Bridges en composite fibré - Clinic n° 4 du 01/04/1999
 

Clinic n° 4 du 01/04/1999

 

PRATIQUE QUOTIDIENNE

PROTHÈSE FIXÉE

MARTIN A. FREILICH *   JACQUELINE P. DUNCAN **   JONATHAN C. MEIERS ***   A. JON GOLDBERG ****  


*Associate Professor, Department of Prosthodontic,
**Department of Prosthodontics,
***Department of Restorative Dentistry and Endodontology,
****Department of Prosthodontics and Center for Biomaterials, University of Connecticut, School of Dental Medicine, 263 Farmington Avenue, Farmington, Connecticut 06030-1615, USA.

Dans cette première partie, les auteurs décrivent l'utilisation d'un composite fibré comme matériau d'infrastructure pour bridges et attelles. Sont successivement abordés : la composition chimique et la structure physique du composite fibré, les progrès et le développement d'autres matériaux composites fibrés, les critères de sélection des cas, la préparation des dents, les protocoles cliniques et de laboratoire pour bridges à recouvrement partiel et total et leur mise en place. Ce nouveau composite renforcé par des fibres permet la fabrication de prothèses sans céramique ni métal dont la durabilité à long terme est très importante et les résultats esthétiques excellents.

L es composites dentaires traditionnels de restaurations sont faits de particules de quartz ou de verre dans une matrice résineuse. Ces composites chargés sont en général utilisés pour traiter les lésions d'une dent unitaire ou comme matériau de recouvrement d'une dent ou sur une prothèse, mais ils sont rarement utilisés seuls pour réaliser des couronnes ou des bridges définitifs.

Cet article décrit une nouvelle technologie qui permet la fabrication d'infrastructures de bridges à partir de faisceaux longs de fibres de verre pré-imprégnées d'une matrice résineuse. Cette infrastructure en composite renforcé par des fibres remplace la classique armature métallique d'un bridge céramo-métallique, tandis que le composite qui la recouvre correspond à la céramique. L'infrastructure fibrée assure solidité et rigidité sous la couche externe de composite. Cette prothèse à double structure de polymères combine les meilleures caractéristiques d'un composite renforcé par les fibres (résistance et rigidité) à celles du composite chargé de particules susjacent (résistance à l'usure et esthétique) et fournit une alternative aux prothèses tout-céramique ou céramo-métalliques.

Les composites renforcés par des fibres décrits dans cet article sont différents de la plupart des autres matériaux fibrés disponibles sur le marché. Ces derniers sont composés de fibres tissées de verre ou de polyéthylène qui sont imprégnées manuellement d'un composite ou d'une résine non chargée par le chirurgien-dentiste ou le prothésiste dentaire. Au contraire, les fibres et la matrice résineuse de ce nouveau composite fibré sont liées au cours du processus de fabrication. De ce fait, les fibres sont uniformément imprégnées de matrice [1]. Une coupe à fort grossissement du composite à longues fibres lié au composite chargé est montrée sur la figure 1 . Des tests de charge en trois points montrent que le composite fibré renforcé par des fibres unidirectionnelles et pré-imprégnées de résine présente une résistance à la charge égale à 2 à 3 fois celle de n'importe quel composite renforcé de fibres tissées imprégnées manuellement et présente un module de flexion jusqu'à 10 fois supérieur [2]. Les propriétés mécaniques des premiers composites renforcés par des fibres pré-imprégnées de résine ont été largement testées [3-5]. L'un d'entre eux est un matériau thermoplastique composé de fibres de verre S2 et d'une matrice polycarbonate [6] qui a été utilisé pour faire des prothèses [7], des attelles et des moyens d'ancrage [8] collés en clinique (fig. 2a et 2b). Le suivi clinique depuis des années n'a pas permis d'observer d'échecs catastrophiques de ces prothèses et des dispositifs divers en polycarbonate renforcé par des fibres pré-imprégnées. Mais, à côté d'une grande solidité et d'excellentes propriétés mécaniques, le polycarbonate thermoformé renforcé par des fibres présente des inconvénients : une manipulation difficile, un aspect opaque et une faible capacité de collage à l'émail ou à d'autres matériaux résines composites.

La nouvelle formule du composite fibré décrit ici, thermo et photopolymérisable, est due aux fibres de verre S2 imprégnées d'une matrice bis-GMA. Ses excellentes propriétés physiques sont identiques à celles des premiers composites en polycarbonates thermoformés renforcés, mais sa manipulation est moins difficile. Les tests mécaniques de ce nouveau matériau ont montré que sa résistance était jusqu'à sept fois celle d'un composite à charges minérales. Il est également plus rigide [9-11].

Enfin, il présente également de meilleures propriétés optiques et n'est pas opaque. Par conséquent, il ne nécessite pas d'être recouvert d'une couche de matériau qui le dissimule aux regards. La couche susjacente de composite peut assurer le rendu esthétique tout en étant relativement fine (environ 0,5 mm).

Les progrès dans le domaine des résines composites ont amélioré et complété la technologie des composites fibrés. Parmi ces nouveaux matériaux améliorés, se trouvent le Sculpture (Jeneric/Pentron), l'Artglass (Heraeus Kulzer), le Poly(mer)glass (Heraeus Kulzer), le Targis (Ivoclar), le Ceromer (Ivoclar) et le belleGlass HP (Belle de St Clair, Kerr). Ces produits sont des nouveaux polymères, avec une répartition plus uniforme des particules de charges, une plus grande résistance aux contraintes et une polymérisation sous une lumière intense, sous vide et à la chaleur. Tous ces facteurs ont amélioré leur résistance à l'abrasion et leur élasticité, qui, à leur tour, ont provoqué une meilleure résistance au choc et à la fracture [12-15]. Cette nouvelle génération de matériaux composites, utilisés pour recouvrir l'infrastructure fibrée, permet la fabrication d'éléments prothétiques à la forme et au contour anatomiques, sans métal ni céramique, et dont la pérennité à long terme est sûre.

Moyens d'ancrage à recouvrement périphérique

Sélection du cas

Il y a plusieurs indications aux prothèses en polymères renforcés par des fibres :

- un résultat esthétique optimal ;

- une prothèse sans métal ni céramique (très important pour les patients allergiques au métal) ;

- une fabrication simple au laboratoire (par rapport aux prothèses céramo-métalliques) ;

- moins d'abrasion des dents antagonistes (que la céramique) ;

- des moyens d'ancrage collés sur les dents supports.

Ces matériaux peuvent être utilisés dans tous les secteurs d'arcades où les critères esthétiques sont exigeants. L'absence de métal et de matériaux opaques permet une bonne translucidité et donne à la prothèse un aspect très naturel.

Cet aspect naturel aux niveaux des collets des moyens d'ancrage du bridge supprime toute obligation pour le chirugien-dentiste d'enfouir les limites cervicales sous la gencive, là où elles peuvent provoquer des problèmes parodontaux. Les bords supra-gingivaux de ces prothèses en polymères s'intègrent facilement aux surfaces dentaires non préparées en situation apicale par rapport à la ligne de finition de la préparation, tout comme la prothèse dans son ensemble s'intègre aux dents naturelles adjacentes.

L'utilisation de matériaux de collage résine composite qui collent à l'intrados des moyens d'ancrage en polymères et à la dentine et à l'émail des préparations des dents supports assure une meilleure rétention à la prothèse. Ce mode de fixation des prothèses en polymères aux dents piliers est sûr, même si les préparations ne répondent pas exactement aux critères classiques de macro-rétention géométrique. Les contre-indications des prothèses en composites fibrés sont :

- l'impossibilité d'assurer un contrôle efficace des fluides, comme chez les patients présentant de l'inflammation gingivale chronique ou aiguë ou lorsque les bords sont profondément sous-gingivaux ;

- les bridges longue portée, avec deux intermédiaires ou plus ;

- les patients parafonctionnels ;

- la présence de céramique non glacée ou de prothèse adjointe partielle face aux bridges en composites fibrés ;

- les patients gros consommateurs d'alcool. Les critères de sélection des cas sont résumés dans le tableau 1 .

Les techniques de scellement-collage ne peuvent s'envisager que si l'opérateur peut maintenir le champ opératoire non contaminé. L'isolation avec la digue en caoutchouc est idéal et doit être utilisé chaque fois que possible. Les bridges remplaçant plus d'une dent ne sont pas recommandés actuellement car la documentation manque sur la capacité du matériau à supporter de grandes travées de bridge. Une usure plus importante ou une fracture plus fréquente sont à craindre chez les patients bruxomanes ou qui claquent des dents et la dégradation du composite vraisemblable chez les alcooliques. Aucun résultat clinique n'établit quel serait le comportement des bridges en composites fibrés placés dans ces différents contextes ; ils ne doivent donc pas être indiqués dans de telles conditions.

Protocoles clinique et de laboratoire

Préparations des dents

Les préparations des dents, pour recevoir une prothèse en polymères renforcés, doivent ménager l'espace adéquat pour l'infrastructure fibrée et le composite susjacent. Les éléments de ces préparations sont :

- une réduction adéquate des dents supports;

- la qualité des limites cervicales ;

- des épaulements proximaux sur les faces adjacentes à l'espace édenté ;

- un épaulement lingual sur les dents supports antérieures.

Un congé avec une dépouille a minima et une ligne de finition régulière continue (avec des angles cavo-superficiels de 90 à 120 degrés) sont recommandés. Une réduction axiale de 1,2 à 1,5 mm sur les faces vestibulaires et linguales et une réduction occlusale au minimum de 1,5 mm sont nécessaires pour ménager une épaisseur de matériau adéquate. Ce sont actuellement les critères de préparations préconisés. Aucun résultat clinique, ni aucune étude in vitro n'indiquent quel est le meilleur type de finition : épaulement ou congé.

Les éléments secondaires de ces préparations sont un épaulement proximal et un isthme occlusal. Les boîtes proximales doivent être d'une largeur de 2 à 3 mm et leur profondeur ne doit pas dépasser 1 mm. Elles sont préparées sur les faces des dents supports adjacentes à l'espace édenté dans leur moitié coronaire. L'isthme occlusal est une tranchée superficielle (0,5 mm de profondeur et 2 à 3 mm de large). Ces éléments créent un espace supplémentaire pour l'infrastructure en composite fibré. La boîte proximale laisse suffisamment d'espace au matériau aux niveaux des connexions et permet au prothésiste de disposer d'un repère net pour placer l'infrastructure de l'intermédiaire. L'isthme occlusal donne une configuration de poutre en I au composite fibré sur chaque pilier et en travers de l'espace édenté.

Une préparation idéale à recouvrement total sur une dent postérieure est montrée sur la figure 3 . Les préparations des dents antérieures doivent comporter une marche ou un épaulement double sur la face linguale de façon à ce que le prothésiste de laboratoire n'ait pas à réaliser une face linguale axiale en surcontour (fig. 4).

Modèles de travail et modèles positifs unitaires

L'empreinte, les modèles positifs unitaires et les modèles de travail sont réalisés de manière conventionnelle. Une seconde coulée est faite de façon à ce que les modèles positifs unitaires des dents piliers soient sur un seul modèle qui permettra la finition de l'infrastructure en composite fibré. La première coulée de l'empreinte est coupée en modèles positifs unitaires sur lesquels le prothésiste a un accès facile aux limites. Une fine couche de matériau espaceur est déposée sur les modèles positifs unitaires jusqu'à 1 mm en-deçà de la ligne de finition. Une autre couche de matériau séparateur, mais non espaceur, est déposée sur les autres surfaces des modèles positifs unitaires.

Fabrication de la prothèse

Il est important que le chirurgien-dentiste connaisse parfaitement les formes de contour des bridges en composite fibré pour contrôler les critères des préparations et évaluer avec discernement les infrastructures et les prothèses fibrées faites par le laboratoire de prothèse. La fabrication d'une prothèse en composite fibré comporte quatre étapes :

1 la fabrication de la chape ;

2 la mise en place de la poutre support de l'intermédiaire ;

3 l'élaboration de l'armature de composite fibré ceinturant l'infrastructure ;

4 le montage du composite à charges minérales susjacent.

Une fine chape de composite dentine opaque (Sculpture, Jeneric Pentron) est montée sur les modèles positifs unitaires (fig. 5a). Cette chape présente, sur ses faces axiales, un collier cervical qui évite au composite fibré de glisser au-delà lors de sa mise en place. Une encoche est également creusée sur chaque chape au milieu des faces proximales adjacentes à l'espace édenté (fig. 5b). Cette encoche correspond à la marche proximale tracée dans la préparation et stabilisera le composite fibré lorsqu'il sera placé pour réunir les deux chapes. Les chapes terminées sont retirées des modèles positifs unitaires et placées sur le modèle monolithique issu de la deuxième coulée de l'empreinte.

Le composite fibré (FibreKor, Jeneric Pentron) est fourni par le fabricant en longues bandes de 3 ou 6 mm de large et épaisses de 0,3 mm, qui peuvent être coupées à la longueur désirée avec des ciseaux en céramique. La poutre en composite fibré est réalisée en superposant cinq à sept bandes de 6 mm de large et de la longueur correspondant à la distance inter-piliers. Une petite quantité de Spécial Resin, un gel de bis-GMA fourni par le fabricant, est placée dans les encoches des chapes pour renforcer le collage entre la couche inhibée par l'oxygène de la chape et le composite fibré non polymérisé. La poutre est alors placée et collée dans les encoches des chapes en composite par photopolymérisation (fig. 5c). La poutre doit être laissée suffisamment distante de la dent antagoniste pour assurer une épaisseur adéquate de composite et une forme correcte des embrasures gingivales.

Une longue et unique bande de composite fibré de 3 mm de large est alors collée à une extrémité de l'infrastructure de l'intermédiaire déjà polymérisée (fig. 5d), plaquée et photo-polymérisée le long de la poutre et autour des faces axiales des chapes. Il est procédé par étapes, segment par segment : chaque segment du composite fibré est successivement placé dans la position désirée, puis photopolymérisé et collé. La première portion de l'infrastructure est terminée lorsque la bande est totalement collée aux chapes.

Des bandes supplémentaires de composite fibré sont coupées à la taille, placées et collées sur les faces vestibulaire, linguale et cervicale de l'infrastructure de la poutre de composite fibré. Une bande occlusale continue de matériau fibré est collée sur la face occlusale d'une chape, sur la face occlusale du support de l'intermédiaire et sur la face occlusale de la deuxième chape. Ce montage par étapes de l'infrastructure en composite fibré aboutit à une maquette miniature de l'intermédiaire composée de couches collées et photopolymérisées de composite fibré, dont certaines sont dans la continuité du matériau qui a été collé sur et autour des chapes des moyens d'ancrage.

Une caractéristique importante de l'infrastructure d'un bridge en polymère fibré est qu'elle est monolithique. Bien que montée en couches, en commençant avec le composite dentine opaque, toutes les couches conservent leur surface externe inhibée par l'oxygène avant la mise en place de la couche suivante de composite. Les couches ne sont plus modifiées une fois polymérisées : l'intégrité des couches inhibées par l'oxygène est conservée et leur contamination lors des meulages par la poussière, le gras ou les débris est évitée. Cela assure une prothèse de structure uniforme sans démarcations entre les couches et sans zones de faiblesses potentielles ou surfaces de séparation au sein des fibres. Si tel n'était pas le cas, l'infrastructure pourrait présenter un potentiel de fracture sous des charges inférieures à celles que chacun des matériaux constituants peut supporter. Les longues fibres du support de l'intermédiaire sont les mêmes que celles qui cerclent les faces axiales ou couvrent les faces occlusales des moyens d'ancrage. L'infrastructure terminée est illustrée sur les figures 5e et 5f .

L'infrastructure en composite fibré comporte une couche inhibée par l'oxygène sur sa face externe qui permet le collage du composite susjacent (Sculpture). Cette couche externe de composite est montée par stratification, avec mise en place de teintes au collet, recouvertes de translucides et possibilité de personnalisation lorsqu'elle est indiquée. Un bridge de trois éléments terminé est montré sur les figures 5g et 5h . Après la photopolymérisation finale, la mise en forme, la finition et le polissage, le bridge est placé dans un four à 110 °C où il subit une thermo-polymérisation sous vide (- 980 m/bar) pendant 15 minutes afin d'améliorer la solidité et les autres propriétés physiques.

La figure 5i montre les instruments (fraise fine en carbure de tungstène, kit à finir les composites Diacomp, disque flexible diamanté, de la pâte à polir diamantée, Komet) utilisés pour mettre en forme, finir et polir le bridge en composite fibré au laboratoire de prothèse.

Scellement du bridge

Comme avant toute pose d'un bridge, le chirurgien-dentiste doit vérifier les contacts proximaux, l'occlusion, l'anatomie, la teinte et faire les réglages qu'il estime nécessaires. Les contacts proximaux peuvent être « gonflés » en ajoutant un composite hybride pour restaurations après que la surface ait été rendue rugueuse et de la résine non chargée placée sur le composite fibré. La teinte finale du bridge peut être essayée avec une pâte à l'eau de la teinte du futur composite de collage. Des retouches mineures peuvent être réalisées en choisissant des résines de collage plus foncées ou plus claires. La translucidité du bridge en composite fibré permet au composite de collage de jouer un rôle dans la teinte finale.

Coller le bridge en composite fibré sous-entend le respect des protocoles de collage en dentisterie restauratrice : isolation des dents supports, traitement de l'intrados des moyens d'ancrage du bridge et des surfaces des préparations. Les intrados des moyens d'ancrage sont d'abord sablés avec des particules d'alumine de 50 µm et traités avec un adhésif (Bond It, Jeneric/Pentron). Simultanément, les préparations sont mordancées avec de l'acide phosphorique à 37 %, rincées, séchées légèrement (pas dessiquées) et traitées avec un système de collage (Bond It).

Le bridge sablé, chargé d'un matériau de collage composite fluide hybride (Lute It, Jeneric/Pentron), est alors présenté sur les préparations. Ce matériau de collage va former une structure homogène, liant l'intrados des moyens d'ancrage à l'émail mordancé et à la couche hybride de dentine des dents supports. L'excellent résultat esthétique peut être apprécié sur les figures 5j et 5k . On notera l'excellente intégration de la teinte et de la translucidité du bridge à celles des dents naturelles adjacentes. Les bords sont supra-gingivaux : le joint dento-prothétique est cependant difficile à discerner en raison de la bonne intégration de la prothèse dans l'ensemble des dents naturelles.

La figure 5l montre les instruments d'ajustage, de finition et de polissage (fraise fine multi-lames en carbure de tungstène, kit à finir Diacomp, fraise à finir en carbure et pâte à polir diamantée, Komet) utilisés par le chirurgien-dentiste au fauteuil avant le collage du bridge.

Bridges à ancrages intra-coronaires

Sélection du cas

Le bridge à recouvrement partiel en composite fibré permet une forme plus conservatrice lorsque les dents piliers sont intactes ou ne présentent que de petites restaurations intracoronaires. Lorsqu'un implant n'est pas possible, un bridge collé métallique (type Mariland) est la seule alternative thérapeutique conservatrice fixée. Ces prothèses sont pourtant devenues moins populaires en raison de leurs décollements, de la teinte grisâtre des dents piliers due au métal visible en transparence et les moyens d'ancrage en surcontour.

Les avantages des bridges à recouvrement total (esthétique, sans-métal, facilité de réalisation au laboratoire et utilisation d'une technique de scellement-collage) restent appropriés.

Protocoles clinique et de laboratoire

Préparations des dents

La forme de contour des préparations peut tirer profit de cavités existantes dans la mesure où les parois de ces cavités sont divergentes.

Les dents piliers intactes sont préparées comme pour un inlay de Classe II en composite avec une petite boîte (occluso-gingivale) proximale (fig. 6). Il n'est pas nécessaire de préparer une boîte proximale étendue car le composite fibré ne peut pas être placé apicalement à la zone du point de contact et assurer une embrasure adéquate. Le composite esthétique serait uniquement utilisé pour remplir la partie apicale de la boîte et ce sans aucun profit pour l'ensemble de la restauration.

Ce point est clairement illustré sur la figure7a . Dans ce cas, la restauration existante nécessitait une boîte sur la face distale de la prémolaire. On observera la situation de la barre de soutien de l'intermédiaire en composite fibré par rapport à la surface du contact proximal. Le composite en position apicale par rapport au composite fibré n'ajoute rien à l'intégrité structurelle de l'ensemble du bridge.

Réalisation du bridge

Comme pour les bridges à recouvrement total, les modèles positifs unitaires et les modèles de travail doivent être préparés. L'espaceur n'est pas appliqué, seul un lubrifiant l'est. La forme de l'infrastructure est moins compliquée que celle des bridges à recouvrement total car la forme intra-coronaire des moyens d'ancrage élimine le besoin de cercler les faces axiales des dents piliers sur toute leur périphérie avec le composite fibré.

Une fine couche de composite dentine est placée sur le fond des préparations sur les modèles positifs unitaires et est photopolymérisée (fig. 7b). Six à sept bandes de composite fibré sont coupées à la dimension et placées sur la couche de composite dans chaque préparation et en travers de l'espace édenté (fig. 7c). Le composite fibré est polymérisé et 12 à 15 bandes supplémentaires sont ajoutées sur les faces vestibulaires, linguales et cervicales pour créer un modèle réduit d'intermédiaire. L'anatomie complète de l'intermédiaire et des moyens d'ancrage est montée avec le composite esthétique. La figure 7d illustre le bridge terminé.

Collage du bridge

Il est précédé de la vérification de la précision d'adaptation des bords, de l'occlusion et de la teinte. Des essais avec une pâte à l'eau peuvent être faits pour affiner la teinte du composite de collage, comme cela a été recommandé pour le bridge à recouvrement total. Une fois les réglages terminés, les dents doivent être isolées avec une feuille de digue. Les préparations sont alors mordancées et recouvertes d'un apprêt/adhésif dentinaire. Les intrados des moyens d'ancrage sont légèrement sablés avec de l'alumine à 50 µm puis recouverts de l'apprêt/adhésif et d'un composite de collage dual.

Après photopolymérisation et retrait de la digue, l'occlusion est vérifiée. Les réglages peuvent être réalisés avec une fraise en carbure de tungstène 30 lames et des disques en papier. Les pointes montées à polir en caoutchouc peuvent être utilisées pour le polissage final. Les figures7e et 7f illustrent le résultat esthétique final.

Conclusion

Cet article décrit l'utilisation d'un composite renforcé par des fibres de verre pour la réalisation de bridges. Cette prothèse, composée d'un composite esthétique externe allié à une infrastructure interne en composite fibré, est collée sur des préparations à recouvrements total ou partiel. Au cours des 8 années passées, les chercheurs de l'Université du Connecticut ont mis en place environ 100 attelles, moyens d'ancrage et bridges en composite fibré. Les premières expériences se sont soldées par quelques problèmes de collage, de manipulation et des résultats esthétiques quelque peu médiocres, mais aucun échec patent n'a jamais été observé.

Les tests in vitro d'évaluation des propriétés mécaniques d'un nouveau composite photo et thermopolymérisable renforcé par des fibres se poursuivent parallèlement à l'évaluation clinique des différentes formes à recouvrement total ou partiel de bridges en polymères fibrés. A ce jour, cependant, il n'existe aucun résultat clinique à long terme des bridges en composite fibré.

Remerciements : Nous tenons à remercier Mme Diane Kosis, coordinatrice du centre de recherches de l'université du Connecticut pour son aide inestimable. Nous tenons à remercier également Mme Shirley Carrolla pour son travail au laboratoire.

Cette recherche a été financée par l'Institut national de la recherche dentaire, NIH Research Grant DE-09126, Connecticut Innovations, Inc, et Jeneric/Pentron, Inc.

NDLR : Nos plus vifs remerciements à Monsieur Georges Bourrelly (Symphyse) pour la pertinence des ses commentaires lors de la relecture de cet article.

Les produits du Laboratoire Jeneric/Pentron sont distribués en France par Symphyse.

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