Relations entre maladies parodontales et pathologies cardiovasculairesRelations between periodontal diseases and cardiovascular diseases - JPIO n° 04 du 01/11/2013
 

Journal de Parodontologie & d’Implantation Orale n° 04 du 01/11/2013

 

Article

Céline GATTI*   Marie-Laure COLOMBIER**  


*Assistante hospitalo-universitaire
**PU-PH, Département de parodontologie, faculté de chirurgie dentaire, université Paris Descartes, AP-HP, hôpitaux universitaires Paris Nord Val de Seine

Résumé

Les maladies parodontales et les pathologies cardiovasculaires sont deux types d’affections inflammatoires chroniques qui partagent de nombreux facteurs de risque. Bien qu’un lien de causalité n’ait pas été mis en évidence, les études observationnelles démontrent une association entre maladies parodontales et pathologies vasculaires athérosclérotiques, indépendante des facteurs confondants. Des liens physiopathologiques entre ces maladies ont été établis et deux voies sont actuellement privilégiées, l’une infectieuse par un mécanisme direct des bactéries parodontopathogènes sur l’athérogenèse, l’autre indirecte par l’augmentation dans la circulation sanguine des médiateurs inflammatoires et des molécules de phase aiguë. Les études interventionnelles montrent que les traitements parodontaux sont effectifs sur la réduction de l’inflammation systémique et de la dysfonction endothéliale, mais leur impact sur les événements cardio­vasculaires reste à démontrer.

Summary

Periodontal and cardiovascular diseases are two chronic inflammatory pathologies sharing numerous risk factors. Although causal relathionship has not been shown, observational studies prove an association between periodontal diseases and atherosclerotic cardiovascular diseases, independent of confounding factors. Physiopathological links between these pathologies have been established, and two pathways are currently highlighted, the infectious one through a direct mechanism of periopathogen bacteria on atherogenesis, the other one, indirect, through an increase of inflammatory mediators and acute phase reactants in the bloodstream. Interventional studies show that periodontal treatments are effective on systemic inflammation and endothelial dysfonction reduction, but their effect on cardiovascular events has to be demonstrated.

Key words

Periodontal diseases, atherosclerosis, cardiovascular diseases, inflammation

Introduction

Le possible retentissement des maladies parodontales sur les maladies cardiovasculaires a généré de très nombreuses publications. Aujourd’hui, cette relation entre les deux pathologies est reconnue tant par les cardiologues que par les parodontistes – consensus publié conjointement par l’American Journal of Cardiology et le Journal of Periodontology (Friedewald et al., 2009) et rapport scientifique de l’American Heart Association (Lockhart et al., 2012) –, de force variable selon les études, même si une relation de causalité ne peut être démontrée du fait de sa complexité et des facteurs de risque partagés.

Étiologie et facteurs de risque des maladies cardiovasculaires

Maladies cardiovasculaires : première cause de mortalité dans les pays développés

En France en 2008, les maladies cardiovasculaires constituent la deuxième cause de décès (27,5 %), derrière les tumeurs (29,6 %) et largement devant les accidents (4,6 %), mais elles sont la première cause de mortalité chez les femmes. Elles sont également la première cause de mortalité dans l’Union européenne (40 % des décès), soit l’équivalent de 2 millions de morts chaque année. Le poids financier que représente ce groupe de maladies pour les systèmes de soins de santé dans l’Union européenne a été évalué à près de 110 milliards d’euros en 2006, soit 10 % de l’ensemble des dépenses de santé de l’Union européenne. Les maladies cardiovasculaires sont également l’une des principales causes de maladies de longue durée. Elles sont étroitement liées aux conditions sociales et les écarts entre les taux de maladies cardiovasculaires constituent la principale cause d’inégalité en matière de santé, tant au niveau national qu’européen (http://ec.europa.eu/health-eu/health_problems/cardiovascular_diseases/index_fr.htm).

Étiologie et facteurs de risque des maladies cardiovasculaires

Les maladies cardiovasculaires concernent le cœur et la circulation sanguine. Elles comprennent :

– la maladie coronarienne, due à une diminution du débit sanguin coronarien ;

– l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs, qui est due à une obstruction des artères périphériques ;

– l’infarctus du myocarde, qui correspond à une nécrose ischémique d’une zone myocardique dont la perfusion est interrompue par l’occlusion de l’artère coronaire du territoire concerné ;

– les accidents vasculaires cérébraux (AVC), qui sont des déficits neurologiques soudains et non convulsifs. Ils peuvent être d’origine ischémique, c’est-à-dire dus à l’interruption de la vascularisation d’un territoire cérébral par un caillot, ou d’origine hémorragique, c’est-à-dire dus à la rupture d’un vaisseau sanguin.

L’athérosclérose est à l’origine de la plupart des maladies cardiovasculaires à l’exception des AVC hémorragiques. Elle est définie, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 1958, comme une association variable des remaniements de l’intima des artères de gros et moyen calibres – consistant en une accumulation locale de lipides, de glucides complexes, de sang et de produits sanguins, de tissu fibreux et de dépôts calcaires – avec des modifications de la média. Ces modifications de la paroi artérielle aboutissent à son épaississement et à son durcissement.

L’athérosclérose est une maladie inflammatoire chronique, lentement évolutive, qui affecte la morphologie et la fonction des artères au ­niveau de zones bien précises, en particulier les bifurcations où l’écoulement sanguin est irrégulier. C’est une pathologie résultant d’étiologies multiples qui font intervenir des facteurs environnementaux, des anomalies plasmatiques et génétiques ainsi que des dysfonctionnements cellulaires. Ainsi, une succession d’événements conduit à la formation du thrombus au niveau de la paroi, prélude à l’obstruction du vaisseau : infiltration puis oxydation des lipoprotéines de basse densité (LDL, low density lipoproteins), pénétration des cellules immunitaires, production de médiateurs pathogènes (cytokines pro-inflammatoires, radicaux libres oxygénés, chimiokines chimio-attractives…), différenciation des monocytes en macrophages spumeux suivie de leur apoptose et donc de l’augmentation du cœur lipidique pariétal, dysfonctionnement endothélial, protéolyse péricellulaire favorisant la rupture de plaque (fig. 1) (Nalbone et al., 2006).

L’athérosclérose débute dès l’adolescence mais ne se manifeste qu’après de nombreuses années, quand le volume des plaques d’athérome commence à diminuer le débit sanguin des artères. Sténose, thrombose, hémorragie et anévrisme comptent parmi les complications possibles (fig. 2) (Nalbone et al., 2006).

Les facteurs de risque des maladies cardiovasculaires ont été établis à partir des études épidémiologiques. Les facteurs non modifiables sont le sexe, l’âge et les antécédents familiaux. Les facteurs modifiables comprennent les facteurs comportementaux (suralimentation, obésité, sédentarité, stress émotionnel répété), les facteurs socio-économiques, le tabagisme, l’hypercholestérolémie, la consommation excessive d’alcool, l’hypertension artérielle, le diabète, le stress psychosocial. Hormis l’hypercholestérolémie et l’hypertension artérielle, ces facteurs de risque sont également reconnus pour les maladies parodontales, ce qui rend complexe l’étude des relations entre parodontites et maladies cardio­vasculaires. Les différents facteurs de risque se cumulent. Étant donné qu’un infarctus du myocarde sur deux survient chez des sujets ne présentant aucun facteur de risque cardiovasculaire, de nouveaux facteurs de risque, dont les infections chroniques comme les parodontites, sont étudiés depuis plus de 20 ans.

Relations entre maladies parodontales et maladies cardiovasculaires : physiopathologie

Trois voies fonctionnant individuellement ou en synergie ont été explorées pour expliquer les mécanismes de la relation entre parodontite et maladie systémique : la voie immunitaire – réponse auto-immune via des anticorps (Hinode et al., 1998) – et deux voies plus privilégiées aujourd’hui, la voie infectieuse et la voie inflammatoire.

Voie infectieuse

Cette théorie repose sur la détection de bactéries parodontopathogènes spécifiques dans les tissus vasculaires, en particulier dans les plaques athéromateuses (Chiu, 1999 ; Haraszthy et al., 2000 ; Zaremba et al., 2007 ; Figuero et al., 2011). Elle est confortée par différents travaux in vitro sur les facteurs de virulence bactériens qui ont permis d’impliquer en particulier Porphyromonas gingivalis dans le processus de formation et de progression de l’athérosclérose via sa capa­cité à pénétrer les cellules endothéliales (Deshpande et al., 1998 ; Giacona et al., 2004 ; Amar et al., 2009). L’activation des TLR2 (toll-like receptor 2) des cellules endothéliales stimule la production de cyto­kines pro-inflammatoires et la surexpression de molécules d’adhésion (Wada et Kamisaki, 2010 ; Kebschull et al., 2010). Activés par les pathogènes parodontaux, les monocytes migrent dans l’espace sous-endothélial et se transforment en macrophages puis en cellules spumeuses après absorption de LDL oxydées. Cela a été démontré in vitro : des macrophages incubés avec P. gingivalis et du LDL internalisent la bactérie et se transforment en cellules spumeuses (Giacona et al., 2004). De plus, les pathogènes parodontaux induisent la prolifération des cellules musculaires lisses de l’intima et de la média (fig. 3). Enfin, les pathogènes parodontaux pourraient être impliqués dans la maturation de plaques d’athérome et leur rupture en favorisant la dégra­dation de la matrice extracellulaire (Kebschull et al., 2010).

Plusieurs expérimentations animales montrent que des interactions spécifiques avec les pathogènes parodontaux accélèrent l’athérogenèse. Ainsi, P. gingivalis pourrait contribuer à la progression de l’athérosclérose indépendamment de taux élevés de cholestérol chez la souris (Lalla et al., 2003) et chez le porc (Brodala et al., 2005). Toutefois, ces modèles animaux présentent des variables, tant pour la voie d’administration que pour sa durée, sa fréquence et la dose de P. gingivalis utilisée, qui suggèrent qu’à la fois la réponse de l’hôte et la virulence spécifique des souches de P. gingivalis sont importantes dans ces modèles animaux.

Voie inflammatoire

Cette théorie est fondée sur la circulation sanguine de médiateurs pro-inflammatoires à partir des lésions parodontales d’une part et produits par une réaction systémique aiguë d’autre part, favorisant le développement d’athérosclérose de façon indirecte. Chez un patient atteint de parodontite, les taux sériques des médiateurs systémiques pro-inflammatoires tels que la protéine C réac­tive (CRP, C-reactive protein), le fibri­nogène et des cytokines – interleukines 1 et 6 (IL1 et IL6), TNF-α (tumor necrosis factor alpha) – sont augmentés.

D’un point de vue systémique, l’épithélium de poche ulcéré permet le passage de bactéries dans la circulation sanguine, ce qui entraîne des bactériémies récurrentes, un bruit inflammatoire continu ainsi qu’une stimulation faible mais permanente du système immunitaire. Par rapport à des patients sains, les sujets atteints de parodontite ont davantage de granulocytes circulants et des concentrations plus importantes de marqueurs de l’inflammation aiguë comme la protéine C réactive, le fibrinogène et les cytokines. Une méta-analyse d’études cas-témoins a mis en évidence une concentration sérique de CRP plus élevée de 1,7 mg/l chez les patients avec une parodontite que chez les sujets sains (Paraskevas et al., 2008). L’importance de cette différence est cliniquement significative puisqu’elle fait changer les patients de classe de risque cardiovasculaire associé à la CRP.

Face à l’attaque bactérienne, les différences de la réaction immunitaire trouvées entre les individus développant ou non une parodontite proviendraient de certaines caractéristiques des lymphocytes T et des monocytes. Ainsi, certains individus réagissent à la présence de bactéries ou de lipopolysaccharides (LPS) avec une réaction inflammatoire anormalement forte. Les monocytes périphériques des individus ayant une réaction forte sécrètent de 3 à 10 fois plus de médiateurs inflammatoires que ceux des indivi­dus avec une réponse normale (Offenbacher et al., 1993).

Ce phénotype hyperinflammatoire a été mis en cause par Beck et al. dans l’apparition des infections parodontales et de l’athérosclérose (Beck et al., 1998). Les infections parodontales entraînent une sollicitation systémique chronique des vaisseaux par les lipopolysaccharides bactériens et par les substances inflammatoires libérées par la réponse immunitaire. Les lipopolysaccharides provoquent la libération d’IL1-Β, de TNF-α, de thromboxane B2 et déclenchent l’adhésion et l’agrégation de thrombocytes, favorisant la coagulation et la formation de thrombi. La constante stimulation du lipopolysaccharide génère la formation d’IL1-α sur l’endothélium, ce qui provoque une réduction de la fibrinolyse et une accumulation de fibrine. Ainsi, d’un point de vue général, les lipopolysaccharides systémiques peuvent activer une cascade de médiateurs inflammatoires. Ceux-ci sont en mesure de provoquer la majorité des altérations vasculaires et des complications consécutives en présence d’athérosclérose et/ou de maladies cardiovasculaires.

Preuves épidémiologiques de liens entre les pathologies

Les premières études publiées sur ce sujet remontent à 1989. Deux études cas-témoins ont mis en évidence une association, chez les hommes finlandais, entre le degré d’hygiène orale et l’infarctus du myocarde d’une part et l’accident vasculaire cérébral ischémique d’autre part (Mattila et al., 1989 ; Syrjänen et al., 1989). L’étude de cohorte NHANES I (DeStefano et al., 1993), d’une durée de 14 ans et réalisée aux États-Unis sur près de 6 000 hommes, fait apparaître une augmentation du risque d’infarctus chez les hommes atteints de parodontite, en particulier chez les moins de 50 ans, avec un risque relatif (RR, mesure le risque de survenue d’un événement entre 2 groupes) égal à 1,72. Cependant, d’autres études prospectives réalisées sur d’importantes cohortes aux États-Unis (Joshipura et al., 1996 ; Howell et al., 2001) ne mettent en évidence aucune association entre maladie parodontale et maladies cardiovasculaires. Il faut souligner que pour ces études, l’état parodontal est autodéclaré, ce qui a pu aboutir à une sous-évaluation de la prévalence de la maladie parodontale.

Depuis ces premières études, l’existence et la nature de l’association entre les parodontites et les maladies cardiovasculaires dues à l’athérosclérose font débat. Il s’agit de savoir si l’association est réelle ou due à des facteurs de confusion ­résiduels et si la nature de l’association est causale. Le lien peut également être étudié sous l’angle des modifications éventuellement induites par le traitement parodontal sur les marqueurs de l’inflammation systémique, cliniques ou mécaniques de l’athérosclérose. Les réponses à ces questions nécessitent des études de cohorte rigoureuses et des études interventionnelles contrôlées, randomisées en double aveugle pour éliminer les biais.

Les méta-analyses étudiant l’association entre maladie parodontale et maladie cardiovasculaire mettent toutes en évidence la présence d’une association relativement faible avec des odds ratios (OR, ou rapport des cotes, se définissant comme le rapport des chances/cotes qu’un événement survenant dans un groupe de sujets arrive également dans un autre groupe) compris entre 1,15 et 2,34 (Bahekar et al., 2007 ; Mustapha et al., 2007 ; Blaizot et al., 2009). Toutes les études récentes sur des cohortes mettent en évidence une augmentation du risque de maladie cardiovasculaire en présence d’une maladie parodontale. Une des études réalisée en Écosse sur 11 800 sujets montre que la mauvaise hygiène orale est associée à un risque augmenté de survenue de maladie cardiovasculaire (OR = 1,7). La survenue d’un infarctus du myocarde a été récemment corrélée d’une part à l’augmentation de la charge totale de pathogènes parodontaux (OR = 2), et d’autre part à la présence de Tannerella forsythia (OR = 1,62) et de Prevotella intermedia (OR = 1,40) (Andriankaja et al., 2011).

Parmi les études interventionnelles, quatre d’entre elles portent sur un nombre important de patients et sont présentées dans le tableau 1. Celle de Tonetti et al. montre que le traitement parodontal entraîne une inflammation aiguë systémique de courte durée mais que, 6 mois plus tard, l’amélioration de la fonction endothéliale est associée à l’amélioration des paramètres parodontaux avec une corrélation significative entre la réduction du nombre de poches saignant au sondage et l’amélioration de la fonction endothéliale (Tonetti et al., 2007).

Les études montrent des modifications variables des marqueurs inflammatoires. L’étude PAVE (Offenbacher et al., 2009) est pour l’heure la seule à évaluer, chez des sujets avec des antécédents d’infarctus du myocarde ou d’angine de poitrine, les effets du traitement parodontal sur les maladies cardio­vasculaires elles-mêmes et non sur leurs marqueurs de substitution. Aucune différence n’a pu être mise en évidence entre les deux groupes. Dans cette étude, la CRP ne répondait pas aux effets du traitement parodontal chez les individus obèses (indice de masse corporelle > 30), ce qui confirme le fait que l’obésité masque la faible augmentation de la CRP due aux maladies parodontales.

Du point de vue de la santé publique, si de futures études démontraient un lien causal et un impact positif du traitement de la maladie parodontale sur les maladies cardiovasculaires, les conséquences seraient importantes étant donné la prévalence de ces pathologies alors que la maladie parodontale peut être prévenue et traitée. De plus, des soins oraux préventifs ont de multiples autres bénéfices, notamment sur la qualité de vie. Enfin, l’identification d’individus à risque plus élevé que ne le laisseraient penser les facteurs de risque traditionnels pourrait conduire à une prise en charge plus attentive des facteurs de risque connus comme l’hyperlipidémie chez ces patients.

Il reste la possibilité que la maladie parodontale et les maladies cardiovasculaires soient les manifestations d’une même pathologie exacerbant la réponse inflammatoire. Il n’existe, à ce jour, aucune étude interventionnelle démontrant que le traitement ou la prévention de la parodontite entraîne une diminution de la prévalence des problèmes cardiaques et donc aucune preuve que la relation soit causale. Il reste aussi à déterminer si la contribution possible des parodontites aux maladies cardiovasculaires sera davantage réduite en traitant une maladie parodontale existante ou bien grâce à la prévention avant qu’un seuil de maladie cardiovasculaire subclinique soit atteint.

Conclusion

Les études observationnelles mettent en évidence une association, de force variable, entre maladies parodontales et maladies cardio­vasculaires provoquées par l’athérosclérose. Ces variations considérables peuvent s’expliquer par les différences au niveau des populations étudiées, de la classification et du mode de diagnostic des mala­dies cardiovasculaires et des mala­dies parodontales ainsi que du contrôle insuffisant des facteurs de confusion. De plus, il n’a été publié jusqu’à ce jour aucune étude prouvant que le traitement d’une affection parodontale réduit le risque de problèmes cardiovasculaires. De surcroît, il est possible que même si une association causale existe, elle ne puisse être démontrée en raison de considérations éthiques ainsi que de la complexité des études à mener, du fait des nombreux facteurs de risque partagés et de la durée nécessaire au développement de ces deux maladies.

Si la maladie parodontale n’est pas reliée de façon causale aux maladies cardiovasculaires, les données suggèrent qu’elle pourrait être un marqueur de risque. Cette hypothèse implique qu’un facteur de confusion inconnu est associé à la fois avec la maladie parodontale et avec les maladies cardiovasculaires dues à l’athérosclérose et explique la rela­tion observée. Les facteurs les plus probables sont le tabac, le régime alimentaire, l’obésité, le diabète et les facteurs socio-économiques. Certains auteurs ont par ailleurs évoqué l’hypothèse d’une susceptibilité génétique à une réponse inflammatoire forte qui influencerait le développement non seulement de la maladie parodontale mais aussi des maladies cardiovasculaires dues à l’athérosclérose.

L’ensemble des données disponibles dans la littérature médicale indique que les maladies parodontales doivent être considérées comme un facteur de risque des pathologies cardiovasculaires et de l’athérosclérose, et que le traitement parodontal peut avoir certains effets positifs sur la réduction des taux de cytokines inflammatoires (Huck et al., 2011). Il a été récemment montré que l’évaluation de la perte osseuse par radiographie panoramique pouvait être un critère simple et pertinent pour estimer la probabilité de lésions coronaires complexes multiples chez les patients avec infarctus du myocarde récent (Romagna et al., 2012). Dès lors, l’attention des cardiologues doit être attirée sur cette possibilité d’évaluation de l’état parodontal, et une collaboration plus étroite entre cardiologues et parodontistes doit être instaurée afin de traiter les parodontites des patients à risque cardiovasculaire.

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