloaded and loaded nonsubmerged implants in the canine mandible. J Periodontol 1997;68:186-198.
  • 3. Gargiulo AW, Wentz FM, Orban B.Dimensions and relations of the dento gingival junction in humans. J Periodontol 1961;32:261-267.
  • 4. Tarnow DP, Cho SC, Wallace SS.The effect of inter-implant distance on the height of inter-implant bone crest. J Periodontol 2000;71:546-549.
  • 5. Tarnow DP, Magner AW, Fletcher P.The effect of the distance from the contact point to the crest of bone on the presence or absence of the inter proximal dental papilla. J Periodontol 1992;63:995-996.
  • 6. Grunder U, Gracis S, Capelli M.Influence des rapports tridimensionnels entre l'os et l'implant sur le résultat esthétique. J Parodont Dent Rest 2005;25(2):113-119.
  • 7. Small P, Tarnow D.Gingival recession around implants: a one-year longitudinal prospective study. Int J Oral Maxillofac Implants 2000;15:527-532.
  • 8. Belser UC, Bernard JP, Buser D.Implant placement in the esthetic zone. In : Lindhe J, Karring T, Lang NP, eds. Clinical periodontology and implant dentistry. 4th edition. London : Blackwell Munksgaard, 2003:915-944.
  • 9. Berglund T, Lindhe J, Ericsson I, Marinello C, Liljenberg B, Thomsen P.The soft tissue barrier at implants and teeth. Clin Oral Implants Res 1991;2:81-90.