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V. LUGAND * M.G. POBLETE ** D. GLEZ *** J.-F. MICHEL ****
*UFR d'Odontologie de Rennes
Département de parodontologie
Les maladies parodontales rencontrées chez la femme lors de la ménopause sont des gingivites, des symptômes de brûlure et de sécheresse buccale ainsi que des parodontites. Celles-ci peuvent avoir différentes étiologies : locales, générales et/ou psychologiques. Il a été démontré que le parodonte est un organe cible des hormones stéroïdiennes, mais les mécanismes d'action de celles-ci demeurent encore incompris. Les moyens de défenses immunitaires locaux peuvent également être altérés par des modifications hormonales. Chez les femmes ayant une déficience hormonale lors de la ménopause, le traitement hormonal de substitution peut permettre une diminution des symptômes.
Periodontal diseases that affect menopausal women are : gingivitis, dry mouth, burning symptoms and periodontitis. These have different aetiologies : local, general and/or psychological. It has been shown that the periodontium is a target of steroid hormones, however the mechanisms of action are not understood. Local immune defences can be altered by hormonal changes. In women who have a hormonal deficiency during the menopause, hormone replacement therapy can reduce symptoms.
Du fait des progrès de la médecine et d'un meilleur accès aux soins, les femmes peuvent vivre en moyenne actuellement jusqu'à 83 ans. Il en résulte l'observation d'une augmentation de la fréquence des maladies, ce qui est non négligeable du point de vue de la santé publique. De plus, tout comme lors de la puberté et de la grossesse, les femmes vont être sujettes lors de la ménopause à un bouleversement hormonal physiologique. Ceci a pour conséquence l'apparition de symptomatologies et de pathologies générales (bouffées de chaleur, troubles de la sphère génitourinaire, ostéoporose, maladies cardio-vasculaires…) accompagnées de pathologies buccales chez certaines d'entre elles (sensations de brûlure et de sécheresse buccale, gingivites et parodontites).
Après un rappel concernant la physiologie de la ménopause, nous verrons quelles sont les pathologies buccales rencontrées lors de cette période puis les différentes hypothèses quant à leurs origines. Enfin, on discutera de l'intérêt du traitement hormonal de substitution pour remédier à ces pathologies.
Une femme est en moyenne ménopausée à 52 ans. Cette période fait suite à la périménopause, caractérisée par des irrégularités du cycle menstruel (Wendum, 1997). La sécrétion des œstrogènes se maintient, mais celle de la progestérone diminue. Ainsi, lors de la transition ménopausique, la femme est exposée à des concentrations appréciables d'œstradiol circulant (pouvant atteindre 500 pg/ml) (Mauvais-Jarvis et Sitruk-Ware, 1986).
Après une année sans menstruation, la femme est ménopausée. Les fonctions endocrine et exocrine des ovaires sont abolies.
Ainsi, à la postménopause, le taux d'œstradiol est diminué de 80 %, celui de l'œstrone de 20 % et celui de la progestérone de 85 % (Holst Ravn et al., 1994). L'œstrone est le principal œstrogène après la ménopause, il provient de la conversion de l'androstènedione dans le tissu adipeux, mais est beaucoup moins actif que l'œstradiol (Zachariasen, 1993). Lors de la préménopause, les concentrations d'œstradiol sont de 50 à 100 pg/ml et, à la postménopause, de 5 à 25 pg/ml ; en ce qui concerne les concentrations de progestérone, elles sont de 0,5 à 20 ng/ml lors de la préménopause et de 0,5 ng/ml lors de la postménopause (Zachariasen, 1993).
Ces modifications hormonales vont avoir des conséquences au niveau des organes cibles des hormones féminines, notamment du cerveau, du système génitourinaire, du cœur et des os.
Il est également démontré que les tissus gingivaux et osseux du parodonte peuvent être la cible de ces hormones et faire l'objet de pathologies (Mariotti, 1994).
Il s'agit principalement des sensations de brûlure et de sécheresse buccale, des gingivites et des parodontites.
Ces symptômes sont observés plus fréquemment chez les femmes postménopausées que préménopausées (Zachariasen, 1993). Le statut hormonal, qui n'est pas identique lors de ces deux périodes, peut être à l'origine de cette observation. De plus, ces sensations sont surtout retrouvées chez les femmes qui manifestent les symptômes généraux de la ménopause (Wardrop et al., 1989). Elles sont localisées au niveau de la gencive et/ou de la langue (glossodynies).
Les sensations de brûlures (Cibirka et al., 1997 ; Muzyka et De Rossi, 1999 ; Fraikin et al., 1999) sont classées en trois types selon Lamey et Lewis (1989) :
- le type I, dont les symptômes, non présents au réveil, se développent le matin et augmentent progressivement pour devenir sévères le soir ; 35 % des patients atteints du syndrome de brûlure buccale appartiennent à cette catégorie ;
- le type II, dont les symptômes sont continus dans la journée et qui représente 55 % des patients avec des douleurs du type brûlure ;
- le type III, dont les symptômes se manifestent par périodes dans la journée. Dans cette catégorie, certains patients peuvent passer des journées entières sans symptômes ; 10 % des patients atteints du syndrome sont concernés.
Les douleurs durent de 3 mois à 12 ans avec une moyenne de 3 ans et 4 mois (Cibirka et al., 1997). La douleur est surtout localisée sur la pointe et les deux tiers antérieurs de la langue. Le palais dur, la partie muqueuse de la lèvre et l'arcade alvéolaire peuvent ensuite être concernés (Cibirka et al., 1997 ; Muzyka et De Rossi, 1999).
Les différentes étiologies concernant les sensations de brûlure sont regroupées en trois catégories (Muzyka et De Rossi, 1999 ; Maresky et al., 1993 ; Hakeberg et al., 1997 ; Fraikin et al., 1999 ; Ship et al., 1995) :
- des facteurs locaux, qui sont des irritations mécaniques dues à des erreurs de conception de la prothèse, une mauvaise hygiène buccodentaire, une gingivite, une parodontite, une atrophie des muqueuses, des infections à Candida, des réactions allergiques à certains matériaux employés en dentisterie, une quantité de salive altérée à la suite de la prise de certains médicaments ou d'une radiothérapie ;
- des facteurs systémiques tels qu'une anémie, des carences en vitamines B12, B2, B6 et en acide folique, le diabète, des infections à VIH, des troubles immunologiques et la ménopause ;
- des facteurs psychologiques tels que la dépression, l'anxiété, un processus psychosomatique ou une cancérophobie chez les patients hypochondriaques.
Une xérostomie et une altération du goût peuvent accompagner ces symptômes. La qualité et/ou la quantité de salive peuvent être altérées par le statut hormonal lors de la ménopause. Cependant, le stress, la prise de certains médicaments, une maladie systémique telle que le diabète ou une maladie des tissus conjonctifs peuvent être impliqués dans la xérostomie.
Elles sont retrouvées dans la littérature médicale sous trois appellations différentes, mais correspondent à des degrés de sévérité variables : la gingivostomatite ménopausique, la gingivite desquamative et la gingivite exfoliatrice chronique.
Leurs caractéristiques cliniques sont identiques, seul leur degré de sévérité est variable selon certains contextes : l'hygiène buccodentaire de la patiente, la qualité de ses tissus gingivaux, la présence d'une pathologie systémique et son statut hormonal (Roth et Roth, 1978 ; Ferris, 1993 ; Deasy et Vogel, 1976 ; Markopoulos et al., 1996 ; Yih et al., 2000).
Les causes de la gingivite desquamative, autres que le facteur hormonal, peuvent être des maladies dermatologiques, l'âge, une perturbation métabolique et des infections chroniques.
La forme clinique retrouvée lors de la ménopause correspond à la définition classique : « Une gingivite desquamative est caractérisée par des lésions érythémateuses et desquamatives de la gencive libre et attachée » (Markopoulos et al., 1996).
La muqueuse buccale apparaît atrophiée et sèche. La couleur de la gencive varie du rose pâle au rouge vif. Les saignements sont importants au brossage et/ou au sondage. Les douleurs sont importantes. Un érythème est toujours présent avec desquamation de la gencive libre et attachée. Ces gingivites pourront aller d'une simple atrophie avec desquamation des tissus gingivaux à une gingivite érosive ou desquamative. Parfois, des lésions vésiculobulleuses, érosives ou hyperkératosiques sont observées.
L'épithélium est fin. Il y a une altération de la couche basale (qui apparaît atrophique ou absente) et la présence d'un infiltrat de cellules inflammatoires dans la lamina propria.
Les cas cliniques ci-après montrent différentes gingivites ménopausiques. Ils représentent :
- des gingivites atrophiques et desquamatives ménopausiques ( fig. 1 et 2) ;
- une gingivite érosive ménopausique (fig. 3) ;
- une gingivite desquamative importante avec des lambeaux épithéliaux facilement prélevables à la sonde (fig. 4, 5 et 6).
Les parodontites sont au départ des maladies d'étiologie bactérienne. Des facteurs locaux (plaque dentaire, malpositions, soins iatrogènes…), constitutionnels (hérédité, sexe, stress) et généraux (troubles hormonaux, ostéoporose, tabac…) peuvent moduler la gravité de cette maladie.
Il est actuellement bien établi qu'un déficit en œstrogènes lors de la ménopause prédispose certaines femmes à une ostéoporose systémique (Reinhardt et al., 1999). D'après certaines études, les œstrogènes agissent de la même façon au niveau des os maxillaires (Kribbs et al., 1989 ; Kribbs, 1990 ; Von Wowern et al., 1994 ; Streckfus et al., 1998). Ainsi, un déficit en œstrogènes peut entraîner une perte de densité osseuse au niveau du parodonte et, donc, aggraver une parodontite préexistante (Markovic, 2001 ; Von Wowern et al., 1994). Il en résulte une perte plus rapide que la normale de l'os alvéolaire et, par là, un risque augmenté de perte de dents.
Le facteur étiologique le plus important pour une parodontite est la plaque dentaire sous-gingivale, où une infection bactérienne peut conduire à la perte d'attache épithéliale et à une lyse osseuse. Il a été suggéré que cette affection pourrait être secondairement liée à une perte excessive osseuse due à une ostéoporose systémique (Elders et al., 1992).
Le vieillissement est constitué par des modifications histologiques des tissus liées à l'âge.
La diminution du flux salivaire provient d'une réduction des cellules acineuses du tissu glandulaire en relation avec une augmentation des tissus fibreux, adipeux et vasculaires due à l'âge (Streckfus et al., 1998).
La ménopause est une période de transition qui peut être délicate chez certaines femmes, au cours de laquelle stress et dépression peuvent être courants.
Face à certains symptômes, il est alors nécessaire d'évaluer les circonstances de leur apparition et le degré de sévérité que la patiente leur accorde, de comprendre comment elle perçoit la ménopause afin d'y adapter le traitement d'un point de vue aussi bien biologique que psychologique.
Les sensations d'inconfort oral n'ont pas pour seule étiologie le facteur psychologique, mais elles sont modulées par le contexte psychologique personnel de la femme (Igarashi et al., 2000).
En ce qui concerne le parodonte, les œstrogènes et la progestérone agissent au niveau du système immunitaire local, du tissu épithélial et conjonctif ainsi qu'au niveau de la physiologie osseuse et salivaire.
Les hormones vont agir :
- sur les cellules phagocytaires telles que les macrophages et les polynucléaires ;
- sur les cytokines.
Au niveau des cellules phagocytaires, il a été démontré la présence de récepteurs aux œstrogènes sur les macrophages (Gulshan et al., 1990). Les hormones peuvent donc agir en modulant l'action de ceux-ci. Les œstrogènes, à des doses physiologiques, augmenteraient l'activité de migration, de chimiotactisme et de phagocytose des macrophages (Stanisz et al., 1994). La progestérone a un effet stimulant sur le chimiotactisme des polynucléaires. Si ces derniers sont des cellules protectrices de la physiologie parodontale, alors l'action de la progestérone réduit le risque de gingivite (Miyagi et al., 1992). Aussi, au moment de la périménopause, lorsqu'il existe un déséquilibre endocrinien (les œstrogènes continuent d'être sécrétés tandis que la progestérone diminue), on peut penser qu'une altération du chimiotactisme des polynucléaires résulte de la diminution de la progestérone.
Par ailleurs, il a été observé qu'un environnement pauvre en œstrogènes favorisait la production, par les cellules sanguines mononucléées périphériques, de cytokines de résorption osseuse telle l'IL1-ß, celle-ci stimulant la production d'IL8. Rappelons que l'IL8 est une cytokine ayant des propriétés inflammatoires et qu'elle exerce une action sur le chimiotactisme des neutrophiles. Elle joue un rôle dans la pathogenèse de la maladie parodontale (Payne et al., 1993).
Rheinhardt et al. (1999) constatent que les femmes ayant suffisamment d'œstrogènes et présentant un indice de plaque supérieur aux autres patientes ne montrent pas d'augmentation d'inflammation gingivale. Ceci s'explique par le fait que les œstrogènes sont des inhibiteurs des cytokines pro-inflammatoires. Ainsi, la concentration d'hormones stéroïdiennes pendant la ménopause aurait une influence sur la qualité des défenses immunitaires lors de la maladie parodontale.
De nombreux auteurs ont essayé de comprendre l'action des hormones sur la muqueuse orale en la comparant à la muqueuse vaginale. Lors de la ménopause, ces deux muqueuses présentent des changements similaires : elles deviennent atrophiées, sont de plus en plus sensibles aux infections et les femmes peuvent ressentir des sensations de sécheresse.
L'épithélium pavimenteux stratifié de la muqueuse vaginale réagit à des degrés divers à la stimulation hormonale des stéroïdes génitaux. Cette réponse dépend de la qualité des liens qui unissent ceux-ci aux récepteurs intracellulaires. Différents facteurs conditionnent la réponse des tissus : la qualité et la quantité d'hormones génitales, la concentration intracellulaire des récepteurs hormonaux et la stabilité du complexe hormone-récepteur (Gompel, 1982).
On note également la présence de récepteurs aux hormones stéroïdiennes dans les couches basales et épineuses de l'épithélium gingival, dans les fibroblastes de la lamina propria et dans les cellules endothéliales et périphériques des petits vaisseaux sanguins (Vittek et al., 1982b ; Forabosco et al., 1992 ; Leimola-Virtanen et al., 2000 ; Yih et al., 2000). Cependant, le mode d'action des hormones au niveau des récepteurs n'est pas complètement élucidé.
Les conséquences d'un déficit en œstrogènes peuvent être :
- directes, par la présence de récepteurs aux œstrogènes sur les ostéoblastes, des doses physiologiques d'œstrogènes stimulant l'activité de ces derniers ;
- indirectes, et ce à trois niveaux.
Payne et al. (1993) et Reinhardt et al. (1999) ont constaté que les conditions cliniques qui causent un environnement pauvre en œstrogènes permettent une augmentation de la production locale d'IL1-ß et d'IL6, cytokines actives sur le métabolisme osseux, dans le fluide gingival de femmes ménopausées ayant une déficience en œstrogènes. Une déficience en œstrogènes peut entraîner des concentrations élevées de cytokines telles que l'IL1-ß, cytokine de résorption osseuse. Payne et al. (1993) l'ont prouvé dans leur étude concernant 13 femmes préménopausées et postménopausées (moyenne d'âge : 43,4 ans) prenant un traitement hormonal et 13 femmes post-ménopausées (moyenne d'âge : 51,4 ans) n'en prenant pas. Toutes ces femmes présentaient une parodontite modérée à sévère. Les taux d'IL1-ß dans les échantillons de fluide gingival étaient de 93,0 ± 22,8 pg/30 s chez les femmes sans traitement hormonal et de 21,9 ± 13,0 pg/30 s chez les femmes avec traitement hormonal. De plus, l'IL1-ß était détectée chez respectivement 92,3 et 23,1 % d'entre elles. L'auteur précisait, dans son étude, que la production par les cellules mononucléées périphériques sanguines d'IL1-ß, d'IL6 et de TNF-∝ (cytokines également impliquées dans la résorption osseuse) est modulée par les taux sérologiques d'œstrogènes. Rappelons que des récepteurs aux œstrogènes étaient mis en évidence sur les macrophages. Dans un faible environnement d'œstrogènes, l'interaction macrophages et cellules osseuses avec des fragments de matrice osseuse stimulerait la production locale de l'IL6 et de l'IL1, favorisant la résorption osseuse (Reinhardt et al., 1994).
Pacifici (Reinhardt et al., 1999) a confirmé l'influence des œstrogènes sur les cytokines. Il a observé que les monocytes sanguins périphériques de femmes postménopausées depuis au maximum 5 à 7 ans montraient une production élevée d'IL1, de TNF-∝ et d'IL6, qui était diminuée après un traitement par des œstrogènes (Reinhardt et al., 1999).
Les œstrogènes en quantité physiologique stimulent la synthèse de vitamine D, favorisent la multiplication des récepteurs à la vitamine D d'un facteur 2 environ, stimulent la synthèse de calcitonine et inhibent la fonction parathormone (Zachariasen, 1993 ; Lopes et al., 1993).
Des récepteurs de l'IGF1 sont présents sur les ostéoblastes et les œstrogènes et stimulent la production d'IGF1. L'insuline est un facteur de formation osseuse (Lopes et al., 1993).
Différentes hypothèses peuvent être émises sur l'influence des hormones au niveau de la salive :
- une action sur le flux salivaire. Streckfus et al. (1998) ont observé que le flux salivaire sous-mandibulaire diminue de 33 % lorsque la femme devient post-ménopausée. Cependant, ils émettent une réserve quant à cette observation. L'âge seulement peut être responsable d'une diminution du flux salivaire par une réduction des cellules acineuses du tissu glandulaire, en relation avec une augmentation des tissus fibreux, adipeux et vasculaires (Streckfus et al. 1998) ;
- une action sur la composition salivaire. Selon que la femme est périménopausée, postméno-pausée ou utilise un traitement hormonal, la composition salivaire est œstrogène-dépendante (Leimola-Virtanen et al., 1997a).
Pour Laine et Leimola-Virtanen (1996), l'effet des œstrogènes se réalise au niveau de la vascularisation des glandes salivaires. Celles-ci sont hautement vascularisées et les cellules vasculaires sont également la cible des œstrogènes dans les tissus. Ces derniers ont des effets vasodilatateurs et augmentent le flux sanguin. L'effet possible des œstrogènes sur le flux sanguin dans les glandes salivaires n'est pas complètement connu mais une augmentation du flux sanguin est associée à un accroissement de la sécrétion salivaire. Les œstrogènes agissent au niveau de récepteurs spécifiques se trouvant dans les tissus vasculaires et/ou salivaires. Enfin, Campbell et al. (1990) ont mis en évidence la présence de récepteurs hormonaux dans les glandes parotidiennes et sous-mandibulaires des rats. Leimola-Virtanen et al. (2000) ont entrepris une étude qui confirme cette présence dans les glandes salivaires. Les hormones agiraient au niveau de ces récepteurs chez le rat, résultant en une augmentation du taux de peroxydases salivaires.
Il existe une grande disparité dans les résultats d'études publiées.
Pour certains auteurs, le traitement hormonal apporte une amélioration des symptômes par celle de la cytologie de la muqueuse buccale (Volpe et al., 1990). Forabosco et al. (1992) ont constaté que toutes les femmes ne présentent pas des récepteurs hormonaux gingivaux mais que toutes celles qui en possèdent voient leur sensation d'inconfort oral se réduire. Laine et al. (1996) ont constaté un effet bénéfique des œstrogènes sur la santé orale par une augmentation du flux salivaire et de l'effet tampon.
Pour d'autres auteurs, il n'y a pas d'amélioration des symptômes (Pisanty et al., 1975 ; Tarkkila et al., 2001).
Si le facteur psychologique est impliqué dans les sensations d'inconfort et sachant que les œstrogènes agissent au niveau cérébral, il est possible de constater une amélioration des symptômes du fait de celle de l'état psychologique des patientes (Wardrop et al., 1989).
Après l'élimination de facteurs locaux et systémiques, un bon enseignement de l'hygiène dentaire et d'un bon contrôle de plaque, une gingivite récidivante peut être de cause purement hormonale et seul le traitement hormonal peut permettre sa rémission. Les traitements locaux ne peuvent qu'améliorer partiellement les symptômes, et ce de façon transitoire.
Le bénéfice d'un traitement hormonal est démontré au niveau de la santé orale. L'utilisation de celui-ci permet un gain de densité osseuse et protège contre la perte des dents. De plus, il diminue le taux de cytokines impliquées dans la résorption osseuse (Payne et al., 1993).
Le risque de perdre des dents diminue avec une augmentation de la durée d'utilisation du traitement hormonal (Paganini-Hill, 1995 ; Grodstein et al., 1996).
La durée d'utilisation influence le nombre de dents préservées. Dans une étude de Krall et al. (1997), les femmes ayant pris un traitement à base d'œstrogènes pendant 4 ans avaient 1,1 dent restante de plus par rapport à celles n'ayant jamais pris d'œstrogènes. Celles ayant pris des œstrogènes pendant une durée de 5 à 8 ans avaient 1,5 dent en plus. Celles qui avaient utilisé les œstrogènes pendant 8 ans ou plus présentaient 3,6 dents en plus. Selon cet auteur, le risque de devenir édentée est diminué de 6 % pour chaque année d'utilisation.
Tout comme le traitement contre l'ostéoporose, le traitement à base d'œstrogènes doit être entrepris le plus tôt possible, doit se prolonger le plus longtemps possible et il n'est jamais trop tard pour l'instaurer. Cependant, dès son arrêt, il se produit une diminution progressive des effets bénéfiques des œstrogènes sur l'os.
Le traitement hormonal de substitution apporte donc une réponse aux problèmes de santé orale durant la ménopause. Il permet aussi une réduction des fractures liées à l'ostéoporose de 50 % et prévient la maladie cardio-vasculaire dans 50 % des cas. Cependant, il faut souligner qu'il augmente de 200 à 300 % le risque de cancer endométrial. De plus, un traitement à long terme est corrélé à une augmentation du risque du cancer du sein (Amar et Chung, 1994).
Lors de la prescription d'un traitement hormonal, il faut donc tenir compte du risque encouru par rapport au bénéfice obtenu.
Les étiologies responsables de la maladie parodontale chez la femme ménopausée sont complexes. Après élimination des facteurs locaux et après traitements parodontaux adaptés, si les symptômes sont toujours présents, il faudra tenir compte du statut hormonal de la patiente. Un déséquilibre hormonal, fréquent durant cette période, peut entraîner des modifications des défenses immunitaires locales aux infections, mais peut aussi agir de façon directe sur les tissus gingivaux et osseux.
Le contexte psychologique dans lequel la femme se trouve n'est pas à négliger puisque celui-ci module les symptômes qu'elle ressent.
Nous remercions les Drs Gérard Bader (fig. 2, 4, 5 et 6) et Jean Apiou (fig. 3) pour leur contribution à l'iconographie illustrant cet article.
Demande de tirés à part
Jean-François MICHEL : Faculté de Chirurgie dentaire - Département de parodontologie - 2, place Pasteur - 35000 RENNES - FRANCE.