Traitement du maxillaire postérieur sans greffe - JPIO n° 2 du 01/05/2017
 

Journal de Parodontologie & d'Implantologie Orale n° 2 du 01/05/2017

 

Article

Nicolas BOUTIN1 / Emmanuel RACY2 / Diane PEREIRA3 / Jean-Gabriel TRANIÉ4 / Caroline CHAPUIS4 / Bernard CANNAS5  

1- Docteur en chirurgie dentaire
Exercice exclusif en implantologie orale, Paris2- Docteur en médecine
Chirurgien maxillo-facial et ORL
Exercice privé, Paris3- Doctorante en chirurgie dentaire
Exercice hospitalier, hôpital Bretonneau, Paris4- Docteur en chirurgie dentaire
Exercice privé, Paris5- Docteur en chirurgie dentaire
Exercice privé exclusif en implantologie orale, Trilport (France)

Résumé

RÉSUMÉ

Dans de nombreux cas, poser des implants dans un maxillaire postérieur édenté reste encore un défi du fait de sa qualité osseuse insuffisante, de la pneumatisation des sinus maxillaires et de l'inévitable résorption osseuse. En implantologie orale, l'élévation du plancher sinusien et les greffes osseuses sont fréquemment utilisées en première intention pour traiter un maxillaire postérieur atrophié. Néanmoins, ces interventions chirurgicales impliquent un certain nombre d'inconvénients tels qu'une longue période de cicatrisation pendant laquelle les patients restent sans restauration prothétique, des coûts financier et biologique élevés, des risques chirurgicaux accrus et des protocoles complexes. Afin de pallier ces limites, plusieurs techniques chirurgicales ont été mises au point ces dernières décennies. L'objectif de cet article est de présenter ces différentes solutions thérapeutiques pour la restauration du maxillaire postérieur atrophié sans greffe et de proposer un gradient thérapeutique en fonction de la hauteur d'os disponible, dans le but de restreindre l'utilisation des greffes aux cas de résorption extrême.

Summary

Abstract

In many cases, the placement of implants in edentulous posterior maxilla still remains a challenge because of its insufficient bone quality, maxillary sinus pneumatization and inevitable bone resorption. In oral implantology, sinus floor augmentation and bone grafts are currently used as first-line treatment for atrophic posterior maxilla. It should however be pointed out that these surgical interventions imply a series of inconveniences such as a long stress-free healing period during which patients remain without prosthetic rehabilitation, high biological and financial costs, increased surgical risks and complicated procedures. In order to overcome such limitations, during last few decades several surgical techniques have been developed. The purpose of this article is to present these different therapeutic alternatives to rehabilitate atrophic posterior maxilla without grafting and to propose guidelines for a conservative approach according to available bone height, in order to restrain grafting procedures to extreme resorption cases.

Key words

Atrophic posterior maxilla, maxillary sinus, tilted implant, short implant, closed lift.

Introduction

Dans toutes les spécialités médicales, l'évolution des techniques tend vers des interventions chirurgicales de moins en moins invasives, comme en témoigne par exemple, le développement de la microchirurgie vasculaire.

Afin de limiter les risques peropératoires et les suites postopératoires, l'implantologie doit s'orienter vers la micro-invasivité. Comme pour les autres disciplines chirurgicales, cela permettra également de réduire le coût et la durée des interventions.

En 1996, lors d'un consensus international orienté autour de l'élévation sinusienne (Jensen et al., 1998), les experts recommandaient alors :

– un comblement sinusien par abord latéral pour une hauteur d'os sous sinusienne inférieure à 6 mm ;

– une condensation crestale (technique de Summers) pour une hauteur comprise entre 7 et 9 mm ;

– la pose d'implants sans comblement au-delà de 9 mm.

Au cours des trois dernières décennies, les concepts et les modalités de traitement en implantologie ont grandement évolué (nouveau design implantaire, implantologie assistée par ordinateur,...). Le traitement du maxillaire postérieur en est alors simplifié, évitant ainsi les risques liés aux complications des greffes sinusiennes (Noharet et al., 2011 ; Prithviraj et al., 2013).

Dans l'optique d'obtenir le meilleur rapport bénéfice/risque pour le patient, la notion de gradient thérapeutique (Attal et Tirlet, 2009) – consistant à choisir le traitement le moins invasif – prend alors tout son sens dans la prise en charge du maxillaire postérieur édenté. Par conséquent, les greffes osseuses comme l'élévation du plancher sinusien par voie latérale doivent être évitées, si d'autres options existent.

Dans cet article, nous détaillerons comment l'amélioration des connaissances et des techniques en implantologie a permis de simplifier le traitement implantaire du maxillaire postérieur.

Physiologie des cavités sinusiennes

L'os maxillaire est fortement pneumatisé et comprend deux zones cavitaires qui sont le sinus maxillaire et les fosses nasales. La spécificité du maxillaire postérieur est conditionnée par la présence du sinus qui est une cavité stérile, dont l'effraction doit être parfaitement justifiée et maîtrisée (Eloy et al., 2006 ; Jung et al., 2007).

Les cavités sinusiennes de la face sont des structures qui, entre autres, allègent le massif facial. Certains anthropologues pensent que l'allégement du massif facial par le développement de ces structures a participé au passage de la posture quadrupède à la station bipède. D'autres pensent que c'est le très important développement du cerveau humain qui a entraîné celui des cavités sinusiennes pour limiter le poids de la tête supporté par les vertèbres cervicales (Blanton et Biggs, 1969). Quoi qu'il en soit, ces cavités sinusiennes sont présentes chez tous les êtres humains mais avec une taille, une forme et une pénétration dans le massif facial très variables (Lang, 1989).

Les prolongements alvéolaires du sinus sont fréquents et peuvent s'immiscer entre les racines dentaires.

Ces cavités sinusiennes stériles communiquent avec les fosses nasales par un petit orifice appelé ostium (Eloy et al., 2006 ; Lang, 1989). En revanche, les fosses nasales ne sont pas stériles. Elles constituent un labyrinthe fait de nombreux reliefs permettant à l'air qui entre par elles en flux laminaire de passer en flux turbulent afin de se distribuer sur l'ensemble de la muqueuse nasale. En effet, si on déplisse celle-ci, on obtient une surface d'environ 30 × 30 cm.

La cloison, les cornets et les zones méatiques correspondent à autant d'obstacles permettant à l'air d'entrer en turbulence afin de permettre au nez de remplir son rôle de filtre, lequel est en effet de réchauffer, d'humidifier et, surtout, de nettoyer l'air destiné à l'organe noble d'échanges gazeux qu'est le poumon. Le nez est une barrière, une protection passive et active. Passive, car le mucus sécrété par les glandes mucipares vient piéger les différentes particules organiques, végétales, minérales, etc., et active, car cette muqueuse comprend de nombreuses cellules immunocompétentes (polynucléaires, macrophages, etc.), qui sont consacrées à la défense de notre corps contre les agressions aéroportées, et elles sont nombreuses !

Nos gènes sont peu différents de ceux de l'homme de Néandertal et, pourtant, nous ne respirons pas du tout le même air. Pour les évolutionnistes, il est choquant de constater que l'espèce humaine a davantage modifié son environnement aérien durant les 200 dernières années (depuis la révolution industrielle du milieu du XVIIIe siècle) que pendant les 300 000 ans de son développement précédent.

Cela explique probablement l'augmentation des maladies dites respiratoires, qu'elles soient nasales, sinusiennes ou pulmonaires.

Mais les défenses s'adaptent et luttent contre ces modifications, pour protéger non seulement les poumons et la gorge mais également les cavités sinusiennes stériles. En effet, la flore nasale, comme la flore buccale, constitue un écosystème de défense bactérien qui travaille en complément des cellules immunocompétentes. Mais cette flore s'arrête au niveau des ostiums, qui sont le siège d'une concentration majeure de cellules immunocompétentes, gardiennes des temples stériles que constituent les cavités sinusiennes.

Un sinus se distingue en particulier par sa position et son drainage : le sinus maxillaire. En effet, c'est une cavité à 6 parois assez développée et souvent en contact avec de nombreux apex dentaires en bas (en général de 14 à 18 et de 24 à 28). Sa paroi antérieure est très fine ; elle est parcourue, verticalement, par le nerf infra-orbitaire dans un canal osseux et, horizontalement, par une artère inconstante que l'on retrouve parfois au moment du fraisage de la paroi latérale au cours d'une élévation de sinus, l'artère alvéolo-antrale. La paroi supérieure du sinus constitue le plancher de l'orbite, zone anatomique stérile également et particulièrement fragile vis-à-vis des infections bactériennes, en particulier anaérobies. Sa paroi interne constitue la paroi inter-sinuso-nasale dans laquelle chemine le canal lacrymo-nasal. Sa paroi externe se prolonge dans l'os zygomatique. Et sa paroi postérieure le sépare de la fosse ptérygo-maxillaire (Gaudy et al., 2006, 2010) (fig. 1).

Mais ce qui distingue le plus le sinus maxillaire des autres cavités sinusiennes de la face, c'est son drainage antigravitaire. En effet, l'ostium est situé très haut au niveau du méat moyen et le drainage de ce sinus constitue une lutte contre les lois de la gravité. Les autres cavités sinusiennes ont également ce système mais le sinus maxillaire est le seul, avec le sinus sphénoïdal, à n'avoir qu'un drainage antigravitaire. Cette spécificité s'explique par les caractéristiques histologiques et physiologiques de la membrane sinusienne.

En effet, toutes les parois du sinus maxillaire sont recouvertes d'une muqueuse respiratoire, parcourue par un délicat réseau vasculaire. Cette muqueuse sinusienne, aussi appelée membrane de Schneider, est sensiblement la même que la muqueuse nasale avec laquelle elle est en continuité. À l'état sain, elle est souple, fine et donc fragile, avec une épaisseur variant entre 0,2 et 0,8 mm (Geha et Carpentier, 2006). On observe toutefois une grande variation d'épaisseur, pouvant aller jusqu'à des hyperplasies sinusiennes qui ne sont pas pathologiques en l'absence de signes cliniques.

La membrane de Schneider est à la fois une barrière de défense de première ligne face aux allergènes, aux agressions physiques, chimiques, virales et bactériennes, et une interface entre l'organisme et l'environnement extérieur. Elle est recouverte sur toute sa surface d'un film de mucus produit par les cellules caliciformes et les glandes séro-muqueuses du chorion et composé de nombreux éléments immunocompétents (mucines, d'immunoglobulines A sécrétoires, de lactoferrine, de lysozymes et d'antioxydants). Il tapisse, lubrifie et protège l'épithélium sous-jacent contre les agressions extérieures. Il capture les agents nocifs et sera évacué de la cavité sinusienne au travers de l'ostium par le mouvement des cils. Les cellules ciliées, décrites par Messerklinger, jouent ainsi un rôle fondamental de véritable tapis roulant de drainage vers la zone de l'ostium (Eloy et al., 2006).

La muqueuse sinusienne assure donc un drainage muco-ciliaire permettant d'éviter, notamment, une prolifération bactérienne. Et, en raison de sa perméabilité aux gaz, elle joue également un rôle dans les échanges gazeux entre la cavité sinusienne et le sang qui l'irrigue. C'est pourquoi toute effraction de la membrane de Schneider est susceptible de perturber les conditions normales d'aération et de drainage des cavités sinusiennes (Jung et al., 2006, 2007) (fig. 2).

On comprend facilement que toute altération de ce fragile drainage (au cours d'un rhume, d'une sinusite ou après une chirurgie) entraîne un stockage muqueux qui peut tout à fait remplir rapidement la cavité sinusienne, constituant ainsi un excellent milieu de culture bactérienne. Lorsque cette infection est rapidement évolutive, on parle de sinusite aiguë et, lorsque la pathologie dure plus de 2 mois et se répète, on parle de sinusite chronique.

Grâce à la révolution diagnostique qu'ont constitué l'imagerie radiologique (scanner et plus récemment cone beam), l'imagerie endoscopique (optiques rigides et fibroscope souple) et la reconstruction 3D par l'outil informatique, on cerne de mieux en mieux les subtilités anatomiques et physiologiques de ces mystérieuses cavités.

Apport de l'imagerie 3D dans le traitement implantaire du maxillaire postérieur

Peut-on, à partir d'une radiographie panoramique ou rétroalvéolaire, dire à un patient qu'un traitement implantaire est impossible sans une technique d'augmentation osseuse ? Comment tirer parti des avancées des techniques chirurgicales et de la technologie dans l'optimisation des traitements ? Le rapport coût/bénéfice/risque ne devrait-il pas guider tous les traitements ?

La région du maxillaire postérieur se situe entre la tubérosité du maxillaire et la canine. Elle est limitée en haut par le plancher du sinus maxillaire et en bas par les rebords alvéolaires. Le sinus maxillaire représente l'obstacle lacunaire majeur lors du traitement implantaire du maxillaire postérieur. Avec la perte des dents et la fonte de l'os alvéolaire, le volume sinusien a tendance à s'étendre. Dans le cadre du traitement de l'édentement du maxillaire postérieur par une solution fixée, l'apport de l'implantologie est indéniable. Cependant, cette prise en charge reste un défi important pour l'opérateur. En effet, la pneumatisation du sinus maxillaire ainsi que la résorption osseuse alvéolaire qui suit la perte des dents impliquent souvent des situations avec des volumes osseux disponibles limités.

Le simple examen de radiographies 2D, sans analyse 3D, pourrait pousser le chirurgien à réaliser un com- blement sinusien alors que certains volumes osseux sont exploitables. Plus la résorption est importante, plus les examens radiographiques et d'imagerie 3D sont indispensables à la compréhension des volumes osseux afin d'optimiser leur exploitation. Si l'os alvéolaire résiduel n'est pas suffisant pour placer les implants dans l'axe des racines dentaires, il est alors nécessaire de rechercher de nouveaux points d'ancrage. Le but est d'éviter au maximum d'avoir recours à des techniques de greffe afin d'optimiser la prise en charge du patient.

Nous verrons ainsi comment l'apport des logiciels 3D de simulation implantaire (SimPlant®, NobelClinician®, Blue Sky Plan®) a fait évoluer notre perception de l'anatomie des zones potentielles d'ancrage implantaire.

Radiographie

La planification ne peut se faire sans compléter l'examen clinique par un bilan radiologique. Celui-ci est particulièrement indispensable, quand la résorption alvéolaire est importante, pour pouvoir appréhender dans leur globalité les volumes osseux disponibles. Selon la méthode classique, l'analyse s'appuie sur des clichés radiographiques en 2D ou sur des coupes 2D issues d'une imagerie 3D.

Radiographie panoramique

La radiographie panoramique, ou orthopantomogramme (OPG), est la technique d'imagerie extra-orale la plus utilisée en odontologie. Elle a été recommandée par la Haute Autorité de santé (HAS) en 2006 comme radiographie de première intention afin d'évaluer les deux arcades de manière globale avec une faible dose de rayonnement (Tyndall et al., 2012). Cet examen radiographique permet de sélectionner les patients qui pourront bénéficier d'un traitement implantaire et d'écarter ceux dont l'état est incompatible avec un tel traitement.

La radiographie panoramique renseigne sur la hauteur osseuse disponible (visualisation des sinus et des fosses nasales) mais pas sur les volumes osseux disponibles. En effet, elle ne prend pas en compte la dimension vestibulo-linguale de l'arcade dentaire, ce qui empêche toute mesure en implantologie. De plus, l'image présente des distorsions géométriques importantes avec des zones d'agrandissement (en postérieur), des zones de superposition et des images fantômes (Suomalainen et al., 2015) (fig. 3).

Radiographie rétroalvéolaire

Les radiographies intra-orales du type rétroalvéolaire seront utilisées pour compléter les informations de la radiographie panoramique (Tyndall et al., 2012). Elles fournissent des informations sur une région limitée mais présentent une excellente résolution spatiale, un bon contraste et une déformation minimale, quand elles sont réalisées avec un angulateur (Cavézian et al., 2011).

Au maxillaire, en raison de la faible profondeur du palais, le positionnement correct des films est souvent impossible. Les mesures ne sont donc souvent pas fiables.

Bien que la radiographie rétroalvéolaire permette des mesures de la distance entre deux dents ou de la hauteur d'os disponible, elle non plus ne renseigne pas sur les volumes. Elle n'est donc pas suffisante dans l'analyse des volumes osseux disponibles.

Imagerie sectionnelle (scanner à rayons X et cone beam)

En implantologie, il est admis que seule l'imagerie volumique permet d'appréhender les volumes osseux (Bellaïche, 2007a, 2007b, 2009a, 2009b). Le praticien a à sa disposition deux techniques d'imagerie sectionnelle : le scanner à rayons X (CT, computed tomography), d'une part, et le cone beam (CBCT, cone beam computed tomography), d'autre part.

Depuis quelques années, le recours à l'imagerie 3D à l'aide du CBCT a supplanté l'usage du scanner à rayons X dans les bilans pré-implantaires. En effet, la diminution de la dose (confirmée par les tests de Lodle) et du nombre d'artefacts métalliques du CBCT par rapport au scanner a facilité l'accès à ce type d'imagerie à un moindre coût (HAS, 2006 ; Bellaïche, 2007a, 2007b, 2009a, 2009b ; Bellaïche et Missika, 1991).

Néanmoins, l'imagerie sectionnelle ne doit pas être utilisée en première intention dans la thérapeutique implantaire mais en complément des radiographies rétroalvéolaire et panoramique, selon le principe ALARA (as low as reasonably achievable) et la HAS en 2006 (HAS, 2006 ; Commission européenne, 2003 ; HAS, 2009 ; Eggermont et al.,, 2006).

La planification implantaire est conventionnellement réalisée sur la base de clichés en deux dimensions ou de coupes 2D issues d'une acquisition volumique par la superposition de calques sur les coupes vestibulo-linguales (VL) (fig. 4). Cela permet une étude bidimensionnelle qui ne peut être fiable que si l'axe implantaire se fait dans celui de la coupe. En effet, l'analyse des coupes scanner classiques sur planche est en réalité une vue en 2 dimensions, et c'est à notre esprit de reconstituer l'os du patient dans les 3 dimensions de l'espace. Cela est d'autant plus problématique dans les cas de maxillaire résorbé où la recherche d'un ancrage différent de celui de l'axe de la crête devient nécessaire pour traiter les patients avec la technique la moins invasive possible (Harris et al., 2012).

Plusieurs moyens sont aujourd'hui à la disposition du chirurgien qui ne peut plus se limiter à la simple impression 2D.

Logiciels de planification

Les données d'acquisition de l'imagerie sectionnelle sont enregistrées au format DICoM (digital imaging and communication in medicine), format numérique universel utilisé en imagerie et par les logiciels de diagnostic et de planification implantaire (Ganz, 2015).

Grâce à l'évolution des logiciels de reconstruction et de planification (SimPlant® ou NobelClinician®, Blue Sky Plan®), on peut, à partir des fichiers DICoM issus du CBCT, obtenir une reconstruction en 3D des structures osseuses. Il devient alors possible de « naviguer » dans la mâchoire du patient et de mettre en évidence les rapports entre les futurs implants et les différentes structures anatomiques (fig. 5 et 6).

Les structures anatomiques importantes peuvent être mises en évidence, notamment l'artère palatine descendante, obstacle majeur de la région tubérositaire. Le sinus maxillaire et ses particularités anatomiques, comme les cloisons de refend, sont bien objectivés (fig. 7). Les risques anatomiques sont ainsi maîtrisés et de nouveaux volumes osseux exploitables (Cavézian et Pasquet, 2012 ; Harris et al., 2012).

L'implantologie assistée par ordinateur ouvre les portes d'une analyse dynamique des volumes osseux en 3D et éloigne l'analyse statique des planches en 2D.

Projet prothétique

Le projet prothétique (Cannas et al., 2014) physique ou numérique est conçu au laboratoire de prothèses puis est transposé sur l'imagerie sectionnelle soit grâce à un guide d'imagerie radio-opaque en sulfate de baryum, soit par la technique du double scanner, soit par les fichiers numériques des modèles de laboratoire ou de l'empreinte optique (fig. 8).

Les logiciels de planification permettent d'intégrer les données du projet prothétique à l'imagerie sectionnelle par fusion des fichiers informatiques. Pour cela, le projet prothétique numérisé sous un format informatique standard dit .stl (stéréolithographique) sera fusionné aux fichiers DICoM issus de l'imagerie sectionnelle.

De nos jours, les implants ne sont plus positionnés « là où il y a de l'os » mais « là où on en a besoin » en fonction du projet prothétique. Dans le traitement de maxillaires postérieurs résorbés, le chirurgien peut avoir tendance à se diriger vers des procédures d'augmentation osseuse. Pourtant, certaines zones d'ancrage potentiel sont compatibles avec le projet prothétique mais ne correspondent pas au grand axe de la crête (Noharet et al., 2017).

Méthode du double scanner

La méthode du double scanner (Daas et al., 2008), mise au point par Nobel Biocare, consiste à numériser, grâce à l'imagerie sectionnelle (CT ou CBCT), le projet prothétique représenté par le guide radiologique non radio-opaque comprenant des marqueurs radio-opaques. Un premier CT ou CBCT du patient est réalisé avec le guide en bouche stabilisé par une cale rigide (indice occlusal) entre les deux arcades pour diminuer la laxité de position lors de l'acquisition.

Les unités Hounsfield (UH) du guide et des tissus mous étant très proches, toute segmentation (séparation du guide sur le logiciel) est impossible. C'est la réalisation du double scanner, du guide seul puis du patient avec le guide, qui rend cette segmentation possible. La superposition des marqueurs radio-opaques des deux scanners permet de fusionner de manière précise les deux clichés. Le guide apparaît ainsi sur l'imagerie sectionnelle, il est enregistré en format numérique .stl ou .nxa.

Modèles virtuels

Le prothésiste va pouvoir, sur un logiciel de CAO, modéliser le projet prothétique à partir de la situation initiale du patient. C'est un wax-up virtuel. L'obtention d'un modèle virtuel (Cannas et al., 2014) (fig. 9) de l'état initial du patient peut se faire :

– directement en bouche grâce à une caméra optique intrabuccale ;

– par numérisation, au laboratoire de prothèses, du modèle en plâtre et/ou du wax-up.

L'avantage premier de ce type de projet prothétique réside dans le fait qu'il est possible de réaliser une imagerie 3D le jour de la première consultation sans que le patient n'ait de guide radiologique en bouche. Le CT ou CBCT peut être fait puis, dans un second temps, l'empreinte optique ou classique. Le projet sera ensuite transféré sur l'examen.

Cette technique remplace ainsi les guides en sulfate de baryum conçus en amont.

Planification implantaire en fonction du projet

Les logiciels de planification implantaire possèdent une banque de données de calques numériques d'implants et de piliers implantaires. Le design, la longueur et le type d'implant sont déterminés ainsi que le ou les futurs piliers prothétiques si nécessaire.

Le logiciel permet de visualiser le patient dans les trois dimensions de l'espace simultanément et, aussi, de tourner autour de l'implant. On peut contrôler le rapport de ce dernier avec les volumes osseux environnants, avec les obstacles anatomiques ainsi qu'avec le projet prothétique. On peut alors valider la compatibilité des implants angulés avec le projet prothétique (fig. 10).

L'utilisation de ces programmes de simulation implantaire apporte un réel avantage dans la planification des cas complexes. On obtient une représentation 3D du projet implantaire chirurgico-prothétique en parfaite correspondance avec la situation clinique.

Bien qu'aucun consensus n'ait été établi, les logiciels de planification permettent l'« estimation » de la qualité osseuse grâce aux unités Hounsfield (UH). On peut ainsi déterminer si l'os est plus corticalisé ou plus spongieux. Cette particularité est très avantageuse lors de la planification d'un protocole chirurgical au niveau du maxillaire postérieur en raison de la faible densité osseuse de cette zone. Cet outil de mesure demande cependant de plus amples études afin de le valider scientifiquement.

Bien entendu, le sens clinique du praticien reste déterminant au moment de la chirurgie si la densité osseuse diffère de l'estimation faite sur l'imagerie.

Enfin, les logiciels d'implantologie assistée par ordinateur aboutissent à la réalisation d'un guide chirurgical qui, dans les situations complexes, rencontrées généralement en cas de forte résorption maxillaire, augmente la sécurité chirurgicale (fig. 11).

Là encore, l'ensemble de la chaîne de réalisation du guide chirurgical doit être parfaitement respecté afin de garantir la précision de ce dernier.

Description des zones d'ancrage osseux au maxillaire postérieur

La région du maxillaire postérieur peut être divisée en trois zones par rapport au sinus maxillaire (fig. 12) :

– la zone antérieure (prémolaire) ;

– la zone sous-sinusienne (molaire) ;

– la zone postérieure (ptérygo-palato-tubérositaire).

La zone antérieure au sinus maxillaire

Cette zone, correspondant au secteur prémolaire, est une pyramide triangulaire à base inférieure comprise entre le sinus maxillaire et les cavités nasales. Son volume peut être diminué par la présence de digitations sinusiennes antérieures.

Lors de la planification, la radiographie rétro-alvéolaire n'apporte que peu d'informations dans cette région du fait de la superposition des structures aériques. Un scanner à rayons X ou un CBCT est donc indispensable pour appréhender cette « pyramide osseuse ».

L'ancrage implantaire peut se faire le long de la paroi antérieure du sinus. Le degré d'inclinaison de l'implant varie selon la morphologie de cette paroi antérieure. L'angulation de l'implant dans le sens mésio-distal est parfois associée à une inclinaison vestibulo-palatine. L'apex de l'implant croise alors en dedans l'apex d'une dent ou d'un implant plus antérieur. De ce fait, il fréquent que la radiographie de contrôle de ces implants puisse porter à confusion (implant et racine dentaire superposés). Seule l'imagerie 3D objective la position réelle de ces implants.

La zone sous-sinusienne

Correspondant au secteur molaire, cette zone se situe directement sous le sinus, en avant de la tubérosité et en arrière de la zone précédemment décrite.

Le volume osseux résiduel sous sinusien dépend de la quantité d'os basal, très variable d'un individu à l'autre, et de la résorption alvéolaire.

Cette résorption alvéolaire potentiellement aggravée par l'ancienneté de l'édentement, les antécédents de maladie parodontale, le port de prothèse amovible et les extractions traumatiques peut entraîner une réduction importante du volume osseux (Cawood et Howell, 1988 ; Noharet et al., 2008).

En dehors de l'os sous sinusien, d'autres zones d'ancrages sont exploitables :

– les éventuelles cloisons de refend ;

– le processus palatin du maxillaire ;

– la paroi latérale du sinus.

Cloisons de refend

Les cloisons de refend toujours verticales par rapport au plancher sinusien, perpendiculaires à la crête alvéolaire, peuvent mesurer jusqu'à 9 mm de hauteur (Underwood, 1910 ; Ulm et al., 1995). Elles sont formées d'os d'origine basale. On y obtient donc un ancrage primaire fiable et stable. La verticalité de ces cloisons permet le placement d'implants dans l'axe prothétique.

Elles sont parfois visibles sur des radiographies panoramiques mais leur localisation précise nécessite l'utilisation d'outils d'imagerie 3D. Les mesures effectuées sur l'imagerie sectionnelle pourront être reportées lors de la chirurgie pour placer les implants précisément dans la cloison. Lorsqu'il n'existe aucun repère crestal, le chirurgien doit privilégier une chirurgie guidée.

Processus palatin du maxillaire

Le processus palatin du maxillaire constitue la partie médiale du sinus. Il participe, en dedans, à la formation des fosses nasales et sépare le sinus des cavités nasales par la cloison inter-sinuso-nasale (Gaudy et al., 2006, 2010).

L'inclinaison de l'implant en direction du processus palatin permet un ancrage primaire solide dans un os de forte densité. L'extrémité de l'implant selon l'angulation sera dirigée vers les fosses nasales, le sinus ou la cloison inter-sinuso-nasale (Brånemark et al., 1984). Bien que ces implants soient inclinés, leurs axes sont souvent en cohérence avec l'axe prothétique.

La région ptérygo-palato-tubérositaire

La région ptérygo-palato-tubérositaire est limitée en haut et en avant par le sinus et en arrière par les processus ptérygoïdes du sphénoïde. Cette poutre de résistance du maxillaire est formée par l'union de trois éléments : les processus ptérygoïdes du sphénoïde, la tubérosité du maxillaire et le processus pyramidal de l'os palatin.

Elle permet l'ancrage d'un implant pilier postérieur d'un bridge avec une excellente stabilité primaire. L'implant sera incliné en haut, en arrière, et légèrement en dedans entre les deux ailes de la ptérygoïde (Balshi et al., 1999 ; Tulasne, 1989, 1992). L'utilisation d'implants relativement longs (de 15 à 18 mm), cylindro-coniques, associée à des techniques de sous-forage permettra d'obtenir un meilleur ancrage primaire (Aparicio et al., 2001).

Néanmoins, la présence du canal grand palatin et de l'artère homonyme fait de cette zone une zone à risque dans laquelle la densité osseuse est faible. Si la tubérosité du maxillaire présente un volume suffisant, il ne sera pas nécessaire d'aller jusqu'aux ailes de la ptérygoïde pour stabiliser l'implant.

En conclusion, seule l'imagerie 3D associée à des logiciels de planification implantaire optimise l'exploitation des volumes osseux dans les 3 sens de l'espace. Elle permet de mettre en évidence de nouvelles zones d'ancrage qui sembleraient inexistantes ou inexploitables sur des clichés radiographiques 2D. Des implants courts ou angulés peuvent être mis en place, évitant ainsi le recours à un comblement sinusien. Le plan de traitement est alors moins invasif, les suites opératoires plus agréables pour le patient et les délais de traitement diminués (Fortin et al., 2013).

Anatomie chirurgicale des voies d'abord des sites implantaires et description des techniques de traitement en relation avec le sinus maxillaire

L'évolution des nouveaux concepts de la chirurgie implantaire péri-sinusienne doit prendre en compte les voies d'abord de chaque technique chirurgicale. Des paramètres spécifiques sont à prendre en compte pour chaque indication.

Le procès alvéolaire édenté présente des hauteurs variables conditionnant le choix de la technique chirurgicale. L'épaisseur de muqueuse pour accéder à l'os alvéolaire varie de 5 à 10 mm (Ulm et al., 1995).

La hauteur d'os résiduel et la quantité des tissus mous péri-implantaires conditionnent le choix de la technique chirurgicale et, dès lors, la voie d'abord.

La décision thérapeutique est donc prise en fonction de la hauteur d'os disponible, selon un arbre décisionnel (Uchida et al., 1989).

Il faut en outre tenir compte de structures anatomiques à éviter ou à rechercher comme ancrage implantaire autour de ce procès alvéolaire.

Hauteur disponible de 6 à 10 mm : implants courts dans l'axe prothétique

Les premiers articles publiés concernant l'utilisation des implants courts datent de la fin des années 1990. Cependant, dans l'ouvrage Osseointegreted implants in the treatment of the edentoulous jaw. Experience from a 10-year period du Pr Brånemark publié en 1977, de nombreux cas traités par implants courts sont déjà décrits.

Dans la littérature scientifique, la définition donnée pour un implant court est un implant dont la longueur est strictement inférieure à 10 mm. L'étude de la bibliographie et le recul clinique supérieur à 15 ans permettent aujourd'hui d'affirmer que l'utilisation des implants courts donne les mêmes résultats que des implants plus longs (Fugazzotto et al., 2004 ; Maló et al., 2007 ; Renouard et Nisand, 2005).

Plus particulièrement deux études nous démontrent que des forces axiales de 100 N à une incidence de 30o provoquent une concentration des forces absorbées par l'implant sur les quelques millimètres situés au col de l'implant (Pierrisnard et al., 2003 ; Renouard et Nisand, 2006).

Le protocole chirurgical est le suivant.

Les implants courts vont être utilisés en exploitant la hauteur totale disponible depuis le sommet de la crête osseuse jusqu'à la corticale du plancher des sinus. Ainsi, pour une hauteur de 7 mm, un implant de 7 mm pourra être positionné sans effraction du plancher du sinus.

Si la hauteur disponible dans l'axe prothétique est de 6 à 10 mm, le placement d'un implant court se fait par voie crestale dans l'enveloppe osseuse du procès alvéolaire, totalement dans l'axe idéal prothétique, sans effraction du sinus. Le placement de l'implant se fait soit avec la levée d'un lambeau muco-périosté réduit à la largeur de la crête, soit sans lambeau (flapless) par incision circulaire (tissue punch).

Le décollement palatin est limité, donc sans conséquence sur le réseau artériel de l'artère palatine descendante.

Les implants courts permettent d'éviter les structures anatomiques voisines (sinus maxillaire, fosses nasales, racines des dents adjacentes en cas de convergence des axes) et facilitent également la pose d'implant en cas d'ouverture buccale limitée. L'ouverture buccale est en effet un facteur à prendre en compte en amont, lors de l'observation clinique (fig. 13).

La faible densité osseuse de ces zones maxillaires postérieures oblige à adapter un protocole chirurgical pour ce secteur afin d'obtenir un ancrage primaire indispensable à l'ostéo-intégration de ces implants de petite longueur. Pour cette raison, il faudra privilégier des implants cylindro-coniques ou autoperforants dans ces secteurs. Un sous-forage est nécessaire dans la plupart des cas.

Évidemment, si la hauteur d'os disponible est supérieure à 10 mm et que l'ouverture buccale le permet, un implant plus long peut être placé dans l'axe prothétique selon les mêmes principes et avec une technique chirurgicale identique, permettant ainsi d'augmenter la surface d'ancrage et la stabilité primaire sans pour autant complexifier le protocole chirurgical.

Hauteur disponible insuffisante dans l'axe prothétique (< 6 mm) : implants inclinés

Si des volumes osseux suffisants (> 6 mm) sont disponibles dans la périphérie du point d'impact, l'inclinaison de l'implant permet un ancrage osseux augmenté sur sa longueur, tout en évitant les structures anatomiques adjacentes telles que le sinus maxillaire et tout en étant compatible avec le projet prothétique.

Les premiers articles concernant les implants inclinés datent des années 2000. Cependant, comme pour les implants courts, l'ouvrage du Pr Brånemark déjà cité montre de nombreux cas traités avec des implants inclinés en avant de la paroi antérieure du sinus. Depuis cette date, des études ont démontré que, dans le maxillaire postérieur, les implants inclinés ont un taux de succès égal, voire supérieur, à celui des implants placés dans l'axe prothétique, y compris dans les cas de mise en charge immédiate (Barnea et al., 2016 ; Calandriello et Tomatis, 2005 ; Krekmanov et al., 2000 ; Testori et al., 2008).

Prévoir de traiter un patient par implants inclinés n'est pas envisageable sans l'étude préalable d'un examen radiologique tridimensionnel (CBCT ou CT) et sans l'utilisation de logiciels informatiques permettant la planification des implants par rapport à un projet prothétique, un volume osseux sous-jacent et des obstacles anatomiques.

Un implant incliné est planifié sur une coupe 2D dynamique, puis la matérialisation de piliers angulés sur la reconstruction 3D validera la faisabilité par rapport au projet prothétique.

Le degré d'inclinaison possible d'un implant est directement déterminé par le type de pilier angulé que possède chaque système implantaire et qui permettra de récupérer l'inclinaison pour finalement obtenir une sortie de vis prothétiquement idéale.

Il est évidement possible de combiner une inclinaison palato-vestibulaire à une inclinaison mésio-distale.

Une fois la planification validée, sa retranscription est réalisée soit avec un guide chirurgical de forage (stéréolithographique), soit à main levée grâce à la transposition clinique d'un point d'impact et d'un point d'émergence de l'implant.

Le long de la paroi postérieure du sinus maxillaire (processus ptérygoïde et tubérosité)

Dans ce cas, la voie d'abord consiste en une incision crestale, en épaisseur totale, jusqu'à la synostose entre l'os maxillaire et le processus ptérygoïde du sphénoïde. Le lambeau d'épaisseur totale assure un accès visuel de l'ensemble de la tubérosité maxillaire jusqu'au foramen grand palatin, émergence exo-osseuse de l'artère palatine descendante sur le versant médial de la tubérosité et sur le versant latéral jusqu'aux insertions antérieures des ptérygoïdiens médiaux et latéraux (fig. 14).

Le décollement doit être en épaisseur totale afin de charger dans le lambeau les différentes structures, le muscle buccinateur et son aponévrose, en évitant ainsi le corps adipeux de la joue et le réseau vasculaire veineux plaqué contre l'aponévrose buccinatrice.

Cette voie d'abord a pour but :

– le contrôle visuel dans le sens antéro-postérieur à partir du processus ptérygoïde, point fixe remarquable ;

– le contrôle visuel de l'obstacle anatomique qu'est l'artère palatine descendante au niveau du foramen grand palatin ;

– le contrôle visuel latéral de la morphologie de la tubérosité.

Le repérage dans l'espace de cette région est possible par la palpation de l'hamulus. L'hamulus matérialise l'axe de la lame médiale de la ptérygoïde sur lequel coulisse le tendon du muscle tenseur du voile du palais. Ces différents repères anatomiques permettent de placer en toute sécurité un implant long de 15 à 18 mm en arrière de la paroi postérieure du sinus maxillaire dans un axe en haut, en arrière et légèrement en dedans, en partant d'un point d'impact au niveau de la deuxième molaire en traversant la tubérosité et en plaçant l'implant entre les deux ailes de la ptérygoïde ou dans le processus pyramidal de l'os palatin qui ferme l'espace entre les deux lames du processus ptérygoïde. Toutefois, si le volume et la densité osseuse de la tubérosité sont suffisants pour assurer une stabilité de l'implant, il n'est pas nécessaire d'aller jusqu'aux ailes de la ptérygoïde (Lopes et al., 2015).

Le long de la paroi antérieure (zone prémolaire)

Si le volume alvéolaire et basal entre la canine et la paroi antérieure du sinus maxillaire est suffisant dans le sens antéro-postérieur, un implant incliné le long de cette paroi antérieure et orienté vers le plancher des fosses nasales permettra son ancrage optimisé.

L'inclinaison peut varier également soit en médial soit en latéral en fonction de la situation. Si le processus palatin est volumineux, l'apex de l'implant sera en dedans des racines des dents en avant de l'édentement.

L'abord chirurgical de ce secteur impose une vision large des volumes osseux par un lambeau muco-périosté et des incisions en épaisseur totale, permettant le contrôle visuel de l'axe de forage et de placement des implants vers le processus palatin ou vers la paroi antéro-latérale du maxillaire.

Les structures anatomiques concernées sont la muqueuse palatine et son réseau vasculaire.

L'arborescence terminale de l'artère palatine descendante se prolonge dans l'épaisseur de la muqueuse palatine et se limite à des vaisseaux de petit diamètre dont le saignement sera stoppé par une simple compression.

Sur la partie latérale, l'abord chirurgical nécessite souvent la désinsertion du muscle buccinateur qui peut être responsable d'algie et d'œdèmes postopératoires (fig. 15).

Orientation médiale vers le processus palatin et le plancher des fosses nasales ou vers la cloison inter-sinuso-nasale

Le maxillaire constitue le palais dur et une partie du plancher du sinus maxillaire. Vers le haut, la paroi médiale du sinus maxillaire sépare celui-ci des fosses nasales et constitue la cloison inter-sinuso-nasale. L'orientation des implants, avec un axe oblique en haut et en dedans, vers le processus palatin permet un ancrage dans une structure osseuse très corticalisée. L'implant est alors orienté en dedans, vers la cloison inter-sinuso-nasale ou jusqu'au plancher des fosses nasales en fonction de la morphologie du processus palatin (fig. 16).

La voie d'abord et les risques chirurgicaux à prendre en compte sont identiques à ceux mentionnés précédemment.

Axe latéral vers la paroi antéro-latérale ou postéro-latérale du sinus maxillaire

Dans certaines situations rares, un axe latéral sera recherché vers la paroi antéro-latérale ou postéro-latérale du sinus maxillaire.

Le protocole chirurgical de la voie d'abord est le même que précédemment ainsi que les risques chirurgicaux latéraux et médiaux.

Vers les éventuelles cloisons de refend

Une cloison de refend est un prolongement de l'os basal vers le sinus qui permet d'augmenter de manière significative, dans une zone précise, la longueur de l'implant (Ulm et al., 1995) (fig. 17).

Il faut toutefois noter que les cloisons de refend sont des structures anatomiques inconstantes. Seule l'imagerie sectionnelle permet de les situer.

La difficulté de ce type de chirurgie est le repérage dans l'espace. Comme pour les voies d'abord précédentes, le contrôle visuel est déterminant pour maîtriser le point d'impact et l'axe du forage visant la cloison, avec une incision d'épaisseur totale, un décollement sous-périosté, des repères osseux et une protection contre les risques chirurgicaux latéraux et médiaux. Le forage causera une effraction endo-sinusienne maîtrisée (fig. 18).

Hauteur disponible de 4 à 6 mm : dépassement maîtrisé

Pour le dépassement maîtrisé, la voie d'abord chirurgical endobuccale est la même que pour les implants courts (fig. 19). Le praticien doit prendre en compte l'effraction du plancher sinusien et la conséquence sur la membrane de Schneider. Les risques hémorragiques peropératoires ou postopératoires doivent également être pris en compte.

La technique chirurgicale consiste à faire dépasser l'apex de l'implant jusqu'à 2 ou 3 mm au-delà de la corticale du plancher du sinus. On utilise pour cela un implant légèrement plus long que la hauteur osseuse disponible. Un protocole chirurgical adapté permet alors de positionner l'implant qui réalisera lui-même, par son apex, au moment de sa mise en place, une « fracture » du plancher du sinus. Les fragments osseux poussés par l'apex de l'implant, mélangés au coagulum sanguin, cicatriseront pour obtenir un implant finalement ostéo-intégré sur toute sa longueur au bout de quelques mois.

Ainsi, pour un volume disponible de 5 mm, le forage se fait sur 4 à 5 mm, sans effraction du plancher sinusien. Puis, lors de la mise en place d'un implant de 7 mm de longueur, ce dernier, une fois inséré sur la totalité du volume osseux disponible, va, par sa partie apicale, réaliser lui-même le fractionnement du plancher du sinus. Cette effraction va entraîner les spicules d'os fragmentés avec l'apex de l'implant, sans perforation de la membrane.

Donc, pour un volume osseux disponible de 4 à 5 mm, un implant de 7 mm peut être positionné et, pour un volume osseux disponible de 6 à 7 mm, un implant de 8,5 à 10 mm peut être positionné, par « dépassement maîtrisé ».

Hauteur disponible de 2 à 4 mm : élévation du plancher sinusien par voie latérale ou par voie alvéolaire et placement immédiat de l'implant

L'abord chirurgical par voie alvéolaire, ou closed lift, est équivalent à celui de l'implant court et du dépassement maîtrisé. Aucun contrôle visuel de l'apex de l'implant et du déplacement du cylindre osseux sous la membrane sinusienne n'est possible. Seul un contrôle tactile est envisageable.

Le risque d'effraction de la membrane de Schneider et de déplacement du cylindre osseux, ainsi que les éventuelles complications exposées plus haut (cf. « Physiologie des cavités sinusiennes ») sont à prendre en compte dans cette technique (Jung et al., 2007 ; Tan et al., 2008).

Ainsi, l'intérêt de l'élévation du plancher sinusien par voie latérale a minima par rapport à l'abord chirurgical par voie alvéolaire est de contrôler le décollement de la membrane et la mise en place du matériau de comblement en même temps que la pose de l'implant (Pjetursson et al., 2008). Les particularités anatomiques sont liées à la cloison antéro-latérale ou postéro-latérale du sinus, plus ou moins épaisse et résistante, la présence d'une anastomose endo-osseuse entre l'artère alvéolaire postéro-supérieure et l'artère infra-orbitaire (artère alvéolo-antrale) dans ces parois pouvant être à l'origine d'hémorragies peropératoires. L'incision devra être à distance de la fenêtre osseuse, décalée vers le versant palatin de la crête alvéolaire afin de réaliser un lambeau muco-périosté d'épaisseur totale prolongé vers le vestibule en désinsérant le muscle buccinateur. Une vision nette de la paroi latérale du sinus est indispensable. Des difficultés dues à un plancher sinusien irrégulier peuvent compliquer le décollement et entraîner une éventuelle déchirure de la membrane de Schneider. Le décollement de la membrane sera réalisé en partant de la partie inférieure de la fenêtre vers le plancher des sinus jusqu'à la paroi médiale du sinus maxillaire et en remontant le long de cette paroi en fonction de la longueur de l'implant choisi. En cas d'angle très fermé entre les parois latérale et médiale, le décollement sera plus difficile et le volume du greffon plus important (Velloso et al., 2006) (fig. 20).

Ce décollement sera prolongé en avant et en arrière et limité au maximum, afin de réduire le caractère invasif de cette intervention au simple but d'effectuer un comblement autour de l'implant stabilisé sur la hauteur alvéolaire réduite.

Cette technique d'élévation de sinus avec abord latéral est limitée à l'espace autour d'un ou deux implants qui peuvent être à distance l'un de l'autre. Ces fenêtres seront préférentiellement soit en avant soit en arrière du processus zygomatique du maxillaire où la paroi latérale du sinus est très épaisse et résistante, contre-indiquant ce type de fenêtre réduite à ce niveau (fig. 21 à 23).

Technique chirurgicale de l'élévation du plancher sinusien par voie alvéolaire

L'élévation du plancher sinusien par voie alvéolaire (closed lift) est une technique de comblement sinusien avec trépanation du plancher du sinus par voie alvéolaire qui permet de poser des implants dans les maxillaires postérieurs atrophiés lorsque 2 à 4 mm d'os résiduel sont présents dans la zone sous-sinusienne. Le protocole consiste à réaliser une trépanation osseuse sans forage, puis à fracturer le cal osseux pédiculé par ostéotomie. Ainsi, la membrane de Schneider et le cal osseux peuvent être repoussés peu à peu et permettre la mise en place d'implants de 7 à 8,5 mm de long dans le même temps opératoire avec ou sans apport de biomatériau simultané.

Cette technique est une évolution de la technique de Summers décrite dès 1994 (Summers, 1994, 1998) et validée par la suite par de nombreuses publications (Winter et al., 2002 ; Chen et al., 2005 ; Pjetursson et al., 2009 ; Tan et al., 2008).

Néanmoins, les indications actuelles de la technique d'origine nous semblent être limitées en raison de plusieurs avancées techniques telles que la modification des protocoles de forage pour assurer une stabilité primaire correcte même dans un os de faible densité, l'apparition de nouveaux designs d'implants adaptés à un os tendre (Cannas et al., 2012), la validation de la fiabilité des implants courts (Renouard et Nisand, 2005, 2006) et l'analyse préopératoire des volumes osseux exploitables grâce à l'imagerie médicale tridimensionnelle (Noharet et al., 2008).

La technique d'élévation du plancher sinusien par voie alvéolaire présentée ici fait partie de l'ensemble de celles décrites sous l'appellation « closed lift » (Fugazzotto 2001, 2002 ; Teng et al., 2013 ; Tilotta et al., 2008).

Les étapes du protocole opératoire proposé sont les suivantes.

Imagerie 3D

Comme pour la chirurgie sinusienne, l'indication de la technique par élévation du plancher sinusien par voie alvéolaire est posée à partir de l'imagerie sectionnelle. Le site implantaire idéal pour réaliser cette technique doit présenter les caractéristiques anatomiques suivantes :

– une hauteur d'os sous-sinusienne comprise entre 2 et 4 mm ;

– un sinus large avec des parois médiales et latérales distantes pour soulever le cal osseux sans interférer avec ces dernières.

Incision

Une incision de pleine épaisseur et un décollement sous-périosté permettent le contrôle visuel des volumes osseux dans leur totalité, ainsi que des contours osseux vestibulaires et linguaux afin que la trépanation osseuse se fasse au centre de la crête.

Trépanation et fracture du cal osseux

Il est recommandé d'utiliser un trépan (IPP Pharma) marqué de graduations en profondeur et d'un diamètre inférieur à celui du futur implant, monté sur un contre-angle à rotation rapide (2 000 tr/min), sous irrigation :

– de 2,5 mm pour un implant de 4 mm de diamètre ;

– de 3 ou 3,5 mm pour un implant de 5 mm de diamètre ;

Le trépan est passé graduellement dans l'axe implantaire, millimètre par millimètre en profondeur sur la hauteur osseuse sous-sinusienne disponible diminuée de 0,5 à 1 mm, afin d'éviter toute effraction directe du plancher du sinus.

Le cal osseux ainsi réalisé, encore attaché au plancher du sinus par une lame osseuse fine, est fracturé afin de totalement le désolidariser puis il est repoussé délicatement, à l'aide d'un maillet à embout en Téflon et d'un ostéotome qui doit être à bout concave (IPP Pharma).

Décollement de la membrane de Schneider et progression intrasinusienne

Le cal osseux doit être utilisé comme « toit » qui maintiendra la membrane sinusienne comme un « piquet de tente » sur l'apex de l'implant. Un nouveau volume osseux se « néoformera » en dessous du cal et autour de l'apex implantaire.

La membrane sinusienne sera décollée sur le pourtour complet du pertuis à l'aide d'une curette de Lucas droite de 2 mm, sur 1 à 2 mm maximum mais de manière « périphérique » et avec beaucoup d'attention. Ensuite, une jauge de profondeur à bout mousse de 3 mm de diamètre permet de « jouer » sur l'élasticité de la membrane afin de la décoller de plus en plus par un « effet de pompe » puis une curette sinusienne courte angulée à 90opermet de finir le décollement sur le pourtour complet du pertuis.

Comblement et mise en place de l'implant

Une fois la profondeur souhaitée obtenue, un matériau de comblement peut être mis en place par voie crestale à l'aide de condensateurs (Bio-Oss® Small 0,25 g, Geistlich). L'implant peut alors être inséré.

Pour obtenir une grande stabilité dans le peu d'os natif résiduel, on a utilisé des implants cylindro-coniques du type NobelSpeedy TiUnit® (Nobel Biocare).

Le torque de blocage final est généralement de 50 Ncm. Si un tel torque est obtenu, un pilier de cicatrisation peut être mis en place en un temps chirurgical (fig. 24).

Résultats

Sur une série de 62 implants consécutifs posés avec la technique de l'élévation du plancher sinusien par voie alvéolaire décrite, aucun échec d'ostéo-intégration ni de projection d'implant dans la cavité sinusienne n'est à rapporter. D'autres équipes rapportent d'aussi bons résultats (Nedir et al., 2010).

Tous les implants ont résisté à la mise en place, au bout de 4 à 6 mois, d'un pilier définitif serré à 35 Ncm (100 %).

La grande majorité des cas (98 %) n'a pas nécessité d'apport de biomatériau.

Sur 62 implants, 52 étaient de large diamètre (5 mm), soit 84 %, les 10 restants (16 %) de diamètre standard (4 mm).

Bien que cette technique présente d'excellents résultats, aucune preuve scientifique ne l'a encore établi. Elle reste une solution de remplacement au comblement sinusien par voie latérale.

Sa réalisation ne doit néanmoins être entreprise qu'à quatre conditions :

– l'épaisseur d'os sous-sinusienne ne doit pas dépasser 4 mm d'os résiduel ;

– la hauteur d'os doit être supérieure à 2 mm. En dessous, l'os résiduel ne pourra pas assurer la stabilité implantaire et le risque de projection antrale semble trop important ;

– le chirurgien doit être capable, en cours d'intervention, de modifier son protocole et de réaliser alors la technique classique par voie latérale, par exemple si la membrane se déchire de manière importante ou s'il ne parvient pas à maîtriser la séparation du cal osseux ;

– de même, le risque théorique étant la projection de l'implant dans la cavité sinusienne par des gestes trop brusques, le chirurgien doit être capable d'intervenir immédiatement pour extraire ce corps étranger.

Hauteur disponible de 0,5 à 2 mm : élévation du plancher sinusien par voie latérale et placement différé de l'implant

La voie d'abord est plus large que pour l'élévation de sinus avec abord latéral a minima, mais répond au même principe (Chiapasco et al., 2009 ; Pjetursson et al., 2008). Dans les cas de processus zygomatiques très épais et résistants, deux fenêtres en avant et en arrière peuvent être nécessaires.

Les risques et les précautions chirurgicales qui en découlent sont là aussi liés à l'artère alvéolo-antrale, à l'épaisseur de la paroi latérale du sinus, aux éventuelles cloisons de refend, à la fragilité de la membrane de Schneider et à la position du méat (qui est généralement à distance de la partie supérieure du greffon).

La vascularisation du sinus maxillaire est un élément très positif du potentiel de cicatrisation (fig. 25).

Elle dépend des branches de l'artère maxillaire qui s'individualisent dans son dernier tiers avant de traverser le foramen sphéno-palatin puis de pénétrer dans les fosses nasales sous la forme de l'artère sphénopalatine terminant sa course dans le canal naso-palatin et qui émerge dans la cavité buccale par le foramen naso-palatin.

Cette artère maxillaire va donner trois autres branches assurant la vascularisation du sinus :

– en arrière par l'artère alvéolaire postéro-supérieure dans la portion endo-osseuse et exo-osseuse ;

– en dedans par l'artère palatine descendante cheminant dans le canal grand palatin, émergeant dans la cavité buccale par le foramen homonyme puis se répartissant par des artérioles s'anastomosant en avant avec la partie terminale des branches de l'artère sphéno-palatine via l'artère naso-palatine ;

– en haut et en avant, par l'artère infra-orbitaire, donnant des branches exo-osseuses et endo-osseuses, qui émerge par le foramen infra-orbitaire et, dans certaines situations, crée une anastomose entre l'artère alvéolaire postéro-supérieure et l'artère infra- orbitaire (Gaudy et al., 2006, 2010 ; Geha et Carpentier, 2006).

Les incidences chirurgicales des gestes du praticien ne concernent que l'artère alvéolo-antrale et la partie terminale de l'artère palatine descendante.

Risques de l'élévation du plancher sinusien par voie latérale

La fenêtre d'accès dans la paroi latérale du sinus est découpée à l'aide d'une fraise chirurgicale ou d'un insert de piézo électrique. Une fois cette ouverture réalisée, plusieurs curettes sont utilisées pour détacher délicatement la membrane sinusienne et ménager l'espace nécessaire au matériau de comblement.

La difficulté de cette étape réside dans la préservation de l'intégrité de la membrane de Schneider. Le risque premier est donc la déchirure de cette muqueuse, altérant la barrière de protection du sinus et interrompant le tapis de drainage. Il s'ensuit systématiquement le remplissage du sinus par du sang qui constitue un milieu propice au développement bactérien. Mais la littérature scientifique montre que l'incidence des infections sinusiennes après perforation de la muqueuse est somme toute très faible (Jung et al., 2006 ; Krekmanov et al., 2000 ; Prithviraj et al., 2013).

Lorsque la perforation est de faible étendue, la cicatrisation est très rapide. En revanche, si la destruction est plus importante il faudra combler la brèche par une membrane, ce qui accélérera le processus cicatriciel.

Par ailleurs, la quantité de matériau de comblement utilisée influe sur les suites opératoires. Une quantité importante de matériau est nécessaire quand les parois qui entourent le comblement sont fines (sinus en « coquille d'œuf »).

Une greffe osseuse autogène ou allogène n'est qu'une base calcique qui sert de support à la reconstruction osseuse ; le corps devant construire de lui même une structure osseuse. Celle-ci nécessite un apport sanguin important à proximité du greffon. Les vaisseaux sanguins seront d'autant plus nombreux que les parois osseuses autour de la zone greffée sont épaisses.

Plus le volume osseux à reconstruire est important, plus les suites opératoires seront difficiles, et plus le risque de non ossification ou résorption sub-totale du matériau est important. Il est donc évident qu'un certain délai est nécessaire pour que cette formation osseuse s'effectue, à savoir 6 à 9 mois selon les matériaux. Toute infection au niveau du greffon durant cette période empêcherait ou freinerait l'édification de ce néo-os.

D'autre part, le risque de lésion vasculaire n'est pas négligeable dans cette zone. L'artère alvéolo-antrale peut être lésée lors de l'ouverture du sinus, déclenchant alors un saignement important.

Les autres complications de l'élévation du plancher sinusien par voie latérale sont plus rares.

Elles peuvent être, par exemple, d'origine nerveuse, du fait d'une rétraction traumatique du lambeau gingivo-périosté au niveau de l'émergence du nerf infra-orbitaire. La récupération peut être tardive mais rares sont les séquelles.

En raison des complications citées plus haut et de toutes celles que nous n'avons pas abordées, on comprend qu'un comblement par abord latéral n'est pas une intervention anodine. Elle engendre un coût biologique, financier et temporel pour le patient, et est associée à un risque de complications non négligeable.

Privilégier la thérapeutique la moins invasive du gradient thérapeutique dans le traitement du maxillaire postérieur en implantologie, selon la situation clinique, évite d'exposer le patient à ces complications.

Conclusion

L'évolution de la performance des implants, des techniques chirurgicales, de l'imagerie tridimensionnelle, des connaissances anatomiques ainsi que le recul clinique et scientifique sur l'utilisation des implants courts et inclinés dans les régions maxillaires postérieures doivent limiter les greffes osseuses dans la majorité des traitements implantaires sous-sinusiens, étendant ainsi les indications de la chirurgie implantaire micro-invasive.

Cependant, toutes les techniques décrites dans cet article sont délicates et leur mise en œuvre nécessite une dextérité acquise après une longue pratique. Elles doivent être parfaitement apprises et maîtrisées, et sont donc réservées à des chirurgiens expérimentés.

Par ailleurs, elles doivent toutes être impérativement utilisées après une étude préalable précise des volumes osseux en 3D par des examens sectionnels (CT ou CBCT).

La chirurgie micro-invasive des régions maxillaires postérieures donne les mêmes résultats à long terme que la pose d'implants après élévation du plancher sinusien par voie latérale. Elle permet de traiter les patients avec la même sécurité, notamment biomécanique, tout en réduisant considérablement les coûts biologiques et financiers, les risques opératoires, les suites postopératoires difficiles et la durée du traitement. Le patient en tire alors bénéfice et sécurité, pour des traitements tout aussi sûrs et pérennes que ceux, beaucoup plus traumatiques, par élévation de sinus.

Même si de plus amples études et un plus grand recul clinique sont nécessaires avant de pouvoir l'appliquer dans un protocole routinier, l'exploitation de ce nouveau champ thérapeutique, à disposition des patients, son recul clinique et sa validité scientifique permettent aujourd'hui de proposer des traitements des zones maxillaires postérieures avec un minimum d'indications de greffe sinusienne par abord latéral.

Cependant, les greffes osseuses de type élévation du plancher sinusien par voie latérale (Chiapasco et al., 2009) restent évidemment d'actualité, mais dans des indications cliniques de plus en plus limitées et très précises, notamment en cas de sinus maxillaires très pneumatisés où l'épaisseur d'os résiduel ne dépasse pas 2 mm (fig. 26).

Remerciements

Concernant les recherches sur pièces anatomiques et les dissections anatomiques nous remercions le Centre du Don des Corps de l'Université Paris Descartes (45, rue des Saints-Pères, Paris).

  • Retrouvez les références bibliographiques sur notre site : https://goo.gl/rHU4yo