Facteurs de risque et traitements implantaires Evaluation clinique et approche rationnelle - Implant n° 3 du 01/08/1999
 

Implant n° 3 du 01/08/1999

 

Implant a lu - Édition

Gilbert Amzalag  

La technique de Brånemark, issue de travaux scientifiques de haut niveau, par sa rigueur, ses pourcentages de réussite et par sa présentation pédagogique et claire, a pu faire croire qu'elle était d'une simplicité extrême.

Le livre de Franck Renouard et Bo Rangert redonne à tous une vision plus précise de la réalité : pour faire les choses simplement et en sécurité, il faut connaître, en amont, tout ce qui est susceptible de perturber l'équilibre et le devenir d'une...


La technique de Brånemark, issue de travaux scientifiques de haut niveau, par sa rigueur, ses pourcentages de réussite et par sa présentation pédagogique et claire, a pu faire croire qu'elle était d'une simplicité extrême.

Le livre de Franck Renouard et Bo Rangert redonne à tous une vision plus précise de la réalité : pour faire les choses simplement et en sécurité, il faut connaître, en amont, tout ce qui est susceptible de perturber l'équilibre et le devenir d'une restauration sur implants. P.-I. Brånemark dit dans la préface : « Le but de ce livre est de permettre l'identification et la prévention des complications implantaires grâce à la mise en œuvre de protocoles cliniques logiques. » La définition du patient à risque (par ex. : gros fumeur, bruxomane, etc.) est « un patient pour lequel la stricte application d'un protocole standard ne donne pas les résultats escomptés. » Les auteurs précisent : « Le but de cet ouvrage est de proposer une méthodologie pour détecter précocement ces patients dans le but de minimiser ou d'éliminer le risque d'échec. Une fois la situation à risque diagnostiquée, il est possible soit de modifier le plan de traitement (allongement de la période de cicatrisation, ajout d'implants, réduction des extensions prothétiques, etc.) soit de contre-indiquer la solution implantaire. »

Sur un tel programme, réaliser un livre attrayant semble difficile. C'est pourtant ce qui a été réussi: une présentation et une mise en page claires et astucieuses, de belles photos très bien choisies, en stricte relation avec le texte, le tout accompagné des schémas toujours aussi lisibles et didactiques de Fredrik Persson (le dessinateur attitré de Nobel Biocare).

La lecture de la table des matières incite déjà fortement le lecteur potentiel à aller plus avant pour découvrir en détail le fond de ce livre passionnant. Le plan de l'ouvrage permet d'aborder les facteurs principaux.

Les facteurs de risque général en fonction d'un bilan global de l'âge, de la psychologie et de la motivation du patient, de l'étiologie de l'édentement, de la prise en compte de la ligne du sourire, de l'ouverture buccale, de la relation intermaxillaire, de la hauteur interarcade en ouverture maximale, d'une évaluation fonctionnelle, avec bien sûr le bilan radiographique et parodontal. Un système de tableaux en trois couleurs, très facile à consulter, avertit le lecteur : « OK » (en vert) veut dire feu vert ; « ATTENTION » (en orange) signifie prudence et « STOP » (en rouge) signale un danger. Ce code va se retrouver dans d'autres tableaux tout au long du livre. La présence de plusieurs contre-indications relatives ou d'une contre-indication absolue doit faire reconsidérer le plan de traitement initial.

Les facteurs de risque esthétiques classés en facteurs de risque gingival (ligne du sourire, qualité de la gencive, forme des papilles, etc.), facteurs de risque dentaire (forme des dents naturelles, position et forme du point de contact interdentaire), facteurs de risque osseux (concavité vestibulaire, place de la papille entre les implants, résorption osseuse, etc.), facteurs liés au patient (demande esthétique, qualité de l'hygiène, techniques de temporisation, etc.).

Les facteurs de risque biomécanique, partie tout à fait concrète pour le clinicien et parfois dramatiquement sanctionnée par une complication ou un échec. Ces facteurs sont définis ainsi : facteurs de risque géométrique (nombre d'implants, position relative, forme de la prothèse, etc.), facteurs de risque occlusal (problèmes liés aux forces appliquées sur les composants, parafonctions, etc.), facteurs de risque osseux (qualité et densité de l'os, stabilité initiale de l'implant, rapport du diamètre de l'implant en relation avec la situation clinique, etc.), facteurs de risque technologique (défaut d'adaptation des infrastructures prothétiques, vissage et scellement, etc.).

L'attention du lecteur est attirée sur les signaux d'alarme spécifiques : dévissages répétés des vis de prothèse ou de pilier, fracture répétée du matériau cosmétique, des vis en or, perte osseuse continue au delà du premier filet de l'implant, etc.). A chaque facteur de risque a été attribuée une valeur. La somme de ces valeurs donne l'indice biomécanique pour une situation mécanique donnée. Quelques exemples de l'utilisation d'une « check-list » biomécanique permettent d'aider le praticien à mieux évaluer chaque situation clinique.

Dans les chapitres IV et V, tous les types d'édentement sont décrits en proposant pour chacun l'option de traitement la plus sûre. Les solutions alternatives sont présentées sur dents naturelles (bridge classique ou collé, prothèse adjointe partielle ou complète, etc.), mais aussi des solutions alternatives implantaires (bridge fixé classique sur implant ou prothèse adjointe clipée sur barre rigide, en cas de grande résorption ou de décalage important des bases osseuses). Cette partie clinique est très riche en iconographie et en explications précises et utiles. Elle peut même servir de « modèle de montre » (!) pour aider le patient un peu perdu à comprendre le choix de construction… et aider le praticien à décider de ce choix grâce aux schémas et tableaux plus aisés à décoder que certaines photos très belles.

Le chapitre VI aborde les différents protocoles chirurgicaux ainsi que les problèmes liés au tissu osseux : par exemple, la différence entre volume osseux disponible (où il est théoriquement possible de placer un implant) et le volume osseux nécessaire (pour placer un implant en fonction d'une situation clinique donnée) ou la densité osseuse. L'utilisation et le choix du système radiographique sont décrits, du bilan longcône préliminaire au scanner, entraînant l'idée de la transposition concrète (en bouche) des données recueillies par l'intermédiaire d'un guide chirurgical. Des tableaux très clairs détaillent les différents protocoles chirurgicaux (protocole standard, protocole en un-temps, protocole standard avec empreinte au premier temps, protocole en un-temps avec empreinte au premier temps, protocole de mise en charge immédiate) avec leurs indications. Sont ensuite décrites des techniques chirurgicales avancées : régénération osseuse guidée, greffe osseuse autogène avec leur suivi postopératoires et les phases de maintenance.

Quel plaisir de trouver regroupées et explicitées toute l'évolution et les possibilités de ce type d'implantologie !

L'avant-dernier chapitre met en évidence la nécessité pour les praticiens de bien aborder les problèmes de communication avec les patients, et de préparer les réponses aux questions telles que : « Est-ce-que cela fait mal ? Combien de temps cela dure ? J'ai une amie qui a perdu cinq implants sur six ! Il paraît que cela marche mieux avec le système X ! Combien cela coûte? Il paraît qu'il y a des rejets (…) » Le livre se termine sur l'examen des complications qui sont présentées d'une façon très simple et didactique avec à chaque fois les causes possibles et surtout les solutions.

Ce livre est une somme, essentiellement clinique, véritable guide pratique du praticien. Il est une réussite qui marque l'évolution de ces techniques, sans zone d'ombre ! Vous avez compris que je l'aime et je me permets de demander à l'éditeur : « A quand la version anglaise ? »