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Søren JEPSEN * Hendrick TERHEYDEN **
*Department of Periodontics, Kiel University, Germany
**Department of Oral-Maxillofacial Surgery, Kiel University, Germany
Les facteurs de croissance (GF : Growth Factors) se présentent comme des médiateurs biologiques qui régulent les événements clés de la réparation tissulaire tels que le chimiotactisme, la différenciation, la prolifération et la synthèse matricielle des cellules. Ils agissent principalement selon un mode autocrine (quand les cellules qui produisent les GF sont influencées par ces derniers) ou selon un mode paracrine (la production des GF par un type...
Les facteurs de croissance polypeptidiques et les protéines morphogénétiques sont des médiateurs biologiques qui jouent un rôle important dans la stimulation et la régulation de la cicatrisation. Ces facteurs sont impliqués dans la réparation et la régénération par la régulation des mitoses, de la différenciation et de la synthèse matricielle. De nombreuses études précliniques ont démontré le potentiel de certains facteurs de croissance et de différenciation dans la modulation de la cicatrisation parodontale et péri-implantaire aboutissant à une régénération parodontale plus importante et une meilleure ostéo-intégration. Plusieurs peptides sont disponibles sous forme recombinée et peuvent être utilisés dans un cadre thérapeutique. Il est prévisible que, dans le futur, l'application de ces protéines de croissance prenne part à nos stratégies régénératrices. Cette revue sera focalisée sur notre compréhension actuelle des effets des facteurs de croissance et des protéines morphogénétiques sur les cellules et les tissus impliqués dans la régénération parodontale et dans l'ostéo-intégration des implants.
Les facteurs de croissance (GF : Growth Factors) se présentent comme des médiateurs biologiques qui régulent les événements clés de la réparation tissulaire tels que le chimiotactisme, la différenciation, la prolifération et la synthèse matricielle des cellules. Ils agissent principalement selon un mode autocrine (quand les cellules qui produisent les GF sont influencées par ces derniers) ou selon un mode paracrine (la production des GF par un type cellulaire influence la fonction d'un autre type cellulaire) par liaison avec des récepteurs cellulaires spécifiques de surface qui activent un signal des voies transductrices impliquant la phosphorylation de la thyroxine kinase ou la sérine tyronase. Les facteurs de croissance et de différenciation retrouvés dans l'os et les tissus cicatriciels incluent PDGF, TGF-β, FGF, IGF-I, IGF-II et les protéines morphogénétiques osseuses (BMP). Ainsi, les facteurs de croissance sont des polypeptides qui agissent sur la croissance cellulaire (polypeptides mitogènes) et peuvent agir également sur le taux de production de la matrice extra-cellulaire. En outre, les facteurs de différenciation (polypeptide de différenciation = protéines morphogénétiques) contrôlent le phénotype cellulaire, permettant l'orientation des cellules étoilées et des cellules progénitrices (c'est-à-dire la différenciation des cellules mésenchymateuses indifférenciées en ostéoblastes) (fig. 1).
La cicatrisation semble être régulée par divers facteurs de croissance et de différenciation ainsi que par des cytokines. Suite à une blessure, les plaquettes activées aux berges d'une plaie libèrent des facteurs de croissance tels PDGF et TGF-β1 (Assoian et al., 1984). L'exsudat plasmatique constitue une source importante d'IGF-1 (Rinderknecht et Humbel, 1978). Les cellules adjacentes à la plaie produisent des facteurs de croissance tels IGF-I, PDGF et TGF-β1 quelques heures après la blessure (Hansson et al., 1987 ; Sitaras et al., 1987 ; Antoniades et al., 1991 ; Werner et al., 1992). Les macrophages pénétrant dans la zone de cicatrisation constituent une autre source de PDGF et TGF-β1 (Rappolee et al., 1988). L'os est connu pour être un réservoir important de facteurs de croissance tels IGF-I, IGF-II, PDGF et TGF-β1 qui peuvent également être produits pendant la blessure (Hauschka, 1990). Les protéines morphogénétiques (BMP) sont également présentes dans la matrice osseuse (Urist, 1965 ; Urist et Strates, 1971) et exprimées lors de la réparation des fractures (Nakase et al., 1994). L'expression des facteurs de croissance à la suite d'une plaie des tissus mous et de l'os semble réguler le processus de réparation et/ou de régénération. Certains auteurs ont même émis l'hypothèse que la destruction parodontale pouvait être la conséquence d'une réparation inadéquate (Hausmann et al., 1992). Les médiateurs de l'inflammation peuvent avoir un effet inhibiteur sur des facteurs de croissance tel PDGF (McAllister et al., 1995). Ainsi, la raison de l'administration de facteurs de croissance en parodontologie et en implantologie est d'améliorer et/ou d'accélérer la capacité physiologique de la cicatrisation, qui peut être insuffisante pour promouvoir une cicatrisation complète des structures affectées. Lors de la précédente décennie, de nombreuses études in vitro et in vivo ont essayé d'élucider le rôle de facteurs de croissance et de différenciation tels que PDGF et BMP sur la cicatrisation parodontale et sur l'ostéo-intégration. Un certain nombre de ces facteurs sont actuellement disponibles sous forme recombinée et peuvent être produits sous forme pure à grande échelle (fig. 2a, 2b, 2c et 2d).
Cet article décrira les effets des facteurs de croissance et des protéines morphogénétiques sur les fibroblastes du ligament parodontal et des tissus durs (cément et os alvéolaire) en se fondant sur les études disponibles in vitro et in vivo.
Les facteurs possédant des effets stimulant la prolifération, la migration et la synthèse de la matrice collagénique des fibroblastes du ligament parodontal peuvent promouvoir la formation d'une nouvelle attache. A l'heure actuelle, on dispose de nombreuses informations relatives aux effets des PDGF, TGF-β1, IGF-I, CGF et des BMP-7 sur l'activité des cellules du ligament parodontal. Le Platelelet Derived Growth Factor (PDGF) est connu pour avoir un effet chimiotactique sur les cellules du ligament parodontal et pour promouvoir la synthèse collagénique (Matsuda et al., 1992). Combiné à l'IGF-I ou à de la dexaméthasone, des effets synergiques sur la mitogenèse des cellules du ligament parodontal ont été observés (Matsuda et al., 1992 ; Rutherford et al., 1992a, 1994). Récemment on a suggéré que la réponse chimio-tactique et mitogénique des fibroblastes du ligament parodontal au PDGF serait supprimée par P. gingivalis par une régulation à la baisse des récepteurs cellulaires de surface des PDGF (Matsuda et al., 1996).
Le Transforming Growth Factor-bêta (TGF-β1) augmente fortement la production de la matrice extra-cellulaire de plusieurs types cellulaires et également des cellules du ligament parodontal (Matsuda et al., 1992. Ce facteur ne favorise pas la migration des cellules ligamentaires et n'a qu'un effet minime sur leur mitogenèse (Matsuda et al., 1992 ; Oates et al., 1993 ; Dennison et al., 1994). En outre, TGF-β inhibe la prolifération des cellules épithéliales (Lynch et al., 1989a ; Tucker et al., 1984).
Le Basic Fibroblast Growth Factor (bFGF) : il a été montré que le bFGF a un effet chimiotactique et mitogène sur les cellules du ligament parodontal (Terranova et al., 1989).
Les Insulin-like Growth Factors I et II (IGF-I et II) : il a été montré que l'IGF-I a une activité chimiotactique sur les cellules dérivées du ligament parodontal, en plus d'un puissant effet mitogène et de potentialisation de la synthèse protéique de ces cellules (Matsuda et al., 1992). Des récepteurs pour l'IGF-I ont été mis en évidence à la surface des cellules du ligament parodontal (Blom et al., 1992). La stimulation du PDGF augmenterait l'expression des récepteurs IGF-I des fibroblastes, favorisant ainsi l'action de IGF-I exogène (Rubini et al., 1994).
Le Cementum-derived Growth Factor (CGF) : le CGF semble être uniquement présent dans le cément (Narayanan et Yonemura, 1993). Ce facteur exerce un effet mitogène sur les cellules du ligament parodontal et serait également impliqué dans la différenciation des cémentoblastes (Yonemura et al., 1992, 1993).
Les protéines morphogénétiques osseuses (BMP) : la BMP-7 (encore appelée OP-1 ou Osteogenic Protein-1), bien que n'exerçant pas d'effet mitogène sur les cellules du ligament parodontal (Rutherford et al., 1994), serait capable de changer le phénotype de ces cellules en stimulant leur activité phosphatase alcaline de façon dose et temps-dépendante. Les BMP-2 et 12 ne possèdent pas d'effet mitogène sur les cellules du ligament parodontal (Nguyen et al., 1995). De nouvelles études explorant les effets des autres BMP sur les cellules du ligament parodontal seraient d'un grand intérêt.
De nombreux facteurs de croissance sont stockés abondamment dans la matrice osseuse et sont considérés comme responsables du couplage résorption/formation osseuse (Baylink et al., 1990, 1993), probablement par des mécanismes paracrines retardés. Au cours de la cicatrisation osseuse, on assiste aussi à l'expression chronologique de nombreux gènes de facteurs de croissance et de leurs produits (Bolander, 1992 ; Andrew et al., 1993a, 1993b ; Joyce et al., 1990). Il est donc raisonnable de penser que de nombreuses interactions ont lieu entre différents facteurs de croissance au cours de la formation et de la cicatrisation osseuse. Bien que le rôle des facteurs de croissance polypeptidiques dans la formation osseuse ait été largement étudié, les informations spécifiques à l'os alvéolaire restent encore insuffisantes.
Le Plateled Derived Growth Factor (PDGF) stimule aussi bien les activités mitogène et chimiotactique que l'activité de synthèse protéique dans une culture d'os (Graves et al., 1989 ; Hock et Canalis, 1994 ; Hughes et al., 1992). Ce facteur de croissance est libéré par des cellules humaines de type ostéoblaste (Zhang et al., 1991).
Le Transforming Growth Factor-bêta (TGF-1) : les effets de TGF-β1 semblent être dépendants du type cellulaire, de la dose et de l'environnement local (Centrella et al., 1987 ; Sporn et Roberts, 1992). TGF-β est connu pour stimuler la synthèse de matrice extracellulaire (Bonewald et Mundy, 1990 ; Pfeilschifter et al., 1990) et pour inhiber la dégradation de matrice (Edwards et al., 1987 ; Overall et al., 1991). Les gènes de TGF-β1 sont exprimés lors de la cicatrisation d'une fracture (Andrew et al., 1993b).
Le Fibroblast Growth Factor (FGF) stimule la prolifération des cellules osseuses (Canalis et al., 1988) et l'angiogenèse (Folkman et Klagsbrun, 1987).
Les Insulin-like Growth Factors I et II (IGF-I et II) sont retrouvés dans de larges proportions dans l'os. IGF-II est le facteur de croissance le plus abondant dans la matrice osseuse (Mohan et Baylink, 1991a et b). IGF-I est produit par les ostéoblastes et favorise la formation osseuse en stimulant la différenciation, la prolifération et la biosynthèse de collagène (Canalis, 1980 ; Canalis et al., 1988 ; Mohan et al., 1986). Il a été démontré que ce facteur régule la formation osseuse selon un mode auto-crine (McCarthy et al., 1989). IGF-II serait moins puissant qu'IGF-I dans la promotion de la formation osseuse (McCarthy et al., 1989). On a, par ailleurs, montré des effets synergiques d'IGF-I et d'autres facteurs de croissance (bFGF, PDGF, TGF-β) sur la mitogenèse des ostéoblastes (Giannobile et al., 1997 ; Piche et Graves, 1989). Il est évident que IGF-I ou IGF-II combinés à d'autres facteurs de croissance peuvent potentialiser le processus de cicatrisation osseuse (Pfeilschifter et al., 1990 ; Giannobile et al., 1997).
Les protéines morphogénétiques osseuses (BMP) : du point de vue structurel les BMP font partie de la famille des TGF-β (fig. 3) et, contrairement aux autres facteurs de croissance, sont capables d'induire une néo-formation osseuse (fig. 4) (Urist, 1965 ; Urist et Strates, 1971 ; Sampath et Reddi, 1981, 1983 ; Wozney et al., 1988 ; Luyten et al., 1989 ; Celeste et al., 1990 ; Sampath et al., 1990, 1992 ; Özkaynak et al., 1990, 1992). Les BMP sont abondantes dans l'os et sont produites par différents types cellulaires notamment les ostéoblastes (Urist et al., 1977). L'effet principal des BMP est d'induire la différenciation de cellules pluripotentielles indifférenciées en cellules productrices d'os et de cartilage (Wozney, 1992 ; Reddi et Cunningham, 1993 ; Asahina et al., 1993 ; Knutsen et al., 1993). Il a été démontré que les BMP régulaient l'expression des gènes des facteurs de croissance dans les cellules crâniennes chez le rat (Yeh et al., 1998). Ils peuvent agir en synergie avec les IGF-I pour stimuler la différenciation et la prolifération des cellules ostéoblastiques (Yeh et al., 1997). Les BMP jouent également un rôle dans la dentinogenèse et peuvent promouvoir la formation de dentine réparatrice in vivo.
Dans une étude pilote chez 3 chiens beagle, Lynch et al. (1989b) ont évalué l'effet de l'association PDGF/IGF-I sur une parodontite naturelle. Les dents tests qui ont reçu 1 µg de l'association facteurs de croissance dans 75 µl de gel de méthylcellulose (utilisé comme support) présentaient une néoformation osseuse et cémentaire 2 semaines seulement après l'intervention, alors que les dents contrôles traitées par le gel de méthylcellulose seul ne présentaient qu'un long épithélium de jonction.
Dans une étude étendue à 13 chiens beagle présentant une parodontite naturelle, Lynch et al. (1991a) ont administré 3 µg de PDGF-B humain recombiné associé à 3 µg d'IGF-I humain recombiné dans 80 µl de gel de méthyl-cellulose. Après 2 et 5 semaines, un gain significatif en os et en cément de 5 à 10 fois par rapport au site contrôle a été observé (vecteur seul). La demi-vie des facteurs de croissance au niveau du site d'application était de 3 h pour IGF-I et de 4,2 h pour PDGF-B. Moins de 4 % des facteurs de croissance marqués radioactivement pouvaient être retrouvés après 96 heures. Les auteurs ont suggéré qu'une seule application de facteurs de croissance exogènes avait stimulé une cascade d'événements lors de la cicatrisation qui se poursuivait en dépit de leur absence.
La même association de PDGF/IGF-I a été évaluée par Rutherford et al. (1992) dans un autre modèle animal. Chez 3 singes présentant une parodontite induite par ligatures et infectée par Porphyromonas gingivalis, une néo-attache d'environ 50 % s'était formée après 4 semaines de cicatrisation.
Dans une étude ultérieure sur le singe, Rutherford et al. (1993) ont évalué l'association de rhPDGF-BB/dexaméthasone dans une matrice collagénique bovine. Comparées aux lésions contrôles traitées par le support seul, les lésions tests présentaient, à 4 semaines, 5 fois plus de formation de cément et d'attache et une régénération osseuse 7 fois plus importante.
Giannobile et al. (1994) ont comparé les résultats d'un traitement unique d'une association de PDGF/IGF-I dans une parodontite naturelle chez le chien et dans une parodontite expérimentale chez le singe. Les auteurs ont trouvé une régénération significativement plus importante des lésions tests par rapport aux contrôles pour les deux modèles animaux. Alors que les chiens présentaient une régénération osseuse plus importante, les singes montraient plus de néo-attache.
Dans une étude ultérieure plus approfondie de Giannobile et al. (1996) comparant l'effet de l'association de PDGF et IGF-I recombinés à l'effet de chaque facteur utilisé individuellement sur la régénération parodontale chez 10 singes cynomolgus, les auteurs ont montré que l'IGF-I seul ne modifiait pas significativement le processus de cicatrisation. Toutefois, le PDGF-BB seul pouvait stimuler la formation d'une nouvelle attache, alors que l'association des 2 facteurs produisait une augmentation significative de la formation d'une nouvelle attache et de régénération osseuse.
Wang et al. (1994) ont utilisé des méthodes autoradiographiques pour analyser l'influence du PDGF sur la prolifération des fibroblastes dans des défauts osseux de type fenestration chez 6 chiens mongrel. Comparés aux défauts contrôles sans PDGF (avec ou sans membrane PTFEe), les défauts traités par du PDGF (avec ou sans membrane PTFEe) présentaient une augmentation de la prolifération des fibroblastes après 1 et 7 jours.
L'utilisation de PDGF associée à la régénération tissulaire guidée (RTG) a été également évaluée par Park et al. (1995) et Cho et al. (1995). Ils ont introduit le concept de « Régénération tissulaire guidée modulée par PDGF » (P-GTR). Une solution de PDGF-BB humain recombiné a été appliquée sur des surfaces radiculaires préalablement déminéralisées par de l'acide citrique. Selon les auteurs, l'avantage serait que le PDGF lié à la surface radiculaire serait lentement libéré dans le temps. Le défaut a ensuite été recouvert par une membrane PTFEe et par un lambeau positionné coronairement. Ce type de traitement a été comparé à la RTG seule chez 6 chiens sur des furcations de classe II créées chirurgicalement. Une attention particulière a été accordée à la prophylaxie des infections topiques et systémiques. Une augmentation significative de la régénération osseuse et de la formation d'une néo-attache a été observée avec P-GTR après 8 et 11 semaines. Avec l'utilisation de PDGF-BB seul, dans une expérience séparée, la régénération osseuse était améliorée après 5 semaines. Cependant, elle était souvent accompagnée par des ankyloses et ne pouvait donc pas être recommandée par les auteurs.
Les essais cliniques en phases I et II de la FDA ont été réalisés dans 2 centres pour évaluer la sécurité et l'efficacité de l'utilisation de l'association de rhPDGF-BB/rhIGF-I dans la régénération parodontale (Howell et al., 1997). Trente-huit patients présentant des défauts infra-osseux et des furcations ont été traités en bouche partagée (split-mouth). Deux doses (50 µg/ml ou 150 µg/ml de chaque facteur de croissance) ont été évaluées et comparées au débridement ou au support seul. La réentrée après 6 à 9 mois a révélé des effets significatifs pour la dose la plus importante. Dans les défauts infra-osseux un gain de 2 mm de hauteur verticale d'os et une régénération de 42 % ont été observés. Un gain moyen de 2,8 mm dans le sens horizontal a été noté pour les furcations. Un large panel de paramètres de sécurité a été déterminé. L'étude n'a révélé aucun problème particulier et aucun patient n'a développé d'anticorps contre les protéines recombinées. Les auteurs ont conclu que d'autres études, utilisant des doses plus importantes, seront nécessaires pour mieux déterminer et optimiser les effets de cette association de facteurs de croissance sur la régénération parodontale chez l'homme.
Même si des données précliniques et cliniques convaincantes sont actuellement disponibles pour le traitement par l'association PDGF/IGF-I, cette approche n'est plus poursuivie. Les raisons en sont inconnues et pourraient être liées aux procédés d'agrément commercial.
Deux études seulement ont évalué l'effet des autres facteurs de croissance.
Selvig et al. (1994) ont appliqué une association de facteurs de croissance (IGF-II/bFGF/TGF-β) sur une éponge de collagène dans une fenestration expérimentale chez 4 chiens beagle. Contrairement aux défauts contrôles, les défauts traités par les facteurs de croissance présentaient une formation osseuse retardée.
Dans une étude récente, Wikesjö et al. (1998) ont évalué un traitement associant le TGF-β1 à une régénération tissulaire guidée chez 5 chiens beagle. Le TGF-β1 recombiné était délivré dans un support de carbonate de calcium/amidon protégé par une membrane PTFEe et par un lambeau positionné coronairement. Une formation osseuse et cémentaire très limitée a été observée et, de plus, ne différait pas de celle notée au niveau des sites contrôles (support seul plus RTG). A partir de ces données les auteurs ont conclu que ce traitement avait un potentiel clinique limité.
L'os déminéralisé (DFDBA) est une allogreffe largement utilisée depuis longtemps en parodontologie. Depuis les publications d'Urist (1965, 1971) les parodontistes ont essayé d'utiliser les facteurs ostéo-inductifs présumés présents dans cette greffe pour la stimulation de la régénération osseuse parodontale. En effet, BMP-2, BMP-4, BMP-7 sont retrouvées dans les préparations osseuses de plusieurs banques d'os (Shigeyama et al., 1995). Cependant, contrairement aux préparations fraîches, l'activité biologique des autres préparations semblait être réduite (Shigeyama et al., 1995) et leurs propriétés ostéo-inductives ont montré une variabilité importante (Schwartz et al., 1996). De plus, Becker et al. (1995) ont remis en question l'utilité de l'os déminéralisé actuellement disponible dans le commerce en parodontologie. Ils ont demandé l'incorporation à la matrice porteuse de BMP recombinées de qualité et de quantité connues.
Bowers et al. (1991), dans le premier et seul essai clinique utilisant les BMP pour la régénération parodontale chez l'homme, ont évalué l'effet de l'ostéogénine (BMP-3) extraite de l'os humain dans la cicatrisation de lésions infra-osseuses. L'ostéogénine a été délivrée dans un support de DFDBA. Dans 36 lésions chez 8 patients, la cicatrisation s'est déroulée après la dépose de la couronne en milieu enfoui et, dans 50 lésions chez 6 patients, elle s'est déroulée de façon transgingivale. Les lésions traitées par la matrice osseuse ou par du collagène non osseux ont servi de contrôle. Des biopsies en bloc ont été faites après 6 mois et la cicatrisation a été histologiquement évaluée. Alors que, dans le milieu enfoui, l'association ostéogénine/DFDBA était significativement supérieure au DFDBA, les différences n'étaient pas statistiquement significatives dans le modèle transgingival, situation rencontrée en clinique. Les résultats les moins favorables ont été obtenus avec la matrice collagénique, avec ou sans ostéogénine. Aucune réaction immunologique due à l'ostéogénine n'a été observée.
Ripamonti et al. (1994), dans une étude pilote chez 4 singes, ont testé l'effet d'un extrait de BMP (extrait d'os bovin, qui contient majoritairement des BMP-2 et des BMP-3) associé à une matrice collagénique osseuse insoluble (ICBM) dans la cicatrisation de 8 lésions de furcation de classe II mandibulaires profondes créées chirurgicalement. Huit lésions controlatérales traitées par la matrice collagénique seule ont servi de témoins. Après 2 mois, il y avait une amélioration significative de la régénération du cément, du ligament parodontal et de l'os dans les furcations traitées par BMP/ICBM.
En utilisant des BMP d'origine bovine partiellement purifiées incorporées dans une membrane de collagène fibreux, Kuboki et al. (1998) ont montré une régénération parodontale dans des lésions de furcation de classe II chez 3 singes après 12 semaines.
Sigurdsson et al. (1995) ont appliqué les BMP-2 sur des défauts supra-osseux chez 6 chiens beagle, en utilisant comme support des microparticules résorbables de PLGA (acide polylactique polyglycolique). La chirurgie régénératrice comprenait l'application du produit test du côté expérimental et du support seul du côté témoin. Pour faciliter la cicatrisation, les couronnes ont été sectionnées et les lambeaux suturés par-dessus les dents (modèle des racines enfouies). Deux mois plus tard, une régénération appréciable de l'os et du cément a été observée au niveau des défauts tests, significativement plus importante que celle notée dans les défauts contrôles. L'incidence de résorption radiculaire était moins importante dans les sites tests, alors que l'incidence d'ankylose était similaire à celle du côté témoin.
Dans une étude ultérieure de la même équipe, une importante régénération parodontale induite par des BMP a été observée dans le modèle transgingival (Sigurdsson et al., 1996). La cicatrisation a été significativement influencée par le type de support utilisé (6 types de supports de BMP-2 évalués).
Kinoschita et al. (1997) ont réalisé une chirurgie régénératrice avec des BMP-2 incorporées dans une gélatine et un copolymère acide polylactique/acide polyglycolique dans des défauts circonférenciels induits par ligature chez six chiens beagle. Une évaluation histométrique après 3 mois a démontré une néoformation significative d'os et de cément sans ankylose.
King et al. (1997) ont étudié les effets de BMP-2 sur des fenestrations chez le rat. Après 10 jours de cicatrisation, une formation osseuse significative et à 100 % et plus de formation de cément ont été notés dans les sites tests par rapport aux sites témoins. Cependant, après 38 jours, une cicatrisation complète de tous les défauts a été observée, ce qui a fait suggérer aux auteurs que, dans ce modèle, les BMP-2 pourraient être capables d'accélérer la formation osseuse et cémentaire durant la cicatrisation précoce.
Ripamonti et al. (1996) ont évalué l'effet des BMP-7 (OP-1) sur la cicatrisation de lésions de furcation mandibulaire de classe II. Six défauts chez 3 animaux ont été traités par des BMP-7 aux concentrations de 0,1 ou 0,5 µg/mg incorporées dans une matrice collagène. Aucune formation osseuse n'a été observée, alors qu'une néoformation du cément a été notée. Les auteurs ont conclu que les BMP-7 utilisées aux concentrations données stimulaient le phénotype cémentoblastique.
Jepsen et al. (1998) ont observé une régénération osseuse appréciable et une néoformation cémentaire après l'utilisation de BMP-7 recombinée, à des concentrations plus importantes (2,5 µg/mg), dans des lésions de furcation de classe II chez des primates non humains (fig. 5a, 5b et 6).
Giannobile et al. (1998) ont étudié l'effet/dose de BMP-7/OP-1 recombiné chez 18 chiens beagle. A la dose de 7,5 µg/mg, ces BMP dans une matrice collagénique entraînaient une stimulation significative de tous les paramètres de cicatrisation qui a été statistiquement différente par rapport au support ou à la chirurgie seule. Aucune augmentation significative du nombre des ankyloses n'a été observée.
La formation non seulement d'os mais également d'une nouvelle attache à la suite de l'application de BMP reste difficile à expliquer. Des auteurs ont suggéré que, suite à l'initiation de la cicatrisation par les BMP, d'autres cytokines et/ou facteurs de croissance stimulent la différenciation de cellules possédant un phénotype parodontal non osseux, puisqu'un effet mitogénique des BMP sur les cellules du ligament apparaît improbable (Rutherford et al., 1994). On peut espérer que d'autres recherches, étudiant les récepteurs des BMP dans les tissus parodontaux, pourraient nous aider à mieux comprendre les mécanismes moléculaires qui modulent la cicatrisation parodontale.
En résumé, les différentes études précliniques montrent que les BMP-2 et BMP-7 peuvent stimuler la régénération parodontale. Des essais cliniques humains sont en cours afin de déterminer la fiabilité et l'efficacité des protéines morphogénétiques recombinées dans la reconstruction parodontale avec des premiers résultats attendus au cours de l'an 2000.
Le succès à long terme de n'importe quel implant mis en fonction dépend de l'obtention d'un ancrage osseux direct (Brånemark, 1983). Ainsi, les deux objectifs principaux de l'utilisation des facteurs de croissance et de différenciation en implantologie sont d'augmenter la surface de contact os/implant et d'accélérer l'ostéo-intégration (Becker et al., 1992). Sans oublier la possibilité d'améliorer la qualité osseuse autour des implants et les sites implantaires insuffisants.
Un mélange de PDGF/IGF-I incorporé à un gel carboxy-méthylcellulose a été utilisé dans une étude canine. Les surfaces rugueuses des implants ont été recouvertes par le gel. Dans les sites édentés de la mandibule, une accélération significative de l'ostéo-intégration a été observée alors que les auteurs n'ont pas pu démontrer de différence significative à 21 jours au niveau de la surface de contact os/implant par rapport au groupe placebo ou à une surface implantaire sans gel (Lynch et al., 1991b). Les mêmes auteurs ont réalisé une étude canine où des implants avec membrane et facteurs de croissance ont été placés après extraction dans des sites présentant des déhiscences vestibulaires. Là aussi une accélération de l'ostéo-intégration a été observée pour le groupe PDGF/IGF-I ; de plus une augmentation de la surface os/implant a été notée (Becker et al., 1992). Dans un cadre orthopédique un effet similaire a été observé avec TGF-β (Lind et al., 1996).
Le plasma riche en plaquettes (PRP), source naturelle de PDGF, s'est révélé très utile pour l'amélioration de la cicatrisation de greffes osseuses autogènes (Marx et al., 1998). Cependant, il n'existe pas de données actuelles concernant l'utilisation du PRP en implantologie.
La capacité des protéines morphogénétiques à augmenter la surface de contact os/implant a été rapportée par plusieurs études. Certaines d'entre elles ont utilisé une préparation de BMP d'origine bovine dans des sites mandibulaires chez le chien (Wang et al., 1993, 1994 ; Yan et al., 1994) mais aucune donnée quantitative n'a été rapportée. Par ailleurs, des BMP-2 recombinées utilisées dans des essais in vitro ont stimulé les cellules ostéoblastiques sur des surfaces en titane (Ong et al.,1997). Dans une étude chez le chien utilisant des OP-1 recombinées associées à du collagène de type I dérivé d'os dans des sites mandibulaires avec implants recouverts d'hydroxyapatite placés après extraction, la surface de contact os/implant mesurée était de 80 %, mais la différence avec les sites contrôles n'était pas significative (Cook et al., 1995). Cependant, dans une étude récente chez le chien utilisant des rhBMP-2 dans du collagène en vue d'une augmentation de la hauteur crestale mandibulaire lors de la pose des implants, la surface de contact avec l'os régénéré était seulement de 29 % 16 semaines après l'intervention (Sigurdsson et al., 1997). Hanisch et al. (1997a) ont pu montrer une possible re-ostéo-intégration des implants suite à des péri-implantites chez des primates non humains après utilisation de rhBMP-2 dans une éponge de collagène. Après 4 mois de cicatrisation, une surface os/implant de 29 % a été observée au niveau de la lésion alors que, au niveau où une néoformation osseuse a eu lieu, une surface de 40 % a été notée dans les sites traités par des rhBMP-2. Dans une étude sur l'élévation de sinus chez le porc utilisant des rhOP-1 sur un support de xénogreffe osseuse déprotéinisée et une implantation immédiate, une différence significative de surface de contact os/implant entre le groupe test (80 %) et le groupe contrôle (38 %) a été observée (Terheyden et al., 1999) (fig. 7 et 8a, 8b).
De nombreuses études expérimentales ont évalué les taux de contact os/implant après modification de surface sans utiliser de BMP. Une surface de contact de 61 % dans la mandibule semble être une valeur représentative pour les implants en titane (Arvidson et al., 1990). Le contact os/implant au niveau maxillaire chez le chien après 4 mois se situe entre 43 % pour les surfaces usinées et 65 % pour les surfaces recouvertes par du dioxyde de titane (Eriksson et al., 1994). Dans une étude chez le porc, différents types d'implants en titane ont été placés dans un os spongieux autour de l'articulation du genou. Après 6 semaines de cicatrisation, le contact os/implant le plus important a été observé au niveau des surfaces en titane rugueuses sablées (58 %), significativement supérieur à celui des surfaces en titane plasma spray (38 %) et en titane poli (25 %). Buser et al. (1991) ont observé une augmentation significative de la surface de contact os/implant avec des surfaces prétraitées à l'acide (33 % versus 58 %) et des surfaces rugueuses (moyennement sablées 22 % versus 58 % pour un sablage important). De nombreuses tentatives ont été faites pour augmenter le contact os/implant en utilisant des surfaces recouvertes par de l'hydroxyapatite (HA). Lors de l'utilisation de ces dernières, un contact os/implant de 71 % en comparaison avec les surfaces en titane plasma spray (55 %) et les surfaces usinées (46 %) a été observé dans la mandibule de chien après 3 mois (Weinlaender et al., 1992). De plus, un recouvrement de la surface implantaire par l'HA a accru le contact os/implant dans le fémur de lapin comparé aux surfaces en titane plasma spray (75,9 % versus 59 %) après 6 mois (Gottlander et al., 1992). Dans une étude chez le porc, le contact os/implant obtenu par les implants recouverts par l'HA (69 %) a surpassé celui de tous les autres types de surfaces de titane (21 % - 58 %) (Buser et al., 1991).
Bien que toutes les études ne soient pas aisément comparables à cause de la différence des modèles animaux utilisés, des périodes expérimentales et des caractéristiques des surfaces, aucune d'entre elles n'a pu réaliser une ostéo-intégration aussi importante que celle de 80 % rapportée dans deux études utilisant des rhOP-1 soit dans des sites d'extractions (Cook et al., 1995), soit dans l'os régénéré (Terheyden et al., 1999). On peut ainsi conclure que les rhOP-1 favorisent l'ostéo-intégration dans les études précliniques.
Le rôle des BMP dans la promotion de la formation osseuse autour des implants a été largement rapporté. Dans les études canines suscitées utilisant des préparations de BMP d'origine bovine, une extension de l'apposition osseuse autour des implants a été observée en microscopie optique et électronique après 4 semaines de cicatrisation (Wang et al., 1993 ; Yan et al., 1994 ; Wang et al., 1994). Dans une étude pilote chez le singe utilisant des protéines ostéogéniques purifiées d'origine bovine incorporées à du collagène, une rapide apposition osseuse autour des implants a été observée après 3 semaines (Rutherford et al., 1992c). De plus, dans une étude sur l'élévation de sinus chez le porc, un dépôt calcifié a été observé autour des surfaces des implants après 2-3 semaines du côté traité par des rhOP-1 et après 8-9 semaines chez les témoins et ce par marquage fluorochromique (fig. 7) (Terheyden et al., 1999). Par contre, dans une étude canine comparant les défauts péri-implantaires dans une mandibule traitée avec et sans rhBMP-2, des différences significatives par rapport aux contrôles ont été notées par évaluation radiographique à 12 semaines mais non à 4 semaines (Cochran et al., 1997).
L'utilisation de facteurs de croissance tels PDGF ou IGF n'a jamais été rapportée pour les élévations de sinus et les augmentations de crêtes. Cependant, deux études ont évalué l'effet de rhBMP-2 incorporées dans des éponges de collagène pour des élévations de sinus chez des chèvres (Kirker-Head et al., 1997) et chez l'homme (Boyne et al., 1997) même si les implants n'ont pas été placés dans le premier temps chirurgical. Dans une étude animale comparant les rhOP-1 dans un support collagénique et de l'os bovin inorganique dans le sinus, les implants n'étaient pas mis en place (Margolin et al., 1998).
Le placement d'implants associé à l'administration de protéines ostéo-inductrices semble être avantageux (Terheyden et al., 1999). Un site receveur d'implant contenant des protéines morphogénétiques peut représenter un environnement ostéo-inducteur pour les cellules ostéoprogénitrices. Ces cellules interagissent avec la matrice extracellulaire et les surfaces dans leur environnement (Ripamonti et Reddi, 1994). Ainsi, on peut suggérer, même si cela n'a pas encore été testé que, pour les implants placés secondairement (second temps chirurgical) dans un os régénéré par les BMP, le contact os/implant ne serait pas favorisé. En effet, dans le second temps d'implantation, lors d'une étude utilisant des rhBMP-2 dans du collagène dans une élévation de sinus chez le singe, le contact os/implant était de 41 % et similaire dans les sites augmentés par rhBMP-2, les sites contrôles et dans l'os original adjacent à l'élévation de sinus (Hanish et al., 1997b).
Aucun facteur de croissance n'a été jugé utile pour l'amélioration de la qualité osseuse locale (par exemple de l'os de type IV), même s'ils semblent constituer un terrain de recherche intéressant pour le futur.
Les études cliniques concernant les BMP naturelles et purifiées sont peu nombreuses et préliminaires. Il a été montré que l'ostéo-intégration était favorisée par les BMP naturelles purifiées (Sailer et Kolb, 1994). Dans une étude préliminaire multicentrique utilisant rhBMP-2 pour l'élévation de sinus, des succès contradictoires ont été observés (Boyne et al., 1997). Seul un des 3 patients traités avec une élévation de sinus avec rhOP-1/collagène de type I a présenté une formation osseuse suffisante pour la mise en place de l'implant (Groeneveld, 1999).
Le succès de la régénération tissulaire par les facteurs de croissance et de différenciation dépend du haut degré de purification et de production de ces molécules, ainsi que des systèmes de libération de ces facteurs vers les cellules cibles.
De nombreuses recherches ont été développées afin de trouver le support idéal pour l'application des BMP. Le développement de ces systèmes de libération présente une étape importante pour l'utilisation thérapeutique des facteurs de croissance. Même si une matrice support n'est pas un prérequise pour l'induction de la régénération osseuse par les BMP (Wang et al., 1990), elle présente de nombreux avantages (Reddi et al., 1997) grâce à l'immobilisation de la protéine dans la zone ciblée. La matrice ne sert pas seulement à définir la forme de l'os néoformé, elle permet aussi aux BMP d'être actives à de faibles quantités en assurant leur rétention dans le site jusqu'à ce que leur action inductrice se produise. Un support idéal devrait se lier à la protéine active et la protéger contre toute protéolyse non spécifique. Il devrait être biocompatible, non immunogénique et ne devrait pas interférer avec le processus de cicatrisation (Kenley et al., 1993 ; Miyamoto et al., 1993). Il devrait par ailleurs faciliter une invasion vasculaire rapide (Hollinger et Chaudhari, 1992) afin de permettre le contact entre les cellules progénitrices et la rhBMP liée au support. La matrice collagénique osseuse représente le support naturel des BMP, toutefois l'utilisation de matériaux organiques d'origine xénogène ou d'allogreffes osseuses s'accompagne du risque de transmission de maladie (Lindhe et Cortellini, 1997). De ce fait, l'utilisation de matériaux synthétiques résorbables tels que les polymères ou les céramiques de phosphate de calcium peut présenter un certain avantage. De tels systèmes de libération ont été évalués dans de nombreux modèles animaux (Yamazaki et al., 1988 ; Ripamonti et al., 1992a, 1992b ; Miyamoto et al., 1993 ; Sigurdsson et al., 1995 ; Kinoshita et al., 1997).
Sigurdsson et al. (1996), dans une étude test, ont évalué différentes substances en tant que support de rhBMP-2 dans des défauts supra-osseux chez le chien beagle (entre autres, l'os bovin minéralisé déprotéinisé, des micro-particules de PLGA, des granules de PLA). Les résultats mettaient en évidence des différences nettes dans la qualité et l'importance de l'os et du cément régénérés, en fonction du type de support utilisé. Par ailleurs, aucun des matériaux ne paraissait être le support idéal à tous les points de vue.
Des observations similaires ont été obtenues lorsque différents supports de rhBMP-7/OP-1 ont été étudiés dans le modèle d'augmentation mandibulaire chez le rat. Des différences statistiquement significatives ont été observées entre les supports (entre autres, l'os bovin minéralisé déprotéinisé, le phosphate tricalcique β, les hydroxyapatites pycogéniques), en ce qui concerne la densité osseuse, la hauteur d'augmentation et la qualité osseuse (Jepsen et al., 1997 ; Terheyden et al., 1997). Des différences dans la cinétique de libération de rhOP-1 à partir des différents biomatériaux pourraient expliquer partiellement ces différences observées (Jepsen et al., 1999).
Ces observations indiquent que, dans l'avenir, différents systèmes de libération pourraient être utilisés pour différentes indications chirurgicales. Alors qu'un matériau mou à résorption rapide pourrait être plus adapté au comblement des lésions parodontales, une augmentation horizontale de crête ou une élévation sinusienne feraient davantage appel à l'utilisation d'un matériau plus rigide, à résorption lente et doué d'une plus grande stabilité mécanique.
En plus de la question concernant le matériau de libération idéal, d'autres problèmes restent à résoudre : Quelle est la signification biologique et thérapeutique de l'existence des formes multiples de BMP ? Quelle est la dose thérapeutique optimale ? Les recherches devraient, dans le futur, analyser les différentes doses ainsi que les combinaisons moléculaires afin de développer un profil d'activité pour les différents membres de la famille des BMP. Enfin, le plus important est la nécessité de biopsies humaines ainsi que d'études cliniques contrôlées et randomisées permettant de confirmer les données précliniques obtenues chez des patients présentant des maladies parodontales.
La présence brève des méthodes de libération des facteurs de croissance dans les plaies parodontales correspond à une demi-vie brève de ces facteurs dans le site cible. Une technique utilisant des systèmes de libération à ADN pourrait être une alternative à l'application des protéines dans la plaie. Le but de la thérapeutique génique serait ainsi de libérer les facteurs de croissance en quantité élevée et de façon prolongée (pendant des jours au lieu de quelques heures) au niveau de la plaie. La logique de cette approche est fondée sur les observations selon lesquelles les facteurs de croissance sont exprimés, pendant une période pouvant aller jusqu'à 14 jours, au cours d'une blessure tissulaire comme cela a été démontré pour le PDGF, le FGFb et la BMP (Antoniades et al., 1991 ; Werner et al., 1992 ; Nakase et al., 1994).
La transduction des cellules cibles appropriées doit être obtenue avec succès. La libération efficace des gènes dans les cellules peut être obtenue aussi bien in vitro qu'in vivo. Les thérapeutiques in vivo nécessitent une expansion transgénique à partir d'un spécimen tissulaire. Une thérapeutique génique résultant en une expression plus élevée mais transitoire de gènes a été réalisée in vivo en utilisant l'ADN plasmidique dans une peau en cours de cicatrisation (Slama et al., 1995 ; Andree et al., 1994) et dans des plaies osseuses (Fang et al., 1996). Récemment, des méthodes transductrices des plaies par une technique de microseeding in vivo ont été introduites (Winkler et al., 1995 ; Giannobile et al., 1998). Dans une autre approche, on a récemment décrit que des fibroblastes gingivaux humains, après transduction avec un adénovirus recombiné contenant le gène d'OP-1, produisaient la BMP-7 active résultant ainsi en une formation osseuse in vivo (Hill et al., 1999).
De nombreuses recherches restent à faire pour optimiser l'expression génique, élever au maximum le nombre des cellules opérant la transduction et évaluer si la cicatrisation parodontale et péri-implantaire peut être améliorée par le transfert génique.
Un grand nombre d'études, réalisées il y a plus d'une dizaine d'années, ont démontré la possibilité d'obtenir une régénération tissulaire par des facteurs de croissance polypeptidiques et des protéines morphogénétiques recombinées. Des essais multiples précliniques et réalisés in vitro ont apporté la preuve de la stimulation de la cicatrisation parodontale et de l'intégration implantaire par le PDGF recombiné seul ou en combinaison avec l'IGF-I, ainsi que par des protéines morphogénétiques telles que la BMP-2 et la BMP-7. Quand les essais cliniques réalisés chez l'homme, dont le premier a été publié et les autres sont en cours, vont venir confirmer ces observations et que les thérapeutiques utilisant les facteurs de croissance auront obtenu l'approbation des autorités sanitaires, l'utilisation thérapeutique de ces facteurs biologiques puissants apportera certainement un bénéfice additionnel à nos stratégies régénératrices. De plus, le développement, dans l'avenir, de la thérapie génique pourrait devenir une nouvelle approche dans le traitement par les facteurs de croissance pour l'ingénierie tissulaire en parodontologie et en implantologie orale.
Demande de tirés à part :
Søren JEPSEN, DDS, MD, MS, PhD, Department of Periodontics, Kiel University, Arnold-Heller-Str. 16, 24105 Kiel - GERMANY.