Biologie et pathologie des tissus mous péri-implantaires : aspects fondamentaux - JPIO n° 1 du 01/02/1998
 

Journal de Parodontologie & d'Implantologie Orale n° 1 du 01/02/1998

 

Articles

C.P. Marinello  

Département de prothèse fixée et de prothèse adjointe
Université de Bâle, Suisse

Résumé

Les tissus péri-implantaires ont beaucoup de traits communs avec les tissus parodontaux. Malgré cela, il existe certaines différences évidentes entre les deux types de tissus. Les implants ne présentent pas de cément et donc, par conséquence, aucun système d'attache. Une revue de la littérature montre que les réactions inflammatoires au niveau des tissus mous péri-implantaires, avec ou sans perte osseuse, ont aussi beaucoup de points communs avec la maladie parodontale. L'inflammation des tissus mous péri-implantaires due à la présence de la plaque bactérienne va, en progressant, entraîner une récession des tissus mous et une perte osseuse. Les cliniciens doivent donc développer toutes les mesures préventives pour diminuer la prévalence des agents étiologiques.

Summary

The soft and hard periimplant and periodontal tissues have many features in common., however, may be recognized between the two types of tissue. Implants lack root cementum and have as a consequence no connective tissue attachment. A review of the literature reveals that inflammation reactions in the soft periimplant tissues with and without loss of bone have many features in common with periodontal disease. Plaque induced inflammation in the periimplant mucosa may progress, causing recession of the soft tissue, and signs of bone loss. Clinicians have to enforce preventive measures to decrease the prevalence of the causative agent.

Key words

Implantology, periimplant, soft tissues

Cet article est le résumé de la thèse de Master of Science de l'Université de Göteborg dont le titre original est « Suppression de la péri-implantite expérimentale ».

Introduction

Le remplacement des dents absentes par des racines artificielles fermement ancrées à l'os des maxillaires, aussi bien chez l'édenté partiel que l'édenté complet, a toujours été un désir profond chez tout praticien. C'est l'« ostéointégration » appelée aussi « ankylose fonctionnelle » qui autorise un ancrage ferme et permanent du corps de l'implant dans l'os des maxillaires. Cet ancrage, généralement obtenu par des implants en titane, a été initialement décrit par Brånemark et coll. (1969). Plus tard, ce contact intime os-implant a été exploré par Schroeder et coll. (1976). Albrektsson et coll. (1981) ont précisé les paramètres permettant d'obtenir l'ostéointégration : biocompatibilité du matériau implanté, forme et état de surface de l'implant, conditions requises au niveau du site receveur, technique chirurgicale permettant la mise en place de l'implant, mise en charge pendant la période de cicatrisation. Lorsque l'ostéointégration est obtenue, les taux de succès biologiques et fonctionnels sont très élevés (Adell et coll., 1981 ; Lekholm et coll., 1986a, b).

Les systèmes implantaires en titane permettent d'obtenir une ostéointégration et d'établir des relations saines avec les tissus mous (Adell et coll., 1981). Malgré un taux de succès élevé, des échecs occasionnels dus à des facteurs mécaniques/techniques et/ou biologiques sont observés. Les critères d'échec implantaire ont été proposés par Albrektsson et coll. (1986). Ils comprennent des paramètres comme la mobilité clinique de l'implant, une radioclarté péri-implantaire, une perte osseuse verticale et des symptômes comme la douleur, l'infection, l'atteinte nerveuse …

Un échec implantaire peut survenir tôt (pendant la période de cicatrisation) ou plus tardivement (après une ostéointégration clinique). Les échecs précoces sont associés à des facteurs tels que la qualité/quantité osseuse, une technique chirurgicale inadaptée ou une réponse négative de l'hôte au traitement. Les échecs tardifs sont dus à une infection bactérienne (Berglundh et coll., 1991 ; Ericsson et coll., 1992 ; Lindhe et coll., 1992) ou une surcharge physique/occlusale (Lindquist et coll., 1988 ; Quirynen et coll., 1992 ; Sanz et coll., 1991) ou une combinaison des deux.

Lorsque apparaissent une inflammation des tissus mous péri-implantaire ou une hyperplasie gingivale, un abcès, une fistule ou une perte osseuse (Adell et coll., 1986), deux trajets différents de propagation de la destruction tissulaire ont été identifiés :

- la voie classique (l'infection) : la plaque entraîne une mucosite péri-implantaire qui évolue vers la péri-implantite avec perte osseuse ;

- la voie rétrograde (surcharge occlusale) avec une perte osseuse débutant éventuellement au niveau crestal, ou avec une désintégration complète du contact avec l'os.

Il existe de nombreuses situations où une charge excessive va entraîner un échec implantaire : 1) l'implant peut être mis dans un site osseux de mauvaise qualité/quantité ; 2) la position et le nombre d'implants peuvent être inadaptés ; 3) la longueur de l'implant peut être incorrecte ; 4) le patient peut présenter des parafonctions excessives ; 5) l'adaptation de la suprastructure peut être compromise et/ou les caractéristiques biomécaniques insuffisantes (Brånemark, 1985). Lindquist et coll. (1988) ont constaté une corrélation entre la surcharge et la perte osseuse marginale. Il y avait plus de perte osseuse autour d'implants (fixtures de Brånemark) avec de longues extensions en comparaison avec des extensions plus courtes. Sanz et coll. (1991) ont montré que les échecs implantaires dus à des surcharges occlusales ne présentaient pas de signes d'inflammation au niveau histologique. Quirynen et coll. (1992) en ont conclu qu'une augmentation de la perte osseuse marginale pouvait être associée à une surcharge occlusale. Par contre, Wehrbein et Diedrich (1993) ont rapporté, sur des implants utilisés comme ancrage orthodontique, qu'il n'y avait : 1) aucun signe clinique ou histologique de déplacement de l'implant ; et 2) pas d'augmentation de l'incidence de l'alvéolyse marginale. La force appliquée (physiologique) a même un effet positif sur la structure de l'os péri-implantaire.

Biologie des tissus parodontaux et péri-implantaires

Les tissus parodontaux

Les tissus parodontaux comprennent la gencive, le ligament parodontal, l'os alvéolaire et le cément. Leur fonction essentielle est d'assurer la fixation des dents dans les mâchoires et de constituer une liaison étanche entre l'environnement de la cavité buccale et le parodonte (Listgarten et coll., 1991).

La couche la plus superficielle de la gencive est constituée d'un épithélium kératinisé, stratifié et squameux qui se prolonge par l'épithélium sulculaire et l'épithélium de jonction. La gencive libre/interdentaire a un rôle de barrière et protège le parodonte proprement dit (cément avec ses fibres, ligament parodontal et os alvéolaire) des agressions du milieu externe (Lindhe et Karring, 1989). Les mécanismes de protection comprennent des composants structuraux comme : 1) l'épithélium de jonction et ses différents constituants ; 2) le complexe vasculaire ; 3) les fibres collagènes ; et 4) d'autres éléments du tissu conjonctif et les réactions inflammatoires vasculaires et/ou cellulaires présentes dans les infiltrats sous- ou intra-épithéliaux. Les fibres de collagène (dento-gingivales, dento-périostées, transseptales) sont soit fixées à la surface radiculaire selon une direction perpendiculaire, soit entourent les dents (fibres circulaires) sans liaison à la dent (Lindhe, 1989 ; Lisgarten et coll., 1991).

La liaison entre l'épithélium et l'émail, ou la dentine, ou le cément est assurée par des hémidesmosomes et une lame basale (Lisgarten, 1972). Le joint est augmenté par la présence des fibres de collagène circulaires. Lorsque le joint est rompu et/ou si les fibres apicales à l'épithélium sont lysées ou détruites, une plaie peut être créée, l'épithélium de jonction peut migrer en direction apicale et la perte d'attache peut survenir.

Le ligament parodontal est un tissu fibreux, collagénique, non minéralisé et cellulaire qui permet la connexion dent-os de la mâchoire. L'attache est assurée sur la face dentaire par le cément et, sur la face osseuse, par un os très fin, l'os alvéolaire proprement dit. Le ligament est bien vascularisé avec des vaisseaux sanguins et lymphatiques qui suivent un trajet apico-coronaire (Lindhe, 1989) (fig. 1).

Tissus péri-implantaires

Contrairement aux dents qui se sont développées en même temps que les tissus parodontaux et qui présentent des liaisons structurelles avec ses tissus, les implants endo-osseux sont des racines artificielles de substitution.

Dans une étude réalisée sur le chien Briquet et avec un contrôle de plaque rigoureux, Berglundh et coll. (1991) ont montré que la muqueuse autour des piliers prothétiques sur des implants de type Brånemark présente beaucoup de caractéristiques communes avec le tissu gingival. Ainsi, comme la gencive, la muqueuse péri-implantaire présente une barrière analogue à un manchon (joint) qui semble, d'un point de vue clinique : 1) adhérer à la surface du pilier en titane et 2) ne pas présenter de saignement au sondage léger. Un examen microscopique des tissus mous péri-implantaires montre la présence d'un épithélium kératinisé se prolongeant par un épithélium de jonction qui : 1) fait face à la surface de titane ; 2) a la même longueur (2 mm) que l'épithélium de jonction autour des dents et 3) s'arrête à 1-1,5 mm coronairement à la crête osseuse.

Des faisceaux de fibres de collagène provenant du périoste péri-implantaire sont orientés parallèlement à la surface du pilier.

Dans une étude histologique sur le chien Briquet, Buser et coll. (1992) ont montré que les structures épithéliales autour d'implants non enfouis (du type ITI®) et non mis en charge montraient un sulcus péri-implantaire avec un épithélium sulculaire non kératinisé et un épithélium de jonction. La région supracrestale montrait un contact direct entre le tissu conjonctif et l'implant. Une zone d'environ 50-100 µm de large, non vascularisée et ressemblant à un tissu cicatriciel, était observée contre la surface de l'implant.

D'un point de vue biologique, le passage transmuqueux est très exigeant. En effet, pour permettre la survie de l'implant dans cet environnement, il faut un épithélium de jonction qui empêche la pénétration bactérienne ou chimique (Goud et coll., 1981). Comme dans la denture naturelle, l'épithélium de jonction est lié à la surface implantaire par une lame basale et des hémidesmosomes (Carmichael et coll., 1990).

Une zone de tissu conjonctif supracrestal est présente entre l'os alvéolaire et l'épithélium de jonction au niveau d'implants en titane posés chez l'homme (Brånemark et coll., 1977) et chez le chien (Berglundh et coll., 1991 ; Buser et coll., 1992). La muqueuse autour des implants enfouis ou non enfouis montre une zone supracrestale où le tissu conjonctif présente un contact direct avec l'implant (Berglundh et coll., 1991 ; Buser et coll., 1992 ; Schroeder et coll., 1981). En raison de l'absence de cément, les fibres de collagène sont parallèles à la surface de l'implant (Berglundh et coll., 1991) ou circulaires sans liaison avec l'implant (fig. 2).

Descriptions cliniques

Morphologie des tissus mous marginaux

Les caractéristiques morphologiques du parodonte en général et de la gencive en particulier sont, en partie, en rapport avec la taille et la forme des dents (Lindhe, 1989). Des études empiriques suggèrent que la position de la gencive marginale est influencée par la convexité cervicale de la couronne et que l'os alvéolaire et la gencive autour d'une dent avec une courbure mésiodistale importante et/ou une convexité cervicale marquée sont situés plus apicalement que sur une dent aux surfaces plates.

Les implants, qui sont un substitut dentaire symétrique, traversent, au niveau de la crête édentée, soit la gencive kératinisée, soit la muqueuse alvéolaire. De plus, ces deux types de muqueuse peuvent être présents autour d'un même implant. Le rebord marginal des tissus mous ne présente souvent pas de forme en biseau, et ce pour deux raisons. D'une part, le guide que constitue la jonction amélo-cémentaire est absent, ainsi que le cément et des fibres de collagènes qui s'y insèrent. D'autre part, cela dépend aussi de la position (vestibulo-linguale) et de l'épaisseur des tissus muco-périostés (tableau I).

Anatomie vasculaire

Berglundh et coll. (1994) ont montré, sur des dents naturelles, que la vascularisation de la gencive et du tissu conjonctif supracrestal provenait de deux sources : 1) les vaisseaux supra-périostés latéraux au procès alvéolaire ; 2) les vaisseaux du ligament parodontal. Les vaisseaux sanguins de la muqueuse péri-implantaire sont des branches terminales des vaisseaux périostés environnants. Dans les deux cas, dentaires ou péri-implantaires, les vaisseaux adjacents à la jonction épithéliale forment un « plexus créviculaire » caractéristique. Mais une différence nette a été observée. Si le tissu conjonctif supracrestal adjacent au cément est richement vascularisé, la zone correspondante péri-implantaire montre, la plupart du temps, une absence de vascularisation.

Sondage au niveau des dents et des implants

Autour des dents, la profondeur au sondage est le reflet de la résistance des tissus parodontaux à la force exercée sur la sonde. L'augmentation de la profondeur au sondage et la perte d'attache sont des signes pathognomoniques de la parodontite. Le sondage constitue donc une étape importante dans le diagnostic d'une lésion parodontale et dans l'évaluation des effets de la thérapeutique parodontale (Lindhe, 1989).

Ericsson et Lindhe (1993) ont comparé la résistance opposée au sondage par la muqueuse péri-implantaire et par la gencive. Ils ont constaté que la résistance de la gencive était plus importante que celle de la muqueuse péri-implantaire et, par conséquence, la pénétration de la sonde était plus importante autour des implants. La sonde semblait apparemment décoller les tissus mous de la surface du pilier implantaire au moment de l'évaluation de la profondeur de sondage. Au niveau des sites dentaires, lorsque la gencive était saine, l'extrémité de la sonde s'arrêtait à proximité des cellules apicales de l'épithélium de jonction. Il est important de noter que les mesures de profondeur au sondage ne provoquaient pas de saignement sur une gencive cliniquement saine alors qu'un saignement était, la plupart du temps, observé lors du sondage au niveau des sites implantaires sains. La controverse sur la valeur de la profondeur au sondage et l'évaluation du niveau d'attache autour des implants est encore d'actualité.

Pathologie des tissus mous parodontaux et péri-implantaires

Quelques études épidémiologiques ont montré une relation évidente entre la présence de la plaque dentaire et la maladie parodontale chez l'homme (Löe et coll., 1965) et chez l'animal (Lindhe et Rylander, 1975) et des études expérimentales (Lindhe et coll., 1975) ont montré une relation de cause à effet. Au niveau implantaire, les conséquences de l'accumulation de plaque ont été observées chez l'homme (Mombelli et coll., 1987 ; Quirynen et Listgarten, 1990) et sur l'animal (Berglundh et coll., 1992, Ericsson et coll., 1992).

Apse et coll. (1991) ont constaté que la plaque adhérait moins sur le titane que sur une surface dentaire lisse. Malgré cela, Ericsson et coll. (1992) n'ont pas trouvé, chez le chien Briquet, de différences au niveau de la quantité de plaque accumulée sur le titane ou la surface dentaire. Toutes les surfaces dentaires ou implantaires montraient de la plaque sous-gingivale.

Microbiologie et succès ou échec implantaire

La composition de la plaque sous-gingivale au niveau des sites implantaires sains est similaire à celle des dents naturelles (Leonhardt et coll., 1992 ; Mombelli et coll., 1987 ; Quirynen et Lisgarten, 1990). Dans une étude microbiologique, Lekholm et coll. (1986a, b) montraient des similitudes dans la distribution des morphotypes bactériens de la plaque supra- et sous-gingivale. La flore montrait une prédominance de bâtonnets non mobiles alors que les spirochètes étaient soit absents soit présents en faible proportion.

Mombelli et coll. (1988) ont montré chez des patients totalement édentés que, peu de temps après la pose des implants, la flore observée autour des implants est équivalente à celle présente sur les crêtes édentées. Apse et coll. (1989) ont trouvé peu de différences entre la flore autour des implants et celle des dents de patients partiellement édentés. Malgré tout, une diminution très marquée du nombre des pathogènes parodontaux était observée autour des implants chez les patients totalement édentés.

Mombelli et coll. (1987) et Quirynen et Listgarten (1990) ont montré des similitudes entre les plaques associées aux lésions parodontales avancées et celles observées autour des échecs implantaires.

Ces sites en échec implantaire étaient caractérisés par la présence d'une flore complexe composée essentiellement de bâtonnets anaérobies Gram -. Becker et coll. (1990), utilisant des sondes ADN pour évaluer la flore de 36 implants en situation d'échec chez 13 patients, ont constaté que ces implants étaient mobiles, présentaient à la radiographie des images radioclaires, des profondeurs au sondage supérieures à 6 mm, et montraient la présence de taux modérés de A. actinomycetemcomitans, P. intermedia et P. gingivalis.

Il est donc suggéré que la colonisation bactérienne des surfaces implantaires et la pathogénie de la mucosite et de la péri-implantite expérimentale suivent des voies identiques à celles observées autour des dents (Mombelli et coll., 1987).

Parodontite versus péri-implantite

La parodontite est une maladie inflammatoire des tissus parodontaux qui entraîne une perte des tissus de soutien de la dent atteinte. Les modifications inflammatoires coïncident avec la migration apicale de l'épithélium de jonction à partir de la jonction amélo-cémentaire, que l'infiltrat inflammatoire soit au niveau ou apical à cette jonction. La perte de l'os alvéolaire marginale est évolutive.

Jusqu'à récemment, il n'y avait pas de consensus sur la terminologie des pathologies péri-implantaires. Lors du European Workshop on Periodontology (1993), les définitions suivantes ont été proposées. On groupe sous le vocable de maladies péri-implantaires les réactions inflammatoires des tissus environnant l'implant. La mucosite décrit les réactions inflammatoires réversibles des tissus mous environnant un implant fonctionnel. On parle de péri-implantite lorsqu'il y a réaction inflammatoire et perte du support osseux autour d'un implant fonctionnel.

Puisque la composition de la plaque est identique au niveau des sites dentaires (sains et pathologiques) et implantaires (sains et pathologiques), la plaque bactérienne semble être le facteur étiologique principal dans l'apparition de la péri-implantite (Leonhardt et coll., 1992 ; Mombelli et coll., 1987 ; Quirynen et Listgarten, 1990). Selon Mombelli et Lang (1992), cette hypothèse est confortée par : 1) les résultats des études expérimentales sur l'animal (Ericsson et coll., 1992 ; Leonhardt et coll., 1992 ; Lindhe et coll., 1992) ; 2) les études cliniques montrant une perte osseuse plus importante chez les patients présentant une hygiène déficiente (Brånemark et coll., 1969 ; Lindquist et coll., 1988) ; 3) la présence d'une relation entre la microbiologie et l'histopathologie chez l'homme (Adell et coll., 1981 ; Lekholm et coll., 1986a, b) et 4) une réduction des signes cliniques de l'inflammation des tissus mous péri-implantaires après traitement anti-bactérien au niveau de sites présentant des signes de mucosite ou de péri-implantite.

Les réactions inflammatoires des tissus mous péri-implantaires ont été décrites chez l'homme (Adell et coll., 1981 ; Lekholm et coll., 1986a) et chez l'animal (Berglundh et coll., 1992 ; Ericsson et coll., 1992 ; Schou et coll., 1993a, 1993b). Berglundh et coll. (1992) ont montré, dans une étude comparant les dents et les implants, que l'accumulation de novo de la plaque bactérienne permettait le développement d'une lésion inflammatoire aussi bien dans la muqueuse péri-implantaire que dans la gencive (fig. 3). Dans les deux types de tissus, l'infiltrat inflammatoire progressait en direction apicale en même temps que la plaque sous-gingivale. Dans les deux situations, le volume et la composition des lésions avaient de nombreux de traits communs : 1) entre J0 et J21, l'augmentation du nombre de polymorphornucléaires neutrophiles intra-créviculaires était équivalente ; 2) l'extension apicale du tissu conjonctif inflammatoire était la même pour les deux tissus ; et 3) les volumes occupés par les cellules inflammatoires des deux tissus conjonctifs étaient aussi comparables. Les auteurs ont conclu que les dents et les implants retiennent les mêmes quantités de plaque.

En exposant les dents et les implants à l'accumulation de la plaque, Ericsson et coll. (1992) ont constaté que les deux tissus contenaient un infiltrat inflammatoire et que son extension était significativement plus importante autour des implants. Cela signifie que la réponse de la muqueuse péri-implantaire semble moins performante que celle de la gencive dans la prévention de la migration apicale de la flore sous-gingivale.

L'atteinte expérimentale des tissus péri-implantaires a aussi été étudiée (Lindhe et coll., 1992 ; Lang et coll., 1993 ; Schou et coll., 1993a, 1993b). Lindhe et coll. (1992) ont constaté que les signes cliniques et radiographiques de la destruction tissulaire étaient significativement plus prononcés autour des implants. L'histologie révélait la présence d'un infiltrat conjonctif plus important au niveau des tissus mous péri-implantaires. La plaque sous-gingivale était présente entre la surface implantaire et l'épithélium de poche qui montrait des signes d'ulcération. Le volume de l'infiltrat inflammatoire conjonctif était significativement plus important autour des implants. De plus, l'infiltrat inflammatoire était situé à 1,1 mm au-dessus de la crête osseuse autour des dents présentant une parodontite expérimentale alors qu'il s'étendait jusque dans l'os péri-implantaire (fig. 4).

Deux autres études ont étudié la progression de l'inflammation autour des implants chez l'animal. Lang et coll. (1993) ont placé, chez le singe, deux implants ITI® sur chaque hémimandibule partiellement édentée. Après une période de cicatrisation de 2 mois (sous contrôle de plaque), l'accumulation de plaque était autorisée. Après une seconde période de 1 mois, des ligatures étaient posées autour d'un des deux implants. Les troisièmes molaires servaient de témoins et étaient, elles aussi, ligaturées. Autour des implants, l'accumulation de plaque entraînait le développement d'une réaction des tissus mous présentant toutes les caractéristiques de la gingivite. Lorsque l'accumulation de plaque était favorisée par la présence de la ligature, on observait une lésion localisée, caractérisée par une désintégration tissulaire marginale s'étendant en direction apicale. Ces lésions évoluaient vers la formation d'une poche péri-implantaire avec perte d'attache et alvéolyse s'apparentant à la parodontite.

Dans une autre étude sur la destruction des tissus de soutien, la signification de l'absence de ligament parodontal autour des implants a été évaluée (Schou et coll., 1993a, 1993b). Lorsque l'ankylose dentaire et l'ostéointégration étaient obtenues, une inflammation marginale était provoquée. Les signes cliniques associés à l'indice de plaque, à l'indice gingival, à la profondeur de poche au sondage et à la perte d'attache étaient les mêmes autour des dents et des implants. Malgré tout, une perte significative d'os était observée autour des implants et des dents ankylosées. Aucune perte osseuse n'était constatée autour des dents présentant un ligament parodontal fonctionnel. Le tissu conjonctif autour des implants présentant une ligature montrait une augmentation significative des lymphocytes, des plasmocytes et des neutrophiles par rapport aux implants sans ligature et aux dents. Le nombre total des lymphocytes autour des implants ligaturés était significativement plus élevé que celui observé autour des dents ankylosées ligaturées et des dents témoins. Il n'y avait pas de différence statistiquement significative pour le nombre total de plasmocytes et de neutrophiles dans le groupe ligaturés. Les ostéoclastes étaient seulement présents autour des implants ligaturés et des dents ankylosées. De plus, la perte osseuse était significiativement plus importante autour des implants qu'autour des dents ankylosées.

Conclusion

Les tissus péri-implantaires et parodontaux, durs et mous, présentent de nombreuses similitudes. Tous les deux forment, tel un manchon, une barrière dans la cavité buccale avec un épithélium de jonction de longueur équivalente et répondent à l'accumulation de plaque par la formation d'un infiltrat conjonctif inflammatoire. Pourtant, il faut reconnaître des différences entre ces deux tissus. Les implants ne présentent pas de cément et donc pas de système d'attache conjonctive. Au contraire, les fibres sont fixées à l'os crestal et courent parallèlement à la surface implantaire. En outre, il y a moins de vaisseaux dans le tissu conjonctif supracrestal péri-implantaire et la réponse à l'accumulation de plaque est plus marquée autour des implants.

Une revue de la littérature montre que les réactions inflammatoires des tissus mous péri-implantaires, avec ou sans perte osseuse, ont aussi des points communs avec celles des maladies parodontales. L'inflammation, induite par la plaque au niveau de la muqueuse péri-implantaire, va progresser, entraînant une récession des tissu mous et des signes d'ostéolyse. Les cliniciens doivent mettre au point des mesures préventives pour diminuer la prévalence des agents étiologiques.

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