Une nouvelle maladie : la COVID-19 A new disease: COVID-19 - JPIO n° 3 du 01/09/2020
 

Journal de Parodontologie & d'Implantologie Orale n° 3 du 01/09/2020

 

Article

Vianney DESCROIX  

Professeur des Universités en biologie orale, UFR d'odontologie Garancière, Université de Paris
Chef de Service d'odontologie, hôpital Pitié-Salpêtrière, APHP Sorbonne Université

Résumé

Résumé

Le syndrome respiratoire aigu sévère coronavirus-2 (SRAS-CoV-2) est dû à un nouveau coronavirus qui a provoqué une pandémie mondiale de la maladie respiratoire humaine Covid-19, entraînant une menace grave pour la santé et la sécurité publiques. L'analyse de l'arbre génétique suggère que le SRAS-CoV-2 appartient au même groupe de bêtacoronavirus que le coronavirus du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS-CoV) et le coronavirus du syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS-CoV). Bien que la voie de transmission virale reste un mystère, le SRAS-CoV-2 semble provenir d'un réservoir animal, probablement celui de la chauve-souris. Les caractéristiques cliniques de Covid-19, telles que la fièvre, la toux, l'essoufflement et la fatigue, sont similaires à celles retrouvées dans de nombreuses infections respiratoires aiguës. Il n'existe actuellement aucun traitement spécifique pour la Covid-19 mais la thérapie antivirale combinée à des soins de soutien est la principale stratégie. Nous résumons ici les progrès récents dans la compréhension des caractéristiques cliniques de la Covid-19 dans les différentes formes adultes et pédiatriques.

Summary

ABSTRACT

Severe acute respiratory syndrome coronavirus-2 (SARS CoV-2) is due to a new coronavirus which has caused global pandemic of human respiratory disease Covid-19, posing a serious threat to health and public safety. Analysis of the genetic tree suggests that SARS-CoV-2 belongs to the same group of beta-virus that the acute respiratory syndrome coronavirus severe (SARS-CoV) and respiratory syndrome coronavirus from the Middle East (MERS-CoV). Although the way to viral transmission remains a mystery, SARS-CoV-2 appears to come from an animal reservoir, probably bats. The clinical characteristics of Covid-19, such as fever, cough, shortness of breath and fatigue, are similar to those found in many respiratory tract infections. There is currently no specific treatment for Covid-19 but antiviral therapy combined with supportive care is the main strategy. Here we summarize recent advances in the understanding of the clinical features of Covid-19 in different adult and pediatric forms.

Key words

ARS-CoV 2, Covid-19, viral pneumonia, new coronavirus.

Introduction

Les virus de la famille des coronavirus provoquent généralement les symptômes du rhume courant, mais deux bêtacoronavirus – SRAS-CoV-1 et le coronavirus du syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS-CoV) – peuvent provoquer une pneumonie grave et une insuffisance respiratoire conduisant au décès. Fin 2019, une infection a été signalée chez des personnes qui avaient été exposées à un marché de fruits de mer à Wuhan, en Chine, où des animaux vivants ont été vendus. Il s'agit d'un nouveau bêtacoronavirus, nommé par la suite SRAS-CoV-2. Dès lors, le virus s'est propagé de manière ultra-rapide, conduisant à une pandémie mondiale de la Covid-19. Nous proposons dans cet article une revue des données cliniques et biologiques qui décrivent le mieux la maladie Covid-19. Il s'agit d'une maladie particulièrement récente, appelant à une grande prudence concernant les données scientifiques qui peuvent changer rapidement.

Transmission

Le SRAS-CoV-2 se propage principalement d'une personne à une autre par le biais de gouttelettes respiratoires, qui sont généralement libérées lorsqu'une personne infectée tousse ou éternue. Étant donné que les gouttelettes tombent généralement à quelques mètres, la probabilité de transmission diminue si les personnes restent au moins à 2 mètres l'une de l'autre. Il est peu probable que la transmission se produise par inhalation d'aérosols (virions en suspension dans l'air) mais il est à craindre que le virus puisse être aérosolisé au cours de certaines activités (par exemple, le chant) ou de procédures (par exemple, l'intubation ou l'utilisation de nébuliseurs). Il peut, en outre, persister dans les aérosols pendant plus de 3 heures (van Doremalen et al., 2020). L'ARN du SRAS-CoV-2 a été détecté dans le sang et les selles bien que la propagation fécale-orale n'ait pas été documentée. Le SRAS-CoV-2 peut persister sur le carton, le plastique et l'acier inoxydable pendant des jours (jusqu'à 72 heures) (van Doremalen et al., 2020). Par conséquent, la contamination des surfaces inanimées peut jouer un rôle dans la transmission (Wei et al., 2020).

L'un des défis majeurs à prendre en compte pour endiguer la propagation du SRAS-CoV-2 est que les personnes pré-symptomatiques sont contagieuses (Kimball et al., 2020). Des rapports récents suggèrent en effet que les patients peuvent être contagieux 1 à 3 jours avant l'apparition des symptômes et que 40 à 50 % des cas peuvent être attribuables à des transmissions de personnes asymptomatiques ou pré-symptomatiques (He et al., 2020). Juste avant ou peu de temps après l'apparition des symptômes, les patients présentent des taux viraux naso-pharyngés élevés, qui diminuent ensuite au cours d'une semaine environ (Wölfel et al., 2020). Les patients atteints d'une maladie grave ou chronique peuvent mettre plus de temps à éliminer le virus, bien que la durée de l'excrétion virale infectieuse ne soit pas claire (Liu et al., 2020).

Présentation clinique

Le SARS-CoV-2 provoque une maladie respiratoire nommée Covid-19 par l'Organisation mondiale de la santé (OMS).

Il existe deux formes différentes de la maladie Covid-19 : une forme asymptomatique et une forme symptomatique (Plaçais et al., 2020).

La maladie Covid-19 peut évoluer en 3 phases avant le décès (Plaçais et al., 2020).

Premièrement, on observe une phase dite d'incubation. La durée d'incubation est définie par l'intervalle de temps entre la date d'un premier contact (contamination) et la date d'apparition des symptômes. En fonction des études, sa durée varie entre 1 et 14 jours (Tu et al., 2020). Guan et al. retrouvent une durée d'incubation de 4 jours (Guan et al., 2020) alors que Li et al. retrouvent une durée d'incubation de 5,2 jours (Li et al., 2020).

Deuxièmement, une phase symptomatique apparaît chez 70 % des personnes infectées, présentant une durée médiane de 8 jours.

Enfin, une troisième phase de syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) survient chez 3,4 % des patients hospitalisés.

L'épidémie au sein du bateau Diamond Princess resté en quarantaine au port de Yokohama a permis une analyse de modélisation qui peut estimer la proportion de patients asymptomatiques parmi tous ceux qui se sont avérés positifs au SARS-CoV2 (Mizumoto et al., 2020) : 634 personnes ont été testées positives parmi 3063 testées au 20 février 2020. Dans cet échantillon, 17,9 % des personnes étaient asymptomatiques, ce qui chevauche une estimation récemment dérivée de 33,3 % (intervalle de confiance à 95 % [8,3-58,3]) à partir des données des citoyens japonais évacués de Wuhan. On observe une similitude rapportée des charges virales entre les patients asymptomatiques et symptomatiques (Zou et al., 2020). En outre, même s'il n'y a pas encore de preuve claire de transmission asymptomatique, la transmission du SRAS-CoV-2 par des cas asymptomatiques ou pauci-symptomatiques reste possible. Aussi, la proportion relativement élevée des infections asymptomatiques pourrait-elle avoir des implications pour la santé publique (Bai et al., 2020).

À côté de ces formes asymptomatiques, on retrouve des formes symptomatiques qui peuvent être plus ou moins sévères, sans qu'il existe aujourd'hui de consensus permettant clairement d'en définir la gravité.

Formes légère à modérée

La période d'incubation médiane, depuis l'exposition jusqu'au début des symptômes, est d'environ 4 à 5 jours (fig. 1) et 97,5 % des patients symptomatiques présenteront des symptômes dans les 11,5 jours suivant l'infection (Lauer et al., 2020). Ces symptômes peuvent inclure de la fièvre, de la toux, des maux de gorge, des sensations de malaises et des myalgies. D'après Guan et son équipe, la fièvre est le principal symptôme (88,7 % des personnes), suivie par la toux (68 %), les expectorations (34 %), la dyspnée (19 %) et, enfin, les myalgies (15 %) (Guan et al., 2020).

Certains patients présentent des symptômes gastro-intestinaux, notamment de l'anorexie, des nausées (1 à 17,3 %) et de la diarrhée (2 à 35,6 %) (Wong et al., 2020).

D'autres troubles tels que l'anosmie et l'agueusie ont également été signalés (Lechien et al., 2020). Dans une étude européenne, comprenant un total de 417 patients Covid-19 légers à modérés (dont 263 femmes), la douleur au visage et l'obstruction nasale étaient les symptômes oto-rhino-laryngologiques les plus liés à la maladie : 85,6 % et 88,0 % des patients respectivement ont signalé des dysfonctionnements olfactifs et gustatifs. Il y avait une association significative entre les deux troubles (p < 0,001). La dysfonction olfactive (DO) est apparue avant les autres symptômes dans 11,8 % des cas. Les scores sQO-NS étaient significativement plus faibles chez les patients anosmiques que chez les individus normosmiques ou hyposmiques (p = 0,001). Parmi les 18,2 % de patients sans obstruction nasale ni rhinorrhée, 79,7 % étaient hyposmiques ou anosmiques. Le taux de récupération olfactive précoce était de 44 %. Les femmes étaient significativement plus affectées par les dysfonctionnements olfactifs et gustatifs que les hommes (p = 0,001). Les mécanismes physiopathologiques conduisant aux dysfonctionnements olfactifs et gustatifs de l'infection au Covid-19 sont encore inconnus. Le coronavirus a déjà été identifié comme appartenant à une famille de virus pouvant être associés à l'anosmie. En 2007, Suzuki et al. ont démontré que le coronavirus pouvait être détecté dans les sécrétions nasales des patients atteints de dysfonctionnement olfactif. De plus, ils ont observé que certains patients avec une rhinométrie acoustique normale ne récupéraient pas leur olfaction, suggérant que l'inflammation nasale et l'obstruction associée n'étaient pas les seuls facteurs étiologiques à l'origine du dysfonctionnement olfactif dans l'infection virale.

Dans certaines séries de patients hospitalisés, la dyspnée s'est développée avec une médiane de 5 à 8 jours après l'apparition initiale des symptômes (Wang et al., 2020), sa survenue signant une aggravation de la maladie.

Certaines co-morbidités comme les maladies cardio-vasculaires, les maladies pulmonaires chroniques, l'hypertension, le diabète et l'obésité (tableau 1), ainsi qu'un âge avancé (> 65 ans) s'avèrent être des facteurs de risque entraînant de graves complications. On ne sait pas si d'autres contextes cliniques – maladie rénale, immunosuppression, cancer et infection non contrôlée par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) – ne peuvent pas engendrer un risque accru de complications. Toutefois, ces maladies peuvent être associées à des formes graves après une infection par d'autres agents pathogènes respiratoires et une surveillance étroite de ces patients atteints de Covid-19 est alors justifiée.

Les formes graves de la maladie se déclarent en moyenne une semaine après les premiers symptômes. La dyspnée est le symptôme le plus commun de la forme sévère, souvent associée à une hypoxémie.

Forme sévère

Dans une large cohorte de patients atteints de Covid-19, 81 % avaient une forme légère, 14 % avaient une maladie grave et 5 % sont tombés gravement malades avec une insuffisance organique. Dans ce dernier groupe, le taux de mortalité était de 49 %. (Wu et al., 2020). D'un point de vue épidémiologique, la forme sévère de Covid-19 chez l'adulte se définit par une dyspnée, une fréquence respiratoire (FR) > 30 cycles par minute, une saturation en oxygène (SaO2) < 93 %, un rapport de la pression partielle d'oxygène artériel à la fraction d'inspiration oxygène (PaO2/FiO2) de moins de 300 mmHg. (Wu et al., 2020).

La forme grave de la maladie débute généralement environ une semaine après le début des symptômes. La dyspnée est le symptôme le plus courant d'une forme grave de la maladie et s'accompagne souvent d'hypoxémie (Zhou et al., 2020 ; Wang et al., 2020) (fig. 1). Une caractéristique frappante de la Covid-19 est la progression fulgurante de l'insuffisance respiratoire peu après le début de la dyspnée et de l'hypoxémie. Les patients atteints de Covid-19 sévère répondent généralement aux critères du syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA), défini comme l'apparition précoce d'infiltrats bilatéraux, une hypoxémie sévère et un œdème pulmonaire, non entièrement expliqués par une insuffisance cardiaque ou une surcharge liquidienne. La majorité des patients atteints de Covid-19 sévère souffrent de lymphopénie et certains ont des troubles du système nerveux central ou périphérique. Les cas graves de Covid-19 peuvent également entraîner des lésions cardiaques, rénales et hépatiques aiguës, en plus d'arythmie cardiaque, d'une rhabdomyolyse, d'une coagulopathie et d'un choc multi-viscéral (Bhatraju et al., 2020). Ces défaillances multi-viscérales peuvent être associées à un syndrome de libération de cytokines caractérisé par de fortes fièvres, une thrombocytopénie, une hyper-ferritinémie et une élévation d'autres marqueurs inflammatoires (Mehta et al., 2020). L'orage de cytokines ou lympho-histiocytose hémophagocytaire secondaire (LHHs) est un syndrome hyper-inflammatoire caractérisé par une hyper-cytokinémie fulminante et fatale associée à une défaillance multi-organes. Chez les adultes, la LHHs est le plus souvent déclenchée par des infections virales et survient dans 3,7 à 4,3 % des cas de septicémie. Les caractéristiques cardinales de la LHHs comprennent une hyperthermie persistante, des cytopénies et une hyper-ferritinémie. L'atteinte pulmonaire (y compris le SDRA) se produit chez environ 50 % des patients. Un profil de cytokines ressemblant à la LHHs est associé à la gravité de la maladie Covid-19, caractérisé par une augmentation de l'interleukine-2 (IL-2), de l'IL-7, du GCSF, de la protéine 10 induite par l'interféron δ, de MCP1, de MIP1-α et du TNF-α.

Les signes biologiques prédicteurs de décès, retrouvés dans une étude rétrospective multicentrique de 150 cas confirmés de Covid-19 à Wuhan, incluaient une ferritine élevée (moyenne 1297,6 ng/ml chez les non-survivants versus 614,0 ng/ml chez les survivants ; p < 0,001) et IL-6 (p < 0,0001) suggérant que la mortalité pourrait être due à une hyper-inflammation virale (Ruan et al., 2020).

Dans une série de cas de 214 patients, Mao et al. mettent en évidence des symptômes neurologiques chez 36,4 % des patients, plus fréquents chez les patients présentant une infection sévère (45,5 %). Ils incluaient une maladie cérébro-vasculaire aiguë, des troubles de la conscience (p < 0,001) et des lésions neuro-musculaires. Dans le groupe sévère, un patient a eu une crise caractérisée par un début soudain de contraction des membres, d'écume dans la bouche et de perte de conscience, qui a duré 3 minutes (Mao et al., 2020).

Outre les maladies cérébro-vasculaires et les troubles de la conscience, la plupart des manifestations neurologiques se sont produites au début de la maladie (durée médiane, 1-2 jours). Sur 6 patients atteints d'une maladie cérébro-vasculaire aiguë, 2 sont arrivés aux urgences en raison d'une apparition soudaine d'hémiplégie mais sans aucun symptôme typique de Covid-19 (fièvre, toux, anorexie et diarrhée). Leurs lésions pulmonaires ont été découvertes par une tomodensitométrie pulmonaire et ils ont été diagnostiqués comme souffrant de Covid-19 par une détection ultérieure de l'ARN du SARS-CoV-2. Certains patients souffrant de fièvre et de céphalées ont été admis en neurologie après avoir été initialement exclus du Covid-19 par des résultats de tests sanguins de routine et un scanner pulmonaire de dépistage. Cependant, plusieurs jours plus tard, ils présentaient des symptômes typiques de Covid-19 tels que toux, douleur à la gorge, lymphopénie et apparition de l'opacité du verre dépoli sur le scanner pulmonaire. Leur diagnostic Covid-19 a finalement été confirmé par une PCR positive et ils ont été transférés en service d'isolement (Mao et al., 2020). Le tropisme neurologique viral pourrait participer à la détresse respiratoire provoquée par le SRAS-CoV-2 (Plaçais et al., 2020).

Les personnes atteintes de pathologies chroniques telles que des maladies cardio-vasculaires, le diabète sucré et l'obésité sont plus susceptibles de développer une forme grave de Covid-19. L'incidence et la prévalence des maladies graves sont également plus élevées chez les hommes que chez les femmes et chez les personnes de plus de 65 ans que chez les personnes plus jeunes (Grasselli et al., 2020). Cependant, des personnes en bonne santé de tout âge peuvent devenir gravement malades (Berlin et al., 2020).

Évaluation

L'évaluation et la gestion de la Covid-19 sont guidées par la gravité de la maladie. Selon les données initiales chinoises, 81 % des personnes atteintes de Covid-19 souffraient d'une maladie légère ou modérée (y compris les personnes sans pneumonie et les personnes atteintes de pneumonie légère), 14 % avaient une maladie grave et 5 % avaient une forme critique (Wu et al., 2020).

Les patients qui présentent des signes et symptômes bénins n'ont généralement pas besoin d'une évaluation supplémentaire et, selon le profil de risque, ils peuvent même ne pas avoir besoin de réaliser un test de dépistage (PCR) de la Covid-19, car l'infection se résout majoritairement spontanément. Cependant, certains patients qui présentent initialement des symptômes légers auront par la suite une détérioration clinique précipitée qui se produit environ 1 semaine après l'apparition des symptômes. Chez les patients présentant des facteurs de risque de maladie grave (tableau 1), une surveillance étroite de la progression clinique est donc justifiée, avec un seuil bas pour une évaluation supplémentaire.

Si des symptômes nouveaux apparaissent ou s'ils s'aggravent (par exemple, majoration de la dyspnée) chez les patients atteints d'une maladie initialement bénigne, une évaluation supplémentaire est également justifiée. Un examen physique doit être effectué pour évaluer la tachypnée, l'hypoxémie et les atteintes pulmonaires. En outre, des tests de dépistage pour d'autres agents pathogènes (par exemple, le virus de la grippe, selon la saison et d'autres virus respiratoires) doivent être effectués, si disponibles. Enfin, il est nécessaire d'effectuer une imagerie thoracique.

Si les résultats de l'évaluation initiale suggèrent une maladie modérée ou grave, l'hospitalisation est généralement requise. Les patients atteints d'une maladie modérée peuvent souffrir de dyspnée mais leur saturation en oxygène du sang (SaO2) est généralement d'au moins 94 % en air ambiant. Les indicateurs d'une maladie grave sont la tachypnée marquée – fréquence respiratoire (FR) ≥ 30 respirations par minute –, l'hypoxémie – SaO2 ≤ 93 % ; rapport de la pression partielle d'oxygène artériel à la fraction d'oxygène inspiré < 300 – et les infiltrats pulmonaires – plus de 50 % du champ pulmonaire impliqué dans les 24 à 48 heures.

Concernant les examens complémentaires, la radiographie thoracique est initialement proposée. Certains centres utilisent également l'échographie pulmonaire. L'American College of Radiology recommande de ne pas utiliser la tomodensitométrie (TDM) comme dépistage ou étude d'imagerie initiale pour diagnostiquer Covid-19, exhortant à ce qu'elle soit utilisée « avec parcimonie » et uniquement chez les patients hospitalisés lorsqu'il existe des indications spécifiques (Ghandi et al., 2020).

Des tests sanguins supplémentaires peuvent parfois être effectués, comme des études de coagulation (par exemple, la mesure du D-dimère) et des tests pour les marqueurs inflammatoires (par exemple, la protéine C-réactive et la ferritine), la mesure du lactate déshydrogénase, de la créatine kinase ou encore de la procalcitonine. La valeur pronostique et l'utilité clinique des résultats de ces tests et d'autres restent incertaines (cf. infra).

Biologie

La Covid-19 symptomatique s'accompagne de différentes manifestations biologiques (Wang et al., 2020).

Une lymphopénie chez 83,2 % des malades pour l'étude de Guan (Guan et al., 2020) et chez 64 % des malades dans l'étude de Wu (Wu et al., 2020) associée à une neutrophilie.

Une CRP augmentée jusqu'à 150 mg/L (Wu et al., 2020) associée à une hypo-albuminémie et une hyper-ferritinémie (Zou et al., 2020 ; Wu et al., 2020).

Une augmentation des D-dimères qui signe une forme grave et prédictive de la mortalité (Zou et al., 2020 ; Wu et al., 2020).

Différentes modifications biologiques sont suspectées d'être prédictives de la survenue d'un SDRA et/ou du décès des personnes. Il s'agit notamment d'une augmentation des D-dimères à plus de 1 mg/mL, d'une élévation des polynucléaires neutrophiles ou encore d'une hyper-bilirubinémie totale, d'une hypo-albuminémie et de l'élévation de l'urée et de la LDH (Wu et al., 2020).

Imagerie

Selon la société française de radiologie, en mai 2020, il n'y a pas de place pour la radiographie thoracique. Si une imagerie est indiquée, il faut réaliser un scanner. Chez des patients sans gravité clinique ni co-morbidités, pour lesquels il existe un diagnostic différentiel pouvant évoquer une pneumopathie bactérienne, les arguments cliniques (foyer auscultatoire, douleur thoracique) et biologiques (hyperleucocytose) doivent prévaloir. Une PCR peut être indiquée en cas de fièvre résistante à l'antibiothérapie plutôt que la prescription d'une imagerie. Il n'y a actuellement pas d'indication à réaliser un scanner thoracique à des fins de dépistage chez des patients sans signes de gravité et sans co-morbidités.

Les aspects tomodensitométriques sont essentiellement l'aspect de plages de verre dépoli non systématisées à prédominance sous-pleurale et, à un stade plus tardif, de condensation alvéolaire. Il n'y a en règle pas d'excavation, de nodules, de masses. Les micronodules bronchiolaires, les adénopathies médiastinales et épanchements pleuraux sont rares, en sachant que des épanchements sont possibles en cas de décompensation cardiaque (SIT, 2020).

Infection chez l'enfant

Différentes études permettent de mieux comprendre l'évolution de l'infection à SARS-CoV-2 dans la population pédiatrique (Lu et al., 2020). La forme symptomatique semble très peu fréquente. Ainsi, parmi les 44 672 cas rapportés dans l'étude de Wu (Wu et al., 2020), les moins de 10 ans ne représentent que 1 % de la population. On retrouve la même proportion chez les 1099 patients de l'étude de Guan (Guan et al., 2020).

Sur les 1391 enfants évalués et testés dans l'importante étude rétrospective de Lu et al., 171 enfants (12,3 %) ont été confirmés comme infectés par le SRAS-CoV-2 (Lu et al., 2020). L'âge médian des enfants infectés était de 6,7 ans. La fièvre était présente chez 41,5 % des enfants pendant toute la durée de la maladie. Les autres signes et symptômes courants comprenaient la toux et l'érythème pharyngé ; 27 patients (15,8 %) ne présentaient aucun symptôme d'infection ni de caractéristique radiologique de pneumonie. Au total, 12 patients présentaient des signes radiologiques de pneumonie mais ne présentaient aucun symptôme d'infection. Au cours de l'hospitalisation, 3 patients ont eu besoin d'un séjour en soins intensifs et d'une ventilation mécanique invasive ; tous avaient des co-morbidités (hydronéphrose, leucémie). Une lymphopénie (numération lymphocytaire < 1,2 × 109/L) était présente chez 6 patients (3,5 %). Le résultat radiologique le plus courant était l'opacité bilatérale en verre dépoli (32,7 %). Au 8 mars 2020, il y avait eu un décès. Un enfant de 10 mois avec invagination a présenté une défaillance multiviscérale et est décédé 4 semaines après son admission. Au total, 21 patients étaient dans un état stable dans les services généraux et 149 étaient sortis de l'hôpital.

L'ensemble des cohortes pédiatriques semble montrer, à ce jour, que l'infection par SARS-CoV-2 est moins fréquemment symptomatique et moins grave que chez les adultes. Il n'est cependant pas précisé si ces proportions reflètent une sensibilité plus faible chez les enfants par rapport aux adultes ou des taux d'infection similaires ou encore s'il s'agit de proportions beaucoup plus élevées avec une maladie asymptomatique (Dong et al., 2020).

Fin avril 2020, différents services de pédiatrie ont rapporté un petit nombre de cas d'enfants hospitalisés présentant une maladie inflammatoire systémique pouvant faire évoquer une maladie de Kawasaki (Viner et al., 2020). Il s'agit d'une vascularite pédiatrique aiguë rare, avec les anévrismes des artères coronaires comme principale complication. Le diagnostic repose sur la présence de fièvre persistante, d'exanthème, de lymphadénopathie, d'injection conjonctivale et de modifications des muqueuses et des extrémités. Sa cause reste encore mal comprise, même s'il est aujourd'hui clair que la maladie de Kawasaki est liée à la présence de certains virus dans l'organisme. Son déclenchement a en effet été associé à plusieurs types d'infections virales, et notamment à des virus respiratoires ou entériques.

Conclusion

La Covid-19 est une nouvelle maladie virale particulièrement pernicieuse, très contagieuse dont nous savons encore peu de choses. De nombreuses zones d'ombre restent à explorer, notamment ses conséquences à long terme et les possibles séquelles ou ses atteintes multi-viscérales. Les espoirs résident essentiellement dans l'obtention d'un vaccin. Alors que la pandémie est encore loin d'être derrière nous, de nombreuses études et recherche cliniques permettront certainement de mieux comprendre cette maladie.

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