Faut-il visser ou sceller les prothèses ? - Implant n° 2 du 01/06/2001
 

Implant n° 2 du 01/06/2001

 

Repères

Arguments

Philippe Leclercq *   Rémy Tanimura **  


*Expert près la cour d'appel de Paris
**Docteur en chirurgie dentaire

Depuis les années 1985, le principe d'ostéointégration s'est généralisé et la majorité des systèmes implantables, dits de référence, ont privilégié le vissage des prothèses au scellement. Pour des raisons de réversibilité et d'inter-changeabilité, la plupart des systèmes déconseillaient le scellement des prothèses. Dans les années 1990, les principes en implantologie ont considérablement évolué tant sur le plan chirurgical que prothétique. L'école suédoise, qui ne...


Depuis les années 1985, le principe d'ostéointégration s'est généralisé et la majorité des systèmes implantables, dits de référence, ont privilégié le vissage des prothèses au scellement. Pour des raisons de réversibilité et d'inter-changeabilité, la plupart des systèmes déconseillaient le scellement des prothèses. Dans les années 1990, les principes en implantologie ont considérablement évolué tant sur le plan chirurgical que prothétique. L'école suédoise, qui ne concevait la prothèse implantaire que vissée, revoit sa gamme prothétique et commercialise maintenant des moignons pour la prothèse scellée comme s'il s'agissait d'un concept nouveau. Cette évolution est étroitement liée à l'architecture de la prothèse (scellée ou vissée). Actuellement, sauf pour des raisons de hauteur prothétique ou d'implant situé en dehors du couloir prothétique, toutes nos prothèses, lorsqu'il s'agit de traitement simple, sont collées et nous ne prévoyons aucune démontabilité. Dans les réhabilitations complexes faisant intervenir des greffes pariétales ou iliaques, nous réalisons des prothèses transitoires vissées durant une période allant de 6 mois à 1 an selon les cas. Ceci est également valable dans les cas de mise en charge immédiate. Les prothèses d'usage, quant à elles, pourront être vissées ou scellées dans les cas de mise en charge immédiate ou de prothèse réalisée sur des implants placés dans des sites greffés avec du pariétal. (Les connecteurs devront donc être changés si on décide de passer du vissage au scellement.) La prothèse d'usage, dans les cas d'utilisation de greffe iliaque, restera vissée.

Les prothèses scellées sur implants sont considérées comme des prothèses fixées sur piliers naturels. En cas d'évolution clinique, nous procédons de la même manière, c'est-à-dire en remplaçant intégralement la supra-structure.

Évolutions chirurgicales

Depuis une dizaine d'années, le rattrapage des axes prothétiques a été au fur et à mesure abandonné par l'apport de volume osseux (greffes d'apposition) pour pouvoir placer les implants dans une situation idéale (direction et émergence).

Les techniques de greffes osseuses varient selon les cas cliniques, mais néanmoins, nous privilégions les greffes osseuses autogènes d'origine pariétale, iliaque ou mentonnière (lorsque le déficit osseux est peu important).

Grâce à ces greffes osseuses, les implants travaillent dans leurs axes et la connectique est largement simplifiée. Le travail des techniciens de laboratoire l'est également.

L'élargissement des crêtes osseuses par l'utilisation des ostéomes a permis de placer des implants de diamètres plus importants. Un des points importants dans cette évolution chirurgicale est l'état de surface des implants.

En effet, les surfaces en titane sablées (et/ou mordancées) montrent des résultats supérieurs aux surfaces usinées traditionnelles et améliorent le pourcentage de surface ostéointégrée.

Nous privilégions davantage le choix du diamètre et de l'état de surface à la recherche systématique de longueurs d'implants importantes.

Ces surfaces permettent de serrer les connecteurs avec un couple de serrage plus important (35 N) et évitent donc le desserrage des vis.

Elles permettent également de charger les implants beaucoup plus rapidement.

Outre ces mises en charge différées, les mises en charge immédiates sont devenues des actes de routine lorsque les indications sont bien posées. Les moignons monoblocs s'avèrent alors extrêmement intéressants pour les édentements postérieurs, notamment par leur simplicité et leur efficacité. Dans les cas de reconstitutions globales en mise en charge immédiate, les prothèses vissées sont recommandées. Après la prise d'empreinte postchirurgicale et de la relation intermaxillaire, le technicien de laboratoire pourra réaliser le bridge transitoire longue durée avec armature. Grâce au vissage, les implants seront sollicités au minimum.

Évolutions prothétiques

La connectique doit être de plus en plus simplifiée afin de minimiser le nombre de pièces entre l'implant et la future prothèse.

Le choix de la taille et de la forme des implants a considérablement modifié la partie prothétique.

Actuellement, nous utilisons dans la plupart des cas, lorsque la situation clinique le permet, des implants d'un diamètre de 4 mm, voire supérieur et de 10 à 12 mm de longueur. L'avantage est, d'une part, de minimiser les fractures au niveau des connecteurs et, d'autre part, de pouvoir serrer les pièces à 35 N à l'aide d'une clef dynamométrique, grâce également à l'état de surface. L'utilisation d'implants relativement courts et de diamètre plus important permettra de gérer plus facilement l'axe de l'implant et, donc, le positionnement du moignon dans le couloir prothétique.

L'expérience des prothèses scellées sur implants nous a conduit à utiliser dans la plupart des reconstructions plurales (au-delà de deux implants) des moignons en titane monoblocs usinés.

Ces moignons sont réglés en hauteur, parallélisés au laboratoire (les limites gingivales sont établies également par le laboratoire); ils sont ensuite serrés sur les implants au degré de serrage conseillé par le fabricant (Fig. 1).

Le bridge d'usage collé par un ciment adhésif jouera un rôle de clavetage et évitera tout dévissage des moignons. Ce système simple et efficace facilite le rapport entre celui qui réalise la prothèse et le praticien chirurgien, car on retrouve les gestes habituels de prothèse.

Depuis que nous utilisons cette technique avec nos correspondants, les problèmes de dévissage ou fracture de vis de moignons transfixiés ont disparu.

En cas de divergence importante des implants ou lorsque les émergences ne se trouvent pas dans le couloir prothétique, le parallélisme sera géré par une infrastructure rigide (poutre) vissée sur les implants. Sur cette poutre, nous réaliserons des éléments télescopiques qui seront collés par un ciment adhésif à celle-ci. Bien entendu, cet ensemble n'a pas pour but d'être démonté (Fig. 2).

Que la prothèse soit scellée au vissée, la passivité de l'armature assurant un « verrouillage » de l'ensemble implants-prothèse reste, à notre avis, le paramètre fondamental de la réussite des traitements implantaires.

Conclusion

À l'heure actuelle, les prothèses scellées sur implants sont de plus en plus utilisées, sans doute pour leur simplicité et l'aspect sécurisant des différentes étapes de prothèses (prise d'empreinte, relation inter-maxillaire...).

Le scellement permet également d'améliorer l'esthétique et de recréer une morphologie occlusale idéale sans que les puits d'émergence des vis ne causent de gêne.

Cependant, les prothèses vissées ont leur avantage dans certaines réhabilitations : mise en charge immédiate (Fig. 3), bridge transitoire de longue durée avec armature sur des sites greffés par de l'os pariétal ou iliaque.

Le choix du scellement ou du vissage sera toujours déterminé par la situation clinique et non par des dogmes ancestraux.

ADRESSE DES DISTRIBUTEURS

IMPLANT EVL -SERF - 85 CHEMIN DES BRUYERES - 69153 DECINES CEDEX - TÉL. 04 72 05 60 20 - FAX : 04 72 02 19 18 - e-mail : serf@serf.fr -

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