Élévation du plancher sinusien à l'aide d'ostéotomes - Implant n° 3 du 01/08/2002
 

Implant n° 3 du 01/08/2002

 

Chirurgie

Jean-Jacques Chalard *   Hadi Antoun **   Marc Chalard ***   Patrick Missika ****  


*Assistant hospitalier HCL - Pr D. Bois
Unité fonctionnelle d'implantologie - Lyon - Dr C. Chavrier
Assistant universitaire
Faculté d'odontologie - Université Lyon I - Claude-Bernard
3, cours Émile-Zola
69100 Villeurbanne
**Attaché de consultation
Unité d'implantologie
Faculté de chirurgie dentaire - Université Paris 7
Denis-Diderot
Service d'odontologie - Garancière - Hôtel-Dieu
9, rue Galilée
75116 Paris
***Attaché hospitalier HCL - Pr. D. Bois
Unité fonctionnelle d'implantologie - Lyon - Dr C. Chavrier
3, cours Émile-Zola
69100 Villeurbanne
****Maître de conférences des universités
Praticien hospitalier des hôpitaux de Paris
Directeur du diplôme universitaire d'implantologie chirurgicale et prothétique
Faculté de chirurgie dentaire
Université Paris 7 - Denis-Diderot
Service d'odontologie - Garancière - Hôtel-Dieu
12, rue des Pyramides
75001 Paris

Résumé

Pour compenser le manque de volume et de densité osseux généralement constaté au niveau des zones maxillaires sous-sinusiennes, de nombreux auteurs ont préconisé des techniques de greffes et comblements avec effraction osseuse de la cavité sinusienne. Plus récemment, des techniques moins invasives ont été proposées. Elles préconisent l'utilisation d'ostéotomes dont l'effet de compaction de la masse osseuse permet de soulever le plancher sinusien, augmentant ainsi la hauteur disponible à la pose d'implants dans la même séance clinique ou en différé.

Summary

Several techniques of sinus grafts have been used to increase osseous density and volume of maxillary regions located under the sinus. Less invasive procedures were recently described. These use osteotomes, which osseous compaction action allows to elevate sinus floor, thus, increasing available height for implant placement simultaneously or in a staged approach.

Key words

implant , sinus, osteotomes

La méthode standard de préparation d'un site implantaire repose sur un retrait de l'os avec des forets. Si la qualité et la quantité osseuses sont satisfaisantes (densité osseuse d1 et d2 selon Lekholm et Zarb [1]), cette technique chirurgicale, aux résultats constants et prévisibles, permet d'obtenir une bonne stabilité primaire des implants [2, 3]. Dans les secteurs maxillaires sous-sinusiens, un volume osseux insuffisant contre-indique la mise en place d'implants dentaires [4]. L'os est en général peu dense (d3 et d4) ; le forage précis est difficile et l'ouverture accidentelle du sinus ou la surpréparation du tissu osseux est toujours possible [5]. Une des alternatives pour compenser les limites anatomiques est la technique classique de greffe et comblement de sinus par effraction osseuse latérale de la cavité sinusienne ou encore la mise en place d'implants longs (zygomatique, ptérygoïdien) ou implants plats (Diskimplants®).

Le but de cet article est de présenter une technique plus récente et moins invasive, préconisant l'utilisation d'ostéotomes dont l'effet de compaction de la masse osseuse sous-sinusienne permet de soulever le plancher sinusien.

Rappels

Anatomie du sinus

Le sinus maxillaire est une cavité aérienne, localisée au maxillaire postérieur. Chez l'adulte, le sinus maxillaire présente une forme pyramidale renforcée par des structures septales verticales créant des cavités intrasinusiennes [6]. La taille du sinus est très variable d'un individu à un autre. Celle-ci varie de 36 à 45 mm dans le sens de la hauteur, de 25 à 35 mm dans le sens de la largeur et de 38 à 45 mm dans le sens de la longueur [7, 8].

La membrane de Schneider constituant la muqueuse sinusienne tapisse l'os sous-jacent. Cette membrane adhérente à l'os est très fine et fragile [8]. Elle est tapissée par un épithélium pavimenteux ciliaire pseudo-stratifié permettant l'évacuation des fluides et mucus dans les fosses nasales par l'intermédiaire de l'ostium [6-9].

La zone sous-sinusienne est formée par la crête osseuse alvéolaire et les dents postérieures (molaires et/ou prémolaires et/ou canines).

La hauteur d'os disponible dans la région sous-sinusienne est directement en rapport avec la proximité du plancher du sinus par rapport au sommet de la crête.

Taux d'échec au maxillaire

La quantité d'os disponible dans cette région est souvent insuffisante en raison d'un édentement de longue date ou du rapport anatomique très proche des racines des dents postérieures avec le sinus. Suite aux avulsions de ces dents, le sinus peut encore s'étendre vers le bas, augmentant ainsi son volume au détriment du volume osseux. Même en présence d'une bonne cicatrisation postextractionnelle, l'option implantaire est souvent limitée à des implants courts (8 mm) [10].

La densité osseuse dans cette région est souvent faible. L'os dans cette zone est généralement de densité 3 (d3) ou 4 (d4). Cet os, constitué de faibles trabécules osseuses, est caractérisé par une très faible densité [11]. Le taux d'échec implantaire est important dans ce type d'os. Il varie selon certains auteurs de 21,4 à 44 % [12].

De plus, avec les implants courts, le risque d'échec semble plus grand du fait de la charge masticatoire plus élevée dans les parties postérieures du maxillaire [13].

Techniques classiques

Le volume osseux disponible au niveau sous-sinusien devrait être évalué dans les trois plans de l'espace à l'aide d'un scanner dentaire. L'examen clinique doit préciser l'espace prothétique interarcades disponible [14]. Une classification en fonction de la hauteur d'os disponible est proposée avec une conduite thérapeutique en fonction de cette hauteur [15] :

SA-1 : hauteur d'os disponible supérieure à 10 mm entre le plancher du sinus et la crête osseuse ; mise en place d'implants supérieurs à 10 mm et allant jusqu'à la limite inférieure du sinus ;

SA-2 : hauteur d'os disponible comprise entre 8 et 10 mm entre le plancher du sinus et la crête osseuse.

Le plancher du sinus est légèrement repoussé sur une hauteur de 1 à 2 mm, rehaussant la muqueuse sinusienne en même temps que la pose d'implants [16] ;

SA-3 : hauteur d'os disponible comprise entre 5 et 8 mm entre le plancher du sinus et la crête osseuse. Un volet osseux dans la partie latérale du sinus est préparé et poussé par rotation interne dans une position horizontale. Ce nouveau plancher sinusal avec la muqueuse sinusienne crée un espace qui est comblé par une greffe osseuse. La hauteur d'os résiduelle est suffisante pour permettre la mise en place simultanée d'implants [15-17] ;

SA-4 : hauteur d'os disponible inférieure à 5 mm entre le plancher du sinus et la crête osseuse. Un volet osseux vestibulaire est effectué pour apposer une greffe d'os. La faible hauteur d'os résiduel impose de différer la pose d'implants de 6 à 10 mois [18-22].

L'abord direct du sinus par voie latérale représente une technique fiable et reconnue par un très grand nombre d'auteurs ; elle n'en reste pas moins délicate dans sa mise en œuvre [23] (Fig. 1a, 1b et 1c).

La technique d'ostéotomie que propose Summers est moins invasive, plus rapide et semble plus accessible à un grand nombre de praticiens [24-29].

Technique d'ostéotomie

Principe, intérêt, indications

La technique par ostéotomie permettant l'implantation au maxillaire a été mise au point par Tatum et décrite par Summers [24-28]. Elle est utilisée comme une alternative au forage dans la préparation des sites implantaires. Elle complète et simplifie les techniques habituelles; elle est d'une aide précieuse pour la pose d'implants. L'ostéotomie est une procédure qui permet aussi d'élever le plancher des sinus. Elle peut être réalisée sous anesthésie locale.

L'objectif de l'élévation sinusienne par ostéotomie est de :

- conserver l'essentiel de l'os dans le site et de le déplacer sélectivement vers le haut pour élever le plancher sinusien ;

- placer une masse d'os à proximité du sinus qui soulèvera le plancher, le périoste et la muqueuse. L'os est concentré au-dessus de la tête de l'instrument qui pénètre en poussant la masse osseuse au plus profond de l'ostéotome (Fig. 2).

La limite du sinus, peu corticalisée, est apte à se déplacer en prenant l'aspect d'un dôme à mesure que l'ostéotome progresse. L'accumulation de l'os au bout de l'ostéotome engendre une compression, puis une déformation du fond du sinus sans grand risque de perforation de la membrane de Schneider [28-30].

L'ostéotomie, associée à un forage minimum, présente plusieurs avantages : conservation, expansion et condensation de l'os [31] (Fig. 3). Le protocole chirurgical est moins invasif, moins complexe, moins coûteux et préserve l'os. Au lieu de retirer un volume d'os sain à l'aide de forets, l'ostéotome préserve la quasi-totalité de l'os présent. En condensant les versants osseux latéralement, l'interface osseuse est plus dense, la forme du lit implantaire plus précise et la fixation de l'implant assurée. En général, l'usage des ostéotomes manuels est limité à l'arcade maxillaire et à l'os peu dense (d3 et d4).

En évitant l'usage des forets, les ostéotomes réduisent les risques de complications comme les fenestrations, déhiscences ou fractures de crête. De plus, l'absence de forage évite tout risque d'échauffement. La sensibilité tactile de cette procédure permet, enfin, d'appréhender plus sûrement la qualité de l'os.

L'ancrage primaire de l'implant est exclusivement assuré par la portion d'os initialement disponible. En conséquence, la possibilité d'implanter dans le même temps chirurgical que le soulevé de sinus est définie par la hauteur d'os initiale. Si celle-ci est supérieure ou égale à 7 mm et si la densité le permet, l'ancrage primaire de l'implant est suffisant pour que celui-ci soit mis en place dans la même séance.

On distingue deux indications principales [24-28] :

- l'élévation du plancher sinusien à l'aide d'ostéotomes avec mise en place immédiate de l'implant lorsque la hauteur d'os entre le sommet crestal et le bas-fond sinusien est inférieure à 7 mm. Il s'agit d'une technique en un temps ;

- la création d'un futur site implantaire à l'aide d'ostéotomes avec au moins 5 mm de hauteur d'os disponible sous le sinus et ne permettant pas une implantation immédiate. Il s'agit d'une technique en deux temps.

Ainsi, de nombreux sites en proximité sinusienne qui ne peuvent recevoir que des implants très courts (7 à 8 mm) par la technique de forage classique peuvent être modifiés pour une implantation immédiate d'implants de 10 ou 13 mm. Un site, dont la hauteur d'os sous-sinusienne est d'au moins 5 mm, peut être augmenté avec la technique d'élévation du sinus par ostéotomes pour recevoir en différé un implant de 10 mm ou plus.

Description de la technique

Matériels

Plusieurs types d'ostéotomes de tailles et de formes différentes sont disponibles. Ceux-ci dérivent des ostéotomes du Dr Summers. Le kit standard d'ostéotomes du Dr Summers comporte cinq instruments (Fig. 4) :

- deux en forme de gradin de petit diamètre, allant de 1,6 à 3,3 mm et de 2 à 3,3 mm de diamètre (tête concave) ;

- deux de forme légèrement évasée à tête concave allant de 3 à 3,7 mm et de 3,3 à 4,3 mm de diamètre ;

- un de forme cylindrique à tête concave appelé « bone pusher ».

Critères de choix d'un ostéotome

- une gamme complète d'ostéotomes permettant la pose d'implants de diamètre standard au large diamètre ;

- des graduations de contrôle d'enfoncement ;

- des bagues réglables servant de butées de limitation d'enfoncement dans le sinus ;

- un manche en baïonnette pour permettre une meilleure accessibilité aux secteurs maxillaires postérieurs ;

- un manche relativement gros pour une utilisation manuelle et avec maillet ;

- une forme cylindro-conique permettant de réaliser une condensation latérale de l'os ;

- une tête aplatie, légèrement concave ou convexe non coupante pour obtenir une condensation axiale optimale et latérale, cela permettant de pousser l'os et/ou ses substituts lors des élévations sinusiennes en limitant le risque de perforation de la muqueuse sinusienne ;

- pour réaliser la préparation des futurs sites implantaires à l'aide d'un greffon, une corrélation des diamètres doit exister entre le trépan de préparation du greffon et l'ostéotome permettant son enfoncement dans le sinus.

Méthodes

Après l'étude clinique préimplantaire, un bilan radiographique (panoramique, bilan long cône, scanner) permet d'évaluer avec précision l'anatomie et le volume osseux sous-sinusien disponible. Les techniques d'ostéotomie se déclinent en deux indications :

- élévation du plancher sinusien par ostéotomie en vue d'implantation immédiate ;

- élévation du plancher sinusien par ostéotomie en vue d'implantation différée.

Élévation du plancher sinusien par ostéotomie en vue d'implantation immédiate

Les impératifs sont :

- hauteur sous-sinusienne > 7 mm ;

- largeur crestale > 5 mm.

Il existe deux modes opératoires selon la densité osseuse du site.

• Protocole opératoire selon Summers pour un os de densité 3 ou 4 [24-28] (Fig. 5a, 5b, 5c, 5d, 5e et 5f)

- aucun instrument (ostéotome, foret) ne doit pénétrer dans la cavité sinusienne tout au long de l'intervention ;

- le guide chirurgical précise les impératifs prothétiques ;

- le positionnement du site implantaire est effectué avec la fraise-boule ;

- la préparation du site débute avec le foret pilote de 2 mm de diamètre sur la hauteur du site moins 1 à 2 mm en dessous du plancher sinusien (suivant la densité osseuse) ;

- insertion d'un premier ostéotome de petit calibre engagé sur une hauteur d'au moins 2 mm d'os ;

- l'ostéotome est introduit par de légères rotations ou par de légères percussions manuelles ou à l'aide d'un maillet ; la progression de l'ostéotome est arrêtée à 2 mm du bas-fond du sinus (Fig. 5b) ;

- les ostéotomes doivent être maintenus dans le site au moins une minute pour que la déformation de l'os se stabilise. Il est impératif de ne pas forcer, au risque de provoquer des fractures des corticales des crêtes osseuses. L'os doit se détendre dans le site d'une façon progressive et contrôlée jusqu'à ce que la forme de l'ostéotomie soit acquise [31] ;

- passage des ostéotomes de calibre croissant sur la même longueur jusqu'à l'obtention d'une cavité compatible avec le diamètre de l'implant ;

- un matériau de comblement est introduit dans le site chirurgical et déplacé à l'aide d'un ostéotome (bone pusher) et d'un maillet. Ce matériau additif, translaté par l'ostéotome, va repousser plus apicalement en direction du sinus le fragment osseux. L'ostéotome ne franchit jamais la limite du plancher du sinus (Fig. 5c, 5d et 5e) ;

- l'intégrité de la muqueuse sinusienne est vérifiée à ce stade. L'intervention doit être interrompue si cette membrane est lésée ;

- insertion de l'implant qui assurera sa propre stabilité primaire ; il faudra donc éviter tout foret d'évasement (Fig. 5f) ;

- enfouissement de l'implant pour une période de 6 mois ;

- contrôle radiologique.

Ces étapes sont illustrées par un cas clinique (Fig. 6a, 6b, 6c, 6d, 6e, 6f et 6g .

• Protocole opératoire selon Lazzara pour un os de densité 1 ou 2 [30]

Il existe une variante au protocole de Summers (os de densité 3). Un forage est réalisé en passant le foret pilote, puis un foret intermédiaire et enfin un foret 3 mm de diamètre en restant à 1 mm en dessous du plancher sinusien. Un matériau de comblement est introduit dans le site chirurgical avant l'utilisation du premier ostéotome (ostéotome de Summers numéro 3). Le matériau de comblement est condensé et repousse la membrane sinusienne, ce qui augmente le site implantable de 1 mm environ à chaque nouvel apport de matériau. Le matériau est utilisé comme « coussin » de fracture de la corticale antrale, l'ostéotome ne pénétrant jamais dans la cavité. La condensation est répétée jusqu'à l'obtention d'une hauteur jugée suffisante (au moins apte à recevoir un implant de 10 mm) [30-32].

Cette méthode diffère surtout par le recours au forage qui est pratiqué d'emblée jusqu'au diamètre de 3 mm. La conséquence de ce forage est la perte de substance osseuse tandis que la méthode de Summers conserve au maximum l'os qui sera chassé latéralement et apicalement.

Élévation du plancher sinusien par ostéotomie en vue d'implantation différée

Les impératifs sont :

- hauteur sous-sinusienne > 5mm ;

- largeur crestale >5 mm.

• Protocole opératoire selon Summers [27] (Fig. 7a, 7b, 7c et 7d)

- le positionnement du site implantaire est effectué avec la fraise-boule guidée par les impératifs prothétiques ;

- un trépan de 4 à 8 mm de diamètre monté sur contre-angle permet de réaliser un cylindre osseux. Le trépan doit rester à 1 mm en dessous du plancher du sinus ;

- ce cylindre osseux est luxé et déplacé délicatement à l'aide d'un ostéotome (bone pusher) de gros calibre : ostéotome numéro 5 de Summers ;

- l'embout de l'ostéotome ne doit pas faire effraction dans le sinus. L'intervention est interrompue si la muqueuse sinusienne est lésée ;

- une addition de matériau de comblement est effectuée dans le site d'ostéotomie, et le compactage par l'ostéotome va provoquer un déplacement vers le haut de tout le matériel osseux, refoulant plus loin la membrane sinusienne. L'opération est renouvelée jusqu'à l'obtention du volume osseux sous-sinusien nécessaire (site implantaire de 10 à 15 mm de haut) ;

- le site osseux est mis en attente 4 à 6 mois ;

- contrôle radiographique rétro-alvéolaire, panoramique et scanner permettent d'apprécier le gain ainsi réalisé ;

- mise en place des implants après confirmation de la cicatrisation osseuse.

Ces étapes sont illustrées par un cas clinique (Fig. 8a, 8b, 8c, 8d, 8e, 8f, 8g, 8h, 8i et 8j).

Matériaux utilisés

Le matériau de choix est, pour la majorité des auteurs, l'os autogène, prélevé soit dans la zone rétro-molaire mandibulaire, soit dans la zone tubérositaire du maxillaire, soit au niveau de la symphyse mentonnière [33]. L'os prélevé à la mandibule présente une excellente qualité.

L'avantage d'une greffe autogène réside essentiellement en son potentiel ostéogénique et ostéoinducteur. En revanche, les greffes autogènes exigent l'ouverture d'un site de prélèvement, ce qui augmente le temps opératoire et les suites opératoires [34, 35].

L'alternative aux greffes autogènes est représentée par l'apport de substituts osseux résorbables tels que les greffes alloplastiques, les xénogreffes (par exemple, os bovin déprotéiné et stérilisé) ou allogreffes (os humain de cadavre frais) [36] (Tableau I).

Résultats

Différents auteurs ont publié des résultats présentant une évaluation clinique rétrospective de la technique (Tableau II).

Summers rapporte en 1994 un taux de succès de 96 % (de 0 à 5 ans) pour 143 implants placés dans le même temps opératoire que l'ostéotomie chez 46 patients. L'auteur utilise des implants recouverts d'hydroxyapatite ou spray de plasma titane (TPS). Cependant, le type d'implant utilisé (vis ou impacté) est peu précisé [24].

Horowitz présente en 1997 les résultats de 34 implants ITI® placés dans le même temps opératoire que l'ostéotomie chez 18 patients et obtient un taux de succès de 97 %. Le nombre d'implants mis en place dans cette étude à très court terme (moyenne de 5 mois) est peu important et la hauteur osseuse initiale n'est pas précisée [37].

Coatoam rapporte en 1997 les résultats de 99 implants placés par la technique d'ostéotomie. Certains implants ont été placés consécutivement au soulevé du sinus ; d'autres, dans un deuxième temps chirurgical. Ils observent un taux de succès de 92,1 % avec un recul clinique moyen de 24 mois. Cependant, la hauteur osseuse initiale n'est pas précisée [38].

Rosen et al. présentent en 1999 les résultats de 174 implants placés dans le même temps opératoire que l'ostéotomie chez 101 patients. Les implants utilisés étaient des vis titane standard, des vis TPS, des vis HA et des cylindres TPS [29]. Le taux de survie implantaire global est de 95,4 % avec un recul clinique moyen de 20,2 mois après mise en charge. Ce taux n'est pas influencé par le type et le diamètre d'implant utilisé ni par le matériau de comblement introduit dans le site. En revanche, la hauteur osseuse initiale paraît être un facteur important de succès. Le taux de survie chute de 96 à 85,7 % quand cette hauteur est de 4 mm ou moins. Enfin, la majorité des échecs se produit durant les 12 premiers mois de mise en charge [29].

Une dernière étude sur un total de 86 implants (72 Frialit-2® et 14 IMZ Twin-Plus®) montre un taux de survie de 95,3 % avec un recul clinique moyen de 28 mois. Soixante-huit implants ont été mis en place dans le même temps opératoire que l'ostéotomie avec un taux de succès de 95,6 %. Dix-huit implants ont été mis en place dans un second temps opératoire après préparation du site par ostéotomie avec un taux de succès de 94,4 % [39].

Discussion

L'élévation du plancher sinusien à l'aide d'ostéotomes présente de multiples avantages :

- technique peu invasive de reconstruction du maxillaire postérieur édenté avec un volume osseux limité;

- mise en place d'implants d'une longueur supérieure ou égale à 10 mm ;

- mise en place d'implants, dans certains cas, dans la même séance chirurgicale ;

- simplification de l'acte et réduction du temps opératoire par rapport à la technique classique d'un soulevé de sinus ;

- meilleur confort postopératoire ;

- technique conservatrice par absence de forage et peu de perte d'os ;

- amélioration de la densité osseuse péri-implantaire par effet des ostéotomies ;

- grande perceptibilité tactile pour l'opérateur le renseignant sur la densité osseuse ;

- moindre difficulté à élargir de façon homothétique que par un forage mécanique dans un os de faible densité ;

- préservation de l'intégrité sinusienne (si aucun instrument ne pénètre dans le sinus).

Cependant, cette technique s'opère à l'aveugle, laissant peu de contrôle de l'intégrité de la membrane sinusienne lors de l'élévation du plancher sinusien.

De plus, lors de la translation d'un cylindre osseux par ostéotomie, il est difficile d'en contrôler la progression dans le sinus au risque d'être expulsé dans la cavité sinusienne.

Une caméra endoscopique introduite dans le sinus par trépanation dans la paroi latérale permettrait de contrôler visuellement la progression de l'ostéotomie.

Les résultats à court terme montrent que l'ostéointégration des implants n'est pas compromise lorsque ces derniers sont placés dans le même temps opératoire que le soulèvement de sinus par les ostéotomes [37]. En revanche, cette technique d'ostéotomie semble présenter moins de prévisibilité en cas de faible hauteur osseuse initiale (< 5 mm) [29]. Dans ces situations cliniques, le comblement sinusien par abord latéral reste encore la technique de référence. Par ailleurs, les résultats dont nous disposons actuellement avec les ostéotomes n'ont pas le même recul clinique que les techniques classiques de soulevé de sinus.

Il sera intéressant de mener des études à moyen et long terme afin de valider cette technique.

Conclusion

L'utilisation des ostéotomes trouve son application dans l'élévation du plancher sinusien sous certaines conditions de hauteur osseuse disponible et au niveau d'édentement de faible étendue. C'est une technique chirurgicale peu invasive simplifiant la chirurgie implantaire en évitant le recours à des techniques classiques plus lourdes.

Cette nouvelle approche implantaire permet une conservation, une expansion et une condensation osseuse. Des études à long terme sont indispensables pour confirmer l'efficacité de cette nouvelle proposition thérapeutique.

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