Comparaison de la résistance et des modalités d'échec de sept systèmes implantaires - Implant n° 1 du 01/02/1999
 

Implant n° 1 du 01/02/1999

 

Prothèse

Lennart Möllersten *   Paul Lockowandt **   Lars-Åke Lindén ***  


*DDS, Odont Dr Sturegatan 10
11436 Stockholm, Suède
**DDS, Odont Dr Ancien Professeur et Doyen du département de biomatériaux et technologie dentaire
Karolinska Institutet, Odont Inst Dental Materials, Box 4064 14104 Huddinge, Suède
***DDS, Odont Dr Professeur et chef du département de biomatériaux et sciences dentaires
Umeå University 90187 Umeå, Suède

Cette étude expérimentale traite de l'influence du type de connexion sur la résistance et les modalités d'échec des systèmes d'implants dentaires. Les tests de résistance portent sur le système dans son ensemble. Sept systèmes implantaires avec différents types de connexion sont évalués. La résistance et l'échec varient de façon significative selon les systèmes implantaires et la profondeur de la connexion.

Plusieurs articles ont rapporté l'efficacité dans le temps des implants ostéointégrés comme supports de bridges [1-4]. Cependant, la méthode est encore entachée de faiblesses telles la perte de l'ostéointégration, la fracture des implants, des vis prothétiques et des vis de pilier.

Une étude d'un suivi à long terme [5] sur des implants de Brånemark (524 placés au maxillaire et 480 à la mandibule) fait état, par exemple, d'un taux de fracture des implants de 16 % au maxillaire et de 4 % à la mandibule 15 ans après leur mise en place. Babbush et Shimura [3] rapportent une seule fracture d'implant sur un total de 28 échecs implantaires relevés dans une étude de suivi sur cinq ans de 1 059 implants IMZ en deux étapes. Dans une autre étude portant sur 589 implants consécutifs de Brånemark supportant des bridges complets suivis pendant sept ans, il est noté trois fractures d'implants, cinq fractures de vis de piliers et sept fractures de vis de prothèse [6]. Les résultats d'un suivi sur cinq ans [7], réalisé par des étudiants postuniversitaires de l'école dentaire de la Tufts University sur 24 patients traités avec 71 implants IMZ supports de bridges, sont les suivants : neuf fractures IME et trois fractures de vis. Zarb et Schmitt [8] constatent, dans le suivi à long terme (quatre à neuf ans) de 274 implants de Brånemark placés sur 49 arcades de 46 patients consécutifs, trois piliers endommagés, neuf fractures de vis de pilier et 53 fractures de vis en or. Au cours de l'observation sur 15 ans de l'implant de Tuebinger, il est relevé 2,7 % d'échec des implants standard en raison de fractures causées par des traumatismes externes ou au cours de la mastication [9]. Le suivi de 76 implants de Brånemark unitaires [10] permet de conclure que le desserrage de la vis est la complication la plus fréquente.

La faiblesse mécanique des systèmes implantaires a des répercussions cliniques. Une connaissance approfondie des propriétés mécaniques des systèmes implantaires est par conséquent indispensable. McGlumphy et al. [11] ont comparé les contraintes provoquant l'échec des systèmes implantaires les plus utilisés. Balfour et O'Brien [12] ont testé la stabilité antirotationnelle maximale, la résistance à la flexion et la résistance dans le temps à la fatigue cyclique de trois systèmes d'implants unitaires avec différentes connexions prothétiques. Globalement, ils ont trouvé que l'hexagone interne permet la meilleure stabilité des restaurations unitaires. Les hexagones et octogones internes ont une résistance de 50 % supérieure aux systèmes à hexagone externe.

Pour Balfour et O'Brien [12], la connaissance des limites fonctionnelles et mécaniques des systèmes d'implants unitaires est essentielle au succès à long terme de la restauration. L'échec par fatigue du métal de la vis de prothèse utilisée dans le système Brånemark a fait l'objet d'une analyse théorique [13]. L'importance du dessin de la vis et la nécessité d'appliquer le couple correct pour que la résistance à la fatigue de la vis soit la plus durable possible ont été précisées. Dellinges et Tebrock [14] ont évalué l'intensité du couple pouvant être appliquée sur les têtes des vis d'implants avec des tournevis manuels et des clés lors d'une mise en place clinique simulée : elle est de l'ordre de 11,55 Ncm. Les auteurs [14] concluent que le petit diamètre des vis en or permet de les serrer correctement à la main à 10 Ncm alors que les plus grosses ne peuvent pas être serrées avec les tournevis manuels. Patterson et al. [15]communiquent des résultats d'études in vitro des forces et des moments de flexion transmis au travers des piliers d'un bridge implantoporté aux implants sous-jacents : pour eux, le rôle du moment de flexion dans les échecs est plus important que ce qu'il est supposé être.

La résistance à la flexion des systèmes implantaires est essentielle au succès à long terme de la restauration et dépend certainement de plusieurs facteurs comme le diamètre des vis, le matériau et la forme de la connexion du système implantaire. Les connexions des systèmes implantaires sont de conceptions variées. L'un des facteurs important de la conception est la profondeur de la connexion. Certaines connexions sont superficielles et d'autres assez profondes. On peut raisonnablement supposer que la résistance à la flexion d'un système implantaire est d'autant plus élevée que la connexion est profonde.

Le but de cette recherche est d'étudier expérimentalement l'influence de la hauteur de la connexion sur la résistance à la flexion du système implantaire. Sept systèmes implantaires avec des connexions à des niveaux différents sont soumis à des charges de flexion. L'hypothèse de départ est que le niveau de la connexion n'a aucune influence sur la résistance à la flexion. Les modalités d'échec des systèmes implantaires sont également identifiées.

Matériels et méthodes

Les systèmes implantaires étudiés sont les suivants : Astra Tech , ITI Bonefit , Frialit-2 , Impla-Med , Nobel Biocare Estheticone , IMZ avec pilier en titane et IMZ avec connecteur (fig. 1a, 1b, 1c, 1d, 1e, 1f et 1g). Ces systèmes ont été retenus pour l'étude, car ils sont les seuls approuvés par le National Swedish Health Insurance et sont couramment utilisés dans de nombreux pays de par le monde.

Dix implants et leurs accessoires, c'est-à-dire pilier et vis, sont sélectionnés au hasard dans chaque système. La longueur des implants est de 15 mm et leur diamètre va de 3,5 à 4,5 mm. Lorsque c'est possible, des implants de même diamètre sont utilisés (4 mm). Si cette taille n'existe pas, la dimension la plus proche est retenue. Pour simuler les conditions cliniques, des couronnes en or standardisées (fig. 1d) sont coulées dans un alliage de type III. Les couronnes sont réalisées avec une encoche en forme de V située à 6 mm du bord cervical de la couronne. Plus tard, la pression est appliquée au niveau de l'encoche. La couronne, le pilier et l'implant sont assemblés par vissage, sauf dans les cas où le système n'est pas fourni avec des vis pour prothèse (IMZ avec pilier en titane et Frialit-2). Dans ces cas-là, les prothèses sont scellées avec un ciment-résine acrylique. Les vis sont serrées par le même opérateur au moyen des dispositifs de serrage manuel fournis par les fabricants. L'échantillon dans son entier, composé de l'implant, du pilier, de la couronne et d'une (voire deux) vis, est inclus dans de la résine acrylique autopolymérisable dans un cylindre en cuivre parfaitement ajusté. Ainsi, une faible épaisseur de résine acrylique persiste entre le cylindre et l'implant, le bord de la couronne se situant à l'extrémité du cylindre. Le cylindre renfermant l'échantillon est fixé sur un support de cuivre spécialement fabriqué pour cette étude (fig. 2). L'échantillon est placé dans une machine à tester universelle (modèle Zwick 1454 ) et soumis à une force de compression avec une fréquence de 0,1 mm/s jusqu'à ce que la défaillance de l'échantillon soit évidente. La contrainte est transmise perpendiculairement à l'axe longitudinal de l'échantillon au moyen d'une tige dont l'extrémité taillée en coin concentre la pression sur l'encoche de la couronne en or à 6 mm du bord cervical de la couronne (fig. 2 et 3). La contrainte est enregistrée sur des courbes de déplacement (fig. 4) sur du papier graphique défilant à 1 mm/s.

La lecture des courbes est faite en plaçant une règle le long de la partie rectiligne de la courbe et en la faisant glisser parallèlement à 1 mm de la courbe. Puis on repère le point où la règle coupe la courbe (fig. 5). Ce point correspond à la force pour laquelle la déflexion permanente atteint 0,1 mm. La valeur est calculée sur l'ordinateur selon la formule :

L × vitesse de charge / vitesse du graphique (mm/s)

où L est la distance entre la règle et la partie rectiligne de la courbe. Après le test, chaque échantillon est retiré du support démontable, examiné pour identifier la modalité de l'échec et microphotographié.

Estimation du couple lors du serrage manuel des vis

L'évaluation du couple de serrage manuel des vis et des piliers est réalisée au moyen de deux vis. L'une est une vis de prothèse Impla-Med, dont la partie filetée a un diamètre de 1,4 mm et qui représente les vis de petit diamètre. L'autre est un pilier de connecteur IMZ, dont la partie filetée a un diamètre de 3 mm et qui représente les vis de gros diamètre. Un échantillon Impla-Med est fixé sur le support en cuivre utilisé pour le test de résistance. La vis de prothèse est serrée manuellement et desserrée dix fois au moyen du tournevis fourni par le fabricant et qui a été fixé à la machine à tester Zwick avec un fil de fer fin. L'opérateur tient le tournevis entre ses doigts pour simuler le vissage réunissant les composants de l'échantillon à tester. L'intensité de la force utilisée est lue sur un cadran et enregistrée. Le couple est calculé selon la formule :

couple = F × d

où F représente la force en newtons et d le diamètre en mm de la vis. Puis, un échantillon de connecteur IMZ est monté de la même façon que l'échantillon Impla-Med, mais la couronne en or est retirée. Le pilier est alors serré et desserré manuellement dix fois avec le dispositif spécial prévu à cet effet et fourni par le fabricant du système implantaire IMZ. L'intensité de la force utilisée est lue sur le cadran et enregistrée. Le couple est calculé.

Profondeur de la connexion

Le niveau de la connexion est mesuré sous microscope à un grossissement × 10. Il est indiqué sur la figure 6 .

Analyse statistique

Le coefficient de corrélation de Spearman r est déterminé pour le rapport de la profondeur de la connexion et la contrainte d'échec. Ce coefficient est une mesure d'association entre deux variables réalisée selon une échelle ordinale. Dans ce cas, cette mesure est retenue plutôt que le coefficient de corrélation normal (Pearson), car l'axe des x, niveau de la connexion, n'est pas une variable à échelonnement continu lorsque les observations sont faites au hasard. Une analyse de variance à une entrée (Anova) est également réalisée pour examiner les différences systématiques de contraintes d'échec pour les systèmes implantaires étudiés. Elle est suivie d'une comparaison multiple [16].

Résultats

Profondeur de la connexion et contrainte d'échec

Le niveau des connexions endommagées est compris entre 0,6 et 6 mm (tableau I). Il y une corrélation statistiquement significative (r = 0,959) entre la profondeur de la connexion endommagée et la contrainte d'échec sur un même système implantaire. Les niveaux superficiels sont corrélés aux faibles contraintes et les niveaux plus profonds, aux contraintes importantes (fig. 7). L'hypothèse nulle est rejetée.

Résistance extrême

L'analyse Anova révèle des variations significatives des contraintes d'échec entre les systèmes implantaires (p< 0,0001) (tableau II). L'hypothèse nulle est rejetée. Les valeurs moyennes sont comprises entre 138 N pour l'Estheticone de Nobel Biocare et 693 N pour l'IMZ avec pilier en titane. La figure 8 illustre la variation moyenne de la contrainte d'échec. Une comparaison multiple révèle plusieurs différences significatives (tableau III). La résistance extrême de l'IMZ avec pilier en titane est significativement plus élevée que celle des autres systèmes implantaires (p< 0,001). La résistance extrême du système implantaire Frialit-2 est significativement plus importante que celle des autres, mis à part l'IMZ avec pilier en titane (p = 0,001). Les résistances extrêmes des implants Bonefit et Astra Tech ne sont pas significativement différentes (p > 0,05), mais les deux présentent des valeurs plus élevées que l'IMZ avec connecteur, l'Impla-Med et l'Estheticone Nobel Biocare (P< 0,001). L'IMZ avec connecteur présente une résistance extrême plus importante que l'Estheticone Nobel Biocare (P = 0,004). Il n'y a aucune différence significative entre l'IMZ avec connecteur et l'Impla-Med (P > 0,05). Enfin, la différence entre l'Impla-Med et l'Estheticone Nobel Biocare n'est pas statistiquement significative (p > 0,05).

Modalités d'échecs

La situation et la modalité d'échec des systèmes implantaires étudiés sont présentées sur la figure 9 et le tableau IV . Dans quatre des sept systèmes étudiés, tous les échantillons se fracturent au même endroit. Le système IMZ avec pilier en titane se fracture à cause de la flexion plastique du moignon dans les dix échantillons (dans cet article, les piliers conçus comme des moignons sont considérés comme des moignons). La fracture de la vis de prothèse est observée dans tous les échantillons Astra Tech. L'échec de tous les échantillons Frialit-2 est la conséquence d'une flexion plastique et de moignons fissurés. L'échec des systèmes Impla-Med est, dans deux cas, dû à une flexion plastique et, dans huit cas, dû à la fracture des vis de prothèses. Dans les trois échantillons testés restants, les échecs sont dus aux deux raisons citées. L'échec du système Estheticone de Nobel Biocare est, dans neuf cas, la conséquence d'une flexion plastique des vis de pilier dans leur partie non fileté (fig. 10) et, dans un cas, de la fracture de la vis de pilier dans la partie filetée. L'échec des trois échantillons Bonefit est dû à la fracture du pilier dans sa partie filetée. Les échecs des échantillons Bonefit restants sont observés au niveau des têtes des vis de prothèse, deux sont fracturées et cinq sont déformées. Les modalités d'échec des échantillons IMZ avec connecteur sont, dans huit cas, la flexion plastique de la vis de prothèse (fig. 11) et, dans deux cas, la fracture de la vis de prothèse dans la partie filetée.

Estimation du couple lors du serrage manuel des vis

Le couple moyen, exercé lors du serrage manuel d'une vis de prothèse de 1,4 mm de diamètre, est de 8,8 Ncm, écart type (ET) de 1,3 Ncm, variant de 7,3 à 9,8 Ncm. Le couple moyen, exercé lors du serrage manuel d'un pilier dont la partie filetée a un diamètre de 3 mm, est de 13,1 Ncm, ET de 1,6 Ncm, variant de 9,6 à 14,9 Ncm.

Discussion

Cette étude n'est pas un test du matériau, mais plutôt une étude des composants des systèmes implantaires de différents diamètres dans leur ensemble. La contrainte est, par conséquent, exprimée en newtons et non en mégapascals comme dans les tests de matériaux. Il aurait été possible de tester séparément chaque élément du système, mais il est vraisemblablement impossible de conclure sur le comportement d'un système dans son ensemble à partir des valeurs de résistance de chaque composant. De plus, l'intérêt clinique ne porte pas sur les valeurs de chaque composant, mais plutôt sur le comportement du système dans son ensemble.

L'opinion courante est que l'étude d'une contrainte exercée sur un système implantaire selon un angle de charge de 90° a peu, voire pas de rapport avec une situation clinique. Cependant, les calculs de cette étude révèlent que le mécanisme d'échec d'un système implantaire avec une connexion est le même (échec dû à une contrainte de traction) quel que soit l'angle de charge entre environ 6 et 90°. Soumise à une contrainte faisant un angle de 0°, la prothèse subit une pression pure. Dans ce cas-là, il est peu probable que la connexion se rompe sous l'effet d'une traction. Lorsque l'angle de la contrainte augmente, une valeur « critique » (6°) est atteinte à partir de laquelle des contraintes de traction se manifestent et peuvent provoquer l'échec. Le mécanisme d'échec est identique pour tous les angles jusqu'à 90°. Si les systèmes avaient été, par exemple, testés à 45°, le mécanisme d'échec aurait été identique à celui dû à des charges à 90°. Les contraintes d'échec auraient, selon nos calculs, été seulement légèrement plus importantes que celles de cette étude. Le raisonnement statistique est donc valable. Par conséquent, il y a une justification pour tester à 90° bien que de telles charges ne se rencontrent pas dans une situation clinique normale comme lors de la mastication. Les calculs sont disponibles, mais ne sont pas inclus dans cette étude.

L'influence de la conception de la connexion sur la solidité structurelle des systèmes d'implants dentaires a été étudiée. L'étude simule les conditions cliniques et les échantillons sont par conséquent constitués d'un implant et des accessoires qui sont fixés aux implants au cours des utilisations cliniques, c'est-à-dire le pilier, la suprastructure et les vis reliant les différentes parties. McGlumphy et al. [11] ont comparé la contrainte d'échec de plusieurs systèmes implantaires. Ils ont testé des systèmes comportant une prothèse en extension sollicitée parallèlement au grand axe de l'échantillon, ce qui rend possible la comparaison des valeurs des contraintes d'échec des deux études, car le cantilever peut également être considéré comme le « pire des cas ». Par ailleurs, les marques de systèmes implantaires n'étaient pas identiques dans les deux études, à l'exception de l'IMZ en titane (dans notre étude, il s'agit de l'IMZ avec connecteur). De plus, le pilier standard Brånemark dans l'autre étude était pratiquement identique au pilier Impla-Med testé dans la nôtre, car il peut être admis que le pilier Impla-Med est une copie du pilier standard Nobel Biocare. Dans notre étude, il n'y a aucune différence significative entre l'Impla-Med et l'IMZ avec connecteur en ce qui concerne la contrainte d'échec. Dans l'article référence, il n'y a aucune différence significative entre le pilier standard Brånemark et l'IMZ en titane. Lorsque la comparaison est possible, les résultats d'une étude confirment les résultats de l'autre.

Lorsque cette étude a commencé, la plupart des fabricants ne fournissaient rien d'autre que des tournevis manuels pour serrer les vis ou les composants filetés. Plus tard, ils proposèrent des clés à cliquets ou d'autres sortes de contrôleur de couple. Par conséquent, tous les composants filetés ont été serrés à la main par le même opérateur. Dellinges et Tebrock [14] ont recommandé le serrage manuel des vis en or de petit diamètre à 10 Ncm alors que les vis plus grosses ne devraient pas être serrées manuellement. Le couple de serrage était estimé dans un test séparé pour évaluer s'il était adéquat. La valeur moyenne était de 8,8 Ncm pour les vis de prothèses (partie filetée d'un diamètre de 1,4 mm) et 13,1 Ncm pour un composant fileté de diamètre plus fort (partie filetée d'un diamètre de 3 mm). Cela peut être comparé avec le couple de serrage recommandé par les fabricants, entre 10 et 15 Ncm pour les vis de prothèse et entre 13 et 35 Ncm pour les vis de piliers. Il a été conclu d'après notre estimation du couple des précontraintes que les valeurs de couple de serrage utilisées dans notre étude approchaient des valeurs minimales recommandées par les fabricants et dans la littérature. Une précontrainte inappropriée des vis de prothèse dans l'implant, par exemple excessive, peut affecter leur résistance à la traction extrême [17]. De telles surcontraintes n'ont pas eu lieu dans notre étude.

Pour Patterson et al. [15], les moments de flexion peuvent avoir une responsabilité plus grande dans les échecs des systèmes implantaires que ce que l'on admettait auparavant. Dans cette étude, la charge est une force de flexion pure, perpendiculaire à l'axe longitudinal de l'échantillon. Si une charge plus axiale avait été appliquée, les échantillons auraient certainement supporté une charge plus forte avant la rupture et les contraintes d'échec auraient, par conséquent, été plus élevées.

Trois facteurs essentiels peuvent expliquer les différences de résistance : la dimension, la conception technique et le matériau. En ce qui concerne le premier, un diamètre uniforme a été favorisé. La plupart des implants des systèmes testés ont un diamètre de 4 mm (tableau V). Deux des systèmes implantaires étudiés, l'Astra Tech et le Frialit-2, n'existent pas avec un diamètre de 4 mm.

L'Astra Tech est proposé avec des diamètres de 3,5 et 4,5 mm. Le diamètre de 3,5 mm a été retenu pour l'étude. Le Frialit-2 est fabriqué avec des diamètres de 3,8 et 4,5 mm. Le 4,5 mm a été sélectionné. Si le Frialit-2 avait eu un diamètre de 4 au lieu de 4,5 mm, la contrainte d'échec aurait été légèrement moins importante. Pour l'Astra Tech, la contrainte d'échec aurait été légèrement plus importante si le diamètre de l'implant avait été de 4 mm. Mais, le résultat des comparaisons n'aurait pas été différent si de petites différences de diamètres des implants avaient été prises en compte. La taille des vis de prothèse et de pilier est un autre facteur qui aurait pu influencer la résistance des systèmes implantaires étudiés. Pourtant, les dimensions des vis semblent n'avoir que peu d'importance sur la résistance. Cette opinion est confortée par le fait que l'Astra Tech a une résistance structurelle 2,7 fois plus importante que celle de l'Estheticone de Nobel Biocare bien que les diamètres des vis de prothèse et de pilier de l'Astra Tech n'excèdent pas les valeurs des mêmes composants de l'Estheticone de Nobel Biocare (tableau V). L'analyse statistique ne révèle pas de corrélation significative du diamètre des vis et de la résistance à la flexion. Par ailleurs, la forme de la connexion a un rôle dominant dans la résistance des systèmes implantaires étudiés. Une corrélation a été trouvée entre la profondeur de la connexion et la contrainte d'échec : lorsque la connexion est courte, la résistance à la flexion est moins importante que dans les systèmes présentant une connexion profonde. Il est intéressant de noter que lorsque le système implantaire présente une connexion courte à une extrémité et une connexion profonde à l'autre (par exemple, l'Estheticone de Nobel Biocare), la fracture de la vis se produit au niveau de la connexion courte (fig. 9).

D'autres différences de conception semblent avoir moins d'importance sur la résistance. Par exemple, deux types majeurs de piliers peuvent être distingués, l'un où la vis et le pilier sont réalisés d'une seule pièce (IMZ avec pilier en titane, IMZ avec connecteur, Astra Tech et Bonefit) et l'autre où la vis de pilier est indépendante et transfixe le pilier (Frialit-2, Estheticone de Nobel Biocare et Impla-Med). La résistance la plus forte est observée dans un système dans lequel le pilier et la vis de pilier sont fabriqués d'une seule pièce (IMZ avec pilier en titane) (fig. 1f), suivi par le système Frialit-2 (fig. 1e), dans lequel la vis de pilier est indépendante et transfixe le pilier. Cela montre que les deux systèmes, l'un avec un pilier et sa vis en une pièce, et l'autre avec une vis de pilier indépendante, peuvent présenter des résistances structurelles élevées. Le facteur déterminant d'une résistance structurelle élevée ne semble pas dépendre du fait que la vis de pilier est indépendante ou non, mais plutôt, comme cela a été mentionné précédemment, de la profondeur du niveau des connexions pilier/prothèse et pilier/implant.

L'influence du troisième facteur essentiel de résistance structurelle des systèmes implantaires, le matériau, ne peut être évaluée dans cette étude, car les différentes parties de tous les systèmes sont en général faites du même métal, le titane pur, bien que de grades différents (I à IV) reflétant les pourcentages d'oxygène présent. Qui dit différents grades de titane, dit résistances différentes. Mais, il est important de noter que les modules d'élasticité des différents grades sont similaires. Par conséquent, la contrainte transmise aux vis n'a pas été influencée par la différence de grade. Seules les vis de prothèse sont faites d'un autre métal que le titane dans certains systèmes. Il est peu probable que cette différence influence la résistance. Les systèmes avec des vis de prothèse en or (Impla-Med et Nobel Biocare) ont des résistances significativement plus basses que ceux avec des vis de prothèse en titane (Astra Tech et Bonefit). Cela ne veut pas dire que les alliages d'or ne sont pas un matériau approprié pour les vis de prothèse dans les systèmes implantaires. La moins grande résistance de certains systèmes avec des vis de prothèse en or (et non en titane) n'est pas une conséquence du matériau de la vis, mais plutôt un résultat des différences de conception de la connexion.

Il y a deux types de systèmes implantaires en ce qui concerne la fixation de la prothèse implanto-portée. Elle est scellée (Frialit-2 et IMZ avec pilier en titane) ou vissée (Astra Tech, Bonefit, Impla-Med, IMZ avec connecteur et Estheticone de Nobel Biocare). Il faut noter que les deux valeurs de résistance les plus élevées sont enregistrées pour les systèmes implantaires dans lesquels la prothèse est scellée et non vissée (IMZ avec pilier en titane et Frialit-2). Pourtant, même si le scellement de la prothèse semble contribuer à la résistance dans cette étude, il doit être considéré comme un inconvénient, car la prothèse est alors souvent difficile à déposer.

Des études de suivi des prothèses et bridges implantoportés révèlent que des fractures des différents composants se produisent. Il est alors préférable que le dommage ait lieu en coronaire, sachant que, par exemple, la fracture d'une vis de prothèse est plus facile à gérer que la fracture de l'implant. Cela signifie que les connexions des différents composants d'un système implantaire doivent être moins résistantes que l'implant lui-même. Néanmoins, nous pensons que les stabilités de la connexion pilier/prothèse et de la connexion pilier/implant doivent être considérablement augmentées pour les systèmes implantaires dont les valeurs de résistance structurelle apparaissent les plus faibles dans cette étude.

La modalité de l'échec des systèmes implantaires concerne le plus souvent les vis. Rien d'étonnant à cela, car le diamètre de ces dernières est beaucoup plus petit que celui des piliers et des implants. Les échecs des systèmes IMZ avec pilier en titane et Frialit-2 sont du même ordre, à une exception près. L'échec de l'IMZ avec pilier en titane est le résultat de la perte de la couronne et de la flexion du pilier (moignon) comme l'échec du système Frialit-2 qui présente, en plus, une fissure du pilier (fig. 12). Cette différence peut s'expliquer par le fait que le pilier du système IMZ est solide, alors que le pilier du système Frialit-2 est creusé d'un long puits pour la vis (fig. 9) qui le fragilise.

L'échec de sept des échantillons Bonefit est dû à la fracture de la tête de la vis de prothèse ou à sa déformation (fig. 9). La fragilité de la tête de la vis est probablement due aux sillons cruciformes nécessaires à la mise en place du tournevis. Maintenant, le fabricant fournit une vis de prothèse plus stable avec un hexagone interne dans la tête de la vis qui remplace le dessin en croix.

Conclusions

Restant dans les limites de cette étude, les conclusions suivantes peuvent être rendues : 1. les connexions profondes permettent une meilleure résistance structurelle des systèmes implantaires ; 2. de grandes différences de résistance structurelle sont observées entre les systèmes implantaires couramment utilisés ; 3. l'échec se produit le plus souvent au niveau de la connexion prothèse/pilier en raison de la fracture de la vis de prothèse ou de la rupture du ciment (dans le cas de prothèses scellées) associée à la flexion ou fracture du pilier. Moins souvent, l'échec se produit au niveau de la connexion pilier/implant, en relation avec la défaillance de la vis de pilier.

Remerciements à :

Nils-Gunnar Ohlson, Dr Techn de Alfa Lava (Tumba, Suède) pour sa précieuse aide pour les calculs ; Hans Öberg, Ingénieur de recherche du département de mécanique solide au Royal Institute of Technology (Stockholm, Suède) pour ses conseils utiles ; Peter Gudmundsson, Professeur, chef du département de mécanique solide, Royal Institute of Technology (Stockholm, Suède) pour ses conseils ; Jan Kowalski, stastisticien, MIP/Medical Statistics du Karolinska Institutet (Stockholm, Suède) pour son expertise et le traitement des stastistiques.

Titre original : Comparaison of strength and failure mode of seven implant system : an in vitro test. Journal of Prosthetic Dentistry 1997 ; 78 (6) : 582-591. Traduit et reproduit avec l'aimable autorisation de Mosby-Year Book, Inc. Merci de ne pas reproduire, quel qu'en soit le motif, sans l'autorisation écrite de l'éditeur.

(1) Astra Tech, 1, rue de l'Union, TSA 9002, 92843 Rueil-Malmaison Cedex. Tél. : 01 41 39 02 40. Fax : 01 41 39 02 44.

(2) Straumann, 67, avenue de l'Europe, Émerainville, 77437 Marne-la-Vallée Cedex 02. Tél. : 01 64 61 69 02. Fax : 01 64 61 69 03.

(3) Friatec Medical France, route de Montereau, BP 106, Darvault, 77793 Nemours Cedex. Tél. : 01 64 45 23 23. Fax : 01 64 45 23 50.

(4) Impla-Med Inc, Sterngold, Sunrise, Floride.

(5) Nobel Biocare, 80, avenue des Terroirs-de-France, 75607 Paris Cedex 12. Tél. : 01 53 33 89 10. Fax : 01 53 33 89 33.

(6) Zwick Co., Ulm, Allemagne.

(7) Leitz, Wetzlar, Allemagne.

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